Balla Moussa Daffé, membre du comité des sages de l’Apr: « Je souhaite que Khalifa Sall soit libre »

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L’ancien maire de Sédhiou, ancien ministre, Balla Moussa Daffé sort de son silence. Dans cet entretien accordé à «L’As», l’universitaire et membre du comité de réflexion pour la paix en Casamance, fait le point sur le processus de recherche de la paix, les problèmes que traverse la région de Sédhiou. Balla Moussa Daffé tire la sonnette d’alarme sur les risques de votes- sanctions dans le Fouladou. Membre du comité des sages de l’Alliance pour la République (Apr), il sermonne l’opposition enfile sa robe d’avocat pour défendre Khalifa Sall emprisonné  dans le cadre de la Caisse d’avance de la Ville de Dakar.

Où en êtes-vous avec la recherche de paix en Casamance ?

Depuis l’avènement de Macky Sall, il y a une accalmie. Il faut dire que le Président Macky Sall est béni. Nous avons fait des efforts pour unifier le Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc) qui connaît un leadership éclaté en 6 camps. Nous avons réussi à unifier 4 camps. Nous avons eu la chance d’entrer dans le maquis et de discuter directement avec les combattants. Nous avons réussi à regrouper 4 factions qui ont accepté d’être derrière César Atoute Badiane et de parler d’une seule voix. Elles sont prêtes à aller à la table des négociations.  On cherche maintenant à les rapprocher avec la faction de Salif Sadio qui est au nord. On ne désespère pas. Mais il y a des gens qui cherchent à nous mettre des bâtons dans les roues pour empêcher Robert Sagna de réussir. Il y a des rentiers qui cherchent à ce que la rébellion perdure. C’est une économie de guerre qui s’est installée. Avec les problèmes d’emplois des jeunes, il y a une tendance à intégrer le maquis. Dans le maquis, ce ne sont pas des vieillards qu’on trouve là-bas, mais des jeunes même s’ils n’ont plus la volonté de combattre, mais c’est un refuge. Ils sont prêts à dialoguer. Maintenant, ce qu’on est en train de faire, c’est de réunir les populations pour que tout le monde s’approprie la dynamique de paix surtout avec l’avènement du Président Barrow en Gambie. Il fallait aussi qu’on aille vers les populations de Goudomp frontalier avec la Guinée Bissau. Aujourd’hui, ces populations ne peuvent plus accéder à leurs champs à cause de mines et leurs troupeaux sont décimés par les voleurs qui disparaissent en Guinée Bissau. Ils  n’ont plus de bétail. Autant la coupe du bois dans le Médina Yoro Foulah, autant le ravage de bétails dans le département de Sédhiou est un fléau. J’ai suggéré au Groupe de réflexion pour la paix en Casamance d’aller rencontrer le Président Adama Barrow et obtenir de lui l’engagement de nous aider. C’est une manière de le déterminer davantage  dans la recherche de paix. Le Groupe de réflexion ne doit pas se limiter seulement en Casamance. On veut aussi que les négociations pour la paix en Casamance se fassent au Sénégal. Pour réduire les frustrations, je pense qu’au-delà de la construction du pont de Farrafeny, il faut une autoroute pour contourner la Gambie. Cela doit être une des priorités du gouvernement. Je veux que la Gambie comprenne qu’elle ne  peut pas se développer sans le Sénégal, mais aussi que le Sénégal ne prend pas la Gambie comme une région. Nous sommes le même peuple. On doit aller au-delà d’une confédération voire une fédération parce que les deux peuples se sont fédérés.

Qu’est-ce qui bloque le processus ?

Le Président Macky Sall a posé des jalons importants pour la paix en Casamance. Mais ce qui manque, c’est qu’en dehors de Abdoulaye Bibi Baldé, il n’y a pas un ministre dans toute la région naturelle de la Casamance. La région de Sédhiou n’a pas eu de ministre depuis que le Président Macky Sall est arrivé au pouvoir.

Pourquoi Sédhiou a rejeté le référendum ?

Je pense que c’est à cause de la manière dont les 15 points du référendum ont été conçus. Il y avait la confusion et la division au sein de l’Apr. Quelque part, il y a eu des votes sanctions liés au contenu du projet de constitution, notamment la polémique autour de l’homosexualité. Les querelles de leadership ont été pour quelque chose. Et tel que je vois les élections législatives, si on n’y prend garde les donnes peuvent changer à causes des frustrations liées aux investiture. Aujourd’hui, beaucoup de responsables font du tapage médiatique pour être investis alors qu’ils n’ont pas de base politique. Malgré les efforts du Président Macky Sall, tout peut être hypothéqué par les problèmes des investitures d’abord au sein de l’Apr en plus des alliés de Benno, la parité et les jeunes. C’est pourquoi j’ai quelque inquiétude pour les législatives. L’Alliance pour la République (Apr) n’arrive pas à se structurer, je ne dirais pas que c’est une armée mexicaine. Le Président Macky Sall pense qu’il faut laisser le parti ainsi jusqu’aux élections législatives. C’est pourquoi, j’ai dit que quelles que soient les mesures que le Président Macky Sall va prendre pour discipliner le parti, chaque responsable va penser qu’il est le meilleur choix pour les législatives. En plus des alliés et de la parité, les critères qui avaient prévalu lors des investitures des dernières législatives ne tiennent plus. Parce que le Parti socialiste (Ps) et l’Alliance des forces de progrès (Afp) traversent des crises, Macky2012 a éclaté etc.

Les populations de Sédhiou exigent la construction de la boucle du Boudié, le Pont, l’électrification des villages etc.

Le bitumage de la boucle du Boudié va bientôt commencer. On aurait dû accélérer la cadence. Sinon lorsque les chantiers commencent à la veille des législatives, les populations vont penser que les engins sont là juste pour les législatives et après, ils vont repartir. Je demande au Président Macky Sall de donner des instructions fermes aux ministres pour accélérer les travaux des infrastructures qu’il avait promis aux populations. En plus des populations, les responsables politiques de Sédhiou se sentiront frustrer de n’avoir connu aucune promotion au niveau national. Moi, je ne suis plus dans cette situation, mais je sens que les cadres de la région ont besoin d’être impliqués dans la gestion en étant nommé ministres ou à la tête des postes de directions. Il y a zéro décret (sic) (le Dg du Cosec). C’est pourquoi, je milite pour la promotion des cadres Casamançais en particulier ceux de Sédhiou. C’est la raison de mon engagement politique pour rétablir une certaine injustice. Parce que la capitale régionale a été déplacée à Ziguinchor et puis Kolda a été érigée en région en laissant Sédhiou comme chef lieu de département. Le Président Macky Sall a été notre avocat auprès du Président Wade pour l’érection de Sédhiou en région. C’est pourquoi, je reste attaché au Président Macky Sall. La région de Sédhiou c’est son bébé. C’est pourquoi il doit prendre en compte le développement de Sédhiou. Il y a beaucoup à faire dans la région en terme de  désenclavement et de mise à niveau des infrastructures. Quand le gouverneur habite encore dans une maison privée, il y a problème. Lorsque le Président a tenu le conseil des ministres délocalisé, tous les ministres logeaient à Kolda. Cela m’avait frustré. Même s’ils devaient loger dans les maisons, ils devaient le faire. C’était une autre raison de frustration. Cela a contribué un peu au résultat du référendum. Ce n’est pas la faute des populations, si on est enclavé et que les investisseurs privés hésitent à venir dans la région alors qu’on n’a jamais connu de violence, de la rébellion en Casamance. J’ai tout fait pour éviter que le Mfdc prenne pied à Sédhiou. Il faut qu’on donne un sens à la région. Malgré la création du pole de développement de la Casamance, les investissements sont concentrés dans la région de Ziguinchor au détriment des régions de Sédhiou et de Kolda. Le désenclavement, l’électrification, l’eau potable restent un sérieux problème. On réclame le bitumage de la boucle du Boudié et la construction d’un pont, le  dragage du fleuve pour permettre sa navigation. Et malgré la création du Domaine agricole communautaire (Dac) de Sefa qui souffre d’un problème de financement, l’emploi des jeunes demeure un autre problème. Il faut créer des infrastructures pour une agriculture moderne. Aussi, il faut souligner que tout le Pakao n’est pas électrifié. Tous les gros villages de 1000 à 4000 habitants ne sont pas électrifiés.

L’opposition reproche au Président Macky Sall d’avoir restreint les libertés d’expression. Partagez-vous cet avis ? 

Cela a toujours été le talon d’Achille de tous les régimes qui se sont succédé. On a laissé la démocratie arriver à un niveau que certains veulent nous faire reculer. Ce n’est pas possible. Il faut laisser la démocratie s’exprimer totalement. Car dès que les gens se sont défoulés, c’est fini parce que le Sénégal reste l’intérêt commun. Mais si tu veux empêcher les gens de contester, il y aura des problèmes. Parce que personne ne peut faire l’unanimité. Même Dieu ne le fait pas parce qu’il y a des gens qui ne croient pas en Dieu. Donc, qu’on ne fasse pas croire cela au Président Macky Sall. Il est venu au pouvoir par la voie de la démocratique et c’est par la     démocratie qu’il va partir. Mais en bâillonnant cette démocratie, les libertés constitutionnelles on risque d’avoir des dérapages. Il faut également que l’opposition sache raison garder sinon on va détruire ce pays.

L’opposition reproche au président Macky Sall d’avoir restreint les libertés d’expression. Partagez-vous cet avis ?

Cela a toujours été le talon d’Achille de tous les régimes qui se sont succédé. La démocratie est arrivée à un certains niveau, mais certains veulent nous faire reculer. Ce n’est pas possible. Il faut laisser la démocratie s’exprimer totalement. Car dès que les  gens se sont défoulés, c’est fini parce que le Sénégal reste l’intérêt commun. Mais si tu veux empêcher les gens de contester, il y aura des problèmes. Parce que personne ne peut faire l’unanimité. Même Dieu ne le fait pas parce qu’il y a des gens qui ne croient pas en Dieu. Donc, qu’on ne fasse pas croire ça au président Macky Sall. Il est venu au pouvoir par la voix de la démocratique et c’est par la démocratie qu’il va partir. Mais en bâillonnant cette démocratie, les libertés constitutionnelles, on risque d’avoir des dérapages. Il faut également que l’opposition sache raison garder sinon on va détruire ce pays.

Pourquoi les régimes peinent à respecter les libertés …. 

Vous savez le pouvoir rend fou pour surtout ceux qui ne mérite pas d’être au pouvoir. C’est-àdire ceux qui pensent être arrivés au pouvoir par le coup du destin, mais ils oublient que cela passe par les hommes. Le peuple est souverain. Le regard change selon qu’on soit au pouvoir ou à l’opposition, mais cela s’inscrit dans la marche du pays. D’une manière générale, il faut que le pouvoir et l’opposition se respectent. Que le pouvoir respecte l’opposition et la laisse s’exprimer dans les limites constitutionnelles sans chercher à la bâillonner, ridiculiser, l’humilier. Cela peut frustrer et créer une minorité nuisible au pouvoir. Il faut ménager les susceptibilités pour éviter qu’elles s’expriment par la violence. Il y a certains dans l’entourage du président Macky Sall, qui peuvent l’influencer dans le mauvais sens. Tant qu’on ne passe pas le cap du second mandat, nous serons toujours dans une zone de turbulence.

L’opposition a-t-elle une chance aux prochaines législatives ?

Vous voyez ce qui se passe au Parti démocratique sénégalais (Pds). Qui aurait imaginé l’exclusion de Pape Samba Mboup et Farba Senghor si ce n’est pas le égos qui s’expriment ? Chacun veut être chef au Pds, au  Ps, à l’Apr… comment les partis peuvent être stables. Déjà on ne s’entend pas au sein des partis et comment l’opposition peut trouver unité au sein de Mankoo pour faire une liste unique ? Vous allez voir les problèmes des partis aux investitures que cela soit du côté de l’opposition que du pouvoir. Malheureusement le péché mignon de Abdoulaye Wade, c’est de croire que le Sénégal lui appartient et qu’il peut imposer n’importe qui et le Pds lui appartient, il peut imposer n’importe qui et démettre  n’importe qui.

Que pensez-vous des querelles au sein du Parti socialiste ?

C’est vraiment désolant. On va de mal en pis. Malheureusement, les choses étant ce qu’elles sont, certains cherchent à transhumer vers l’Apr. On voit des responsables de l’Apr qui cherchent à débaucher des militants du Ps. Chacun cherche à se faire voir. L’intérêt collectif disparaît au profit des intérêts  ersonnels. Mais honnêtement, les valeurs se sont effacées au profit de l’argent. Tout le monde veut être un milliardaire. Le Ps souffre encore un problème de leadership.  Mais il ne faut pas qu’on aliène ce parti pour des considérations personnelles. Je me désole de la situation du parti.

Quel commentaire faites vous de l’arrestation du maire de Dakar Khalifa Sall ?

Je me désole vraiment de l’arrestation de Khalifa Sall. On pouvait le mettre en liberté conditionnelle en attendant de voir plus clair. Je souhaite que le président m’entende sinon c’est encore une autre pomme de discorde comme dans le cas de Karim Wade. On n’a pas besoin de ça quel que soit par ailleurs l’attachement qu’il a pour Tanor. Tel que je l’ai connu, Khalifa Sall est un homme courtois, qui n’a jamais levé la voix même si on l’a poussé ces temps-ci. En tout cas, on a besoin d’apaiser le climat politique. C’est Macky qui est au pouvoir et il est comptable devant les Sénégalais et pas l’opposition. Maintenant s’il veut répondre à tous les coups, il ne va pas pouvoir gouverner dans la paix. Il doit être tolérant et ne pas  écouter certains qui peuvent l’induire en erreur.

On reproche au président Macky Sall de faire une justice sélective avec l’arrestation de Khalifa Sall. qu’en pensez-vous ?

Je souhaite que Khalifa Sall soit libre. Je lui donne la présomption de bonne foi même s’il peut se tromper dans la gestion. Je crois honnêtement qu’après les auditions de ces collaborateurs sur les fausses factures, moi j’ai été maire, nous sommes tous confrontés à ces factures. On règle parfois des problèmes sociaux par les dépenses diverses. On avait des factures de gérant de station d’essence pour liquider quelques dépenses sociales. On appelle Caisse d’avance ou fonds politique, c’est la même chose pour moi. Ce sont des fonds spéciaux. En tout cas, on l’a autorisé depuis avant Mamadou Diop. Et puis ce n’est pas le maire qui va vérifier si c’est du riz qui est commandé pour lui donner ces fonds. Peut être c’est une vieille habitude parce que ce GIE n’existe plus. Si Khalifa Sall savait qu’on proposait des fausses factures pour lui donner l’argent, il aurait refusé parce qu’il est devenu un opposant. C’est la seule faille paraît-il que l’Inspection Générale d’Etat (IGE) a trouvée après vérification. D’ailleurs, ce n’est pas lui qui est responsable de la gestion. Parce que dans les mairies, il y a des commissions des réceptions et le maire ne voit même pas ces commandes. Malheureusement, c’est la règle du jeu en politique. Si tu es un opposant et que devient dangereux on te cherche une faille. Mais je ne dis pas que c’est le pouvoir qui manipule, mais plutôt des gens qui sont auxiliaires quelque part du pouvoir, qui trouvent une faille pour lui créer des ennuis. En plus, il y a eu une succession de faits, notamment l’arrestation du maire Bamba Fall, l’affaire Barthélemy Dias et l’arrestation de Khalifa Sall, l’opinion retient qu’il y a des relents politiques. Donc, il fallait mieux réformer  et faire de la Caisse d’avance des fonds spéciaux parce que la mairie en a besoin. Autant l’Assemblée, le Haut Conseil, le Conseil Economique ont besoin de ces fonds spéciaux autant la mairie de Dakar, voire toutes collectivités en ont besoin. On oublie que les collectivités locales sont des démembrements de l’Etat.

Source: L’As

6 Commentaires

  1. Il demande sa libération sur la simple base selon ses propres dires d’une promotion de bonne foi. Quels rigolo et insulte à la justice !

    • C’est le discours le plus sage que j’ai entendu jusqu’ici !
      Tous les journaux devrait publier tout ou partie de cet interview.
      Le poids des ans et l’expérience doivent servir à l’être humain et, faisant fi de toute autre appréciation, j’applaudis des deux mains les propos que je viens de lire.
      Je les perçois comme honnêtes et réalistes et je dis bravo à son auteur. CE DISCOURS Á LE MÉRITÉ D’ÊTRE RAISONNABLE ET COURAGEUX!

  2. Le Doyen a raison sur toute la ligne. En tout cas, la démarche vindicative et rencunière du gouvernement me fait peur. Les récents emprisonnements sont une épine sous le pied du président. Il ne faut pas qu’il se fasse des multitudes d’ennemis. Les institutions sont instrumentalisées. La gestion clanique du pouvoir est visible. La dilapidation des ressources de l’État est manifeste. La démocratie est torpillée. Vraiment c’est la déception. Je regrette amèrement d’avoir voté pour l’élection de Macky Salle. L’éléphant annoncé est venu avec un pied cassé. C’est dommage

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