Fermeture des consulats du Sénégal : Entre réduction du train de vie de l’Etat et abandon de missions de proximité (Par Abdou SONKO).

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Si la mission des consuls est en premier lieu de s’occuper des préoccupations des Sénégalais de l’étranger, le poste comprend un travail diplomatique d’influence, avec tout un volet de missions liées au rayonnement économique du Sénégal.

En France, quatre consulats généraux sont ouverts dans les grandes villes comme Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux. Une agence consulaire est ouverte au Havre, alors que six consulats honoraires sont recensés dans les agglomérations de Lille, de Nancy, de Nantes, de Reims, de Rouen et de Strasbourg, ainsi que dans la principauté de Monaco. Rappelons que les consuls honoraires n’ont qu’une fonction honorifique, et par conséquent, ne peuvent pas satisfaire les nombreux besoins administratifs et sociaux des Sénégalais installés sur leur territoire de compétence.

La plupart des associations et organisations de la société civile font le constat d’une couverture consulaire pas suffisante pour offrir des missions de proximité à la communauté sénégalaise. De nombreux concitoyens, se retrouvent souvent contraints de se déplacer vers les consulats, sans être sûrs de trouver satisfaction immédiate sur place et donc obligés de revenir ou de prolonger leur séjour, engageant ainsi des dépenses personnelles supplémentaires. C’est le cas pour de nombreux étudiants installés dans la précarité administrative du fait de lenteurs dans le traitement des dossiers et du fait également de moyens limités pour se déplacer.

Les postes de consuls sont sur la liste des emplois pour lesquels la nomination est laissée à la discrétion du Président de la République. Ils sont ainsi ouverts à des non-diplomates de métier. Malheureusement, depuis quelques années, ils ont aussi pris une importance croissante dans le champ politique. Reprendre la main sur ces postes avait pour visée, pour le Président de la République, de recaser des amis ou compagnons du pouvoir, de nombreux soutiens de la première heure, ou même de la dernière, la transhumance étant passée par là.

En voulant satisfaire ses militants, le président Macky Sall a fini par surcharger les ambassades et les consulats d’un personnel parfois incompétent, parfois inutile. Certains n’ont même pas de bureau. Ce népotisme n’est justifié que par la volonté de satisfaire une clientèle politique pensant ainsi pouvoir s’assurer de réseaux porteurs d’un succès électoral. Malheureusement pour lui, cela n’a pas du tout été efficace puisque lors des dernières élections présidentielles de février 2019, sa coalition a perdu dans la plupart des localités de la Diaspora.

Ces recrutements ont été tout le temps critiqués puisqu’ils sont le plus souvent faits en violation de tous les critères de profil, mais aussi des règles élémentaires de respect des droits des salariés, du code du travail et des procédures des pays d’accueil entrainant parfois des situations conflictuelles. Ces recrutements sont aussi source de gabegie. Ils ont également entraîné une pléthore de personnel, source de cafouillage dans l’exécution des missions.

L’annonce de la fermeture du consulat du Sénégal à Bordeaux et de 14 bureaux économiques dans nos ambassades tombent comme un couperet pour les sénégalais qui y vivent. La dynamique tient à la réduction du train de vie de l’Etat, nous dit-on, avec des Chefs de bureaux économiques dans les ambassades, qui avaient rang de ministres conseillers, rétrogradés en Premier-conseiller. Les diplomates en fin de mission à l’étranger sont rappelés d’urgence à Dakar et les autres redéployés dans les autres postes. Les recrutés locaux, eux sont tout simplement licenciés. Il faut espérer que les licenciements s’opèrent dans le respect du code du travail du pays d’accueil, sinon ce sont encore nos représentations diplomatiques et consulaires qui seront traînées devant les tribunaux comme ce fut le cas à Lyon, à Paris, à New-York… avec à la clé de lourdes condamnations pécuniaires.

Face à cette situation, les Sénégalais de Bordeaux sont vent debout contre la décision du chef de l’Etat de fermer le consulat de leur juridiction, comme l’auraient certainement fait ceux de Marseille et de Lyon.

La réputation de notre pays, le Sénégal, qui faisait la fierté de tout Sénégalais est aujourd’hui ternie par des scandales économiques et financières à répétions, sur les contrats pétroliers et gaziers, les ressources minières  en général, impliquant une classe dirigeante aux comportements douteux, mais surtout une minorité et une un clan familial, présidentiel. La diplomatie sénégalaise devrait ainsi être un outil de promotion économique, pour attirer les investissements directs étrangers (IDE). Dans ce sens, il faudra quoiqu’il en soit, prendre en charge des préoccupations des Sénégalais vivant à l’étranger, les organiser et leur permettre de participer au développement du pays. Fermer un consulat et quelques bureaux économiques ne suffira certainement pas.

Un audit complet du personnel du Ministère en charge des Affaires étrangères sera forcement nécessaire dans le but de mener une révision efficace de la carte diplomatique et consulaire.

Une description objective de tous les postes utiles et nécessaires permettra de mettre en place dans tous les Ambassade et Consulats un organigramme type pour les représentations diplomatiques. L’engagement ou l’affectation d’un personnel strict nécessaire aboutira à une amélioration des conditions de travail et de vie des diplomates pour des missions de proximité au profit des administrés.

Rationaliser des dépenses publiques, c’est certainement ce que réclame tout un peuple, majorité et opposition, associations et mouvements de la société civile, mais de grâce, les coupes budgétaires significatives sont effectivement dans les Ambassades et Consulats, mais bien plus encore au sein des ministères (32 ministres, des ministres conseillers que l’on ne compte plus, démis puis recasés), au sein des Agences logées à la Présidence, dans les administrations et sociétés publiques qui pratiquent le recrutement politique et dont les dirigeants ont été épinglés par les corps de contrôle (OFNAC, IGE…), mais sans aucune suite, ni administrative ni judiciaire.

Abdou SONKO

Sénégalais de Lyon, Membre de PASTEF

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