Abdourahmane Ndiaye Adidas, ancien coach des Lions du basket : «Le sport est le parent pauvre du Pse»

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Son expertise et son amour pour la balle orange sont connus de tous pour avoir marqué de son nom, le basket sénégalais. Après avoir gravi tous les échelons, en passant du parquet au banc, Abdourahamne Ndiaye Adidas veut maintenant franchir un autre palier : former des entraîneurs, en collaboration avec Fiba-Afrique. Dans l’entretien qui suit, l’ancien coach des Lions, joint en France, revient, entre autres, sur le sacre des Lionnes, ses relations avec Tapha Gaye. Avant de donner des pistes ayant trait à la politique sportive de notre pays et au Plan Sénégal Emergeant (Pse) qui, selon lui, donne peu de place au sport.

Coach, comment analysez-vous le sacre des Lionnes à l’Afrobasket 2015 à Yaoundé ?
La performance  des Lionnes est à saluer  à plus d’un titre. Cette victoire est méritée car construite de mains de maître par «Coach  Tapha», son staff et ses joueuses. Je leur adresse mes félicitations et mes encouragements pour les compétitions futures.

Qu’est-ce qui, selon vous, a été déterminant dans ce sacre ?
Je pense que tout s’est joué dans les trois derniers matchs. J’ai pris énormément de plaisir à regarder cette équipe produire un basket aussi  consistant durant ses trois derniers matchs. Elle est montée en puissance au fil des matchs en faisant preuve de rigueur défensive et d’esprit collectif. Coach Tapha à bien construit son équipe et a su transcender ses joueuses jusqu’au bout. Il a su rectifier ses erreurs pour le succès final. Bravo à toutes ces joueuses qui peuvent  aussi être fières de leur comportement  et du jeu pratiqué. Elles ont fait honneur au pays. Faut aussi reconnaître que ce fut des moments intenses d’émotion. Au-delà  de la gagne, j ai eu des frissons  quand elles ont chanté l’hymne national. Quelle belle leçon  de  civisme !

Coach Tapha a révélé, à nos confrères de Sud Fm, que vous avez des relations assez particulières. Pouvez-vous revenir sur la nature de ces relations ?
Mes relations avec Coach Tapha sont sincères. Elles sont basées sur le respect, l’écoute et l’échange. Nous avons collaboré  en 2005. Il était mon assistant  quand nous avions en charge l’Equipe nationale. C’est toujours un plaisir d’échanger avec lui. Donc je lui dis : «Respect Coach Tapha pour ton travail !!!»

Cependant, son geste sur Ramatou Daou a fait polémique. Vous en avez parlé ?
Effectivement on en a parlé. C’est regrettable, surtout que c’était en public. Si c’était dans les vestiaires, il n’y aurait pas tout ce tollé. On en a discuté et on s’est compris. L’essentiel est qu’il a eu la grandeur de s’excuser auprès du Peuple sénégalais et de ses joueuses. C’est tout à son honneur. Et je le répète, Tapha c’est un homme bien.

Justement en parlant d’incident, il y a en eu aussi chez les Hommes, avec l’affaire Mohamed Faye, lors de l’Afrobasket en Tunisie…
Mohamed  Faye est un grand joueur. Comme tous les grands joueurs il a son caractère mais je peux dire que  c’est un gars bien. Je condamne les propos injurieux (s’il y a eu) à l’endroit de son coach. Ceci est simplement  inacceptable. Je ne peux pour autant adhérer à la sanction prise en le renvoyant à la maison  comme un  malpropre. Je pense que la sanction est totalement  disproportionnée  parce qu’allant à l’encore de l’intérêt supérieur de l’équipe et de la Nation. Son absence a porté préjudice au groupe d’autant qu’on a vu que  l’équipe jouait pratiquement  à six ou sept. Pour tout vous dire, je pense que renvoyer Mohamed Faye à la maison a été une mauvaise décision.

Avant les deux Afrobasket Hommes et Dames, une nouvelle Fédération a été mise sur pied suite au départ du Comité de normalisation. Avez-vous suivi le processus ?
Je suis toujours de près ce qui se passe au Sénégal sur le plan sportif, d’une manière générale et particulièrement quand ça concerne le basket. Je salue la mise sur pied d’une nouvelle équipe fédérale. Je déplore cependant les conditions dans lesquelles s’est tenue l’élection du président. Je pense qu’à l’avenir, il faudrait que les textes soient plus démocratiques. J’ai l’impression qu’on a fait les textes surtout pour écarter certains. La logique aurait voulu qu’on élise les candidats par rapport à un projet mais pas qu’on s’attarde sur son appartenance à un club ou autres… C’est le projet qui doit être déterminant.

Parler du sport sénégalais, c’est aussi parler de sa politique sportive. Justement pour vous, comment doit être notre politique sportive ?
Mais d’abord parlons du Pse (Plan Sénégal Emergeant). Mon sentiment est que le sport demeure le parent pauvre du Pse. Il est encore temps d’intégrer le sport dans le Plan Sénégal Emergent. Le Pse est un Plan clair, précis et réalisable, mais il est insuffisant car il accorde peu de place au sport dans son élaboration.

Là, vous touchez du doigt le problème récurrent des moyens…
Le temps des promesses non tenues est révolu. Dans un passé récent, nous avons tous entendu l’objectif de mettre le budget du sport à hauteur de 1% du budget national. Jusqu’à présent rien ! Et au demeurant, je pense même que ce niveau est insuffisant tellement le chantier du sport est immense. Je suis d’accord pour sensibiliser les entreprises sur la nouvelle dynamique de partenariat pour accompagner le sport. Et à titre d’exemple, Orange est à saluer. Voilà une société qui, au-delà de son rôle social, a compris qu’il fallait assimiler l’esprit du sport à sa gestion d’entreprise. Il faudrait donc que les autres entreprises bougent. Et c’est à l’Etat de les faire bouger en les incitant à venir aider le sport. Et à ce niveau, les solutions ne manquent pas. Il faudrait une politique sportive plus moderne et plus innovante.

Le ministre des Sports aime souvent rappeler que le volet des infrastructures tient une place centrale dans la politique sportive du gouvernement…
Le devoir régalien de l’Etat est de doter les régions d’infrastructures adéquates à la pratique du sport. L’intégration du sport dans le système éducatif (aménagement des horaires pour permettre la pratique du sport). Ceci implique évidemment la construction de complexes dans les universités et lycées. Mais, il faut comprendre que la politique de réhabilitation des stades ne suffit pas. J’aurais aimé être plus édifié sur la formation des cadres et les moyens que l’on y consacre. La gestion du sport de haut niveau et du sport de masse mérite d’être clarifiée. L’un ne va pas sans l’autre. Véritable régulateur social, le sport, qui est aussi une école de civisme, de santé, de formation, est devenu un levier de développement. Il est également inscrit dans une logique économique et fait partie des enjeux de toutes les démocraties modernes. La société sénégalaise connaît une évolution démographique sans précédent car 60% de sa population a moins de 30 ans. On doit donc réfléchir sur la place du sport dans le nouveau dispositif de notre pays face à l’impact démographique de la jeunesse. Cette jeunesse est notre principale ressource car elle constitue l’avant-garde du pays. Elle mérite plus de considération.

Les Fédérations sportives aussi ont un rôle à jouer…
On parle de l’autonomie des fédérations pour stimuler leur créativité. Mais je pense que trop d’implication dans la gestion des fédérations porte atteinte à leur indépendance et leur esprit d’innovation. Aujourd’hui force est de constater que les Fédérations sont dépendantes de l’Etat. Elles doivent aspirer à plus d’indépendance dans leur gestion quotidienne.

Parlez-nous de vos perspectives. Que devient Adidas ?
Ecoutez, cela fait deux ans que je n’entraîne plus. J’ai 62 ans, je pense que je n’ai plus rien à prouver sur le banc. Mon ambition c’est toujours de servir le basket. Mais aujourd’hui, je veux d’autres challenges. En clair : je veux franchir un nouveau palier en formant des entraîneurs, en collaboration avec Fiba-Afrique. C’est un projet qui me tient à cœur. Mais il n’est pas exclu que j’accompagne des Équipes nationales si le besoin se fait sentir, si le projet est excitant et si les conditions sont réunies.

Le Quotidien

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