Amadou Gueye initiateur de « Terminus 2012 »: l’homme qui veut arrêter le président Wade

Date:

Amadou Gueye, 43 ans, le président de l’Union des indépendants du Sénégal veut-il réinventer la politique ? Ni dans les partis politiques ni dans la société civile, il a initié la campagne Terminus 2012 pour arrêter Me Wade.

Nous sommes en 1974 sur la rue de Thiong, dans la capitale du Sénégal. Le jeune Amadou Gueye a sept ans, il fait sa première classe à l’école élémentaire de Thiong. A la sortie de l’école, l’enfant est attiré par une foule de badauds qui se formait autour d’un véhicule. Il s’approche pour s’enquérir de ce qui se passe. On lui apprend alors que l’homme qui est dans la voiture est le tout nouvel opposant au régime de Senghor. Il s’appelle Abdoulaye Wade et vient de créer le Parti démocratique sénégalais (Pds). Evidemment, le jeune Amadou ne comprend pas grand-chose, mais l’image reste gravée dans son mémoire. Jusqu’à ce qu’il se rende compte, 36 ans plus tard, que cet homme qui suscitait tant d’espoir est aujourd’hui, sur le point « d’organiser la déchéance de la Constitution » pour commettre un « coup d’Etat institutionnel ». La situation est critique. « Il s’agit d’un homme de droit (Me Wade) qui a interprété la Constitution, qui sait que la loi ne lui permet pas de se présenter à l’élection présidentielle, il l’a déclaré publiquement sur support audiovisuel ». Mais, Il est en train de poser les actes pour se présenter malgré tout. Amadou Gueye se propose et s’engage à l’en empêcher. « Wade est devenu un homme qu’il faut encercler, maîtriser et l’arrêter. C’est le devoir de tout citoyen de tout bord. »

Mais, pourquoi lui ? Pourquoi Amadou Gueye, illustre inconnu de la scène politique bouillante et riche de près de cent partis politiques, de ses coalitions, de sa société civile et son opinion publique des plus fortes de Afrique subsaharienne ? On attendait bien qu’un tel débat sur la régularité du troisième mandat du Président soit posé et porté par les partis politiques. On verra bien que c’est après que ce Gueye est monté au créneau que la meute a suivi avec beaucoup de bruits de déclarations fracassantes sans véritable initiative concrète pour empêcher Wade d’imposer la forfaiture. L’opposition dit attendre que cette candidature soit effective pour éventuellement saisir les juridictions compétentes laissant au secrétaire général national du Pds le temps de préparer et d’achever son plan machiavélique. C’est cet attentisme des hommes politiques, souvent préoccupés à cogiter sur leur problème de leadership ou de partage d’un pouvoir non encore conquis qui crée un vide dans l’espace public, abandonnant souvent les populations à leur sort. Amadou Gueye a attendu vainement que l’opposition soulève le débat sur la constitutionnalité du troisième mandat du chef de l’Etat. « C’est un enjeu qui n’était pas pris en compte par les acteurs politiques, en particulier ceux de Benno siggil Senegaal ».

Heureusement que Gueye ne porte pas le combat en tant qu’individu. En fait, c’est en tant que président de l’Union nationale des indépendants du Sénégal (Unis) qu’il s’est lancé dans ce combat. Le jeu en valait la chandelle. L’Unis existe depuis le 12 septembre 2009, mais c’est cette campagne dénommée « terminus 2012 » qui a donné de la visibilité à l’organisation. Précision : l’Unis n’est ni un parti politique ni une organisation de la société civile. Parce que « le jeu politique est limité à quelques partis politiques qui restent dans une démocratie d’opposition, on est politicien pour s’opposer à un autre politicien ». Parce que « les partis politiques sont certes utiles, mais il est important de créer un autre cadre pour permettre à d’autres citoyens qui ne se retrouvent pas forcément dans les partis politiques de s’affirmer ». Parce que « les appareils de parti politique sont souvent au service d’un homme qui détermine les prises de position ». Parce que, les partis politiques ne sont plus des forces de proposition, de combat, ils ne se préoccupent que de la conquête du pouvoir et négligent le développement économique et social du pays. Enfin, après 50 ans d’indépendance, le modèle de parti politique s’essouffle.

Amadou Gueye est-il alors prétentieux ou ambitieux ? C’est selon. Lui, veut humblement être indépendant pour aider le pays à avoir des institutions fortes avec une gestion collégiale du pouvoir qui échappe à la volonté d’un seul homme ou d’un groupe. Il compte modestement incarner un nouveau paradigme, une jonction de l’esprit conquérant des partis politiques et du caractère citoyen de la société civile. Si ! C’est facile à dire… Pourquoi réinventer le monde si on peut porter ce noble combat au sein des partis politiques au lieu ? Il dit : « On ne peut pas transformer les partis politiques, les démocratiser à partir de l’intérieur. Il faudrait des dispositions institutionnelles qui obligent les partis politiques à mettre en place des schémas de démocratie interne. Par exemple, la limitation du mandat à la tête des partis politiques est un combat qui ne peut se limiter au sein d’un seul parti ».

On devine aisément les sourires narquois des détracteurs systématiques et autres commentateurs du jeu politique. C’est vrai qu’il a du « culot » ce Gueye ! En réalité, Amadou Gueye est un homme au caractère figé dans du bronze. « Je suis fils de gendarme ! » aime-t-il rappeler souvent. Né à Sokone, dans le Niombato, il a presque fait le tour du Sénégal dans son jeune âge au gré des affectations de son père décédé il y a trois mois. Avec ce papa, il apprend la rigueur : « Je retiens de lui l’image de la droiture, une obsession à respecter la loi. » Il a passé la plupart de sa jeunesse à Dakar où il a fait l’école primaire. Il réussit le concours d’entrée en sixième à l’école élémentaire de Thiong et obtient en même temps un ticket d’entrée au Prytanée militaire de Saint Louis. Mais, très vite Amadou Gueye s’étouffe dans l’espace militaire. « J’ai toujours eu des difficultés avec la discipline militaire. Elle a ses limites. » Mais, on ne peut pas quitter le Prytanée de son propre gré parce que c’est indigne d’un fils de gendarme de se faire renvoyer pour indiscipline. Que faire ? Le jeune Amadou est en classe de troisième, il organise ce qu’il appelle une « opération suicide ». Cela consiste à réussir à l’examen du Bfem et échouer aux compositions en rendant des feuilles blanches pendant les devoirs. L’opération est réussie, puisse qu’à la fin de l’année scolaire, il réussit à son Bfem mais se fait renvoyer du Prytanée pour insuffisance de note.

Il revient à Dakar et son père l’inscrit aux Maristes où il fait la seconde et la première. Puis, il rejoint l’école publique pour faire la terminale au lycée Lamine Gueye où il obtient son baccalauréat. Entre temps, sa mère, femme d’affaires, « une vraie battante qui sait qu’il faut prendre des risques » avait mis à côté les économies nécessaires pour permettre à son fils de poursuivre ses études supérieures au Canada. Nous étions en 1987. « Je me rends compte, en regardant ma mère, qu’il y a des choses qu’on n’apprend pas à l’école. »

En Amérique du nord, il s’inscrit à l’université du Québec à Montréal en Business management et obtient une licence en administration des affaires. Nous sommes en 1990, l’ère de l’informatique commence à se développer. L’étudiant émigré se réoriente dans l’informatique et y obtient un Diplôme d’études approfondies (Dea) dans la même université. Il commence à travailler en 1994, en tant que consultant et chargé de cours à l’université du Quebec en informatique. En 1998, il part à Washington, recruté par la Banque mondiale pour la mise en œuvre du projet de l’Université virtuelle africaine. Pendant tout ce temps, dit-il, il n’a jamais pensé rester à l’étranger. « Cela n’a jamais été dans mes ambitions », clame-t-il. Il retourne alors au pays en 2000 et ouvre son propre cabinet de consultance en modernisation du management public pour les Etats et les organisations. Voilà son gagne pain. Aujourd’hui, il s’intéresse à la finance islamique, raison pour laquelle il est allé chercher un Dea en Finance à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.

Monogame, père de six enfants, trois garçons et trois filles, il dit en vouloir au moins dix, car lui-même est issu d’une fratrie de dix. Teint clair, taille moyenne, avec sa sempiternelle barbe en O, Amadou Gueye est toujours souriant. Dans son bureau au décor sommaire situé à Sacré Cœur 2, son ami d’enfance Abdou Kane Diop le présente comme un homme digne, sérieux et hyper intelligent. Amadou Gueye est très pieux, en témoigne ce gros point noirâtre sur son front que confère les heures passées à se prosterner devant Dieu. Son ami dit de lui qu’il est intransigeant avec les préceptes de l’Islam. Impatient et très têtu, Gueye ne recule jamais au combat. Vivement ! Pour arrêter le Président.

Cheikh Fadel BARRO
lagazette.sn

2 Commentaires

  1. comme quoi il n ‘ y a pas à désespérer de ce pays : il y a des valeurs sûres qui ne comptent pas sur papa pour arriver au sommet.. Bon courage boy Gueye.
    Indiquez nous comment faire pour rejoindre votre association.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Urgent : L’ Iran vient d’attaquer Israël avec des drones

XALIMANEWS- L'Iran annonce avoir attaqué Israël, ce samedi soir....

Océanie-Australie : au moins 6 morts dans une attaque au couteau dans un centre commercial de Sydney

XALIMANEWS-Six personnes ont été tuées dans une attaque au...

Afrique-Mali : le dialogue inter-Maliens s’ouvre dans la contestation

XALIMANEWS-Le dialogue inter-Maliens voulu par les autorités de transition...