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Dans un conflit militaire classique, si les officiers de l’armée qui perd la guerre ne sont pas sanctionnés par les politiques, ils cessent tout au moins de jouer les chefs intraitables devant la troupe. En politique, selon l’expérience qu’on en a dans ce pays, les perdants s’empressent toujours de se positionner en victimes pour se donner une nouvelle virginité dans un nouveau parti à eux. Ainsi ils deviennent (secrétaires) généraux en face d’autres généraux, prêts à combattre les anciens frères de couleurs.

Ce pourrait être le cas très prochainement, si l’on donne foi aux informations selon lesquelles les anciens caciques du Pds regroupés dans Bokk Guis Guis pour les besoins des législatives envisageraient de se choisir une nouvelle maison. Peut-être pas tous ceux qui étaient sur la liste pour le 1er juillet. Il serait même question d’autant de créations, que d’ex-cadres du Parti démocratique sénégalais ayant accepté d’accompagner le Président Pape Diop, frustré de n’avoir pas été désigné tête de liste de la formation libérale, grande perdante de la présidentielle 2012. A croire que le statut de frustré est devenu objet de convoitise pour asseoir une position de victime de l’injustice politique.

Me Abdoulaye Wade, Secrétaire général national et ci-devant « seule constante » du Pds avait décidé que son compagnon de longue date ne méritait pas d’être à la tête des troupes pour la conquête de sièges à l’Assemblée nationale. Son argument tenait en quelques évidences non isolées. « Pape Diop avait été battu chez lui à Dakar », lors de la présidentielle. Lui, le candidat à sa propre succession, ne s’en étant pas mieux sorti, il aurait été logique de rebattre les cartes pour discuter de l’avenir de la formation, notamment en direction de l’échéance de juillet. Puisqu’il n’en fût rien, certains ont voulu jouer les nouvelles victimes du Maître. Ils se voyaient dans la peau de porteurs de la légitimité pour la défense des couleurs libérales.

La claque a été monumentale. Mais certainement pas assez pour les convaincre que si la compétition avec la liste Pds pouvait avoir valeur de primaires pour le contrôle de ce qui reste du parti, Pape Diop, Mamadou Seck, Thierno Lô, Abdoulaye Baldé et autres Ndèye Khady Diop devraient revoir leur copie.

Les expériences passées de Djibo Kâ et Mousatpha Niasse (démissionnaires du Ps), le gain de popularité qui a sanctionné les exclusions de Idrissa Seck et Macky Sall (pour le Pds) n’ont pas été réédités. Ces quatre ont tous réussi leur premier test électoral. Avec en prime pour le dernier, d’avoir déraciné le baobab, jusqu’alors seul pourvoyeur d’ombre. Ceux qui ont initié la liste Bokk Guis Gis auraient dû avoir davantage de clairvoyance en considérant qu’ils étaient pleinement impliqués dans les raisons de la défiance populaire à l’endroit des parlementaires, les deux chambres confondues. Pape Diop à la tête du Sénat et Mamadou Seck président de l’Assemblée nationale, la seule évocation de leurs noms par des candidats adverses réveillaient de très récents et peu flatteurs souvenirs. De n’avoir pas tenu compte de cette réalité ne pouvait passer sans conséquence.

Pourtant, la tête de liste avait réussi à donner de lui-même une vraie image de gagneur. Pape Diop et les siens ont effectivement déroulé un bon programme de campagne, ce qui avait poussé beaucoup d’observateurs à leur pronostiquer un score que les mêmes présumaient pouvoir créer les conditions d’une cohabitation avec l’Exécutif.
Ainsi le choix de l ‘électorat de rester à la maison dimanche dernier, semble avoir eu Guis Guis comme principale victime, sans les avantages que ses leaders espéraient tirer de la « victimisation », par la faute de Abdoulaye Wade.

Une leçon à tirer de cette donne est que Pape Diop et Mamadou Seck pourraient commettre une erreur de plus, à vouloir créer leur (s) propre (s) parti (s). Mais comment rester (ou retourner) au Parti démocratique sénégalais après tout ce qui s’est passé depuis que, d’autorité, Wade avait décidé que Oumar Sarr conduirait les troupes aux législatives ? Le réalisme aurait pourtant commandé d’aller à de rapides retrouvailles. D’autant que le président du Sénat et l’ex ministre – pour ne prendre que ces deux – sont maintenant à égalité de défaite électorale. Celui qui n’a pas perdu à Dagana depuis 1996, n’a pas fait mieux que se placer premier dans la commune alors que la compétition se jouait au niveau départemental. Résultat des courses, Benno Bokk Yaakaar a enlevé les deux postes convoités.

A la présidentielle, c’est le candidat Abdoulaye Wade qui avait perdu, emportant dans sa chute, quasiment tout son parti ; donc Pape Diop et consorts. Aux législatives de dimanche, difficile de ne pas reconnaître que Oumar Sarr avait au moins la chance de pouvoir dire à ceux du Nord, « voyez l’honneur qui nous est fait de diriger la liste … ». Cet avantage comparatif n’a pas mieux arrangé les choses. Ni pour lui, ni pour sa liste.

Le Parti démocratique sénégalais a commencé sa descente aux enfers. Avec lui, tous ceux qui se servaient du parapluie Abdoulaye Wade pour exister politiquement. Il faudra désormais aux libéraux du courage et de la conviction pour reconstruire ensemble ce qu’ils ont contribué à détruire en érigeant en « seule constante » leur tout puissant leader, depuis trois décennies. Des hommes et des femmes ayant connu l’amère expérience de la défiance populaire, ont pu retrouver une place gagnante sur la scène politique. Faire la même chose que ces revenants du purgatoire suppose de ne pas voir dans une succession de défaites électorales autre chose que la conséquence de mauvais choix dans la gestion des affaires publiques.

Wade condamné à très rapidement se retirer des affaires, donc du Pds, il reviendra à ses héritiers politiques de mériter d’avoir été ses compagnons. C’est le moment pour eux d’accepter désormais, qu’en politique comme dans de multiples autres domaines de la vie, il y a que des variables. On ne les maîtrise qu’un temps. Jamais toutes ensemble tout le temps. Leçon de réalisme.

Ibrahima BAKHOUM
sudonline.sn

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