Batterie d’exonerations pour Sudatel: L’étonnante dérogation

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Sudatel bénéficie d’un régime fiscal exceptionnel. Le troisième opérateur de téléphonie mobile est exonéré de plusieurs taxes et de redevances. Ce régime fiscal exceptionnel est lié aux conditions obscures d’attribution de la dernière licence. La Gazette revient sur les exonérations plaçant Sudatel au-dessus des lois et règlements qui régissent le secteur des télécommunications au Sénégal.

La Gazette persiste et signe. Sudatel est en marge du droit sénégalais des télécommunications. L’opérateur soudanais a bénéficié d’un régime fiscal exceptionnel grâce à une entente avec les autorités sénégalaises qui ont négocié l’attribution de la licence. La Gazette est en mesure de confirmer cette information livrée dans son enquête sur le contrat Etat du Sénégal-Sudatel, contrairement au communiqué distillé par Expresso/Sénégal dans la presse. Ce communiqué soutient : « Expresso/Sénégal qui exploite la licence en question est soumise au régime du droit commun des sociétés : elle ne bénéficie en conséquence d’aucune exonération fiscale de quelque nature que ce soit et supporte ainsi tous les taxes, impôts, charges patronales et sociales en vigueur ». La société de Sudatel tente, à travers son communiqué, de montrer qu’elle est en règle par rapport aux dispositions légales et réglementaires régissant le secteur des télécommunications au Sénégal. Que nenni ! La réalité des faits montrent qu’elle n’est assujettie qu’aux seules clauses secrètes du contrat le liant au Sénégal.

Cette convention secrète est en effet en porte-à-faux avec les dispositions légales régissant les télécommunications, notamment le Code 2001-15 du 27 décembre 2001. Cette dernière, en son article 21, indique que « le titulaire d’une licence est assujetti au paiement d’une contrepartie financière, de redevance et de contribution, dont les modalités seront précisées dans le cahier de charges ». En complément à cette disposition de la loi, le décret 2004-837 du 02 juillet 2004, fixant les redevances pour assignation de fréquences radioélectriques, détermine, en son article 3, les différentes formes de redevances que les opérateurs des réseaux de télécommunications sont tenus de payer. On distingue, parmi celles-ci, les frais d’études de la demande, payables une seule fois, pour un montant de 2 millions de francs Cfa. A cela s’ajoutent des frais de gestion de la licence dont le tarif est fixé à 50 millions de francs Cfa et une participation au service universel imposable à hauteur de 3% du chiffre d’affaires.

Viennent, enfin les redevances de mise à disposition de fréquences dont les opérateurs sont tenus de s’acquitter annuellement pour un montant de 10 millions de francs Cfa par chaque canal duplex (double) attribué à chaque opérateur de réseau. Pour cette dernière redevance, le montant total à payer dépend de la taille du réseau et du nombre d’abonnés. Il faut souligner que ces tarifs concernent uniquement le service mobile terrestre utilisant des techniques cellulaires, telles que le (Nordic Mobile Téléphone) ou le GSM (Global System For Mobile Communications). Or Sudatel, société adjudicataire de la troisième licence, exploite un service de téléphonie mobile, fixe et Internet. Donc, il a plus de taxes et de redevances à sa charge. Et pour chaque numéro, l’opérateur doit verser une taxe de 150 francs.

Cependant, Sudatel est en marge de toutes ces dispositions du Code des télécommunications. Cette situation volontairement créée, autour de la société Sudatel est une violation flagrante du Code qui dispose en son article 5 : « l’exploitation des réseaux de télécommunications ouverts au public s’effectue dans des conditions transparentes. Les exploitants desdits réseaux doivent tenir une comptabilité analytique pour déterminer les coûts, produits et résultats de chaque réseau exploité ou de chaque service ouvert ». Ces dispositions légales qui ont pour vocation de bien réguler le secteur ne sont curieusement pas appliquées à Sudatel, alors que ses concurrents (Orange et Tigo) sont assujettis à ces règles.

DES AVANTAGES AU-DELA DU PERMIS

Sudatel bénéfice d’une défiscalisation au-delà de ce que permet la loi N° 2004-06 portant Code des Investissements. Ce texte prévoit des avantages fiscaux pour ces entreprises, selon des modalités et conditions bien définies. D’abord, il s’agit d’exonération de la Contribution forfaitaire à la Charge des Employeurs (Cfce) pendant une durée de cinq (05) ans. En plus, si les emplois créés, dans le cadre du programme d’investissement agréé sont supérieurs à deux cent (200) ou, si au moins 90 % de ces emplois sont localisés en dehors de la région de Dakar, cette exonération est prolongée jusqu’à huit (08) ans. Sudatel installé en 2008 (donc depuis 2 ans seulement) a, bénéficié de ces privilèges.

Concernant les avantages particuliers sur l’impôt sur les bénéfices, « les entreprises nouvellement agréées sont autorisées à déduire du montant du bénéfice imposable une partie des investissements dont la nature sera définie par décret. Pour ces nouvelles entreprises, le montant des déductions autorisées est fixé à 40 % du montant des investissements retenus ». Selon toujours cette loi adoptée par l’Assemblée nationale, « pour chaque année d’exercice fiscal, le montant des déductions ne pourra dépasser 50 % du bénéfice imposable. Ces déductions peuvent s’étaler sur (05) exercices fiscaux successifs au terme desquels, le reliquat du crédit d’impôt autorisé et non utilisé n’est imputable, ni remboursable ». Ces avantages visent une incitation à l’investissement. En revanche, les syndicalistes de la Sonatel avaient flairé une loi taillée sur mesure pour préparer le terrain à Sudatel. Dans leur communiqué, ils avaient relevé cette coïncidence troublante. En tout état de cause la faveur faite à Sudatel dépasse largement l’esprit et la lettre de cette nouvelle loi. Une étonnante dérogation.

Baye Makébé SARR

lagazette.sn

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