Fata : «La recherche du profit ne donne pas aux journalistes le droit de disloquer des familles»

Date:

Moustapha Gningue, ce nom ne dit rien aux adeptes du mouvement Hip Hop. Mais parler leur de Fata ou ‘’El présidente’’, les idoles commencent à sautiller. Cet artiste, un peu incompris par ses collègues a accepté d’ouvrir son cœur au Pays au Quotidien. Fata parle de ses relations avec sa femme, son divorce, ses débuts tumultueux dans le hip hop. Ce Saint Louisien bon temps garde les pieds ancrés dans sa culture. Loin d’être un ‘’blow man’’, Fata est juste quelqu’un «bu beug lu baax». Entretien.

Fata comment êtes-vous arrivé au rap ?

Je suis né à Saint-Louis où j’ai fait tout mon cursus élémentaire. Mon père et ma mère sont des Saint-louisiens. J’étais partagé entre la maison de mes grands-parents et celle de mes parents. J’étais un enfant normal qui, comme ses amis, profitait de l’absence ou de l’inattention de ses parents, pour aller jouer dans la rue. Après le certificat d’études élémentaires, je suis venu à Dakar où je me suis inscrit au collège Notre Dame du Liban. C’est dans cette école que j’ai commencé à gagner mes premiers trophées de musique. Cela mettait mon père en colère parce qu’il ne voulait pas que je chante. Car, dans notre famille, il n’y avait pas d’artistes. Un jour, il était venu se plaindre à la direction de l’école parce qu’elle m’avait nominé pour un concours de musique. Mon père ne voulait pas que je chante. Il m’avait chassé de la maison à cause du rap. Mais mon amour pour la musique était plus fort et j’avais continué à participer aux concours de l’école. C’est au collège Notre Dame du Liban que j’ai rencontré Malang Camara et Hyacinthe Mendy. Avec eux, nous avions créé un groupe qui s’appelait «Black Xeel». C’est avec ces gars que j’ai commencé à faire du hip-hop. Nous étions des jeunes passionnés de musique et il nous arrivait de sacrifier notre inscription ou d’utiliser l’argent de nos mensualités scolaires, pour payer les frais d’enregistrement de nos chansons. Nous avions un ami en commun qui s’appelle Gougou. Ce dernier a d’abord intégré le groupe en tant que DJ avant de devenir un rappeur. Avec «Black Xeel», nous avions fait quelques concerts à l’intérieur du pays mais, malheureusement le groupe n’a pas tenu. Les plus motivés, Gougou et moi, sommes restés pour créer CBV qui veut dire Coups et Blessures Volontaires. Nous avions choisi ce nom parce que Gougou avait été condamné pour des coups et blessures volontaires. Et c’est avec ce groupe que j’ai tapé dans l’œil du public.

Quelles sont les raisons de l’éclatement du groupe CBV ?

Ce sont les mêmes causes qui ont entrainé la dislocation de Black Xeel. Avec le temps, chacun de nous a évolué. Les aspirations et les ambitions n’étaient plus les mêmes. Au début c’était facile. Mais après, je me suis rendu compte que j’étais renfermé dans un groupe très «hard core» qui m’empêchait de m’épanouir, musicalement parlant. Je fais partie des premiers rappeurs sénégalais qui ont très tôt compris que le hip-hop devait s’ouvrir à d’autres genres musicaux. Gougou n’avait pas la même conception des choses que moi. Il fallait donc que je me lance dans les featuring et les compilations pour émerger dans la musique. Et je crois que l’avenir m’a donné raison.

Vous êtes souvent victime de clash de la part de vos amis rappeurs. Pensez-vous que ce mouvement « anti- Fata » est lié à ce choix d’ouverture ?

C’est une explication entre autres. J’ai débuté dans le hip-hop en artiste très engagé. Je reste toujours engagé, pour socialement, conscientiser les gens car le hip-hop n’est pas une musique uniquement contestataire comme le pensent certains petits rappeurs. Le rap est une musique d’idéologies.

Qui sont les DJ et les rappeurs à qui vous vous adressez dans votre dernier clip ?

C’est de la métaphore. J’ai juste touché le monde du showbiz où nous côtoyons tous les jours des personnes, des célébrités et des stars qui n’aimeraient pas que nous réussissions.

«Je suis un Saint-louisien de naissance donc j’aime croquer la vie. «Dama beugueu lou bakh ». Maintenant, si les gens pensent que c’est ça le « Blow », ça ne me regarde pas. Le Blow c’est une façon de se montrer, de s’exhiber et ce n’est pas ce qui m’intéresse. J’ai été éduqué à la « Ndar-Ndar » ce qui fait que je veux toujours être bien dans ma peau encore une fois ‘’lou bakh rek’’».

Mais vous-vous adressez à des célébrités que nous connaissons tous ?

Il est évident que je m’adresse aux personnes qui essayent de me nuire, mais ce n’est pas faire preuve de grandeur que de les nommer. Je n’ai jamais indexé une personne dans mes chansons. Cependant, les fans savent à qui je m’adresse. Dans notre milieu, il y’a toujours des problèmes avec les animateurs ou les artistes qui cherchent aussi leur chemin

Donnez-moi un nom parmi vos détracteurs ?

Je ne vais pas citer de nom, mais ils doivent savoir que je les connais tous et à chaque fois que je les rencontre, je les salue. C’est la meilleure façon de leur dire que je suis toujours dans le « game » et que je ne vais jamais abandonner.

Vous ne voulez pas citer de nom, mais eux vous nomment directement …

C’est une façon de montrer ma grandeur car je n’ai pas le temps de les nommer, mais j’ai fait des morceaux, des clashs, des bifs qui sont dirigés et les auditeurs savent à qui je m’adresse. C’est de la métaphore. Ils doivent apprendre à utiliser les figures de style pour mieux communiquer.

Vous êtes l’un des premiers rappeurs à exercer le métier d’animateur télé et radio. Avez-vous fait ce choix parce que vous ne gagniez pas beaucoup d’argent dans le rap ?

Je faisais des affaires avant la radio. J’avais une boutique qui était beaucoup plus rentable que la radio ou la télé. Mais, la boutique n’existe plus. Toutefois, mon entrée dans l’animation est liée au fait que j’ai toujours essayé d’apporter quelque chose au mouvement parce que le rap a toujours été une musique peu considérée ici. Je crois que la radio et la télé m’ont permis de contribuer à l’émergence de nouveaux jeunes talents qui constituent une relève digne de ce nom. Les émissions telles que « Hip-hop feeling » ont créé de nouvelles stars. Ce n’est pas la recherche du profit qui m’a poussé à faire de l’animation, je veux combler le vide qui existe dans le hip-hop.

Qui sont ces artistes que vous avez révélés dans vos émissions ?

Ils sont nombreux et certains d’entre eux sont devenus des stars incontournables du hip-hop Galsen. Je peux nommer Canabass, No Name, El phénomeno, Mls dream, Reska’P. Ces jeunes sont en train de suivre leur voie sur laquelle j’ai mis un peu de goudron.

Fata est-il un Blow-man ?

Je suis un Saint-louisien de naissance donc j’aime croquer la vie. «Dama beugueu lou bakh ». Maintenant, si les gens pensent que c’est ça le « Blow », ça ne me regarde pas. Le Blow c’est une façon de se montrer, de s’exhiber et ce n’est pas ce qui m’intéresse. J’ai été éduqué à la « Ndar-Ndar » ce qui fait que je veux toujours être bien dans ma peau encore une fois « lou bakh rek ».

« Lou bakh rek ! ». Est-ce qui vous a amené à regarder du côté de la technicienne de surface qui travaille chez vous quand votre femme est absente ?

C’est une fausse histoire. Au Sénégal, les gens racontent n’importe quoi.

Pourquoi étiez-vous en instance de divorce avec votre femme ?

La question du divorce ne s’est jamais posée entre moi et ma femme, même si je reconnais qu’il nous arrive de faire face à des difficultés comme dans tous les ménages.

Ces difficultés sont-elles liées à l’histoire de mœurs que vous avez eue avec votre bonne ?

Je vous le répète, c’est une histoire fabriquée de toutes pièces par la presse. Nous l’avons lue dans la presse en même temps que vous. Ma femme était à l’étranger et elle était choquée. Et toute la famille était choquée par ces contre vérités. Ceux sont des accusations gratuites dirigées contre ma famille. Heureusement que la bonne en question n’est pas une étrangère pour ma famille. Sa grande sœur travaille depuis plus de 10 ans dans la maison de mes beaux parents et c’est cette dernière qui l’a recommandée à ma femme. Elle va bientôt faire 5 ans avec nous. Les responsables de l’article n’ont pas pensé à la famille de cette bonne femme qui est mariée. La recherche du profit ne donne pas aux journalistes le droit de disloquer des familles.

Vous préparez la sortie de votre deuxième album solo, 7 ans après le premier, qu’est qui explique cette longue attente ?

Je suis devenu une des stars du rap sénégalais, vous oubliez peut-être que je suis ‘’El Presidente’’, donc je n’ai plus le droit de faire les choses à la légère. Il est vrai que je suis resté très longtemps sans sortir d’album mais je suis toujours au perchoir du mouvement hip-hop sénégalais. J’ai pris le temps de concevoir un album qui fera un tabac à sa sortie. Je l’ai appelé IKRA.

Pourquoi IKHRA ?

‘’IKHRA’’ veut dire apprendre, et je me suis rendu compte que chaque jours que Dieu fait nous apprenons quelque chose de nouveau.

Réalisé par BOUBACAR BADJI &

YOUSSOU B. H. SANE (stagiaire)

Le Pays au Quotidien

1 COMMENTAIRE

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

En continu

DANS LA MEME CATEGORIE
ACTUALITES

Football-Liga/Real : le jour où Casemiro a fait pleurer Carlo Ancelotti

XALIMA'EWS-Titulaire inamovible du Real de Madrid sous les ordres...