Décryptage : Le mantra «wadien» dévasté

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Par Soro DIOP – [email protected]

Neuf mois que le dialogue politique avait été rangé dans les placards présidentiels après les discussions ouvertes du 1er au 5 décembre 2010, lorsque Bécaye Diop était à la Place Washington. Pour la conduite des concertations avec le pouvoir, Bennoo avait proposé depuis le 1er janvier au Président Wade un modérateur. Aucune réaction de Me Wade. Jusqu’à vendredi dernier, à l’occasion de la fête de korité. De quoi nourrir de légitimes interrogations sur ce subit appétit présidentiel pour un dialogue politique, devenu presque un mantra «wadien», mais maintenant dévasté.
L’appel au dialogue doit être replacé dans le contexte politique actuel pour mieux en faire sortir les lignes directrices, pour ne pas dire les bavardes marges de silence. Au fond, ce qui fonctionne sous cet appel n’est point étranger à ce que son géniteur a tenté d’évacuer avec une désinvolture suspecte, notamment la recevabilité ou non de sa candidature en 2012. Pour une rare fois, le Président Wade n’a pas l’initiative de la polémique, lui qui, d’habitude, jetait un os à ronger à l’opposition et aux médias. Dans ce débat qui fait fureur dans le champ politique, c’est bien l’opposition et des mouvements citoyens hostiles à la dévolution dynastique qui mordent dans la chair plutôt que dans l’os présidentiel. La question de l’irrecevabilité de sa candidature dans laquelle il a été pris en flagrant délit d’aveu, Me Wade se retrouve dans une posture fragilisée par rapport à son agenda électoral et/ou de succession.
Au fond, qu’a révélé le débat sur la recevabilité ou non de la candidature de Wade pour la Présidentielle de 2012 ? L’ampleur de la solitude du Président Wade qui reçoit ainsi en pleine figure les effets boomerang de sa gestion aristocratique et autocratique du pouvoir, d’une centralité outrancière autour de sa seule personne dans la conduite de l’Etat. A part quelques frêles et dérisoires ripostes d’une troupe médiatico-libérale, le Président Wade n’a jamais autant paru seul face aux Sénégalais, y compris face à son propre camp, au moment où il appelle, pour la énième fois sans succès, l’opposition au dialogue. Cette fois-ci, il a en face de lui la rage de l’opposition et de mouvements citoyens disqualifiant sa candidature, mais aussi la défiance de plus en plus ouverte des authentiques du Pds qui se permettent l’audace de dire leurs maux. Autant dire que la charpente libérale a cédé. La baraque libérale qui n’abrite même plus des débats politiques, mais parfois préfère les ébats sexuels comme dans la fameuse affaire Diombass.

LES VIEILLES RECETTES
Même la gnognotte des multiples jeux des chaises musicales qui ne dilatent plus les rates, émet maintenant sur le registre des dissonances audibles au plus sourd de la «Waderie». Elle semble renvoyer l’image d’un Président qui tourne en rond ou d’un alchimiste politique, perdu dans ses potions électorales et/ou successorales. Son appel au dialogue politique ferait bonne séquence dans une pièce revue de En attendant Godot de Samuel Beckett.
Face au fossé entre lui et les citoyens, pour une bonne partie à cause de l’enlisement du pays dans une chienlit féroce (inondations, délestages, cherté des denrées de première nécessité, scandales financiers en série, etc.), et face aux secousses telluriques de son parti, un dialogue politique, semble espérer Wade, serait à mesure d’inverser la tendance. Au besoin, en recourant à une conspiration électorale avec des franges confrériques et un groupuscule d’imams qui éructent déjà des consignes de vote. Et en appoint, une sorte de verrouillage judiciaire via le Conseil constitutionnel chargé de connaître des inévitables contentieux électoraux qui pointent à l’horizon et, ver sur le gâteau, le retour incongru de Ousmane Ngom à la Place Washington, en tant que ministre de l’Intérieur à la neutralité ruinée par de légitimes suspicions, eu égard à son rôle et son attitude lors du scrutin présidentiel de 2007.
Les vieilles recettes de Wade ne suscitent plus vraiment un appétit politique, même chez des Libéraux aujourd’hui à «la double conscience», pour dévaliser Hegel. Si Wade était capable de s’interroger sur ses errements, ses errances et ses erreurs, si son entourage ne «malgouvernait» pas avec tant de flagrantes impunités, il aurait été possible d’espérer un dialogue politique franc, ne serait-ce que pour s’éviter une branlée électorale. Mais du côté du pouvoir, on ne veut rien entendre. Rien écouter. Rien voir. Tout le drame, c’est que ce régime inoculte à un corps politique et social malade une thérapie qui envenime son état.

lequotidien.sn

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