Franc CFA : Colonies Françaises d’Afrique ou Coopération financière en Afrique ? (par Mohamed Dia, Consultant bancaire)

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Il a été créé en 1945 sur décret par le Général De Gaule. A l’époque, on l’appelait le franc des Colonies françaises d’Afrique ou Franc des Colonies Françaises du Pacifique. Par la suite, il est devenu le franc de la communauté financière africaine. Au moment de l’indépendance certains pays ont quitté la zone franc CFA, d’autres plus tard et certains y sont toujours. Il y a deux zones, la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC) et l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).Les pays membre sont le Benin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo pour l’Afrique de l’Ouest ; pour l’Afrique centrale, il y a le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Tchad. La Guinée-Bissau deviendra membre de la zone franc en 1997. Le but principal de la création de cette zone est de stabiliser l’environnement macroéconomique. Les billets sont toujours imprimés par la Banque de France et le taux de change est fixé sur l’euro Le FCFA, représente-t-il un frein au développement de ces pays ou le mal est-il plus profond qu’une question de monnaie ?

Comprendre le Franc CFA

Pour tous les pays membre, il faut impérativement détenir un compte courant auprès du trésor public français. Chaque banque centrale verse au moins 50 % de leurs réserves de change au Trésor français. En contrepartie, la France aura le devoir d’assurer la garantie internationale de la monnaie. Les comptes ne doivent pas être déficitaires, mais si la banque centrale a besoin de devises, le Trésor français peut lui prêter en cas d’urgence. Cela permet aux pays de la zone franc d’être à l’abri des ruptures en devises, ce qui pourrait avoir un effet négatif sur les importations par manque de devises.

Le marché de change de Paris est responsable de la conversion en devises étrangères. Cela est facilité à cause de la parité fixe entre le Franc CFA et l’Euro. Tous les pays de la zone sont en mesure d’avoir autant de devises étrangères désirées. Certains pays hors CFA n’ont pas cette garantie à cause des problèmes de taux de convertibilité, manque de garantie et même, dans certains cas parce que la monnaie n’est pas acceptée.

Pour les pays de la zone Franc CFA, il faut respecter un nombre de règles pour éviter une éventuelle inflation. Cela est la raison pour laquelle il y a un montant minimum à placer sous réserve. En quelque sorte, le Trésor français apprend ces pays la discipline monétaire.

Vu que la France garantie notre monnaie, elle prend part à la définition des règles. Elle joue le rôle de la police aussi en s’assurant que les règles mises en place sont respectées et elle dispose aussi d’un droit de veto sur certaines décisions. Il y a aussi des intérêts versés chaque année aux pays membre.

Comparaison n’est pas raison

Les dix pays les plus riches en Afrique sont Le Nigeria, l’Afrique du Sud, l’Egypte, l’Algérie, le Soudan, le Maroc, l’Angola, l’Ethiopie, le Kenya et la Tanzanie. Tous ces pays ont une chose en commune, ils ont tous leur propre monnaie.

Les pays les plus riches en Afrique de l’Ouest par ordre sont :

Nigeria : En 2018, le PIB du Nigeria était estime à près de 425 milliards de dollars. Avec plus de 190 millions d’habitants, c’est le pays le plus peuple en Afrique. Le Nigeria utilisait la monnaie anglaise, mais elle a introduit sa propre monnaie le 1er janvier 1973, le naira.

Ghana : Avec un PIB de 49 milliards de dollars, le Ghana occupe la deuxième place même si elle a eu la plus forte croissance de la région avec un taux de 8,3 %. Le cédi est la devise du Ghana depuis 1965.

Côte d’Ivoire: Classée troisième en Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire a un PIB estimé à 45 milliards de dollars Le pays utilise le Franc CFA comme monnaie et son président a indiqué que le Franc CFA est « sain et entre de bonnes mains »

Sénégal : Avec un PIB de 17 milliards de dollars, le Sénégal occupe la quatrième place en Afrique de l’Ouest et a été classé dans le top 20 des pays les plus riches en Afrique. Son ministre des Finances disait que : « notre appartenance à la zone Franc permet aujourd’hui, entre autres, ce n’est pas la seule raison, aux pays de l’Uemoa d’avoir une croissance vigoureuse. Nous avons aujourd’hui un cadre macroéconomique très assaini au niveau de la zone Uemoa et c’est l’existence d’une monnaie stable qui favorise cette situation.»

Puis vient le Mali avec 16 milliards de dollars, le Burkina Faso avec 14 milliards de dollars, le Benin avec 10 milliards de dollars, la Guinée avec 9 milliards de dollars, le Niger avec 8 milliards de dollars et enfin le Togo avec 5 milliards de dollars.

Rester ou Sortir ?

En février 2018, les dirigeants des pays membre de la CEDEAO ont réaffirmé leur volonté de créer une monnaie d’ici 2020, dénommé, « Eco ». Le président du Ghana dira à cet effet que « l’introduction d’une monnaie unique en Afrique de l’Ouest va aider à supprimer les barrières commerciales et monétaires, réduire les coûts de transaction, dynamiser l’activité économique et accroître le niveau de vie des habitants de la région ». Wait and See comme le disent les anglophones.

D’une part, chacun des pays figurant sur la liste des pays les plus riches en Afrique a sa propre monnaie, mais est-ce que cela rend ces pays plus souverains que les pays de la zone euro qui ont une monnaie commune ? Est-ce que la monnaie a été créée pour faire état de souveraineté ou a-t-elle été créée pour faciliter les échanges entre pays ? Durant la conférence de Bretton Woods de juillet 1944, le nouveau système monétaire international vu le jour avec l’or comme monnaie de référence, « Gold Exchange Standard ». Il y a eu certains pays qui étaient sortis du Franc CFA comme la Guinée, la Mauritanie et le Madagascar et qui ne sont pas pour autant plus développer que les pays de la zone Franc CFA. Le Mali est les deux guinées, ne sont-ils pas revenus dans la zone Franc CFA après avoir eu leur propre monnaie nationale ?

D’autre part, tous les pays qui figurent parmi les plus riches en Afrique ont leur propre monnaie. Une monnaie nationale permet d’avoir un meilleur pouvoir d’achat pour tous, elle facilitera les exportations aussi et cela réduirait le déficit commercial si ces pays commencent à offrir des biens et services au monde. Avec une monnaie nationale, ces pays retrouveront la maîtrise de leur propre monnaie et le financement des PME sera plus facile pour redynamiser l’économie nationale. En quelque sorte, une monnaie nationale peut garantir une forte croissance économique et plus d’emplois crées.

Connaissons nos priorités

En 2018, les pays de la Zone Franc font partie des pays les plus pauvres dans le monde et nous devons sortir de cette pauvreté. Sortir du Franc CFA ne garantit pas sortir de la pauvreté. Certes, il est important d’avoir sa monnaie nationale pour diverses raisons énumérées ci-dessus, mais nous devons d’abord avoir une fondation solide avant de nous lancer dans cette aventure assez risquée. Si on prend le cas du Sénégal, nous pouvons dire avec assurance qu’en 2012 il aurait été possible de créer notre propre monnaie mais en ce moment avec l’endettement excessif, l’hypertension budgétaire et le taux de pauvreté, nous devons plutôt penser à développer le secteur agricole, créer des industries, créer des emplois, éradiquer la pauvreté pour que les Sénégalais vivent dignement puis nous pourrons parler de créer notre propre monnaie. Si nous essayons cela et que nous sentons de meilleures conditions de vie, la, nous pourrons parler de créer notre propre monnaie, et cela, à défaut de la création de la monnaie unique envisagée par les états membres de la CEDEAO. Robin S. Sharma disait : « Ne laissez jamais ce qui compte le moins l’emporter sur ce qui compte le plus. »

Mohamed Dia, Consultant bancaire

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5 Commentaires

  1. «  » »Sortir du Franc CFA ne garantit pas sortir de la pauvreté » » ». En réalité, le fait de sortir de la zone CFA va d’une manière certaine nous plonger et nous plomber dans la pauvreté. Pire, nous allons être submergées de fausses coupures de devises étrangères (yen, dollars, euro) car cette monnaie nationale ne nous permettra pas d’échanger des liens commerciaux avec l’Etranger. TOUT SE PAIE EN DOLLAR OU EN EURO pour l’essentiel. TOUT EST IMPORTE, DES PORTABLES AUX VOITURES AUX BIENS DE CONSOMMATION DONT LES SENEGALAIS SONT HABITUES ! Sur un autre volet, LA DETTE COLOSSALE QUE NOUS AVONS VIS A VIS DU MARCHE INTERNATIONAL ! IRREMEDIABLEMENT CETTE DETTE SERA PAYEE, AVEC QUOI ???? DES DEVISES QUI SERONT ACHETEES AVEC NOS RESSOURCES NATURELLES QUI SERONT TOUTES, JE DIS BIEN TOUTES AUX MAINS DES ETRANGERS. Comment pouvons nous espèrer une quelconque prospérité en sortant de ce qui nous unit dans la sous région, le CFA, COMMUNAUTE FINANCIERE DE L AFRIQUE ET NON « COOPERATIVE ». INFLATION, PRECARITE DES PRODUITS IMPOTES (car ne disposant pas de devises) ENVAHISSEMENT DE NOTRE ESPACE PAR L ARGENT SALE DE LA MAJEURE PARTIE DE LA DISAPORA (diay drogue, prostitution, rek laniou fa nekke) PAR DE FAUSSES COUPURES D EURO ET DE DOLLARS (car il y aura une forte demande de ce côté, du fait que personne n’en voudra de cette monnaie de singe nouvellement créee) ! D OU CHAOS ECONOMIQUE, CHAOS SOCIAL, ET IMMIXTION IMMINENT DANS CES CONDITIONS DES JIHADISTES ISLAMISTES SALAFISTES DU MALI ! GUERRES CIVILES CERTAINES §§§§§CE OUSMANE SONKO EST DANGEREUEX POUR LA STABILITE DE NOTRE PAYS !!!! SA CANDIDATURE DOIT ETRE INVALIDEE, IL NE SERA PAS BON POUR CE PAYS.

  2. Pourquoi les pays de la zone CFA doivent avoir leur indépendance monétaire ?

    Je reprends ici les idées pertinentes de Bakayoko jr pour mieux comprendre pourquoi nos pays doivent avoir leur indépendance monétaire. Aux jeunes de s’en inspirer pour défendre l’idée !
    Une dizaine de conférences anti Franc CFA ont été organisées à l’initiative de Kémi Séba, activiste connu pour son bagout tranchant et soutenu dans ce combat à la teinte manichéenne, par des personnalités africaines de premier plan… Jamais sur le continent, la question du franc CFA n’aura autant déchaîné les passions et provoqué une levée de bouclier pour dénoncer cette « colonisation monétaire » qui plombe les blocs régionaux parmi les plus intégrés d’Afrique. Mais ce haro général sur le franc CFA, introduit l’épineux débat sur l’indépendance monétaire des 15 pays où cette monnaie est encore en vigueur.
    Auparavant, cantonnée dans les cercles intellectuels africains sans faire de vagues, la question du franc CFA semble faire des remous qui secouent tant la haute sphère que le commun des Africains. Mais au-delà de cette levée générale de bouclier, le front anti franc CFA pose la question de l’indépendance monétaire des pays africains.
    39 monnaies nationales et 15 pays en zone CFA
    Quinze pays composent encore la zone CFA administrée via des banques centrales régionales communes directement reliées à la Banque de France. Il s’agit de 8 pays ouest-africains réunis autour la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Il faut y ajouter les 6 pays d’Afrique centrale regroupés au sein de Banque des Etats d’Afrique centrale (BEAC) et de la Banque centrale des Comores.
    A la différence des pays de la zone CFA où les banques centrales fonctionnent sous tutelle française, plusieurs pays africains battent déjà leur propre monnaie directement gérée et régulée par leur propre banque centrale. Le rand en Afrique du Sud, le naira au Nigéria, le cedi au Ghana, l’Ougiya en Mauritanie, le Lilangeni au Swaziland, le dirham au Maroc ou encore les dinars en Egypte, en Tunisie et en Algérie… au total près d’une quarantaine de pays sur les 54 pays du continent ont leur propre monnaie. Un affranchissement monétaire qui présente plusieurs avantages.
    « Un Etat moderne n’existe pas sans sa banque centrale. C’est un attribut de souveraineté existentiel comme le territoire, la population, l’armée et le trésor public. Pour chaque Etat, la banque centrale est l’institution publique chargée de la politique monétaire qui consiste à fournir de manière adéquate les flux d’argent et de crédit dans l’économie de la nation. C’est une institution qui est donc au cœur même de l’existence d’un Etat, de sa souveraineté, de sa performance, de sa puissance et donc des conditions de vie ou du bien-être de sa population », plaide l’économiste camerounais Babissakana, joint à Yaoundé par La Tribune Afrique.
    Plusieurs privilèges restent donc attachés à l’administration par un Etat de sa propre banque centrale et chemin faisant de sa propre monnaie. Pour autant, les pays qui battent leur propre monnaie, sont-ils économiquement et monétairement mieux lotis que les pays évoluant en zone CFA ? Si la plongée abyssale de la monnaie nigériane peut empêcher de donner une réponse tranchée et catégorique, Babyssakana répond très vite par l’affirmative. « C’est évident que les Etats africains indépendants et disposant de leur banque centrale gérée exclusivement dans leur intérêt ont une forte avance systémique, méthodologique, et surtout psychologique dans l’appropriation de l’usage des technologies monétaires ».
    Vers la création d’une monnaie africaine commune ?
    Dans le débat sur le franc CFA, il est difficile de trouver un intellectuel africain ou même occidental qui entreprendrait de défendre cette monnaie au risque d’être traité de « suppôt de l’Occident » pour le premier et de « néo-colon » pour le second. Sans se positionner sur l’une ou l’autre de ces positions délicates, Macky Sall, le président sénégalais a plaidé pour un débat de fond dépassionné et dépolitisé sur la question. Dans une interview accordée fin décembre à nos confrères du Point Afrique, le chef de l’Etat sénégalais a jeté un gros pavé dans la mare.
    Il a qualifié de « stable » le franc CFA, allant jusqu’à dire que « […] le franc Cfa est une bonne monnaie à garder ». L’économiste camerounais cité plus haut ne s’est pas fait prier pour répliquer. « La stabilité des prix que vous évoquez n’a rien à voir avec la souveraineté monétaire. C’est la souveraineté qui peut permettre de construire la stabilité et non l’inverse. La stabilité monétaire n’est qu’un résultat intermédiaire qui ne sert strictement à rien en l’absence de revenu ou de pouvoir d’achat détenu ou acquis par les citoyens. »
    L’espoir se trouve peut-être dans le projet de l’Union Africaine (UA) de mettre en place, d’ici 2030, les structures et moyens nécessaires pour la création de la Banque Centrale Africaine (BCA) devant conduire à la mise en place d’une monnaie commune à toute l’Afrique. Pour parvenir à cet objectif, les 39 pays africains qui ont déjà leur indépendance monétaire, devraient sans doute soutenir les 15 pays encore sous tutelle monétaire française. Le combat enclenché par le front anti-CFA, pourrait être livré à un niveau supérieur par les Etats. Autre combat, autres acteurs !

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