Auchan, Y’a Bon Banania Et Nous (Par Boubacar Boris Diop)

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– Ce qui est en cause, c’est l’action de la France dans ses anciennes colonies et le risque grandissant pour notre pays, désormais riche en pétrole et en gaz, de devenir une République banania – Ou une république bananière ?

Ce qui est bien avec le foot, c’est qu’on n’a même pas besoin de l’aimer pour être emporté par la folle passion qu’il suscite partout, pour en venir à être dégoûté de l’existence parce qu’un arbitre – sûrement corrompu, le salaud – a refusé un penalty évident à Sadio Mané… C’est toutefois une passion bien éphémère, incapable de survivre à un Mondial. Celui de 2018 vient de prendre fin et c’est déjà comme s’il avait eu lieu dans une de nos vies de jadis. Il aura heureusement au moins eu le temps de servir de prétexte à des retrouvailles entre proches.

On peut imaginer une famille Cissé recevant de vieux amis chez eux à Castors ou Grand-Yoff à l’occasion d’un match de poule. Tous en ont vite marre des querelles tactiques byzantines : pourquoi ce 4-4-2 en losange alors que le 5-3-2 a toujours réussi à la Tunisie ? Maaloul, le coach des ‘’Aigles de Carthage’’, justement. Son équipe est en train de se faire étriller par Lukaku et ses copains des ‘’Diables rouges’’. Mais pour parler franchement, tout le petit monde réuni dans le salon des Cissé s’en fiche. Ce n’est pas vraiment le genre de match ‘’com-plé-te-ment-fou !’’ ponctué des hurlements de reporters sportifs déchaînés. Alors on cause, on cause de tout et de rien. Ça n’est pas mal non plus, ce machin qu’on appelle démocratie car chacun peut râler à son aise et les hôtes des Cissé ne s’en privent pas. Je peux presque entendre la maîtresse de maison – peu importe son nom – s’indigner de certaine réunion secrète, tenue au Palais en plus, quelle honte, entre le président Sall et de hauts magistrats pour ‘’verrouiller’’ – doux euphémisme – le dossier Khalifa Sall. ‘’Est-ce vrai, ça ?’’ lui lancent de toutes parts des citoyens éberlués et au comble de l’indignation. Elle se défend comme elle peut : ‘’C’est dans les journaux !’’ Forcément, quelqu’un va en profiter pour redire sa stupéfaction : ‘’C’est vraiment bizarre de vouloir faire croire aux Sénégalais que Khalifa Sall est le symbole de la corruption dans ce pays !’’ ‘’En tout cas, il est digne, lui’’ observe, songeur, un autre ‘’car à sa place beaucoup auraient déjà passé plus de temps au Pavillon spécial de Le Dantec qu’à Rebeuss !’’ On peut aussi supposer qu’une énième blague sur les desserts des tirailleurs va faire baisser la tension à un moment ou à un autre. Mais le vrai sujet dans tous les esprits, ce sera sûrement Auchan.

Je ne connais pas cette famille Cissé – entre nous, elle est imaginaire, enfin presque – mais cela ne m’étonnerait pas qu’un de ses invités martèle la petite table du salon de furieux coups de poing en hurlant des obscénités contre les commerçants sénégalais ‘’ces rapaces qui n’ont aucune pitié pour nous les baadoolo’’. Rien de nouveau : le brave homme aura juste répété à sa manière exaltée ce que chacun a déjà lu ou entendu moult fois au cours des dernières semaines. S’il est une chose que l’affaire Auchan m’a fait découvrir avec stupeur, c’est à quel point mes compatriotes haïssent ou méprisent les marchandes au coin de la rue, les modestes boutiquiers et les grossistes, en particulier ceux regroupés au sein de l’UNACOIS !

D’ailleurs même chez les Cissé tout le monde s’est spontanément rallié au cri ‘’À mort les hommes d’affaires sénégalais !’. On a dénoncé avec feu leur mentalité de gagne-petit, regretté qu’ils soient si peu en phase avec les dures réalités de notre époque du libéralisme triomphant, celle du ‘’Marche ou crève !’’ Auchan contre le petit boutiquier du coin : un char d’assaut lancé contre une souris et les gens observent la scéne en faisant ouais, ça n’est pas beau à voir mais que voulez-vous, c’est la globalisation ! Comme déjà suggéré, ce fiel anti-UNACOIS n’a pas coulé des seules lèvres de mes amis imaginaires de Grand-Yoff ou Castors. Cela fait froid dans le dos, quand on pense au nombre de nos concitoyens qui ont cru devoir assimiler ces jours-ci patriotisme et étroitesse d’esprit. Faudrait-il avoir honte d’aimer son pays ? En tout cas, la position de ces modernistes décomplexés ne souffre d’aucune ambiguïté : c’est vraiment dommage que les magasins Auchan n’aient pas ouvert leurs portes beaucoup plus tôt…! Il est vrai aussi qu’ils ont un argument quasi imparable : les emplois créés par la multinationale et dont bénéficient surtout les jeunes.

En résumé, un appel au boycott du collectif ‘’Auchan dégage !’’ aurait dans les circonstances actuelles très peu d’écho. Il pourrait même inciter beaucoup à un ‘’vote de protestation’’ en faveur du distributeur français.

Pourquoi alors l’ambassadeur de France a-t-il cédé si vite à la panique ? Bientôt il n’y aura même plus lieu de réagir aux sorties de ce Christophe Bigot si doué pour se couvrir tout seul de ridicule. Il n’était pas non plus nécessaire qu’un obscur plumitif français du nom de Francois Jurain profère contre les Sénégalais – en fait contre les Nègres – des propos si haineux et racistes sous prétexte de voler au secours d’une multinationale française.

Que la question Auchan soit complexe, nul ne peut le nier. Sans aller jusqu’à présenter toute boutique de quartier ou étal de rue comme un répugnant réservoir de microbes divers et variés, il faut bien avouer que les pratiques de nos commerçants doivent être revues. De là à dire que le Sénégal est le seul pays où cela se passe si mal, il y a un pas qu’il faudrait se garder de franchir. Le laisser-faire a été encouragé par le clientélisme politique et les interférences maraboutiques et cela a ouvert un boulevard à des non-nationaux. Mais si problème national il y a, en quoi une firme étrangère est-elle la solution ? Ceux qui soutiennent ce point de vue aiment sans doute notre pays autant que tout le monde. On peut même soupçonner chez eux du dépit amoureux, né de la tristesse de voir le Sénégal s’éloigner chaque jour un peu plus de leur idéal. Il n’empêche : leur raisonnement qui semble frappé au coin du bon sens est en fait du pur délire. Ce n’est pas parce que nous avons des difficultés dans un domaine particulier que nous allons faire une haie d’honneur à des gens venus d’ailleurs. Appliquée à d’autres secteurs de la vie nationale, une telle logique dit hélas l’affaissement mental d’un peuple prêt à se laisser asservir de nouveau.

Certains défenseurs d’Auchan semblent suggérer que les Sénégalais sont hostiles par principe à la grande distribution étrangère. Dans quel pays vivent-ils donc ? Ce n’est pas la première fois – loin s’en faut ! – que des grandes marques s’installent chez nous. Cela n’a jamais dérangé personne. Si Auchan a suscité un tel émoi, c’est que tout dans sa démarche augure d’une mise à mort programmée du petit commerce. Pour quelques emplois créés, combien de personnes vont être mises hors circuit ? Son maillage du territoire a quelque chose d’hallucinant. Combien de magasins Auchan y a t-il dans notre pays ? On en trouve dans les endroits les plus improbables et le plus choquant est que cette implantation massive se soit faite en si peu de temps.

Bref retour chez la famille Cissé. Ces Sénégalais typiques n’aiment pas beaucoup Macky Sall et son régime, on l’a déjà vu. Pourtant aucun d’eux ne songe à lui imputer la responsabilité de la situation ayant conduit à cette triomphale prise de pouvoir par Auchan. Me permettront-ils de leur faire remarquer que les magasins Auchan, loin d’être le remède à la maladie en sont plutôt le symptôme ?

Je suis ressorti de mon incursion secrète dans la famille Cissé avec la confirmation du paradoxe sénégalais : un ombrageux nationalisme nous rend insupportable toute critique venue des autres mais la vérité c’est que nous ne voulons pas être privés du plaisir de l’auto-dénigrement. Je crois bien qu’avant la fin de ce soporifique Belgique-Tunisie – seul un but du remuant Khazri avait brièvement réveillé l’intérêt pour ce match mais c’était pendant les arrêts de jeu – trois ou quatre hôtes des Cissé se sont amusés à comparer ce que nous mangions avant Auchan avec l’exceptionnelle qualité hygiénique des produits désormais offerts par cette dernière. Fini le risque de cancer, a dit quelqu’un en se référant à je ne sais quel éditorialiste. On est saisi d’un effroi rétrospectif à l’idée que pendant des décennies nous nous sommes gavés de poison par la faute de commerçants nationaux véreux et irresponsables. Personne ne s’en était apparemment rendu compte avant l’irruption sur le marché du géant français mais mieux vaut tard que jamais. Rien que pour avoir permis cette salutaire ‘’prise de conscience’’, Auchan mérite tout notre respect.

Mais trêve de blague. Je ne vois pas en quoi les boites de yaourt et les bouteilles d’huile végétale vendues chez Auchan seraient meilleures ou plus sûres que celles de Casino et Exclusive. Le plus consternant, c’est l’idée si répandue que les produits de tous ces supermarchés ne présentent absolument aucun risque pour la santé des consommateurs. Ceux qui disent cela n’ont-ils donc jamais entendu parler de Monsanto ? Ignorent-ils que tous les jours que Dieu fait un grand nom de l’industrie alimentaire ou pharmaceutique est épinglé quelque part dans le monde pour vente de produits archi-périmés, voire cancérigènes ? Serions-nous des enfants qu’un simple emballage aux couleurs vives et gaies peut faire sautiller d’excitation ? Certains a priori révèlent à notre insu notre manque de respect pour nous-mêmes. Essayer de justifier une telle ligne de raisonnement par on ne sait quelle douteuse modernité, c’est ajouter la sottise à l’insulte.

Est-il besoin de rappeler que le groupe Auchan, mal vu dans son pays d’origine, a également dû fermer boutique au Maroc, en Thaïlande, au Mexique et en Argentine ? Alors, Auchan une entreprise venue certes faire de l’argent chez nous mais en ayant à cœur notre bien-être collectif ? Chercher à nous le faire croire, c’est nous prendre pour des demeurés. Un exemple suffira à en convaincre les sceptiques. Les Sénégalais ne se souviennent sans doute pas de l’effondrement d’un gigantesque atelier de confection du Bangladesh, le Rana Plazza, qui a coûté la vie en avril 2013 à 1138 personnes. Auchan, concernée par la tragédie via une sombre affaire de sous-traitance pour sa marque ‘’In Extenso’’, a d’abord refusé de s’associer à des mesures de compensation financière avant de se raviser ; les victimes que le groupe rechignait à indemniser étaient toutes de pauvres gens obligés d’accepter des salaires de misère en travaillant dans des conditions proches de l’esclavage. À la suite de ce drame, le groupe Auchan a été traîné en justice par les trois ONG ‘’Sherpa’’, ‘’Ethique sur l’Etiquette’’ et ‘’Peuples Solidaires’’ pour, entre autres méfaits, la ‘’violation des droits humains au travail’’ de ses employés au Bangladesh et des ‘’pratiques commerciales trompeuses’’. Un épisode que les employés sénégalais d’Auchan feraient bien de garder à l’esprit. Un peuple averti en vaut deux, lui aussi…

L’on parle beaucoup, et pas seulement dans la famille Cissé, des bas prix pratiqués par Auchan. Il est normal en ces temps difficiles d’être attiré par un supermarché réputé les rendre plus abordables. On peut d’ailleurs s’attendre à ce que les jours précédant la Tabaski soient mis à profit par Auchan pour conforter son image d’ennemie de la spéculation. Ce sera sa réponse à la polémique et une façon de prouver dans les faits qu’elle est plus soucieuse que les autres des intérêts des Sénégalais les plus démunis. On dit merci d’avance en restant toutefois bien conscients que ce petit jeu opportuniste n’aura qu’un temps. Auchan, c’est le loup dans la bergerie mais habillé en grand-mère ! Elle casse aujourd’hui les prix mais qu’en sera-t-il lorsqu’après avoir anéanti toute concurrence, elle sera seule à faire la loi sur le marché ? Si les règles du capitalisme ne changent pas dans les semaines à venir, la réponse à cette question ne fait pas l’ombre d’un doute. Au final, le désir légitime d’acheter moins cher aujourd’hui pourrait coûter très cher aux générations futures.

L’on parle par ailleurs de milliers d’hectares de terres que le groupe serait en train d’acquérir pour produire lui-même de quoi approvisionner ses magasins. Dira-t-on là aussi que c’est bien fait pour nos paysans, ces fainéants ? Un tel discours est aussi récurrent qu’humiliant. Il ne faut pas oublier que les partisans du CFA jouent systématiquement sur la peur du chaos que pourrait occasionner notre sortie de cette monnaie coloniale. Le président Sall – dont les capacités de projection au-delà d’une élection semblent très en-deçà de celles de ses prédécesseurs – a de même confié les commandes de la compagnie aérienne nationale à des Français, supposés a priori plus travailleurs et efficaces que les Sénégalais. Tout porte à croire que c’est depuis Paris que de tels choix lui sont fortement suggérés, pour utiliser un gentil euphémisme.

Et nous voici à présent au cœur du problème Auchan : ce groupe fait surtout débat parce qu’il est perçu, après Eiffage, Orange, Total, Alstom et on ne sait quel vendeur de lampadaires solaires, comme une énième manifestation de la soumission de notre économie aux intérêts français. Il en symbolise même à merveille l’indécence par une ahurissante visibilité. Le choix d’une implantation aussi massive laisse perplexe dans la mesure où elle pourrait faire de ces enseignes les cibles toutes désignées d’une colère populaire plus ou moins spontanée. Mais on peut aussi supposer que des plans existent pour permettre à l’armée française de rétablir l’ordre. Ce point mérite une sérieuse réflexion. L’hypothèse d’un clash, même limité, fait d’autant plus sens que les signes d’hostilité à la politique africaine de la France ne cessent de se multiplier depuis quelque temps dans notre pays. Cela va de l’indignation grandissante contre la figure de Faidherbe à la levée de boucliers contre le CFA – voire, dans une certaine mesure, contre les APE ; on sait aussi que Total et Eiffage suscitent toutes sortes de récriminations ; enfin une campagne de boycott est annoncée pour mardi 31 juillet contre Orange. Dans un tel contexte, personne ne peut se dire surpris de voir souvent côte à côte les slogans ‘’ Auchan dégage !’’ et ‘’France dégage !’’

On aurait tort de négliger ce dernier cri de ralliement sous prétexte qu’il est archi-minoritaire. Il est certes le fait de militants isolés mais tous sont jeunes et déterminés. Ils ont surtout bien compris que la Françafrique, pesante réalité de leur vie quotidienne est, comme son nom l’indique, un monstre à deux têtes. Voilà ce qui fait de l’affaire Auchan un problème plus politique qu’économique : on ne peut combattre les dérives du régime de Macky Sall sans clouer en même temps au pilori un Etat français qui est au cœur de son processus de décision. L’hostilité d’une association d’hommes d’affaires sénégalais, l’UNACOIS, à une multinationale française opérant chez nous, est un message que l’on a sans doute bien décodé de l’autre côté. Même si rien de tout cela ne devrait pour l’heure troubler le sommeil des patrons de ces sociétés, les appels incessants à ‘’dégager’’ – mot nouveau dans notre lexique politique – sont la preuve que l’opinion commence à faire le lien entre le destin singulier du président Macky Sall et les soutiens dont il bénéficie à Paris. N’en déplaise à ceux pour qui élever la voix contre la Françafrique c’est chercher à nous défausser sur les autres de nos responsabilités, il est essentiel de raccorder les deux bouts de la chaine si nous voulons renforcer notre système démocratique ou simplement saisir la nature réelle de nos maux. Sans l’impunité que lui garantissent des soutiens extérieurs, le président Sall ne ferait pas du passage en force une règle quasi immuable de politique intérieure.

À l’arrivée, même si le Sénégal reste une démocratie, il est de moins en moins perçu, même en Afrique, comme un Etat de droit. L’affaire Khalifa Sall est particulièrement troublante de ce point de vue. Le Sénégal de Macky Sall ressemble beaucoup plus au Gabon d’Omar Bongo – la cruauté et la peur en moins – qu’au Sénégal de Senghor. Celui-ci était pourtant un précieux allié de Paris sur le continent. Mais il savait tracer des limites même à ses puissants amis et lui, qui s’était juré dans un de ses poèmes de ‘’déchirer les rires banania sur tous les murs de France’’ avait un sens aigu de l’Histoire. Ce n’est certainement pas l’auteur d’Hosties noires qui aurait vanté le ‘’rôle positif des desserts servis aux tirailleurs’’ durant la sanglante période coloniale.

Tout cela étant dit, Auchan doit-il ‘’dégager’’ ? Quitte à paraître manier le paradoxe, je ne le pense pas du tout. Cela ne peut être ni fondé en droit ni accepté par le sens commun. À mon humble avis, ce groupe doit rester au Sénégal mais en renonçant à des prétentions hégémoniques qui pourraient le desservir tôt ou tard. Il n’est pas tenable à la longue d’évoluer dans un environnement où la seule vue de votre enseigne suscite animosité et rancœur chez tant de vos clients potentiels. Auchan devrait non seulement donner un coup d’arrêt à sa politique irrationnelle d’expansion mais aussi prendre l’initiative de fermer certaines de ses boutiques de quartier. Les dirigeants de l’UNACOIS disent du reste à qui veut les entendre que l’existence de ces ‘’mini-Auchan’’ est tout simplement illégale.

Quelqu’un a choisi malhonnêtement de traduire “Auchan dégage !’’ par ‘’Les Blancs dehors !’’ À ma connaissance personne n’a jamais prononcé ces mots et c’est bien la preuve que les Sénégalais qui protestent contre Auchan – encore une fois ils sont une minorité – n’ont aucune motivation xénophobe. Il suffirait que la chaîne de distribution rentre dans le rang pour qu’on n’en entende plus parler.

Son éventuel retour à la normale ne devrait cependant pas nous dispenser d’un examen de conscience. Il importe de savoir comment on a pu en arriver à une situation si potentiellement explosive. La décision de s’installer de manière aussi spectaculaire dans un pays étranger n’a pas pu être prise du jour au lendemain. Peut-être que la seule façon d’avoir le fin mot de ce scandale, c’est de remonter le cours du temps pour savoir si tout cela s’est conclu au terme d’un processus transparent. Qui a autorisé quoi ? Sommes-nous sûrs que des enveloppes n’ont pas indûment circulé ? A-t-on au moins imposé à Auchan, comme partout ailleurs, des partenaires nationaux ? Je sais bien que ce sont là des questions qui fâchent. Elles seraient pourtant un chantier idéal pour les mouvements citoyens car une démocratie digne de ce nom, cela doit aller bien au-delà de la rotation des élites à la tête de l’Etat.

Je n’exprime toutefois là qu’un point de vue pratique sur une question ponctuelle. Je suis bien conscient qu’Auchan est au centre d’une controverse où ce qui se joue va beaucoup plus loin et profond que les pratiques plus ou moins orthodoxes d’une firme commerciale, si importante soit-elle. En vérité, ce qui est en cause, c’est l’action de la France dans ses anciennes colonies et le risque grandissant pour notre pays, désormais riche en pétrole et en gaz, de devenir une République banania. Ou une république bananière ? On ne sait même plus quoi dire…

Par Boubacar Boris Diop

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7 Commentaires

  1. Ce que je n’ai jamais compris de nous Sénégalais, c’est cette façon que nous avons de faire du commerce depuis soixante ans et même avant. Quelle différente y aurait-il à ventre des produits venant presque entièrement d’Europe, du Maroc, de la Tunisie, de Chine et d’ ailleurs dans de petites boutiques installées dans tous les quartiers de nos villes et de nos villages, et vendre les mêmes produits dans un espace plus grands, plus hygiénique ? Nos commerçants devraient dores et déjà se regrouper pour installer dans toutes les villes du Sénégal des supers et des hypers marchés comme l’ont fait les famille Auchan et Leclerc dans les années 40 ( pour LECLERC) avant que l’argent issus de nos richesses pétrolières et gazières n’inonde le Sénégal. Si nous n’y prenions garde, tout ce qui rapporte beaucoup d’argent (grands restaurants, grands hôtels, boulangeries modernes faisant de la qualité, immeubles, grande distribution de produits alimentaires importés et d’électroménagers) sera entre les mains d’étrangers : Libanais, Marocains, Français, TURCS, Chinois et Indiens). Il faut souligner qu’un pays sans banques appartenant à des nationaux permettant aux populations de bénéficier de prêts facilement et à long terme ne peut développer son économie ! Mr Boris Diop devrait pousser l’analyse sur tous ces aspects !

    Edouard Leclerc lance en 1949 son premier magasin. Le début d’une « success story ».
    En décembre 1949, son premier magasin faisait 16 m2. 63 ans après, son réseau compte 560 magasins dans l’Hexagone et emploie 96.000 personnes. Edouard Leclerc, décédé lundi à l’âge de 85 ans, est l’histoire d’une réussite personnelle démarrée dans le Finistère, en Bretagne, et qui a considérablement marqué l’histoire de la grande distribution.

    Tout commence avec son épouse Hélène. Dans l’après-guerre, il lance une modeste épicerie dans un hangar rue des Capucins, à Landerneau. Il y vend à prix de gros des produits de consommation courante, d’abord des biscuits, puis de l’huile et du savon. Son idée est simple : s’approvisionner directement chez les producteurs pour court-circuiter les fournisseurs et supprimer leurs marges, faisant ainsi baisser les prix. Les clients vont très vite affluer.
    « Après la guerre et avant d’avoir son magasin, il tournait dans la campagne environnante avec une petite camionnette. Par la suite, j’ai accompagné ma mère dans son épicerie lorsque j’avais cinq ou six ans. C’était la sortie courses de la semaine. Le magasin était très populaire. Je me souviens d’une table centrale où il y avait juste des biscuits et du sucre », raconte un habitant de Landerneau de l’époque, interrogé par Europe1.fr
    Un hangar dans son jardin
    En 1951, il se résout à construire un hangar de 30 m2 dans son jardin qui devient son nouveau magasin. Deux ans plus tard, alors qu’il vend désormais plus de 150 références d’épicerie sèche et de produits d’entretien, sa surface de vente atteint 80 m2.
    Pour se développer, il permet à ses disciples d’utiliser gratuitement son nom pour ouvrir leurs magasins, pourvu qu’ils respectent sa conception de la distribution. Le succès est fulgurant. Dix ans après le lancement, une nouvelle épicerie ouvre en 1959 à Issy-les-Moulineaux, en région parisienne. Les clients viennent pour s’approvisionner des quelques 1.500 articles disponibles au sein de ce circuit-court de la distribution.
    A l’époque, les médias accourent intrigués, comme le montre cette vidéo de l’INA :
    Le paquet de pâtes et de café à la baisse
    Ce « système Leclerc » va faire tache d’huile et beaucoup de détaillants du début des années 60 vont lancer des campagnes chocs de promotion sur leurs produits.
    « Nous participons à cette campagne malgré les sacrifices et malgré le handicap certain que nous avons par rapport à un certain mode de distribution. Sur le plan national, nous sommes 120.000 à participer. Cette baisse concerne une cinquantaine d’articles comme les pâtes. Nous vendions 102 francs le paquet de 500 grammes qui est vendu aujourd’hui 92 francs. Le paquet de café que nous vendions 205 francs est vendu aujourd’hui 188 francs », témoigne monsieur Bonnet aux Actualités françaises.
    Mais lorsqu’il essaye d’étendre son système au plan national, certains l’accusent de « tuer le petit commerce ». Pierre Poujade, homme politique et leader syndical proche de Jean-Marie Le Pen, le prend pour cible et les contrôles fiscaux s’enchaînent. Leclerc gagne les premiers procès contre des marques qui refusent de l’approvisionner. Le succès va se confirmer. En 1959, l’Association des centres distributeurs E. Leclerc (ADCLec) est créée et en 1970, la centrale d’achat nationale, Galec. Edouard Leclerc a d’ores et déjà gagné son pari.

    • Merci Maimoun. Nos commerçants sont trop fénéants. Leur modèle commercial est dépassé : acheter en gros à l’étranger (lait, riz, huile…) et le vendre à prix d’or aux boutiquiers du coin. La meilleur façon de combattre Auchan c’est de faire comme Auchan. Se regrouper et construire des grands magasins. Je suis triste de constater aussi que le patronat sénégalais passe son temps a organiser des soirées de galas et a courir derrière les marchés publics. Aucune initiative pour se regrouper et protéger l’économie d’autant plus qu’on a un État qui défend plus les intérêts des entreprises étrangères.

    • Ils doivent se réunir et créer des coopératives parce l’union fait la force.Il faut évoluer, grandir ou mourir de sa plus belle mort.J’ai peur pour nos cultivateurs, nos fermiers, nos pêcheurs, tailleurs, bijoutiers et nos artisans de toutes sortes, parce qu’ils ne peuvent continuer si archaïquement, si rudimentairement leurs exploitations.Une belle analyse et un point de vue pertinent

  2. Merci pour cette contribution. Elle pose effectivement les bonnes questions.
    La presence et l expansion de ces compagnies se comprend pour peu que l’on comprennee ce que les APE cherchent vraiment a faire dans/de nos pays.

  3. Ford et Canadian Tire ont commencé leur Business dans leur garage de maison. Il faut évoluer, grandir, se développer ou alors mourir de bon gré sans se plaindre un instant de rien. Les grandes unités ont toujours éliminé les petites unités qui doivent se transformer en autre chose.Rien ne se perd, tout se transforme,une loi universelle

  4. Ce boubacar boris diop doit vraiment avoir beaucoup de temps pour nous servir un texte aussi pénible, stérile et long ! c’est l’illustration typique d’une grosse masturbation intellectuelle inutile !

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