Farba Sengor raconte l’histoire de ‘’Ngoutout’’, son oiseau mystique

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« J’ai refusé le poste de Ministre d’Etat chargé de la Casamance »

lundi 16 août 2010

Farba Senghor évoque dans la seconde partie de l’Invité de la Rédaction la question casamançaise dont il est un des médiateurs. Les interrogations sur ses compétences pour cette tâche aussi sensible ne le dérangent pas. Mieux, l’ancien ministre révèle avoir décliné le poste de ministre d’Etat chargé de la Casamance que lui a proposé le chef de l’Etat. Comme à son habitude, il tire sur tous ceux à qui on prête des ambitions présidentielles. [Xalima.com] Ses attaques contre Idrissa Seck relèvent du passé, Souleymane Ndéné Ndiaye reste toujours dans sa ligne de mire. Et puis, Pape Samba Mboup, Karim Wade… Farba Senghor y va tout droit.

Est-ce que la publication de « Contes et Mécomptes de l’Anoci » ne devait pas amener Karim Wade et…

(Il coupe) Ah oui, parce que c’est quelqu’un qui se lève et écrit son livre, vous voulez que cela soit pris en compte. Ce serait facile ! Il (Abdou Latif Coulibaly) a écrit, il doit laisser le lecteur apprécier. Mais, on ne peut pas publier un livre et dire coûte que coûte : ‘’Vous devez utiliser mes conclusions’’. Ce n’est pas possible ! Je crois que notre ami Latif est allé quelques fois trop loin. Personne ne peut lui enlever le droit d’écrire des livres et nous le félicitons pour ses initiatives. Mais, vouloir que l’Etat soit d’accord avec lui, c’est là où je dis qu’il est allé trop loin.

Il a posé un débat…

D’accord, mais s’il le fait en tant que journaliste d’investigations, il doit attendre. Vous savez, moi, je suis un enquêteur. J’ai été l’un des meilleurs investigateurs du Sénégal. Et, c’est moi-même qui avais contrôlé la Compagnie sucrière Sénégalaise (Css) et le dossier du Groupe Sud Communication. J’ai été parmi les douze personnes que Sud avait désignées pour les défendre auprès du tribunal. C’est moi. J’ai un pouvoir d’investigation. (Rires) Personne au Sénégal n’avait jamais osé contrôler la Css du temps d’Abdou Diouf. Je suis le seul à l’avoir fait. (Il insiste). Je vous fais une autre révélation : quand Sud a eu des problèmes pour être défendu, c’est moi qu’on a choisi avec Doudou Gning à Sud Fm et en direct. J’étais Commissaire enquêteur, j’ai prêté serment au tribunal le 12 avril 1981 en tant qu’inspecteur d’investigations.

Mais vous n’avez pas le même rôle justement….

(Il esquive) Lui, il doit s’arrêter à mettre le doigt sur ce qui ne va pas.

Et c’est ce qu’il a fait…

Je vous dis que l’erreur qu’il a commise, c’est d’avoir outrepassé la dénonciation. Moi, j’ai le pouvoir d’investigation et je peux convoquer des gens leur dire ‘’montrez moi vos papiers’’. Je peux dresser un procès verbal et saisir le procureur de la République.

Il joue un rôle de sentinelle…

Voilà, mais le rôle de sentinelle a des limites. Il doit se limiter à alerter. Mais, c’est ce qu’il a fait et c’est ce que font tous les journalistes… Non, non.

Monsieur le ministre, reparlons de votre formation politique. Où en êtes-vous avec le Pds-L ?

Le Pds-L est une initiative. Avant que le Parti démocratique sénégalais-Libéral soit officiel, il faudrait qu’on arrive à l’aboutissement du processus de renouvellement que nous avons engagé. C’est à ce moment que le congrès va décider de la naissance officielle du Pds-L.

Que pensez-vous du Pds-L ?

J’ai dit, dès le départ, que le Pds, de toute façon, est le premier parti libéral. Vous vous souvenez de la naissance des courants au Sénégal. Le Président Senghor avait imposé, en 1976, quatre courants. Abdoulaye Wade a choisi le courant libéral. Au départ, nous avions dit que c’est un parti démocratique et libéral. Donc, il est libéral avant notre naissance officielle. Par conséquent, on n’a même pas besoin de mettre un parti libéral. Et si on y ajoute ‘’libéral’’, cela ne change en rien au parti. Les Sénégalais aiment toujours quelque chose de nouveau pour mieux s’engager. Nous avons dopé nos militants et vous verrez ce que deviendra le Pds.

Le Pds-L n’est-il pas un mort-né ?

Non, il ne l’est pas. Le Pds existe et on est dans un processus qui nous permettra de donner de nouveaux habits à notre parti à la fin du processus que nous avons enclenché.

Cette réforme n’est-elle pas une façon de faire la place à ceux qu’on appelle les « concrétistes » ?

La Génération du concret est un courant de personnes qui se sont dit que Karim Wade est en train de faire du concret et se sont engagées. Donc, ce n’est pas un parti politique mais un courant. Bref, c’est une notion qui réunit tous ceux qui veulent faire comme Karim Wade. Mais, ça ne change rien du tout et dans notre parti, nous avons des militants.

Et ceux qui sont de la Génération du concret ne sont pas des militants ?

(Il hésite un peu) Il y a des sympathisants pour notre parti. C’est pourquoi ces renouvellements-là sont très importants parce qu’ils permettront à tout un chacun de prendre la carte du Pds et de savoir si tous ceux qui sont avec Karim Wade sont des militants du Pds.

N’avez-vous pas l’impression que le dernier gouvernement donne la place à des “concrétistes” ?

C’est ce qu’on dit. Mais, je n’ai pas vu sur le front d’un ministre où il est écrit tel est concret ou non. Le Président Wade a ouvert son parti et son gouvernement à tous les Sénégalais méritants et qu’il estime digne de confiance.

On raconte que la salle du Conseil des ministres a eu du mal à remplir tous les ministres…

Attendez ! Il y a une petite salle nouvellement construite et qui est rarement utilisée. En tout cas, tout le temps que j’étais là-bas, je n’ai assisté qu’une ou deux fois à un Conseil des ministres dans cette salle-là. Il y a également une grande salle qu’on appelle la Salle des Banquets où se tiennent régulièrement les Conseils des ministres. Quand un événement est prévu dans la Salle des Banquets, les ministres sont transférés dans la petite salle et c’est ce qui s’est passé. Cette salle était petite et ils sont retournés dans la grande salle.

Cinquante ministres quand même…

A mon avis, il vaut mieux avoir beaucoup de ministres qui se consacrent chacun à un secteur bien déterminé que d’avoir de grands ministères où les gens ne voient même pas le ministre. Quand on était au ministère de l’Economie et des Finances, j’appartenais à la Direction des affaires économiques, mais on ne voyait même pas le ministre parce qu’on était tellement nombreux et le ministère tellement vaste que cela entraînait l’inefficacité. Il faut que les administrateurs et les administrés se rapprochent d’une part et les ministres et leurs collaborateurs, d’autre part. Je crois que le fait d’éclater les ministères est une marque d’efficacité. Et puis, le Président a une école où il forme les Sénégalais. Vous croyez que ce qu’il est en train de faire ne relève pas d’une grande école ?

Il forme des ministres ?

Non, il forme l’homme sénégalais.

A votre image ?

A l’image de ce que devrait être un Africain. Vous savez, l’Africain est digne et le Président apprend à se faire respecter. C’est pourquoi, il a réagi à sa manière dans l’affaire de l’ambassadeur des Etats-Unis à Dakar, Mme Bernicat.

Mais qu’est-ce que cela a à voir entre le respect et la taille du gouvernement ?

Ce que je veux dire, c’est qu’il ne s’agit pas d’avoir un grand ministère fourre-tout et qui ne sache même pas ce que font ses collaborateurs.

Alors, sommes-nous plus efficaces que la France qui a opté pour la réduction de son train de vie ?

Mais attendez, il y a une différence de niveau de développement entre la France et le Sénégal. Ici, nous sommes en construction, tout est à faire, alors qu’en France ils n’ont plus besoin de faire certaines routes, certains aéroports, certains ponts. Donc, cela veut dire qu’en France, dans beaucoup de départements, le ministre ne gère que des affaires actuelles, ponctuelles, courantes. Chez nous, le ministre gère tout, il part de rien et doit tout construire. Par conséquent, on a besoin de ministres qui se concentrent sur des secteurs bien déterminés pour pouvoir être efficaces.

Mais, il y a là une exception. C’est le super ministère de Karim Wade. C’est quand même un gros ministère et un fourre-tout à la limite comme vous le dites. N’est-ce pas ?

Tout cela mérite réflexion parce que rien n’est figé. Si vous proposez que le ministère de Karim soit éclaté, je crois qu’il y a des Sénégalais qui seront de votre avis.

Votre avis d’abord ?

Moi, j’ai confiance au président de la République.

Mais, nous n’avons pas dit que nous ne le sommes pas…

Ah si (rires). Si j’ai des suggestions en ce qui concerne le ministère de Karim ou autres, je lui dirais directement et non par voie de presse. C’est bien que vous ayez attiré mon attention sur le grand ministère de Karim. Je vais y réfléchir (rires).

Farba Senghor zappé dans le dernier gouvernement. Certains disent que c’est Souleymane Ndéné Ndiaye qui est passé par là. Vous le confirmez ?

C’est possible. Vous savez, dans la vie, on peut être pour ou contre quelqu’un. C’est vrai qu’avec le Premier ministre (Souleymane Ndéné Ndiaye) ça ne marche pas toujours parce que nous n’avons pas les mêmes tempéraments. Ça, tout le monde le sait. Tous les Sénégalais le savent. Je préfère être en dehors de tout cela. N’oubliez pas, j’ai le parti et c’est très important d’avoir un parti comme le Pds et de le manager. Je donne de l’impulsion à notre gouvernement. A chaque fois que nous, responsables du parti, avons des suggestions à faire, nous le faisons directement.

N’est-ce pas un choix par défaut ?

Même si c’est un choix par défaut, ma force c’est ma capacité d’adaptation et ça, je l’ai appris du Président Wade. Je me suis adapté à cette situation et je m’y sens très bien.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que si Souleymane Ndéné Ndiaye veut créer une dualité avec le chef de l’Etat, ça ne marchera pas. Est-ce que vous maintenez toujours ce soupçon de dualité ?

Non, il ne faut pas faire de l’amalgame. (Tout sourire) Vous savez, le Premier ministre n’est pas dans ces dispositions. Il n’a même pas la capacité d’instaurer une dualité avec le chef de l’Etat. Ça, même si je ne suis pas d’accord avec lui, Souleymane Ndéné ne s’aventurera jamais à créer cette dualité.

Vous doutez de ses capacités…

(Il coupe) Non, rassurez-vous, il ne le fera jamais. Jamais ! Ce n’est pas une question de capacités intellectuelles, mais je sais qu’il ne le fera pas et il ne peut pas le faire.

Qu’est-ce qui le différencie de Macky Sall ou d’Idrissa Seck ?

Ce qui les différencie, c’est que les autres étaient prétentieux et voulaient rapidement dégager le Président Abdoulaye Wade pour prendre sa place (rires).

Donc, Souleymane Ndéné Ndiaye n’a pas d’ambition ?

Je ne le dis pas. Ecoutez, ça, pour pouvoir le faire, il faut avoir le parti. Idrissa Seck l’avait, Macky Sall aussi.

Il ne peut pas gérer le parti ?

Non, il ne l’a pas. C’est différent. Il ne peut pas créer de dualité parce qu’il n’a pas le parti. C’est tout !

Vous ne vous êtes jamais entendu avec les Premiers ministres de Wade. Qu’est-ce qui se passe ?

C’est très simple. Moi, je suis loyal. Il n’y a pas de discussion là-dessus (rires). J’ai un regard différent de celui des autres et c’est normal parce que je ne veux que du bien au Président. Je vois des choses que les autres ne voient pas ou qu’ils ne veulent pas voir. Et même si on ne m’écoute pas, je me bats pour me faire entendre.

Et vous osez dire ce que les autres n’osent pas dire…

Dès que je sens qu’il y a un danger pour le secrétaire général national, je m’engage entièrement et sans retenue, c’est ça mon problème.

Est-ce que le Premier ministre est aujourd’hui un danger pour le chef de l’Etat, au point que vous le combattiez ?

(Catégorique) Non, il ne peut pas. Il constitue un danger pour lui-même (rires).

On a l’impression que vous n’avez aucune considération pour Souleymane Ndéné Ndiaye

Non, je ne le dis pas vous aussi (il se tord de rire).

Comment est-ce qu’il est un danger pour lui-même ?

yeen daal dénguen ma beugg dougueul (Vous voulez me piéger).

Votre problème avec Pape Samba Mboup. C’est quand même quelqu’un qui est loyal au Président de la République. D’ailleurs, il paraît que le Président vous a un peu tancé…

Non, Pape Samba Mboup et moi, vous savez bien que ce n’est pas la même chose.

Qu’est-ce qui vous différencie ?

On fait de l’amalgame. Vous connaissez mon histoire, vous connaissez celle de Pape Samba Mboup. Il ne faut pas dire cela. Nos deux personnalités sont totalement différentes.

D’accord, mais expliquez-nous en quoi vous êtes différents Moi, je veux rester un homme honnête et loyal en vers le Président. Ne l’est-il pas lui ?

(Il esquive) Nous n’avons pas la même dimension. Je ne veux pas revenir sur ce problème. Je l’ai aidé à plusieurs reprises. Je n’ai jamais voulu dire du mal de lui. Alors, je n’ai fait que me défendre quelques fois. Je ne parlerai pas de lui ici. Maintenant, le jour où il s’aventurera à revenir sur cette histoire, je lui ferai savoir que je suis là.

Vous regrettez cet épisode ?

(Un peu énervé) Je ne regrette rien. Qu’est-ce que j’ai à regretter ? Je ne regrette absolument rien. Je ne suis pas un homme qui fuit ses responsabilités.

Il semble que Wade vous a remonté les bretelles dans l’affaire qui vous oppose à Pape Samba Mboup. Est-ce vrai ?

C’est Pape Samba Mboup qui a été appelé par le Président.

C’est à lui donc qu’on a remonté les bretelles ?

Exactement.

De quelle manière ?

Je ne sais pas. Je ne vais pas vous dire ce que le Président a dit aux autres. Je vous affirme simplement que c’est tout le contraire de ce qu’on a raconté. Mais, je vous assure qu’il lui a bien tiré les oreilles (rires).

Le blocage dans les retrouvailles entre Wade et Idrissa Seck…

(Il coupe) Non, il n’y pas de blocage. Vous ne savez pas ce que les deux se disent. Moi non plus je ne sais pas et je n’essaie pas de savoir. Je n’analyse que ce que je vois. Je n’essaie pas de faire des réflexions sur des choses que je ne maîtrise pas. Ce que je sais, c’est que Idrissa a actuellement un peu plus de 14%. Nous, nous en avions 58. Idrissa est beaucoup plus important que tous les autres hommes politiques qui se battent dans l’opposition et dans le cadre de Benno Siggil Senegaal. Le Président Abdoulaye Wade, pour sa victoire en 2012, a besoin de Idrissa Seck. C’est à lui de voir comment il le gère. Le reste ne m’intéresse pas.

Vous avez quand même changé de discours. Vous étiez opposé à son retour au Pds…

(Il coupe) Attendez, je n’ai pas changé de discours. J’ai été contre les pratiques de Idrissa Seck mais maintenant, c’est du passé. J’ai été investi d’une mission pour la réélection de Wade, je suis conscient du poids politique de Idrissa Seck et je fais confiance entièrement au Secrétaire général national pour prendre ses 14%.

Monsieur le ministre vous avez déclaré le 15 octobre dernier (Ndlr : l’entretien a eu lieu le 14 juillet) que ‘’Idrissa Seck est politiquement fini’’. Apparemment, ce n’est plus votre conviction…

(Rires) Non, vous aussi, est ce qu’un homme politique doit répéter tout ce qu’il dit. C’est à vous de voir maintenant si l’histoire lui a donné raison ou non. Laissez cela dans les annales de l’histoire et, demain, on verra si c’est vrai ou faux.

Mais, est-il aujourd’hui derrière ou avec vous ?

Vous savez, c’est bien que vous ayez retenu tout cela. Mais allez enseigner cela aux autres (éclats de rires).

Vous aviez invité les militants du Pds et l’administration à ne plus lire la presse privée et même à suspendre leurs abonnements. Votre mot d’ordre n’a pas été suivi. Est-ce que vous lisez la presse ?

Non, vous savez c’est un combat. Ma position sur la presse reste la même. J’affronterai toujours la mauvaise graine.

C’est ce qui vous a poussé à envoyer des nervis agresser certains journaux comme L’As et 24 Heures Chrono ?

Non, L’As ou 24 Heures Chrono, ça ne me concerne pas. Je crois que sur ce point, lepp tabbina gueedj (c’est du passé) (rires).

Vous avez été quand même accusé formellement à la barre…

Non, je n’ai jamais été accusé par qui que ce soit.

C’est quand même votre statut de ministre qui vous a sauvé de la Correctionnelle…

Non, de toute façon on m’a convoqué en tant que témoin, j’ai répondu et c’est tout. Mais vous aussi, relisez l’histoire du monde ! Combien de fois Abdoulaye Wade a été devant les tribunaux. Donc, ces péripéties sont inhérentes à la vie des hommes politiques.

Oui, mais tous les hommes politiques ne tabassent pas les journalistes…

Mais moi-même je n’ai pas tabassé les journalistes, je n’ai pas non plus envoyé des nervis. Vous savez, nous sommes dans un monde où tout est bon pour dégager Farba. Sachez, dans tous les cas, que cette affaire-là ne me concerne pas. Je n’ai rien à voir là-dans. Affaire boobou daal tabbina gueedj. Les gens voulaient faire taire Farba Senghor. C’est un grand complot autour de ma personne. On voulait m’intimider, faire de sorte que c’est Farba qui dégage et se mette de côté. Ils voulaient me démoraliser, mais ces gens ne sont pas encore nés. Vous comprenez ! Je suis un homme qui a appris à se battre parce que j’ai été à l’école de Wade.

Dans cette affaire-là, vous aviez accusé le ministre Madické Niang…

(Il coupe) Tout ça, c’est du passé. Affaire boobou daal dieekhna. Cette affaire-là, je n’en parlerai plus. (Rires).

Etes-vous le ‘’Monsieur Casamance’’ du chef de l’Etat ?

Je n’ai jamais été ‘’Monsieur Casamance’’. C’est la presse qui a voulu me coller ce ‘’Monsieur Casamance’’. Si vous vous rappelez, je travaillais avec Cherif Samsedine Nema Aïdara qui était le ‘’Monsieur Casamance’’. Mais, comment voulez-vous qu’un chef remplace son subordonné. C’est moi-même qui l’avais désigné ‘’Monsieur Casamance’’. C’est comme si un Président prenait la place de son Premier ministre. Donc, attribuer à Farba Senghor le ‘’Monsieur Casamance’’, c’est commettre une grave erreur. Je vais vous faire une révélation : On m’a proposé le poste de Ministre d’Etat chargé de la Casamance, je l’ai refusé.

Ah oui ?

Si. Parce que j’ai dit au Président ‘’je suis votre collaborateur’’. Je l’aide sur beaucoup de questions. Donc, je ne peux pas me consacrer uniquement à cette question casamançaise. Beaucoup de personnes, si on leur demandait d’être le ministre d’Etat, allaient accourir très vite. Mais moi, j’ai dit non.

Certains pensent que la question de l’argent a dévoyé ce que vous devriez faire…

Non, ce n’est pas ce que je devrais faire. Mais en général, la question de l’argent a dévoyé le processus de paix en Casamance. Seulement, moi je n’ai jamais été au cœur de l’argent. Je ne vois pas l’argent et je gérais les gens en fonction de mes possibilités, de mes moyens et de mes relations. Et, jusqu’à présent, j’aide les Casamançais, en général, dans toutes les actions dans lesquelles ils sont engagés. Ça, je le fais bénévolement.

Concrètement qu’est-ce que vous avez réussi ?

Ce que j’ai réussi, c’est d’avoir entretenu de très bonnes relations avec les chefs du maquis, mais aussi avec les chefs traditionnels : les sages, les rois, les chefs de village et les chefs religieux. Ma différence avec les autres, c’est que je ne connais pas d’intermédiaires. Au départ, je ne connaissais pas les rebelles. Ce sont eux-mêmes qui m’ont approché et m’ont dit que je pouvais rétablir la vérité auprès du Président parce qu’on racontait beaucoup de choses sur eux et qui n’étaient pas vraies. Donc, depuis plus de cinq ans, j’essaie de rétablir la vérité.

Vous aviez de bonnes relations avec les sages et d’autres personnes du maquis comme Moustapha Bassène qui était votre ami. Qu’est-ce qui a finalement rendu vos relations exécrables ?

Moustapha Bassène, c’est le maquis qui l’a exclu. C’est le front nord et le front sud qui m’ont saisi pour me dire que cet individu n’est plus leur intermédiaire. Moustapha Bassène représentait le Sud, c’est-à-dire Ziguinchor et Oussouye, dans le comité des Sages. A un moment donné il a eu des relations heurtées avec les deux fronts. C’est pourquoi ces derniers l’ont exclu. Mais je n’ai rien contre lui. Et vous ne m’avez jamais entendu dire du mal de lui.

A quand remonte votre dernière rencontre avec un chef rebelle dans le maquis ?

J’entretiens de très bonnes relations avec les chefs rebelles casamançais. Qu’il s’agisse de César Atoute Badiate, de Salif Sadio ou de Lamarana qui est actuellement le chef du front nord. Mais depuis que mon ami Samsdine Aïdara est décédé, la situation est devenue tellement complexe, tellement floue que je ne suis plus parti dans le maquis. Mais, avant j’y allais régulièrement pour rencontrer les dirigeants.
Une fois, il est arrivé, en compagnie de la presse, du chef de la Brigade de gendarmerie et du sous-préfet de Pao Sokoto pour que je parte jusque dans l’Etat major du maquis. J’ai fait deux kilomètres à pied avec le caméraman dans les bois sacrés, c’est-à-dire là où se trouvent les rebelles, ce que personne n’a jamais fait en Casamance. Mais depuis, j’ai préféré envoyer des messagers.

Jusqu’à présent aucune solution durable n’a été trouvée à ce problème ? Pourquoi le processus piétine ?

Le processus fonctionne et nous sommes très proches de la paix. C’est pourquoi beaucoup de personnes se sont précipitées sur le processus de paix pour essayer de le reprendre. Récemment j’ai entendu beaucoup de personnes faire des déclarations. Vous avez même entendu Emile Zola Coly et Amadou Ly Diome dire qu’ils représentent les maquisards, Salif Sadio et César Badiate. Ces deux chefs rebelles sont des ennemis jurés qui ne se voient ni ne se parlent. Comment peut-on les mettre dans le même bac ? Ce n’est pas possible.

Vous avez récemment fait une sortie dans la quelle vous déclariez avoir offert aux rebelles des portables, de l’argent pour célébrer les baptêmes de leurs enfants…

(Il coupe) C’est vrai. Après avoir fait cette déclaration, certains de mes amis n’étaient pas contents, ils n’ont pas apprécié mes propos et je reconnais qu’ils ont raison. Mais j’ai voulu simplement montrer que je connaissais les acteurs et le milieu et que j’entretenais de bonnes relations avec eux. Ce qui est vrai, c’est que les relations que j’entretiens avec le maquis, personne, au Sénégal, n’a ce privilège. Je dis bien personne. Le jour où vous verrez Salif Sadio ou César Badiate ou Lamarana, ils vous le confirmeront. Sinon tous les autres qui s’agitent sont des intermédiaires. Ma différence avec les intervenants dans la question casamançaise, c’est que je n’ai pas d’intermédiaires avec les chefs.

Mais sur le terrain, rien n’indique l’efficacité de vos actions. L’armée procède très souvent à des ratissages dans la partie sud du pays.

Ce que vous ignorez, c’est qu’il y a d’autres individus qui n’appartiennent pas au Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc) et qui perturbent la paix en commanditant des attentats, des tueries et autres. Il y a également des bandits qui viennent d’autres contrées et qui tirent profit de cette situation.
Concernant l’armée, son rôle est d’assurer la sécurité du pays, de garantir la paix et ce n’est pas moi qui vais leur dire ce qu’ils ont à faire. C’est à eux de définir leur manière de procéder. Mais je peux vous assurer que le processus est saboté par des bandits qui n’ont rien à voir avec les maquisards ou des gens qui ne veulent pas de la paix et qui, par leurs actes, veulent amener l’armée à tirer sur les autres.

Le président Wade s’était fixé 100 jours pour régler ce problème qui dure depuis bientôt 30 ans. Et vous, quel délai vous vous donnez ?

Non, je n’ai pas de délai à me donner pour régler le problème casamançais. Mais je peux vous affirmer que le problème est presque réglé.

Quel est le rôle joué par la Gambie et la Guinée Bissau pour arriver à ce niveau de règlement que vous prétendez ?

Il est vrai que ces deux pays sont incontournables pour l’avènement de la paix en Casamance mais le conflit casamançais est un problème sénégalo-sénégalais (il insiste sur les mots) qui se réglera avec des Sénégalais parce que les maquisards et tous les autres protagonistes du conflit sont des Sénégalais.

On raconte que Salif Sadio est plus proche du président gambien Yaya Jammeh que de son homologue Abdoulaye Wade…

Je peux vous garantir que Yaya Jammeh pose tous les jours des actes allant dans le sens de trouver une solution pour parvenir rapidement à la paix. Le Président gambien ne veut que la paix en Casamance. Et c’est la même volonté qui guide la Guinée Bissau. Le problème, ce ne sont pas ces deux pays-là, mais d’autres gens qui sont en dehors du système et qui veulent le perturber. C’est difficile de les identifier mais on peut deviner leur identité.

Est-ce que la course frénétique à la récupération de l’éventuel succès que constitue le retour définitif de la paix ne bloque pas le processus de paix ?

En ce qui me concerne, je n’ai jamais rien récupéré. Parce que, quand pour la première fois, je prenais connaissance de ce dossier. C’était par hasard. Ce sont les hommes de Ismaël Mandiémé (chef d’une faction rebelle en Casamance) qui m’ont appelé pour me demander d’intervenir dans le processus. Quelques mois plus tard, une grève des élèves de Ziguinchor a éclaté. Un jour, alors que ces élèves étaient dans les studios de Sud Fm à Ziguinchor, ce même Ismaël Mandiémé m’a appelé pour me demander d’intervenir pour qu’ils suspendent leur mouvement. C’est d’ailleurs lui qui m’a remis le numéro du journaliste Ibrahima Gassama (Ndlr : ancien correspondant de Sud Fm à Ziguinchor). C’est ainsi que j’ai appelé ce dernier pour lui demander de me passer les étudiants qui étaient avec lui. En deux mots, je les ai convaincus de cesser leur grève. Ensuite, Gassama m’a ouvert les ondes de Sud Fm. J’ai lancé un appel pour qu’ils retournent, dans les trente minutes qui suivaient, dans les salles de classe. Ce qu’ils ont fait. C’est après que des gens m’ont appelé pour me dire que c’étaient eux mes interlocuteurs depuis plusieurs mois et qu’ils sont des éléments du maquis. Voilà comment je me suis retrouvé comme acteur du règlement de ce conflit.

On vous sent distant du dossier casamançais, pourquoi ?

Ce n’est pas parce que je ne suis pas sur place que je n’interviens pas. Quand je me rends dans le maquis, je ne dis rien à personne. Les moyens de communication sont maintenant très efficaces. Mais, j’entretiens toujours avec les rebelles les mêmes relations. Je les rencontre chaque semaine ou chaque mois.

Pourquoi, malgré cette proximité dont vous vous gargarisez avec les maquisards, ils ne vous ont pas cité comme médiateur ? Ils ont plutôt cité Cheikh Tidiane Gadio, Amadou Ly Diome…

Ça, c’est de l’arnaque parce que tous ces médiateurs potentiels cités constituent un cocktail. Ils ne peuvent pas aller ensemble. Ce sont des ions positifs et des ions négatifs.

Le premier ministre a appelé à ce que vous cessiez vos interventions sur la Casamance…

(Il coupe) Je vous ai dit que je suis du côté du président de la République. Je règle les questions qu’il me confie. Je ne suis pas du côté de la Primature.

On est en plein hivernage. Le Premier ministre propose la solution du recasement provisoire des sinistrés sous des tentes à Tivaouane Peul. N’est-il pas trop tard pour prendre une telle décision ?

A mon avis, c’est une initiative préventive. Parce que le Premier ministre pouvait ne pas faire cette déclaration, il pouvait attendre que les zones soient inondées pour sortir les populations de là et les amener dans les sites dédiés. Le cas échéant, elles n’auraient même pas les moyens de refuser car elles seraient obligées de partir. Donc, le Premier ministre a voulu simplement dire qu’il a mis à leur disposition, et il faut le préciser, à l’initiative du président de la République, des tentes. Je pense que c’est la manière de procéder, la communication qui n’a pas été très efficace.

La proposition du Premier ministre est préventive, selon vous. Avez-vous une solution curative à ce problème récurrent que sont les inondations ?

Vous savez, c’est le Parti socialiste qui a installé les populations dans les bas fonds, dans les zones inondables. Le problème des inondations dure depuis trente à quarante ans. Il est difficile d’y apporter une solution définitive. Mais le président de la République a un grand projet de reconstruction de Pikine et de sa banlieue. Et dans ce projet, deux volets, l’assainissement et l’urbanisation figurent en bonne place. [xalima] Ce projet va régler définitivement la question des inondations. Mais, en attendant, la solution reste le déplacement.

Monsieur le ministre, qu’est-ce qui explique que Wade place une aussi grande confiance en vous ?

Je suis issu de l’école Wade. J’ai été préparé et formé par Abdoulaye Wade. Dans les années post indépendance, les jeunes africains avaient pour idole des personnalités comme Nelson Mandela, Kadhafi, Kouame Nkrumah. Moi, j’ai découvert Abdoulaye Wade. Et j’ai vu que c’est un homme qui méritait une attention particulière de la part de la jeunesse africaine. C’est comme ça que j’ai commencé à le fréquenter. Je l’ai connu accidentellement quand j’étais au Cfpa (actuel cycle B de l’Ecole nationale d’administration), dans la 13e promotion avec son neveu Doudou Wade (actuel président du groupe parlementaire démocratique et libéral), nous avions eu une vive discussion avec notre professeur de droit constitutionnel et finalement on a décidé d’aller voir le professeur de droit, Abdoulaye Wade, pour qu’il nous départage. C’est comme ça qu’on est parti le rencontrer au Point E. J’ai eu raison sur mes camarades et, depuis lors, je suis resté à ses côtés. J’ai été séduit par l’homme Wade.

D’autres pensent que vous tenez le Président par des pratiques mystiques…

Moi, je ne crois pas en ces choses-là. Je crois en une seule chose : le travail. (Il insiste). Et tout ce que j’aurai demain ou après demain, ce sera au bout de l’effort. La preuve : quand j’ai été exclu du palais en 2003, à la suite d’une marche que j’avais organisée, alors que j’étais conseiller technique du président de la République, je me suis dit que j’allais me battre. C’est ainsi que je suis reparti à la base pour me battre jusqu’à ce que mon mérite soit reconnu. Quand je suis encore sorti du gouvernement, au lieu de pleurer sur mon sort, d’aller voir des marabouts ou d’autres personnes pour demander de l’aide ou une intervention, je me suis dit : « Aides-toi, le ciel t’aidera ». Et la meilleure manière de s’aider, c’est de travailler.

L’histoire de l’oiseau mystique ‘’Ngoutout’’. Pouvez-vous y revenir ?

Ça, c’est une histoire qui a été inventée de toute pièce. Je vais vous dire : chez moi, j’ai beaucoup d’oiseaux exotiques parmi lesquelles des grues couronnées. Ce sont des oiseaux qui ressemblent un peu aux paons. J’en ai plus d’une dizaine chez moi et au village. L’histoire, c’est quoi ? Quand je revenais du village, j’avais dans mon véhicule une paire de grues. Et quand mon véhicule a subi un tonneau, l’oiseau s’est blessé, d’ailleurs la grue est morte à mon arrivée à Dakar. Voila ce qui s’est passé.

FIN

La Rédaction

Lagazette.sn

Titre choisi par xalimasn.com

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