Doudou Kende Mbaye «Je voulais être journaliste»

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Bong sang ne saurait mentir, a-t-on coutume de dire. Doudou Kende Mbaye est la voie crachée de son père El Hadji Mbaye Dondé Mbaye. L’ascendant officiait auprès du Khalif Ababacar Sy et a occupé l’espace pendant près d’un demi-siècle. Le timbre de sa belle voix a animé les « tentes » des chants religieux à travers le Sénégal, sans compter le rôle d’amplificateur des discours des chefs religieux de la famille de El Hadj Malick Sy. Le fils qui a fait des études poussées, voulait devenir journaliste. L’appel du destin visant à perpétuer l’héritage patriarcal ne lui a pas laissé trop de marge de manœuvre. Doudou Kende Mbaye assure à Tivaouane et un peu partout dans le monde et ses chansons, compilées dans les ordinateurs, téléphones portables et autres tablettes, égayent l’oreille et le cœur des disciples de la Tidjanya. Il retrace son itinéraire ainsi que sa vie auprès des khalifs de Maodo. Entretien

Vous êtes l’une des principales figures de chanteurs de panégyriques de El Hadj Malick Sy dédiée au prophète et aux figures de la Tidjanya. Quel sens donnez-vous à cet engagement?

Pour nous, c’est une mission que notre vénéré père, El hadji Mbaye Dondé Mbaye, nous a léguée et qu’il a commencée sous la coupole de Sérigne Babacar Sy qui la lui avait confiée. Pendant presque des années, on l’a accompagné dans ce sens à savoir, vulgariser à travers la chanson, tous les poèmes que Seydi El Hadji Malick Sy, ses enfants et petits fils, ont eu à écrire dans le domaine de la religion musulmane et de la confrérie tidjane. Je crois que c’est un message que ces érudits, ces hommes de Dieu, ont voulu lancer à l’endroit de tous les adeptes à travers ces poèmes et je crois que c’est un honneur que Dieu nous a fait, en choisissant nos modestes créatures pour que nous fassions partie de ceux-là qui sont chargés de livrer ce message aux musulmans en général et aux Tidjanes en particulier.

En tant que chanteur et interprète de ces poèmes sacrés, vous parcourez le Sénégal, la Sous—région, voire le monde, est-ce à dire que c’est un métier à plein temps ?

Effectivement, nous avons la chance de parcourir le Sénégal presque chaque année, d’aller dans les coins et recoins du pays pour les besoins de cette profession et effectivement, nous nous rendons chaque année en dehors du Sénégal, dans la Sous-région, en Mauritanie, en Gambie et ailleurs en Europe et aux Etats Unis d’Amérique pour célébrer la naissance du prophète Mohamed (PSL) ou bien les journées dédiées à notre vénéréCheikh Ahmed Tidjane Chérif ou à ses khalifes. C’est une occasion que nous saisissons toujours et une mission que nous essayons d’assurer à travers ce que notre père nous a légué.

Comment vous êtes-vous transformé en chanteur de panégyriques religieux ?

C’est Serigne Abdou Aziz Sy Al Amine qui m’a retenu au Sénégal parce que moi j’étais en Europe pour des études avant d’y travailler. J’étais venu en vacances au pays en 1991 ou 1992. Un jour, mon père m’a demandé de l’accompagner à Keur Samba Gueye près de Karang à la frontière sénégalo-gambienne. C’était pour un Gamou que présidait Sérigne Abdou Aziz Sy Al Amine. A 5 heures du matin, mon père m’a remis le micro en me demandant de chanter un peu, ce que j’ai fait.  Le lendemain, on est allé rendre visite àSerigne Abdou et il m’a dit : « je vous ai entendu chanter, je te demande de ne plus retourner en Europe, reste ici pour assister ton père. » C’est ce qui a fait que je suis resté au Sénégal. Comme Al Amine est un homme de Dieu, il avait vu que certainement, mon père allait disparaitre 10 ans après. Une manière de m’amener à me débrouiller  dans  la chanson, afin que la mission ne connaisse pas un échec.

Est-ce que le métier de chanteur religieux nourrit bien son homme?

Mon père, de son vivant, m’a toujours interdit de fixer un prix pour une prestation religieuse. Il m’a toujours dit que quand quelqu’un vous sollicite pour un Gamou, une conférence ou une prestation religieuse, ne lui fixe pas de prix, même si vous avez la possibilité de mettre du gazole dans votre véhicule, faites-le. Respectant cette recommandation à la lettre, je n’ai jamais fixé un  montant pour mes prestations. El Hadji Mbaye Dondé m’avait dit que c’est un service qui lui a été légué par Serigne Babacar Sy, raison pour laquelle nous concevons ce métier comme une mission et non un moyen pour s’enrichir. Néanmoins, nous rendons grâce à Dieu, car, à chaque fois que nous avons des besoins à satisfaire financièrement, il ya toujours la «Soutoura» qui est là. Comme disait Serigne Abou, «Ce peut être dur mais jamais vous ne flairerez le déshonneur.»

Si Doudou Kende Mbaye n’était pas chanteur, quelle profession aurait-il exercée ?

C’est une ironie du sort, car, je voulais devenir journaliste. Tous ceux qui me connaissent ici à Tivaoune m’ont toujours vu assurer les reportages des matchs du National populaire. Et même quand il y avait la ziarra de Tamkharite avec le dahira des Moustarchidines, je faisais partie des gens qui réalisaient des interviews. J’ai toujours aimé la presse. Ma vocation, c’était de devenir journaliste. Mais mon père a toujours eu peur, non pas de la presse en tant que telle, mais du risque de dire une contrevérité sur une personne. Voilà pourquoi il n’avait pas bien accepté que je devienne journaliste et il est allé le dire à Serigne Abdou Aziz Sy. Et ce dernier lui a dit :«laissons-le et transformons-le en journaliste de la Khadra.»

Cette 111ème édition du Maouloud est la première qui se tient sans feu Serigne Mansour Sy Borom Daradji, dont vous étiez un proche, mais aussi la première sous le khalifat de Serigne Cheikh Tidjane Sy. Quel sens lui donnez-vous?

Je dirai que c’est un mélange de joie et de tristesse, dans la mesure où c’est une grande perte quand on perd un érudit, un homme de Dieu comme Cheikh Mouhamadoul Mansour Sy. En ce premier Maouloud célébré en son absence, c’est à un vide extrêmement important auquel nous faisons face. Borom Daradji -rien que ce surnom veut tout dire – par sa rhétorique, son savoir encyclopédique, sa manière de dompter les foules, sa façon de livrer les messages, nous manquera inévitablement. Mais, de manière prémonitoire, c’est lui-même qui nous rappelait cette fameuse phrase de Cheikh Ahmed Tidjane, le fondateur de la confrérie Tidjane : «Quand une étoile s’éteint, apparaît une autre qui éclaire davantage. » C’est pour dire que c’est une mission divine que Dieu lui avait confiée et qui est arrivée à son terme, et comme l’a toujours rappelé Cheikh  AbdoulAziz Sy Al Amine, il est reparti vers Dieu. Nous venons de Dieu, nous sommes pour Dieu et nous retournons à Dieu. Si cette mission devait s’arrêter, je crois qu’il l’aurait fait à la disparition du prophète Mohamed (PSL) mais, les compagnons du prophète avec ses quatre khalifes successifs et ceux qui les ont suivi, les érudits et les chefs de confréries ont toujours continué cette mission, ont toujours maintenu le flambeau afin qu’il ne s’éteigne jamais. Donc, nous avons une pensées pieuse vers notre vénéré Borom Daradji.

En particulier moi-même parce que sur sa recommandation, j’ai toujours chanté à ses côtés. Sa disparition est terriblement triste. Néanmoins ; on essaie toujours de supporter la volonté divine et prier pour que continue à rayonner le flambeau qui est maintenant entre les mains de Serigne Cheikh Ahmed Tidiane Sy que Borom Daradji appelait son « jumeau.»  Il l’a toujours appelé ainsi parce que la différence d’âge entre eux n’est que de quatre mois. Serigne Mansour est venu au monde en août alors que Serigne Cheikh Tidjane Sy est né en décembre. Nous lui souhaitons une longue vie, de même qu’à tous ses frères, et à tous les descendants de notre vénère El hadji Malick Sy. Epaulé par ces frères, qui sont là et qui ont toujours été présents, il pourra réussir la mission que tous les fidèles attendent de lui.

sudonline.sn

 

 

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