Abdou Latif Coulibaly, journaliste, auteur du livre Affaire Me Sèye, un meurtre sur commande : «Je n’ai aucun doute que l’assassinat de Me Sèye a été mijoté et décidé au plus haut sommet du Pds»

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Abdou Latif Coulibaly, auteur du livre Affaire Me Sèye, un meurtre sur commande, éclaire ce dossier avec son analyse tirée de son expérience de journaliste.
Souvenirs de journaliste
«C’est l’un des événements les plus importants dans ma carrière de journaliste. Je reviens sur ça avec beaucoup d’émotion. C’était un samedi 15 mai. J’ai un reçu un appel d’un confrère qui m’a relaté ce qui venait de se passer. J’ai demandé dans quel état il était, il m’a répondu qu’il n’était pas mort. Mais, il a été blessé et transporté à l’hôpital. J’ai immédiatement sauté dans ma voiture. A l’époque, il n’y avait pas de téléphones portables. J’ai contacté à partir du fixe le rédacteur en chef du journal Sud Quotidien. En moins de deux heures, nous avons tous rappliqué à l’hôpital Principal de Dakar. Nous avons eu la chance d’avoir un appel qui revendiquait l’assassinat de Me Sèye. Je peux dire aujourd’hui sans aucun doute qu’il s’agit de la voix de Clédor Sène (Condamné à 18 ans de prison avant d’être gracié par Me Wade). Nous avions gardé l’enregistrement en lieu sûr. Nous avions la Preuve de l’existence de cet enregistrement. Au sein de la rédaction, nous tenions trois réunions par jour sur cette affaire. En tant que journaliste, je pense avoir vécu les moments les plus intenses de ma vie avec cette affaire. C’était fantastique. Le procès a été un moment extraordinaire qui a marqué un repère dans le temps de la naissance des radios. A l’époque, Sud Fm venait de naître. C’était un moment palpitant. Les Sénégalais étaient capables de dire dans les détails quels étaient les plaidoiries, les points de droit, les faits. Il y avait un témoin-clé auquel les journalistes faisaient allusion régulièrement ce qui faisait rire les Sénégalais. Il s’agit du défunt Ahmet Diène. Clédor Sène lui a dit: «Ahmet Diène, vous êtes mon oncle.» Il lui répondait en wolof : «Clédor, tu aimes avoir des oncles. Je ne suis pas ton oncle.» La presse n’était pas aussi massive qu’elle l’est aujourd’hui. Ce qui fait qu’il ne pouvait pas y avoir de pressions sur la justice. Le président Arona Diouf (décédé), présidait les Assises spéciales. On se régalait. Franchement on se régalait. Il y avait tout dans cette affaire jusqu’à la condamnation à 18 ans de prison pour Assane Diop et Clédor Sène et 15 ans pour Pape Ibrahima Diakhaté.

Empressement de l’Etat de condamner Abdoulaye Wade
Dans cette affaire, il est aussi important de relever les tergiversations des uns et autres. J’étais particulièrement impressionné de voir la rapidité avec laquelle le domicile de Wade a été cerné par des personnes encagoulées, avec des matraques, 20 minutes seulement après l’assassinat de Me Sèye. A l’époque nous étions un groupe de journalistes, Abdourah­mane Camara, Tidiane Kassé, Demba Ndiaye, Ibrahima Bakhoum. Il y avait quelque chose de fantastique, non pas que la mort nous a galvanisés, mais ce sont des histoires, en termes journalistiques qui passionnent beaucoup. En fait, quand l’Etat et la gendarmerie ont visé directement le chef de l’opposition de l’époque, vous voyez ce que cela donne.
J’ai été frappé avec la rapidité avec laquelle le Premier ministre de l’époque (Habib Thiam) soutenait que l’Etat allait prendre toutes les mesures nécessaires. Quel que soit l’auteur du crime. Nous avons vu aussi le ministre de l’Intérieur sortir de ses poches des douilles devant les caméras. Alors que ces douillent devaient être entre les mains du procureur de la Ré­pu­blique. Cela préfigurait déjà du manque de professionnalisme de l’enquête conduite non pas par la police, mais par des acteurs politiques qui voulaient à tout prix avoir un assassin. A ce moment précis, Wade ne pouvait pas être assassin, mais complice. J’ai tout raconté dans mon livre. D’ailleurs, quand je l’écrivais, je suis allé voir les archives du Soleil pour me rappeler quelle température il faisait à Dakar. Vous savez, ce mois de mai est un peu frisquet, mais à l’époque, il faisait très chaud. C’était fou. Il y avait un élément de taille qui paraissait surréaliste dans ce procès. Là où maître Sèye a été touché sur la Corniche, plutôt que de faire un retour pour passer par la Corniche qui était complètement dégarnie un samedi, le chauffeur et son garde du corps ont estimé devoir passer par l’Avenue Blaise Diagne pour remonter par San­daga pour aller à l’hôpital Princi­pal. Nous avions le sentiment qu’on voulait que maître Sèye meurt avant qu’il n’arrive à l’hôpital. C’était plus facile de faire un demi-tour sur la Corniche et de repartir vers l’hôpital Principal. Ce détail était troublant. Mais le Parquet avait prétendu à l’époque que des policiers de très haut niveau avaient perdu leur sang froid. Mais des policiers d’élite comme les gardes du corps ne peuvent pas perdre leur sang froid à ce point pour prendre tout ce chemin. Personne ne pouvait croire en cela. On était persuadés qu’il y avait un coup monté derrière. Maître Wade n’a pas manqué de souligné ça à l’époque. Cela a plus ou moins sauvé sa peau. L’Etat a semé la zizanie entre les corps, c’est-à-dire entre la police et la gendarmerie nationale.

Rivalités police et gendarmerie
C’est la police qui menait l’enquête au départ. A un moment donné, personne n’avait compris. Ils ont dessaisi la police pour immédiatement saisir la gendarmerie. Ce que la police n’avait pas apprécié. En tant que journalistes, nous avions rencontré certains commissaires de police qui étaient tellement remontés contre la décision du gouvernement. Les tergiversations ont amené le gouvernement dans un premier temps, par le biais de gendarmerie, à arrêter un faux Assane Diop. Les autorités voulaient à tout prix avoir l’assassin. Cela a brouillé les pistes de l’enquête et a permis à Abdoulaye Wade de retourner l’opinion en sa faveur. Il avait organisé une conférence de presse pour orienter les journalistes présents vers la piste socialiste. Cela nous paraissait irréaliste que Abdoulaye Wade puisse être le commanditaire. La réaction du gouvernement à vouloir lui faire porter le chapeau était aussi intrigant. Nous étions con­vaincus que quelque chose ne tournait pas rond dans l’affaire du gouvernement. Finalement, on en est arrivé à l’arrestation des trois assassins (Assane Diop, Clédor Sène, Pape Ibrahima Diakhaté) et le mis en cause Abdoulaye Wade. Ils ont été déférés.

Regrets liés à cette affaire
J’ai eu beaucoup de regrets a­près. J’ai eu le sentiment que nous avions beaucoup contribué à l’épo­que à entériner l’idée qu’il ne pouvait pas y avoir de commanditaires dans cette affaire au niveau du Pds. Nous l’avions fait de bonne foi. La stratégie du gouvernement était tellement laborieuse, le man­que de professionnalisme était tel que nous doutions de quelque chose. Ce doute professionnel nous a probablement permis de soutenir qu’il ne pouvait pas y avoir de commanditaire. Je l’ai regretté. En­sui­te, j’ai fait un mea culpa dans mon livre en disant que nous avions tort.
J’ai passé plus de dix jours à enquêter en Gambie. Je suis allé dans tous les lieux où les armes étaient achetées, j’ai rencontré tous les gens qui ont aidé Clédor et les autres à acheter les armes. J’ai lu tous les rapports de la Police, j’ai vu le véhicule qui a été saisi. En plus, Pape Ibrahima Dia­kha­té a parlé dans mon livre. ­Trois personnes qui ont participé à l’assassinat m’ont parlé dans ce livre. Je n’ai aucun doute aujourd’hui que ça était mijoté et décidé au plus haut sommet du Pds. Sinon le président Wade ne se serait pas donné la peine de les gracier et de faire voter une loi d’amnistie (Loi Ezzan). C’était manifestement l’affaire Me Sèye qui le préoccupait.»
lequotidien.sn

5 Commentaires

  1. D’accord M. Coulibaly. Abdoulaye est le commanditaire de l’assassinat. Good job!
    Maintenant, dis nous comment Macky a vole l’argent du Senegal puisque tu semblestout connaitre. A moins que vous soyez convaincu que votre nouveau patron est blanc comme neige. Cela prendrait plus que tous vos talents a prouver.

  2. Quel argent Malamine. T’ES UN VRAI RIGOLO S’il s’agit du terrain de 8ha que Wade a paye comptant et cash Serigne Mbacke Ndiaye nous a largement edifie. WADE veut un sujet de campagne pour les legislatives . vous allez voir son humiliation sera encore plus grande ce vieux singe qui sait au moins maintenant que le peuple senegalais est plus intello que sa progeniture. ils n’ont rien vu ni senti venir. ah ah ah ah.

  3. CA Y EST C’EST LE DEBUT DU COMMENCEMENT DU NEPOTISME A LA WADE!!!!
    PAUVRES SENEGALAIS.
    FAISONS TOUT POUR NE PAS TOMBER DANS L’ERREUR QUE NOUS AVIONS COMISE AVEC WADE: FAUT PAS DONNER A MACKY L’EXECUTIF ET LE LEGISLATIF. CELA SIGNIFIERAIT, COMME AVAIT FAIT WADE DE LUI LIVRER LE SENEGAL ET LES SENEGALAIS PIEDS ET POINGS LIES PRET POUR L’ECHAFFAUD.

    NE VOTONS SURTOUT PAS LA LISTE BBY AUX LEGISLATIVES
    NE VOTONS SURTOUT PAS LA LISTE BBY AUX LEGISLATIVES

    NE VOTONS SURTOUT PAS LA LISTE BBY AUX LEGISLATIVES
    NE VOTONS SURTOUT PAS LA LISTE BBY AUX LEGISLATIVES
    NE VOTONS SURTOUT PAS LA LISTE BBY AUX LEGISLATIVES

    IL FAUDRAIT UN CERTAIN EQUILIBRE POUR QUE CE FILS DE WADE NE DECIDE PAS SEUL (AVEC SES AFFIDES DE BBY) DE L’EXECUTIF ET DU LEGISLATIF…. LE JUDICIAIRE N’EN PARLONS PAS !

    SOYEZ VIGILENT CHERS COMPATRIOTES DU 23 JUIN, NOUVEAUX TYPES DE SENEGALAIS (NTS) SINON CE SERAIT PEINE PERDUE ET BEAUCOUP DE VIES PERDUES POUR RIEN;

    WA SALAM

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