Émergera, émergera pas ? Le Sénégal souffre d’économisme par Birame Waltako Ndiaye

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Depuis les indépendances, les plans et prospectives économiques ne produisent que des effets narcotiques d’un avenir toujours possible. Ce n’est pas faute de bonne volonté, le refrain lancinant sur les échanges et sur sa majesté le capital s’est soldé en arnaques et en vices cachés. Il manque d’originalité et d’audace pour s’inscrire, comme toujours, dans une logique de réplique et de tapage. En plus de constituer gage et moyen d’accaparement des débouchées et du marché sénégalais par des puissances étrangères, il freine tout élan de développement durable.
L’élite bien pensante rie déjà sous cap, se disant : encore un ignorant qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. Eh bien ! L’arriéré, c’est celui qui ne parvient toujours pas à se départir du conditionnement qui lui fait croire que les investisseurs mercenaires détiennent les clés du paradis. Votre schéma multiséculaire de développement repose sur l’endettement et l’espoir de voir poindre des investissements directs étrangers. Cet économicisme plébiscité fait croire qu’en dehors de l’hébergement inconditionnel de capitaux, point de salut.
Cette politique agréée et promue mise sur la croissance économique alors que, telle que structurée et plaquée en terre africaine, elle ne favorise pas l’émancipation. Si l’amélioration des conditions de vie passe nécessairement par la création de richesses, faudrait-il que celle-ci, pour être agissante, profite aux entreprises locales et à l’épargne nationale. Si les profits sont rapatriés illico à l’étranger, ils n’ont plus vocation à faire émerger le Sénégal, pays stable, attractif et accueillant. Mon œil !
Abdoulaye Wade l’avait compris pour avoir essayé arbitrairement d’enrichir des nationaux pour que s’ensuive une production de richesses avec effet multiplicateur réel. Les modalités par lesquelles la croissance voit le jour ainsi que son déploiement font toute la différence. Seul l’arrimage des politiques publiques à une forte mobilisation aux ressources nationales disponibles garantit une véritable émergence, capacité propre à financer durablement l’économie. Il n’est pas question de tourner le dos au reste du monde, mais de compter d’abord sur nous-mêmes, de sortir de la spirale: endettement, investissement, fuite des capitaux, belote, rebelote.
Ce n’est pas parce que nous sommes exploités que nous sommes pauvres. Nous sommes pauvres et exploités parce nous nous complaisons dans un curieux suivisme à défaut de nous montrer inefficaces dans l’emportement. Les techniciens de l’économie s’emparent des politiques publiques pour nous servir, tels des automates, la recette d’accumulation des richesses, apprise, stockée et fredonnée à répétition. Quant aux activistes, en feu et flammes, ils accusent et grondent contre l’oppression en faisant l’économie des méthodes préparatoires et des dispositions subtiles.
Atteints du même cancer, les uns se montrent toujours fanatiques de la médecine classique. Les autres, plus fantaisistes, préconisent le chamboulement d’un coup sec de toute l’existence. D’un côté, les solutions promises restent dans la continuité sans issue. D’un autre, les plaintes et complaintes contre l’absurdité conduisent au non sens. Tiens ! Les jusqu’au-boutistes dénoncent l’arrimage au franc CFA et prêchent la scission brutale. C’est bien beau, mais il est encore plus cohérent et méthodique de s’en prendre aux facteurs d’instabilité, de corruption et de laxisme qui coincent et nous condamnent à la dépendance.
La responsabilité n’incombe pas seulement à l’élite, aux politiciens, aux délinquants ou à une quelconque génération comme semblent le présenter les préjugés et les partis-pris. Nous sommes collectivement responsables du passif de l’administration néocoloniale, soumise, tatillonne et gaspilleuse, en cours depuis Léopold Sédar Senghor. À présent, nous sommes amenés à nous accuser mutuellement d’intouchabilité, de traitrise et de sorcellerie. Tout compte fait, nous répondons tous, par alliance, par filiation ou par simple association, du système sexagénaire de profiteurs et de gesticulateurs.
Birame Waltako Ndiaye
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