Au travail, a dit notre prési national

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Quand le président, Macky Sall, dit et répète aux sénégalais qu’ils doivent se mettre au travail, une envie soudaine dicte une réplique non moins sérieuse : « Faites nous aimer le travail, on ne demande que ça ». Le travail n’est pas une valeur en soi. Il ne peut être promu qu’à la condition d’être indispensable et intéressant. Tant qu’il sera manifestement plus facile de gagner sa vie sans éprouver de la fatigue, rien qu’en manigançant ou en s’acoquinant, beaucoup de nos compatriotes s’inventeront un avenir dans la politique ou s’aventureront dans les raccourcis truffés d’argent facile.
Nous aimons bien nous comparer aux travailleurs des pays industrialisés pour accabler nos fonctionnaires et autres employés de défauts. Cette boiteuse comparaison s’attarde sur la fonction du travail en tant que méthode d’insertion sociale et d’accès à la consommation. Pas sûr que le travail soit reconnu, au Sénégal, comme moyen privilégié d’émancipation. En attendant qu’il devienne principale source de salut, être riche au plus vite restera encore la voie de l’enfant prodigue. Le travail s’impose en communauté à mesure que la croyance de pouvoir se réaliser par l’effort s’y renforce. Les insipides appels au volontarisme bidon n’y feront rien du tout.
Nous pouvons nous indigner des aspirations individuelles démesurées, des modes et tendances hors de portée qui s’emparent des « gorgorlou ». Nous pouvons aussi convoquer la fierté et le besoin d’autonomie comme des appels au travail. Pour autant, tant que la conviction que seul le travail peut nourrir son homme et assouvir ses exigences d’égalité et de chance n’est pas partagée par le plus grand nombre, les populations opteront pour la facilité. Il est question de déficit de confiance dans le système.
S’il suffit simplement aux hommes et femmes actifs de tendre la main ou de s’affilier pour encaisser autant de francs CFA sinon davantage, le travail souffrira de manque d’attractivité. Veste, cravate, chemise repassée et souliers italiens, ça fait recette. Turban assorti, grand boubou frou-frou et babouches marocaines, ça rapporte aussi. Pourtant, une fois à l’étranger, les sénégalais se convertissent en bosseurs appliqués compte tenu de l’offre captivante des activités professionnelles. Instrument de survie et correcte compensation au bout de l’effort, le travail y attire et y mobilise les expatriés.
« Il faut travailler, beaucoup travailler, toujours travailler…», avait dit le président Wade. Son successeur estime qu’« on ne travaille pas assez au Sénégal ». Nous en sommes encore à ce stade de diagnostic et de reproche. Les engagements politiques monnayables, les offres florissantes de services maraboutiques ainsi que les chantages sexuels prouvent à suffisance le délassement en vogue. Le rapport distant entre le spécimen sénégalais et le labeur s’explique en grande partie par un rendement faible du travail rémunéré et les innombrables incitatifs sociaux à l’inaction.
C’est un aveu d’impuissance que de servir à répétition ce discours moralisateur qui tient lieu d’appui insignifiant à l’engagement professionnel. Les décideurs ont la charge pratique de conduire la force vive à l’ouvrage par la promotion sociale du travail et par des garanties de rendement de la force-travail. Les sermons et les discours n’y feront rien. Les populations rechigneront à l’effort tant que surgiront de toute part de miraculeux nantis. Eh oui ! On prie pour les riches, on les honore et on les adule sans égards à l’origine de leurs patrimoines.
Birame Waltako Ndiaye
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