«Hannah ARENDT (1906-1975), théoricienne de la Politique ou le refus radical de ne pas banaliser le Mal absolu», par M. Amadou Bal BA

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«Hannah ARENDT (1906-1975), théoricienne de la Politique ou le refus radical de ne pas banaliser le Mal absolu», par M. Amadou Bal BA – http://baamadou.over-blog.fr/
«Penseuse des chaos du monde et militante antinazie de la première heure, elle fut à la fois une combattante des droits de l’homme, une théoricienne des périls qui menacent la démocratie, une penseuse de l’antitotalitarisme et une femme engagée dans les principaux combats du siècle» écrit Laure ADLER. Si Hannah ARENDT est l’écrivain le plus connu et le plus commenté en langue française, cependant une bonne partie de sa contribution reste mal connue ou faussement interprétée, notamment les rapports entre la morale, la religion et la politique. «Dans la pensée politique, Hannah ARENDT occupe une place à part. Sa vaste érudition, sa liberté vis-à-vis des idéologies à la mode, la hauteur de ses vues lui permettent une réflexion sans myopie, sans partialité et sans « partisannerie », écrit Benoît LEMAIRE. Célèbre pour ses travaux sur l’activité politique, le totalitarisme et la modernité, refusant de se considérer comme philosophe mais comme une théoricienne de la politique, Hannah ARENDT a mené une réflexion originale et essentielle, qui a fait surgir la notion de crise de la culture allant de pair avec la perte du sens de la tradition. En effet, ayant vu la montée du Nazisme, c’est Hannah ARENDT qui a le mieux conceptualisé le Mal absolu, le discernement du Juste, du Bon ou du Mauvais. Hannah ARENDT ayant une haute idée de la dignité humaine, propose une réflexion générale sur le politique, à travers ses concepts fondamentaux, en faisant prévaloir une éthique en politique, à savoir la condamnation du totalitarisme, et en opposant radicalement les concepts de Bien et du Mal. ARENDT étudie le rôle du mensonge et des techniques d’intoxication, et la manière de les combattre. Elle développe sa réflexion sur la notion de violence, sur les relations entre une structure étatique et les formes de contestation qui peuvent s’y opposer : la désobéissance civile, dont elle montre le développement aux Etats-Unis, et son importance à côté des voies classiques de recours et de contestation ; la violence des révoltes, dans les pays gouvernés par un régime totalitaire où se développe la bureaucratie.

Hannah ARENDT reste d’une grande actualité dans notre monde complexe et inquiétant. En effet, il faudrait lire ou relire ARENDT pour croire en nous-mêmes, en notre singularité, en notre pouvoir de citoyen, pour sortir de notre mutisme et de notre résignation, de notre solitude intellectuelle. La liberté ne consiste pas dans le fait de choisir notre travail, nos amours, voire notre manière de consommer. Le confort et le repli de notre vie personnelle ne sauraient suffire à nos vies. Nous rendre dans l’espace public, y prendre la parole sont les seuls moyens de retrouver les conditions de notre humanité, cette attitude est la manifestation la plus authentique de notre liberté. Sa pensée va donc à contre courant : non seulement les gens n’ont pas envie de faire de la politique, à la fois parce qu’ils ne s’en croient pas capables mais aussi parce qu’ils sont persuadés que cela ne sert à rien, et ils ne pensent pas du tout que leur liberté soit en jeu à ce niveau.

Inspirée d’un immense amour de la liberté et constituant un défi à l’esprit de système, la pensée de Hannah ARENDT est hautement subversive et anticonformiste. C’est l’amour de la liberté qui impulse l’activité de penser et l’effort de compréhension ; c’est lui qui fait agir les hommes et qui donne sens à la politique. La pensée libre n’est donc pas celle qui fuit le monde, mais bien celle qui accepte de se mesurer à lui. À telle enseigne que la perte du monde commun signe la perte de la liberté elle-même. La liberté n’a de sens, chez Hannah ARENDT, que mise à l’épreuve du politique et de tout ce qui constitue le vivre-ensemble des hommes. C’est ainsi que Hannah ARENDT, à travers le procès, en 1961, d’Adolf EICHMANN, un criminel nazi, s’est révoltée contre la banalisation du Mal. FN représentativité, on a oublié les principes républicains d’égalité et de fraternité. FILLON reconnaît sa faute, une faute morale, l’acte qu’il a commis est légal, mais il sollicite l’absolution de l’opprobre commis par sa faute, en convoquant le suffrage universel, et demande aux électeurs de se boucher le nez avant d’aller voter pour lui. Bien des électeurs dans ces élections compliquées, sont tentées de s’abstenir, donnant ainsi la chance d’une victoire du F.N. Or, Hannah ARDENT nous invite à nous pencher, sérieusement, sur le «Mal moral». En effet, dans son ouvrage «La vie de l’esprit» ARENDT dit que «la faculté de juger ce qui est bien de ce qui est mal (pourrait avoir) un rapport avec notre faculté de penser». C’est là une de ses pensée profonde, ce n’est pas le système qui est en cause, c’est la responsabilité individuelle de chacun d’entre nous de nous révolter contre le Mal. Chaque individu réfléchissant doit rester en accord avec lui-même. Par conséquent, Hannah ARENDT situe sa philosophie dans la recherche de la quête du sens qui est la destination la plus authentique du penser, elle avait le souci de l’être humain, comme un être pensant qui doit collaborer avec le Mal, et promouvoir le Bien souverain. Par conséquent, l’isolement et l’autisme par rapport à la montée du totalitarisme, Mal absolu, «l’oubli de la pensée», la perte de tout rapport critique au monde, c’est finalement une complicité, une connivence, avec le Mal. Lors de ce procès d’EICHMANN, certains ont reproché à Hannah ARENDT d’être antisémite. Le 24 juillet 1963, voici ce qu’elle lui répond après qu’il lui a reproché de ne pas aimer le peuple juif : «Vous avez raison, je ne suis animée d’aucun amour de ce genre et cela pour deux raisons : je n’ai jamais, dans ma vie, aimé aucun peuple, aucune collectivité, ni le peuple allemand, ni le peuple français, ni le peuple américain, ni la classe ouvrière, ni rien de tout cela. J’aime uniquement mes amis et la seule espèce d’amour que je connaisse et en laquelle je crois est l’amour des personnes. En second lieu, cet “ amour des juifs ” me paraîtrait, comme je suis juive moi-même, plutôt suspect» dit ARENDT.

Hannah ARENDT, née Johanna ARENDT, à Hanovre le 14 octobre 1906, philosophe allemande naturalisée américaine, a fait ses études en Allemagne et a suivi ses cours aux universités de Marbourg et de Fribourg, puis a obtenu un doctorat en philosophie de l’université de Heidelberg. Issue d’une famille juive, non pratiquante, fidèlement attachée à la social-démocratie ; sa mère, enthousiasmée par la révolution spartakiste est une admiratrice de Rosa LUXEMBOURG à qui Hannah empruntera la conception politique des « conseils ». Son père meurt jeune. À 15 ans, Hannah ARENDT avait lu Karl JASPERS, à 16 ans tout Söeren KIERKEGAARD.

En 1924, ARENDT entre à l’Université de Marbourg où elle reçoit l’enseignement de Martin HEIDEGGER (1899-1976), avec qui elle noue une courte liaison, ainsi qu’une vaste correspondance qui durera jusqu’à la mort de celui-ci. Jeune fille tourmentée et suicidaire, quand elle rencontre HEIDGGER, elle comprend qu’elle peut aimer et penser. «Pour elle la pensée va devenir une activité érotique et l’amour une activité intellectuelle» écrit Laure ADLER. Après un semestre chez Edmund HUSSERL (1859-1938), à Fribourg, elle s’inscrit à l’Université de Heidelberg. Martin HEIDDEGER ayant refusé de diriger sa thèse, il l’a, en effet, envoyé à Karl JASPERS (1883-1969), un humaniste allemand, avec qui elle se lie d’une amitié sans faille, et qui restera son vrai maître jusqu’à sa mort, en 1969. La thèse d’Hannah ARENDT, «Le concept d’amour chez Saint Augustin», est publiée en 1929. Hannah ARENDT commence à s’intéresser à l’histoire et à la politique, prend conscience de sa condition juive, de l’antisémitisme et de la montée du nazisme.

ARENDT entre en politique à partir de l’incendie du Reichstag, le 27 février 1933. Elle comprend qu’elle ne peut plus se contenter d’être spectatrice. Au mois de mai, Martin HEIDDEGER accepte les fonctions de recteur de l’université de Fribourg, après que 13 de ses collègues juifs en ont été exclus. HEIDDGER démissionnera en février 1934 après la nuit des Longs Couteaux, mais il ne désapprouve le nazisme qu’en privé. Emprisonnée une semaine, elle fuit et se réfugie à Paris, où elle apporte son aide à de jeunes Juifs qui veulent émigrer en Palestine. Elle y rencontre des réfugiés allemands dont Bertolt BRECHT (1898-1956) et connaît Raymond ARON (1905-1983). Elle fréquente le séminaire de KOJEVE consacré à HEGEL, côtoie Jean-Paul SARTRE et Simone de BEAUVOIR sans se lier avec eux. Hannah ARENDT éduque des adolescents juifs et facilite leur exil vers la Palestine. Au printemps 1936, à trente ans, elle fait connaissance de Heinrich BLUCHER (1899-1970), un philosophe allemand et un communiste ayant participé à la révolution de 1918 en Allemagne et au mouvement spartakiste. BLUCHER a, lui aussi, fui Berlin. Il est éperdument amoureux, elle l’épousera en 1940 après avoir divorcé de Gunter ANDERS. Leur couple, leur stabilité au-delà des aléas de la vie sera un immense bienfait pour Hannah ARENDT qui fut toujours terrorisée par la peur de l’abandon. À partir de 1940, le gouvernement français édicte les lois anti-juives. Internée à Gurs, ARENDT parvient à s’échapper et obtient, grâce à Théodore W ADORNO (1903-1969) un philosophe, sociologue et musicologue allemand, un visa en 1941 pour les États-Unis pour y enseigner notamment aux universités de Californie, de Chicago, de Columbia et de Princeton. À 38 ans, elle apprend l’anglais ; elle écrira toute son œuvre dans cette langue mais pense en allemand ; des amis reliront et corrigeront ses textes. Apatride, Hannah ARENDT se sent alors déracinée, et voit le monde comme une scène de luttes où elle n’a pas sa place. ARENDT affirmera qu’il n’y a pas de droits de l’homme, mais seulement des droits du citoyen. L’apatride est interné ou exterminé.

ARENDT se fait naturaliser américaine, le 7 août 1952, et à partir de cette époque, elle publie son ouvrage majeur, «les Origines du totalitarisme», dont les trois volumes paraîtront en français sous les titres «le Système totalitaire» (1972), «Sur l’antisémitisme» (1973) et «l’Impérialisme» (1982). Hannah ARENDT, également auteure de «Condition de l’homme moderne» (1958) et de la Crise de la culture (1961), Hannah Arendt assiste à Jérusalem au procès du nazi Adolf EICHMANN et publie ensuite les articles qu’elle consacre à l’événement (Eichmann à Jérusalem, 1963). Chargée de cours dans les plus grandes universités américaines, elle obtient en 1963 la chaire de science politique à Chicago, puis est nommée en 1967 à la New School for Social Research de New York. En 1968, elle est nommée professeur de philosophie politique à la New School for Social Research de New York où elle retrouve Hans Jonas.

Peu de temps après avoir reçu le prix Sonning délivré par le gouvernement danois, Hannah ARENDT meurt, le 4 décembre 1975 à la suite d’une attaque cardiaque. Son dernier livre, publié à titre posthume en 1978, «la Vie de l’esprit», réunit les textes de conférences sur les thèmes de «la Pensée» et de «la Volonté».

Hannah ARENDT propose une réflexion sur la nouveauté radicale de notre époque, réflexion qui associe le totalitarisme au renoncement à la politique. Tant que les hommes cesseront de penser, et surtout de prendre la parole dans l’espace public, nous seront pas à l’abri de la tyrannie et du totalitarisme. Pour son amour de la liberté et du monde, la contribution de Hannah ARENDT est une sérieuse mise en garde : la démocratie n’est jamais une conquête définitive ; il faut rester constamment vigilant.

Par conséquent, Hannah ARENDT milite pour la réhabilitation de l’action politique. La morale c’est l’accord avec soi-même qui se prolonge et s’approfondit dans celle de l’accord avec autrui ; il faut savoir mener une vie authentique de l’esprit. Ces valeurs morales, condition la plus authentique de l’esprit, supposent que l’on pense fondamentalement en communauté.
I – Comment le totalitarisme reste toujours possible ?
Dans son ouvrage «L’impérialisme» Hannah ARENDT pense que la colonisation, ce crime contre l’humanité, annonçait déjà le totalitarisme. En effet, l’impérialisme fit son entrée sur la scène mondiale en Afrique. Voici venu le temps de la race comme fondement du corps politique, de la bureaucratie comme principe de domination. Aucune considération éthique ne doit entraver la domination blanche. L’expansionnisme continental, l’éveil des minorités, les mouvements de réfugiés consécutifs à la Première Guerre mondiale achèvent de saper l’État-nation. Mépris de la loi, éclatement des partis : l’Europe travaille avec acharnement à l’avènement du système totalitaire.
ARENDT pense avant tout le totalitarisme comme un fait radicalement nouveau, une rupture à propos de laquelle elle écrira que  » le fil de la tradition est rompu « . Son originalité apparaît surtout dans la manière incisive avec laquelle elle montre le renversement des activités de l’homme et des valeurs dans la vie politique actuelle. Les pages les plus importantes de son oeuvre sont celles où elle traite du totalitarisme, phénomène qui résulte à ses yeux de la substitution de l’idéologie à la pensée politique. Dans son ouvrage sur les «origines du totalitarisme» Hannah ARENDT y procède à une histoire politique et sociale des juifs depuis le XVIIIème siècle. ARENDT distingue l’antisémitisme social de l’antisémitisme politique. L’antisémitisme politique vient de ce que certains privilèges ayant été accordés aux juifs, ceux-ci ont constitué un groupe à part, solidaire des États. Dès lors, tout conflit avec l’État devient antisémite. L’antisémitisme social, en revanche, est dû à l’égalité croissante des juifs avec les autres.
Hannah ARENDT y développe le thème de l’impérialisme qui se manifeste de deux façons. D’une part, ARENDT raconte l’histoire de la désintégration de l’État-Nation et montre ainsi les conditions nécessaires à l’émergence des mouvements et gouvernements totalitaires.
L’impérialisme colonial est la recherche de l’expansion pour l’expansion, pour des motifs non pas politiques mais économiques. D’autre part, ARENDT analyse aussi le phénomène des minorités et l’apparition des apatrides qui, dans le système des États-Nations, ne peuvent être promis qu’à l’assimilation ou la liquidation. Ils ne peuvent obtenir leur salut qu’en transgressant les lois ou en accédant au « génie ».
Hannah ARENDT développe surtout le thème du totalitarisme qui est un phénomène historique sans précédent qu’on ne peut penser avec les anciennes catégories que sont la tyrannie, analysée par Platon, le despotisme, analysé par Montesquieu ou la dictature. Le totalitarisme se caractérise d’abord par le phénomène des masses. Les masses se définissent par trois variables :
La grandeur numérique.
Un ensemble de gens sans éducation politique, hors des partis et des syndicats. Les masses sont créées par les crises économiques et l’effondrement des classes moyennes qui ne trouvent pas dans les projets politiques des parlementaires des projets correspondants à leur situation. La société est atomisée.
Une solidarité négative de foules désemparées, d’hommes isolés à qui le chef totalitaire donne un langage et un semblant de dignité.
Hannah ARENDT définit la tyrannie dans le chapitre «Idéologie et terreur» : c’est «l’arbitraire du pouvoir, non limité par des lois, son exercice, au profit du gouvernant, et hostile aux intérêts des gouvernés d’une part, et d’autre part la peur, pour principe d’action – peur du peuple ressentie par le gouvernant, peur du gouvernant éprouvée par le peuple – telles ont été, tout au long de notre tradition, les marques distinctives de la tyrannie». Elle montre qu’une certaine forme de loi au contraire constitue l’essence même du totalitarisme. Le totalitarisme «prétend obéir rigoureusement et sans équivoque à ces lois de la Nature et de l’Histoire dont toutes les lois positives ont toujours été censées sortir». La loi de l’Histoire est une déformation de la pensée marxiste de même que la loi de la Nature était une mauvaise interprétation des idées de Darwin. Elle consiste à éliminer tous ceux qui pouvaient par leur seule existence freiner l’avènement de la société communiste. Toutes deux s’appliquent d’une manière systématique et aveugle, et ne souffrent ni discussion ni exception. «La légitimité totalitaire, dans son défi à la légalité et dans sa prétention à instaurer le règne direct de la justice sur la terre, accomplit la loi de l’Histoire ou de la Nature sans la traduire en normes de bien et de mal pour la conduite individuelle» écrit ARENDT. Autrement dit le totalitarisme pulvérise nos catégories politiques et nos critères de jugement moral. Les dirigeants ne prétendent pas être justes mais exécuter des lois historiques ou naturelles. La terreur sacrifie les parties au profit du tout, on élimine l’individu au profit de l’espèce. Culpabilité et innocence deviennent des notions dépourvues de sens. «La terreur totale, l’essence du régime totalitaire, n’existe ni pour les hommes ni contre eux. Elle est censée fournir aux forces de la Nature ou de l’Histoire un incomparable moyen d’accélérer leur mouvement » dit ARENDT.
Dans son ouvrage «Considérations morales», Hannah ARENDT s’interroge : est-ce que notre aptitude à juger, à distinguer le bien du mal, le beau du laid, est dépendante de notre faculté de penser ? Tant d’années après le procès Eichmann, Hannah Arendt revient dans ce bref essai, écrit en 1970, à la question du mal. Eichmann n’était ni monstrueux ni démoniaque, et la seule caractéristique décelable dans son passé comme dans son comportement durant le procès et l’interrogatoire était un fait négatif : ce n’était pas de la stupidité mais une extraordinaire superficialité. Une curieuse et authentique inaptitude à penser. La question que Hannah Arendt pose est : l’activité de penser en elle-même, l’habitude de tout examiner et de réfléchir à tout ce qui arrive, sans égard au contenu spécifique, et sans souci des conséquences, cette activité peut-elle être de nature telle qu’elle conditionne les hommes à ne pas faire le mal ? Est-ce que le désastreux manque de ce que nous nommons conscience n’est pas finalement qu’une inaptitude à penser ?
FN est un parti légal, mais les thèmes qu’il invoque sont manifestement contraires aux lois de la République et personne pourtant ne s’en offusque. Il a réussi sa «dédiabolisation ». Le discours de Nantes du FN, le concept de patriotisme. Le refus de se présenter devant les juges.
FH et VALLS a liquidé le PS ambition et remords, la gauche a renoncé à ses fondamentaux hégémonie culturelle – Antonio GRAMSCI clair obscur.
Presse, non pas d’enquête et d’investigation, un service public de renoncemnt, une logique commerciale de l’audimat (bfmvt) obséquieuse La télévision entretient en partie ce désintérêt en privilégiant les émissions de divertissement aux
émissions sérieuses où les hommes politiques auraient vraiment le temps de développer leurs analyses
et leurs propositions. Celles ci n’ayant pas assez d’audimat, disparaissent peu à peu et les hommes
politiques se voient obligés d’accepter, s’ils veulent se faire connaître, les émissions de variétés où
leurs discours sont réduits à quelques phrases immédiatement tournées en dérision par n’importe quel
artiste ou journaliste présent sur le plateau.
Les Français piégés par le racisme quotidien ont choisi de se désintéresser de la politique
Les Partis traditionnels le mensonge, un désir d’une nouvelle race

La terreur abolit tous les liens entre les personnes et les communautés qui constituent la société : sans la liberté qu’octroient les liens interpersonnels, les individus sont sous le contrôle du pouvoir discrétionnaire. L’individu, dépossédé de tout lien avec les autres, avec le monde et avec le passé, connaît la «désolation», le délaissement le plus radical.
Se crée alors un monde fictif, méprisant les faits, épargnant aux masses tout affrontement avec le réel et leur donnant un semblant de cohérence. Le totalitarisme est négation du politique Le tyran rend impossible la parole dans l’espace public mais il laisse les hommes dans l’espace privé. Le totalitarisme attaque la vie privée elle-même. L’individu n’est pas seulement isolé mais il n’a plus de consistance interne, perd son moi. Il n’y a, en réalité, aucune organisation politique, le chef étant la loi suprême et pouvant liquider ses subordonnés.

II – Comment conjurer le Mal absolu ?
ARENDT ne se contente pas de diagnostiquer le mal. Elle s’interroge sur les moyens de se préserver contre la tentation totalitaire. Rien n’est plus dangereux que d’arrêter de penser. Le danger consiste en ce que nous devenions de véritables habitants du désert et que nous nous sentions bien chez lui». Ainsi se termine un petit ouvrage de Hannah ARENDT intitulé : Qu’est-ce que la politique ? Etrange phrase. De quel désert s’agit-il et pourquoi nous y sentirions nous bien ? Cette mise en garde est un condensé de la pensée de Hannah ARENDT. Elle ne fait pas allusion au désert d’Afrique bien sûr, mais à celui de notre monde occidental. Cette métaphore désigne notre absence de points de repères. Bien que noyés sous les informations et les images de toutes sortes nous vivons dans le désert de nos vies privées et cela semble bien faire notre bonheur. Autrement dit, notre passivité de citoyen consommateur nous suffit. Nous avons sous nos yeux le spectacle d’un monde auquel nous ne pouvons rien changer et nous acceptons sans trop de problèmes cette fatalité. «Tant que nous souffrons, dans les conditions du désert, nous sommes encore humains, encore intacts» ajoute ARENDT. Cette défiance à la Politique, dans son sens noble, montre que nous avons renoncé à ce qui fait notre humanité véritable, c’est-à-dire à notre liberté.

Pour Hannah ARENDT le totalitarisme, à un certain moment donné de l’histoire, n’a pas triomphé par hasard et il pourrait encore ressurgir. En effet, la menace persiste car notre époque ne s’est pas débarrassée du terreau dans lequel il a surgi. L’élément de base, c’est l’existence d’une société de masse caractérisée par son indifférence totale à
la politique, liée au sentiment de son impuissance la plus grande. Hannah Arendt nous rappelle alors sans cesse que chaque homme est porteur d’une singularité irremplaçable qui doit se manifester dans l’espace public pour que le concept de liberté ait encore un sens. Autrement dit, seul le fait de prendre la parole pour s’emparer enfin de la chose politique, discuter des affaires communes, peut nous affranchir du conformisme de la masse. Venir au monde, c’est être d’emblée confronté à la pluralité, c’est une nouvelle espérance qui surgit tant il est vrai que «les hommes ne sont pas nés pour mourir mais pour innover».
Le désir de se débarrasser de la politique est de plus en plus répandu. Il rend manifeste l’existence d’une crise, qui nous contraint à nous demander : «Qu’est-ce que la politique ?». Face à la tyrannie et au totalitarisme, pour ARENDT, la réponse tient dans deux thèses qui se trouvent déployées dans ce livre : l’essence de la politique est la pluralité ; son sens est la liberté. Pour se saisir des promesses que la politique recèle, abdiquons toute volonté de spéculation et laissons place à la pensée. Il faut pour cela réhabiliter l’action politique. Dans les «sombres temps», Hannah ARENDT ne s’est pas borné à dénoncer un mal d’époque, mais de réfléchir un peu de «la lumière incertaine, vacillante et souvent faible que des hommes et des femmes, dans leur vie et leur œuvre, font briller dans presque n’importe quelles circonstances».

Selon Hannah Arendt, notre tradition de pensée politique naît avec PLATON et se clôt avec Karl MARX. Elle naît donc dans l’hostilité à l’égard du monde de la Politique au sens noble, du régime athénien. Il faut revenir à la Grèce pré-platonicienne, celle d’Homère, d’Hérodote, de Thucydide et de Socrate, avant que l’homme d’action et l’homme de pensée ne divorcent. ARENDT veut réévaluer l’action et le domaine public. La condition de l’homme moderne entreprend de penser ce que nous faisons c’est-à-dire de retrouver les capacités de la « vie active » opposée à la « vie contemplative ». 1Ainsi, Hannah ARENDT réclame l’avènement de l’action qui se caractérise l’homme agissant. C’est  » la révélation de l’agent dans la parole et dans l’action « . L’action est la seule activité qui mette directement en rapport les hommes. L’homme agissant est celui qui s’engage dans la vie de la Cité et qui a donc rapport au monde des hommes, ce qui implique la constitution d’un domaine public (c’est-à-dire à la fois de l’égalité et de la distinction). Il peut alors prendre conscience de la pluralité, essence de la condition humaine. L’action est mise en relation, constitution d’un espace public au sein duquel les hommes dialoguent et agissent ensemble. L’homme agissant est l’homme parlant dans une communauté d’égaux éloignés des spectres du totalitarisme.
Dans son principal ouvrage, «Condition de l’homme moderne», Hannah ARENDT développe systématiquement la thématique du renversement des activités de l’homme. Ces activités sont hiérarchisées ainsi: le travail, l’oeuvre et l’action. Le travail permet à l’homme de vivre. Par l’oeuvre, l’homme dépasse le nécessaire et accède au domaine utilitaire et artistique. Enfin, l’action, où sa liberté s’exerce pleinement, lui permet d’entrer dans le monde du politique. Or, constate Hannah ARENDT, si l’homme a été remplacé par la machine dans bien des tâches qui constituaient naguère son travail, il n’a pas réussi à en profiter pour instaurer une ère de liberté indispensable à l’action et à la politique; il s’est au contraire soumis davantage au joug de la nécessité: tout est devenu travail. Ce phénomène est une régression, une réduction de l’activité de l’homme au niveau élémentaire, un renversement de la hiérarchie.

L’action, qui est l’art du bien vivre, a perdu son sens en raison la subversion par le mensonge. Le mensonge et la violence du politicien ou du démagogue prennent le pas sur la vérité et la persuasion. En effet, Hannah ARENDT qui a consacré sa vie à «penser» le monde, à tenter de comprendre les événements tragiques qui ont marqué son époque (antisémitisme, impérialisme, totalitarisme), à réfléchir sur les conditions de la liberté et de l’action politique. Ainsi, ARENDT se pose la question suivante : nous sommes sans cesse menacés par la résurgence du totalitarisme Arendt se demande : à quelles conditions un monde non totalitaire est-il possible ?

Considérant l’humain comme un être d’action, c’est dans cette faculté d’agir politiquement qu’Arendt cherchera la réponse. Selon elle, «c’est la possibilité d’action qui fait de l’homme un être politique» ; c’est sa capacité d’initier quelque chose de neuf plutôt que d’exécuter ou de répéter des gestes. Et c’est dans cette faculté de l’humain d’agir politiquement que repose la possibilité qu’advienne un monde nouveau. Philosophe de la volonté, Hannah ARENDT refuse le fatalisme. La tradition inspirée du schéma aristotélicien l’aurait confondu avec le libre arbitre alors que les penseurs chrétiens l’auraient ramené à la vie intérieure de l’âme humaine. La volonté renvoie, chez ARENDT, à la faculté proprement humaine d’initier ou de créer du neuf, de fonder ou d’instaurer un nouvel ordre des choses. Là s’exerce la liberté authentique ; là s’éprouve le courage d’endurer la contingence, l’imprévisibilité, l’irréversibilité et la vérité interne des événements.

Suivant ARENDT, il y a exercice du politique dès que des personnes se rassemblent pour parler d’une situation commune et décider d’agir ensemble afin de changer cette situation, donc de se mobiliser pour mener une action collective. « Seule l’action est la prérogative de l’homme exclusivement ; ni bête ni dieu n’en est capable, elle seule dépend entièrement de la constante présence d’autrui » écrit Hannah ARENDT dans la «Condition humaine». Pour elle, le pouvoir correspond à l’aptitude de l’homme à agir, et à agir de façon concertée. Le pouvoir n’est jamais une propriété individuelle, il appartient à un groupe et continue de lui appartenir aussi longtemps que ce groupe n’est pas divisé.

Pour Hannah ARENDT, le totalitarisme est une forme étrange de gouvernement. Dans les pays totalitaires, le pouvoir est imposé par la propagande et la terreur. La propagande est même remplacée par l’endoctrinement et la violence est utilisée moins pour effrayer les gens que pour réaliser constamment les doctrines idéologiques et les mensonges pratiques du gouvernement. Devant cet homme dépossédé de sa plus haute part, nous sommes comme le juge de Chesterton qui, au lieu de condamner, laisse tomber les bras et le code, et dit ce qui s’impose: « Achetez une âme neuve! Celle que vous avez ne suffirait pas à un chien malade. Achetez une âme neuve». Hannah A11RENDT, en nous faisant renouer avec la grande tradition philosophique, peut nous aider à nous élever au-dessus des discours dominants et à accoucher de notre âme. Nous devons refuser le totalitarisme, car Il faut cesser de courir derrière l’Histoire et d’avoir peur de manquer le dernier train. Ne pas dire: c’est la loi de l’Histoire, il faut obéir; mais s’insurger contre cette loi, ne pas l’accepter. Il faut croire à la liberté et à la fraternité, même si nous risquons le ridicule. «Je ne plierai pas, je ne m’en irai pas en silence. Je ne me soumettrai pas. Je ne me retournerai pas. Je ne me conformerai pas. Je ne me coucherai pas. Je ne me tairai pas. Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire ; ce n’est pas subir la loi du mensonge triomphant», nous disait Jean JAURES.
En définitive, la pensée de Hannah ARENDT, d’une brûlante actualité, est hautement révolutionnaire et subversive, mais dans un sens particulier. Il ne s’agit pour elle ni de faire table rase du passé ni de nous promettre des lendemains qui chantent, mais de nous inciter à prendre en main notre histoire même si elle sait toutes les limites de l’entreprise. Il s’agit d’abord de sauver notre humanité du conformisme et de l’uniformité, du divertissement avilissant. Sa critique radicale de la société, sa connaissance des valeurs du passé nous ouvrent des perspectives passionnantes. Il faut savoir résister à ces vents mauvais : «Aussi étroit soit le chemin, Nombreux les châtiments infâmes, Je suis le maître de mon destin, Je suis le capitaine de mon âme» dit William Ernest HENLEY, dans son poème Invictus.
Biographie sélective
1 – Contributions de Hannah ARENDT
ARENDT (Hannah), Considérations morales, traduit par Marc Ducassou, Paris, Payot et Rivages, Petite bibliothèque n°181, mars 1996, 96 pages ;
ARENDT (Hannah), Du mensonge à la violence : essai de politique contemporaine, Paris, Calmann-Lévy, 2002, 249 pages ;
ARENDT (Hannah), Essai sur la Révolution «On Revolution», traduit de l’anglais par Michel Chrestien, Paris, Gallimard, 1967, 480 pages ;
ARENDT (Hannah), HEIDDEGER (Martin), Lettres et autres documents, (1925-1975), Paris, Gallimard, Collection bibliothèque de philosophie, 2001, 400 pages ;

ARENDT (Hannah), La condition humaine, Paris, Gallimard, Collection Quarto, 2012, 1056 pages ;
ARENDT (Hannah), La crise de l’éducation, Paris, Gallimard, 2006, 160 pages ;
ARENDT (Hannah), La crise de la culture : huit exercices de pensée politique, Paris, Gallimard, 1972, 380 pages ;
ARENDT (Hannah), La vie de l’esprit, Paris, P.U.F, 2013, 571 pages ;
ARENDT (Hannah), Le concept d’amour chez Augustin, essai d’interprétation philosophique, traduit de l’allemand par Anne-Sophie Astrup, avant-propos de Guy Petitdemange, Paris, Éditions Payot et Rivages, 1999. Coll. «Rivages poche/Petite Bibliothèque», édition originale allemande, 1929, 117 pages ;
ARENDT (Hannah), Les origines du totalitarisme : Eichmann à Jérusalem, Paris, Gallimard, 2002, 1615 pages ;
ARENDT (Hannah), L’impérialisme, les origines du totalitarisme, Paris, Seuil, 2010, 384 pages ;
ARENDT (Hannah), Philosophie de l’existence et autres essais, traduction de Michèle-Irène Brudny de Launay et Anne-Sophie Astrup et Martin Ziegler, Paris, Payot et Rivages, Petite bibliothèque n°1017, 2015, 352 pages ;
ARENDT (Hannah), Qu’est-ce que c’est la politique ?, traduit par Carole Widmaier, Muriel Frantz-Widmaier, Sylvie Taussig et Cécile Nail, Paris, Seuil, 2014, 312 pages ;
ARENDT (Hannah), RICOEUR (Paul), La condition de l’homme moderne, Paris, Calmann-Lévy, 1988, 406 pages.
ARENDT (Hannah), Sur l’antisémitisme, Paris, Hachette, 1994, 292 pages ;
ARENDT (Hannah), Vies politiques, traduction de Eric Adda, Jacques Bontemps, Barbara Cassin, Didier Don, Albert Kohn, Patrick Lévy, Agnès Oppenheimer-Faure, Paris, Gallimard, Collection Tel n°112, 1986, 336 pages ;
ARENDT (Hannah), Journal de pensée, traduit par Sylvie Courtine-Denamy, Paris, Seuil, Collection l’ordre philosophique, 2005, 2 volumes, 965 pages ;
2 – Critiques de Hannah ARENDT
ADLER (Laure), Dans les pas de Hannah Arendt, Paris, Gallimard, Hors série Connaissance, 2005, 672 pages ;
DAGENAIS (Daniel), sous la direction de, Hannah Arendt, le totalitarisme et le monde contemporain, Les presses de l’université de Laval, 2003, 611 pages ;
DUVAL (Michelle), «L’action collective pensée par Hannah ARENDT, comprendre l’agir ensemble, pour le favoriser», Service Social, 2008 (1) n°54, pages 83-96 ;
EHRWEIN NIHAN, (Céline), Hannah Arendt : une pensée de la crise politique aux prises avec la morale et la religion, préface de Jean-Marc Ferry, Genève, 2011, Labor et Fidès, 393 pages ;
MOREAULT (Francis), Hannah Arendt, l’amour de la liberté, Québec, Les Presses de l’Université de Laval, 2002, 248 pages ;
RAVET (Jean-Claude), «L’amour du monde, socle de la liberté» Relations, janvier-février 2016, n°782, pages 14-16 ;
TASSIN (Etienne), sous la direction de, Hannah Arendt, l’humaine condition politique, Paris, L’Harmattan, 2001, 364 pages ;
VALLEE (Catherine), Hannah Arendt, Socrate et la question du totalitarisme, Ellipses, 1999, 144 pages ;
VARNHAGEN (Rahel), Hannah Arendt la vie d’une juive allemande à l’époque du romantisme, Paris, Payot et Rivages, collection Petite bibliothèque n°1026, 2016, 432 pages ;

YOUNG-BRUEHL (Elizabeth), Hannah Arendt, Paris, Calmann-Lévy, 2011, 798 pages.
Paris, le 9 avril 2017 par M. Amadou Bal BA – http://baamadou.over-blog.fr/

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