Amadou BARRY, ancien député, sénateur, responsable Pds à Keur Massar : «La perte du pouvoir est extrêmement dure ; elle a été un peu brutale»

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Amadou Barry est un ancien député, sénateur et coordonnateur du réseau des parlementaires sur les questions migratoires et responsable du Parti démocratique sénégalais (Pds) à Keur Massar. L’homme se définit comme un pur produit libéral. Toutefois, il soutient que la création de la Génération du concret (Gc) de Karim Wade a été une mauvaise idée pour le Pds. M. Barry appelle la famille libérale à soutenir le chef de l’Etat Macky Sall. Son prétexte : il est un produit du président Abdoulaye Wade. Le sénateur dit être pour le maintien du Sénat.

Après des années, vous avez perdu la Présidentielle et les Lé­gislatives. Comment l’avez-vous ressenti, ici à Keur Massar ?
C’était des moments très difficiles. La perte du pouvoir est extrêmement dure. Elle a été un peu brutale ; on ne s’y attendait vraiment pas du tout. On se ressaisit petit à petit, mais ce ne sera pas de sitôt, parce que nous avons un parti en déconfiture ; il y a eu beaucoup de départs. Alors aujourd’hui, il faut repenser le parti pour voir les voies et les moyens afin de se remettre sur la bonne voie.
Et selon vous qu’est-ce qui est à l’origine de tout cela ?
Le Pds n’était pas bien organisé. Voilà un parti qui ne renouvelle jamais ses instances. Alors tout se faisait au sommet. Il y avait un petit groupe autour du secrétaire général national qui décidait de tout et finalement les gens n’ont pas suivi. Et le président Wade a un bilan extrêmement élogieux, mais vu le comportement de certains responsables et militants, le Peuple nous a rejetés purement et simplement. Et cela nous a coûté très cher. Vraiment, le président Abdoulaye Wade a fait beaucoup et cela est visible.
Des responsables libéraux déclarent avoir boudé le parti à cause de Karim Wade. Est-ce une bonne

justification ?
Chaque départ peut se justifier par une raison ou une autre. Certains vous parleront de Karim, d’autres vous diront autre chose. Moi, je pense que c’est le fonctionnement interne du parti, la cause du problème. Tous ceux qui étaient là se mettaient dans la tête que ce sont eux les noyaux, qui incarnaient le parti. On ne comprenait plus rien.

Alors aujourd’hui comment vit le Pds ?
Le Pds est malade dans son organisation, son fonctionnement, au sommet, à la base. Nous avons un parti complètement fragilisé et affaibli par de nombreux départs. Dans ce parti, on ne sait plus qui est qui. Et il y a ce que l’on appelle le parachutage. Il faut qu’on repense l’organisation et le mode de fonctionnement de ce parti. On aura bâti un très grand patrimoine, mais malheureusement on n’a fait que 12 ans au pouvoir ; ce que le parti ne mérite pas. Le parti doit se ressaisir. Cela va de mal en pis, surtout avec le départ annoncé de Me Wade. S’il quitte la tête du parti, ce sera la débandade.

Donc vous insinuez que Me Wade doit rester toujours dans le parti ?
Non ! Il est temps qu’il prenne sa retraite pour permettre à d’autres d’assurer la relève. Mais comment faire, dans un parti où chacun pense qu’il est l’héritier principal, que c’est lui et non l’autre ? Ça pose problème.
Selon vous, quelle est la personne la mieux placée pour gérer le poste du secrétaire général du Pds ?
Il n’y a pas de personne la mieux placée ; il faut qu’on fasse un congrès, et les instances de base désigneront quelqu’un. Il faut que toutes les instances se prononcent démocratiquement sur l’homme qui doit assurer la destinée de ce parti. Sinon, on va vers la catastrophe.

Et si le président Wade proposait son fils Karim pour le succéder ?
Certains vont accepter, c’est clair mais d’autres refuseront.
C’est pourquoi la meilleure ma­niè­re de sauver ce parti c’est de le faire par la voie démocratique. Que les ins­tances de base se prononcent pour que le choix se fasse de manière dé­mo­cratique.

Justement si l’on parlait de la Génération du concret de Karim Wade. Pensez-vous que cela a affaibli le Pds ?
Moi, j’ai eu le courage et l’honnêteté de dire à Karim, dans son bureau de laisser tomber cette affaire de Génération de concret qui ne nous amène nulle part. Il faudrait fondre cette Génération du concret dans le Pds. je l’ai dit à Karim Wade. Et je sais qu’il n’a pas aimé.

Et quelle était sa réaction ?
Je ne voudrais pas entrer dans les détails, mais je sais qu’il n’a pas bien aimé. Et pourtant, c’était pour lui rendre un grand service. Je ne suis pas de ceux qui venaient lui chanter ses louanges ; je lui ai dit seulement la vérité. Il n’a pas voulu peut-être me comprendre et voilà, l’histoire m’a donné raison. Cela nous a créé beaucoup de difficultés. Aujour­d’hui, nous devons aller à la reconstitution de la famille libérale. C’est le Pds avec l’Apr (l’Alliance pour la République). J’ai entendu tout dernièrement Macky Sall dire qu’il était avec son frère libéral le Président Alassane Ouattara. Il y a Idrissa Seck de Rewmi et nos frères de Bokk gis gis. Tous ceux qui se réclament du libéralisme doivent se retrouver, faire une entité. On peut faire une fusion et être un parti. Si c’est le contraire, que chaque parti reste comme tel et qu’il y ait une synergie, un programme d’actions pour qu’on puisse garder le pouvoir aussi longtemps que possible pour accompagner le Président Macky Sall. Le Pds comme les autres Libéraux doivent fédérer pour que Macky Sall réussisse sa mission, parce que c’est un Libéral. S’il échoue, ce sont les Libéraux qui auront échoué. Il faut que les Libéraux se retrouvent comme les gens de gauche sont en train de le faire. Le pôle de gauche est en train de se reconstituer.

Avez-vous espoir avec les nouveaux élus qui composent l’actuelle Assemblée nationale ?
Une fois installée, l’Assemblée nationale doit maintenant inscrire son action, en prenant en charge les préoccupations des populations. L’objectif est le même : conduire le Sénégal et le changer, faire des lois et les faire appliquer, faire prévaloir des principes d’ouverture et d’équité dans l’esprit et dans l’action.
Pour le moment, je ne veux pas faire un jugement de valeur. Il faut laisser le temps au temps. Mais j’ai quand même espoir par rapport à la configuration, parce qu’à l’As­semblée nationale, il faut le reconnaître, il y a de fortes têtes, des hommes d’Etat qui ont eu de grands postes de responsabilité dans ce pays, d’anciens ministres et députés, des chefs religieux aussi. Cela nous permettra d’avoir des débats extrêmement intéressants et très importants.
Etes-vous pour la suppression ou pour le maintien du Sénat décrié par bon nombre de Sénégalais ?
Jamais une seule fois, une institution n’a suscité autant de débats autour de son maintien ou de sa suppression. Mais aussi jamais une institution n’a suscité autant d’engouement pour son élection ; ce qui est paradoxal. Les élections sénatoriales se tiendront le 16 septembre (l’entretien a eu lieu avant le projet de suppression du Sénat par le Président Macky Sall : ndlr) avec une participation de deux listes ; c’est paradoxal pour des gens qui demandent sa suppression. Nous avons 20 listes en compétition. Même les partis les plus hostiles à son maintien sont dans la compétition, demandant même à assurer la présidence pour cette institution. Donc, le Sénat doit être maintenu avec des changements majeurs. Par exemple, dans le code électoral, en son article L 193, il dit qu’il est élu un sénateur dans chaque département. Les autres sont nommés par le président de la République parmi lesquels 4 représentants et 1 sénateur par département. Puisque le mode de désignation cause problème, on peut aller vers une proposition, revoir ces dispositions pour faire en sorte que le nombre d’élus au lieu d’un sénateur soit deux sénateurs par département. Là, on aura 90 sénateurs élus et le président de la République se contentera de nommer une dizaine. Maintenant, on aura un Sénat élu à 90%. C’est une proposition à améliorer (…)

Quatre mois au pouvoir, pensez-vous que le nouveau régime est sur la bonne piste ?
Un gouvernement qui vient de s’installer pour un mandat de 5 ans, vouloir le juger en quatre ou cinq mois, c’est trop juste. Il faut lui accorder un état de grâce, attendre peut-être 2 ans ; si maintenant en 2 ans, on ne voit pas quelque chose de positif ou de concret, alors là, on pourra dire qu’effectivement ces gens-là ne se retrouvent pas. Aujourd’hui, le Président Macky Sall est dans la bonne direction pour bouger les choses.

Avec le régime de Wade, on a connu un échec dans la lutte contre les inondations. Aujour­d’hui quelle est la solution adéquate que doivent prendre les nouveaux dirigeants pour éradiquer définitivement ce problème ?
Les inondations, c’est la bête noire des gouvernements -pas seulement le gouvernement de Macky Sall-, c’était le cas pour le pouvoir socialiste. C’est un problème très compliqué, et l’Etat ne peut pas tout faire. Et il serait bon de mettre en place une très bonne politique de lutte contre les inondations, en responsabilisant les Collectivités locales. Par exemple, la mairie de Pikine peut signer un partenariat avec un pays comme la Turquie qui excelle dans ce domaine. Mais il faudrait aussi un plan d’assainissement bien structuré et bien pensé.

L’année scolaire 2011/2012 a connu des perturbations, et les résultats des examens l’ont démontré avec un faible taux de réussite. Quelle analyse en faite-vous ?
Cette année, on n’a connu beaucoup de mouvements d’humeur. C’était une année assez catastrophique. Et il faut qu’il y ait un dialogue entre l’Etat et les partenaires sociaux. Ils doivent se mettre autour d’une table pour trouver des voies et moyens pouvant arriver à décanter cette situation, avec l’implication des associations des parents d’élèves. Cette situation de guéguerre n’arrange personne. Et les plus grands perdants sont les élèves. Et il faut qu’on s’adresse à l’Assemblée pour qu’on sache exactement comment régler le problème de l’Education.
lequotidien.sn

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