Faux ongles, fausses hanches, dépigmentation : Ces artifices de séduction payés au prix fort

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Belle à n’importe quel prix. Dépenser beaucoup d’argent pour optimiser son physique ou son apparence. Autant de moyens pour y parvenir : fausses hanches, faux ongles, dépigmentation, entre autres artifices de séduction. De plus en plus de beautés cosmétiques qui ne tiennent guère devant les caprices de la nature. Immersion dans les salons de beauté et dans les cosmétiques.

La beauté jusqu’au bout des doigts. Fausses hanches, fausses fesses, faux ongles, autant en apporte la conception que chacune a de la vénusté. Qu’elle soit cosmétique ou artificielle, appelons-le comme on veut, ce qui compte, pour elles, c’est optimiser leur physique. Les motivations varient mais la constante relève du glamour. Prendre entre les petites mailles de son filet, un gros poisson qu’il soit noir, gris ou blanc. Sauf que c’est de la pêche artificielle avec du matos médicalement interdit. Idem, sur le plan religieux. Au Sénégal, autour des ces pratiques pour sublimer son corps, se développe un grand business.

Envie d’élégance ? On ose la french manucure, pédicure ! On ose les coiffures. A vos cheveux « naturels », le paquet à 60 000 FCfa, voire 300 000 FCfa. A vos poches, rois de la galanterie. A vos salaires, jeunes dames ou filles qui veulent bien paraître dans les cérémonies ou le lieu du travail. Une ruelle qui donne sur l’avenue Blaise Diagne : une confusion de tables, de tentes et de boutiques. On entend de loin leurs éclats de rire à cet âge d’insouciance où les responsabilités sociales ne pèsent pas encore sur leurs épaules. Sous une tente, un trio de jeunes filles. Elles sont des amies depuis le lycée.

La féminité jusqu’au bout des ongles
Habitant la Médina, un quartier populaire périphérique du centre ville, elles sont venues refaire leurs poses notamment de cils et d’ongles. « Défar bamou bakh, athie bamou kawé », des termes usuels qu’elles reprennent. En cette période d’été, le gérant de la place, Abou Diop, déroule ses activités sans discontinuité. Tatouage, pédicure, manucure, pose cils. Un chiffre d’affaires qui peut aller jusqu’à 100 000 FCfa par jour. Présentement, les jeunes filles se refont pour envahir les plages. « En période de fête, je peux gagner en trois jours, 500 000 FCfa », avoue ce jeune venu de la Casamance pour gagner sa vie.

Avec une paire de ciseaux, il coupe une partie d’un faux cil. Ensuite, un recourbe-cil et tout est parfait. Un peu de colle et l’utilisation d’une pince fine. Ça y est. Il est posé vers l’extérieur de l’œil. Rêve réalisé : Sana affiche des yeux de biche comme les stars hollywoodiennes grâce à ses faux cils. 2 000 FCfa pour payer le service. Avant que son amie ne termine sa séance de pose ongle avec l’autre prestataire, elle se plonge dans la lecture d’un magazine pour découvrir la tendance été. Des yeux qui ressortent plus. Hyper timide, à chaque question, elle esquisse un sourire. Son amie plus audacieuse laisse entendre « Mme, fi kou gnawoul ya ngui dieul mesure » pour répondre à la question de savoir si c’est pour une disponibilité sexuelle qu’elles le font.

Une bassine contenant de l’eau tiède, un coupe-ongles, une lime en carton double face, un repousse-cuticules, une pierre ponce, des outils que l’on trouve presque dans tous les salons de beauté même les moins chics. Une petite quantité de sels de bain, de l’huile d’amande également. On lui demande d’y introduire les pieds. Sur une sorte de tabouret, quatre filles autour d’elle. Une, assise à même le sol, lui fait une pédicure. En même temps, une autre, avec du coton à la main, applique du dissolvant sur ces ongles pour retirer délicatement toutes les traces d’anciens vernis. Un repousse-cuticules pour repousser de ses doigts les pellicules sèches et envahissantes qui reprennent leurs droits quelques jours après coupure. D’où la nécessité, pour certaines femmes, de faire une manucure régulière. De belles mains qu’est-ce que c’est ? De longs ongles, un joli vernis évidemment. Donc, une pose-ongles s’impose. Pourtant, la cuticule des ongles protège les doigts et orteils des germes venant de l’extérieur.

Teint sombre, taille svelte, des épaules larges, des yeux de gazelle, Madeleine Ndiaye est assistante de direction. Elle profite de son week-end pour se faire belle dans un de ces salons de beauté, à quelques encablures du marché de Castors. Cette noirceur d’ébène vient tous les quinze jours pour effectuer une pose-ongles, adoucir ses pieds et ses mains qu’elle juge un peu rugueux. Lébou de Bargny, son teint ne fait que confirmer la beauté de la peau noire. Une raie au milieu ouvert, une coiffure d’été, elle retrouve sa féminité jusqu’au bout des ongles.
Selon elle, les poses-ongles mettent les mains en valeur. En image, qu’est-ce que cela donne ? Une secrétaire coquette, qui, avec ses longs doigts aux ongles bien posés, fait saliver son patron, ses partenaires d’ici ou d’Outre-mer. Par ailleurs, les faux ongles sont également des moyens pour cacher les problèmes d’ongles qui peuvent modifier sa forme et son apparence : l’ongle dédoublé, l’ongle rongé, l’ongle cassant et mou.

Corriger les ‘’incorrections’’ de la nature
Cap sur l’avenue Lamine Guèye, un mouvement de jeunes filles venues se procurer des habits en ce coin des bonnes affaires. Ici, les derniers arrivages épousent les réalités climatiques. Plus de robes courtes et légères, des débardeurs, des mini jupes, etc. Autre activité parallèle, la vente des culottes boxers galbantes ou gainantes, des sous-vêtements féminins pour corriger les « incorrections » de la nature. Des fesses ou hanches galbées bombées à moindre prix : à 1500 ou 2000 FCfa. Selon certaines filles rencontrées, les culotes à vil prix débordent.

Ce que dément ce vendeur qui prêche pour sa chapelle : « Nos culottes n’ont rien à envier aux autres. La différence est que certains, occupant des magasins à location très chère, vendent leurs articles en tenant compte de cette réalité. Alors que nous, nous ne payons que 250 FCfa par jour à la mairie », explique Dame, un « Saloum-Saloum ». Selon lui, même celles qui sont vendues dans les boutiques dédiées sont de marques chinoises. Ce qui n’est pas tout à fait faux. La Chine est l’usine du monde. Mais, elle en fait du bon, du moins bon et du mauvais. Sur cette même avenue, une boutique spécialisée en sous-vêtements féminins, dévoile ses prix. Deux jeunes montent la garde. Le sac doit être laissé à la porte. Deux autres filles suivent les clientes. A chaque taille, à chaque modèle son prix. Culotte dentelle Rembo pour avoir des formes arrondies, remonte hanches et fesses avec contrôle pour procurer un maintien ferme, autant de variétés pour avoir une forme à désirer. Des prix qui ne sont pas accessibles à n’importe qui.

Soins du corps pour un soin du cœur
A chacune, son lait éclaircissant. Avoir une peau claire est devenue un critère de beauté pour les femmes surtout d’âge mur. Rejet de sa peau, de son corps pour plaire à un autre qui quand le premier subit les caprices de la nature, n’aimerait point se frotter à lui. Pour dissimuler les effets non désirés, on se cache derrière le bio. C’est du Aléo vera, carotte, papaye ou tamarin, à chacune son parfum, à chacun ses effets à court ou à long terme. Deux billets de deux mille francs et un de mille francs contre une bouteille de « So White ». « Je ne me dépigmente pas, je m’éclaircis la peau », lance-t-elle tout sourire. La différence est qu’on use à petit feu sa peau. Marché Castors, un mouvement d’hommes et de femmes venus pour diverses raisons. A la main, un sachet où il est écrit « fière d’être femme ». Et si elles en étaient autant avec ce que la nature leur a offert.

Ndèye Bineta Fall, 19 ans, commence déjà à utiliser les produits éclaircissants. « C’est pour lutter contre certaines tâches noires qu’une amie m’a conseillée d’utiliser cette crème qui ne contient pas de l’hydroquinone », renseigne-t-elle. Selon Mame Mor, propriétaire d’une boutique de cosmétique, toute dépigmentation commence par l’éclaircissement de la peau. « La plupart de nos clientes, qui se dépigmentent, achetaient au début des produits pour se donner un teint lumineux. Au fur et à mesure, elles y ont pris goût et ont fini par passer à la vitesse supérieure, c’est-à-dire la dépigmentation », confie ce dernier. Il suffit qu’elles voient que le produit est fabriqué dans un grand pays qu’elles l’achètent sans hésiter.
Marame Coumba SECK

– lesoleil.sn

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