Effet d’annonce à la suite de drames – Après l’émotion, le silence !

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Depuis 2012, les tenants du pouvoir se font remarquer par des effets d’annonce dans une situation de crise. À chaque fois que le Sénégal traverse une période difficile, les autorités sortent le chéquier des promesses. Mais une fois l’émotion passée, toutes les décisions prises tombent dans l’oubli, en attendant la prochaine catastrophe.

Depuis que le ‘’daaka’’ de Médina Gounass a été endeuillé par un incendie ayant fait 31 morts au dernier bilan, les autorités ne cessent de prendre la parole pour regretter les faits et annoncer des mesures. Lors de son déplacement dans le Sud au lendemain du sinistre, le ministre de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo a fait savoir que le feu et la paille ne font pas bon ménage. Une manière de dire qu’il faudra trouver une solution. Son patron, le président de la République lui a emboité le pas avant-hier en conseil des ministres. Macky Sall veut des mesures concrètes.

‘’Le Chef de l’Etat demande au Gouvernement, en relation avec les organisateurs de cette manifestation religieuse de dimension internationale, de prendre toutes les dispositions logistiques préventives, en vue d’un aménagement adéquat, d’une modernisation soutenue et d’une sécurisation optimale des lieux, installations et établissements de séjour des pèlerins du ‘’daaka’’, ainsi que du renforcement des dispositifs d’adduction en eau potable de Médina Gounass et des localités polarisées’’.

Si dans la forme, il est difficile de trouver à redire, dans le fond par contre, le message ressemble à du ‘’déjà entendu’’. En effet, depuis 2012, les tenants du pouvoir se font remarquer par des effets d’annonce dans une situation de crise. À chaque fois que le Sénégal traverse une période difficile, les autorités sortent le chéquier des promesses. Mais une fois l’émotion passée, toutes les décisions promises sont immédiatement oubliées, en attendant la prochaine catastrophe. À propos d’incendie, l’on se rappelle qu’une autre tragédie a eu lieu à la Médina dans la nuit du 3 au 4 mars 2013. Neuf (9) enfants-talibés ont été brûlés vifs dans un incendie de leur lieu d’habitation. La République toute entière s’était mise à genou pour porter le deuil. Réagissant à chaud, la puissance publique avait promis de sévir contre les fautifs.

‘’Nous allons intervenir et identifier les sites comme celui-ci, les fermer. Les enfants seront récupérés et remis soit à leurs parents quand ils ont la possibilité de les garder, soit à l’Etat qui les gardera. Pour les enfants venus de la sous-région, nous prendrons des mesures, au besoin de concert avec les autorités de leurs pays, afin de les ramener chez eux’’, martelait Macky Sall, en déplacement sur les lieux du drame. Deux jours après, une rencontre est dirigée par le Premier ministre de l’époque, Abdoul Mbaye. A la sortie, il a été décidé ‘’l’interdiction totale de la mendicité des enfants dans les rues’’. Selon les termes du banquier, ‘’le Coran s’apprend dans un daara et non dans la rue’’. 4 ans après, les enfants, talibés ou pas, sont plus que jamais dans la rue. Ils continuent à mendier du petit matin jusque tard dans la nuit, généralement drapés de haillons et les pieds nus.

1547 enfants retirés de la rue

En 2015, après deux ans d’oubli, le gouvernement a essayé de se ressaisir de la question. Cette fois-ci, c’est le ministère de la Famille et de l’Enfance qui a tenté de retirer de la rue les mômes et leurs tuteurs, moyennant quelques mesures d’accompagnement comme un logement provisoire, des denrées alimentaires et quelques billets de banque. Mais d’aucuns avaient vu dans cette initiative des visées inavouées. Les autorités ont été accusées de chercher à faire plaisir aux Américains qui avaient soulevé la question et y avaient quelque part assujetti l’octroi des fonds du MCA. Quoi qu’il en soit, cette dernière initiative n’est guère plus concluante que l’interdiction formelle. En effet, d’après le Directeur de la protection des droits de l’enfance, après 66 opérations, 1547 enfants ont été retirés de la rue à ce jour. ‘’Pas plus tard qu’hier, 21 ont été ramenés en Guinée Bissau’’, se réjouit Niokhobaye Diouf. Pourtant, il s’agit bien d’une goutte d’eau dans la mer. Car rien dans la rue n’indique qu’un seul enfant a été récupéré. Il est vrai qu’au début des opérations, les enfants avaient disparus, certainement par crainte d’être embarqués. Mais quelques jours après, ils étaient revenus, plus nombreux que jamais.

Toujours au chapitre des incendies, le pavillon vert du Centre international du commerce extérieur du Sénégal (Cices) avait pris feu en décembre 2015. Cheikh Ndiaye le Directeur général de l’institution avait promis de dédommager toutes les victimes. Mais jusqu’à la Fidak suivante, elles n’ont pas été indemnisées. À la veille de la dernière édition, le ministre Alioune Sarr, lors d’une visite de stands en novembre 2016, avait confirmé le DG de la Cices. D’après lui, le Premier ministre a donné des instructions pour que l’affaire soit traitée au plus vite. Et que l’Agent judiciaire de l’Etat, son département et celui des Finances ainsi que le Cices ont eu une réunion dans ce sens. ‘’L’agent judiciaire de l’Etat est en train de suivre avec beaucoup d’attention et toutes les dispositions seront prises dans les prochaines semaines pour que cette question soit évacuée. (…) Encore un peu de patience, l’Etat les accompagnera’’, rassurait-il.

Malgré les mots doux, les sinistrés n’ont pas vu la couleur de l’argent jusqu’à présent. Et il s’en est suivi même une polémique avec les autorités, les commerçants ayant très peu apprécié certaines sorties des tenants du pouvoir. ‘’Nous informons l’opinion publique nationale et internationale qu’après avoir saisi toutes les autorités de ce pays sur ce problème, réclamé pacifiquement et de manière patriotique nos dues, aucun Sénégalais n’a été indemnisé. Toutes les portes nous ont été fermées. On n’a reçu aucune information officielle du Cices ou du gouvernement, encore moins de l’agent judiciaire de l’Etat’’, s’offusquait le porte-parole des sinistrés, Alpha Mamadou Thiam.

Autre exemple d’annonce non suivie d’effet, la sanction contre les criminelles. L’année 2015 a été particulièrement marquée par des crimes odieux. Chaque semaine, la presse rapportait un ou des cas d’homicide (s), généralement volontaire (s), parfois même avec préméditation. Les autorités sont restées silencieuses jusqu’à ce que le monde politique soit frappé. Fatoumata Moctar Ndiaye de l’Alliance pour la République (APR) par ailleurs vice-présidente du Conseil économique social et environnemental (CESE) a été a été sauvagement tuée chez elle. Le chef de l’Etat qui s’était rendu au domicile de la défunte pour présenter ses condoléances a profité de l’occasion pour annoncer des sanctions exemplaires.

Pas de mesure sur les voyages nocturnes pourtant à l’origine de 80% des accidents

‘’Nous allons faire des projets de loi lors au prochain conseil des ministres aux fins de corser les peines contre les crimes de sang. Ainsi, quiconque tuera quelqu’un sera condamné à perpétuité avec travaux forcés sans aucune possibilité de remise de peine’’, pestait-il. Jusqu’à ce jour, il n’existe pas de nouvelles lois votées à l’Assemblée nationale et allant dans le sens de corser les peines. À l’image sa célèbre ‘’tolérance zéro’’ avec les automobilistes, il faudra sans doute attendre la prochaine série de meurtres pour se rappeler la promesse.

Parlant justement des automobilistes, le gouvernement, à l’issue d’un conseil interministériel sur la sécurité routière, a révélé que 80% des accidents ont lieu pendant les voyages de nuit, avec le transport interurbain. En guise d’exemple, le ministre du Transport Mansour Elimane Kane avait même déclaré qu’il fallait interdire les voyages au-delà de 22H. Mais à l’heure de sortir les 10 mesures censées réduire le nombre d’accidents, l’on se rend compte qu’aucune n’est relative aux déplacements nocturnes.

De même, lorsque la conduite de Keur Momar Sarr avait cédé, assoiffant les Dakarois pendant deux semaines, le ministre de l’hydraulique de l’époque, Pape Diouf avait promis des alternatives. ‘’A ce propos, il est prévu ultérieurement de procéder au dessalement de l’eau de mer pour que Dakar soit ravitaillé par différentes sources’’. Pour l’instant, les responsables préparent le lancement de l’appel d’offres prévu en début 2018. S’agissant de l’usine, elle ne sera fonctionnelle qu’en 2021.

Quant aux nombreux engagements pris au lendemain de crise scolaire et jamais respectés, ils sont légion. Le gouvernement avait pourtant un slogan bien inspiré : ‘’faire ce qui est dit et dire ce qui est fait’’.

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