Inspection générale d’Etat Statuts et évolutions d’un corps

Date:

Entre novembre 1974 et juillet 2011, le corps des inspecteurs généraux d’Etat (Ige) du Sénégal a connu d’importantes évolutions, articulées essentiellement autour des voies d’accès, du profil des vérificateurs et de leurs prérogatives.

Ces jours-ci, l’Inspection générale d’Etat(Ige), est au devant de l’actualité, du fait de la décision du chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, de faire accéder le sieur Sidy Mohamed Ndour à ce corps d’élite par le biais du tour extérieur. Normalement une telle nomination ne devrait pas faire l’objet de controverse d’autant que le concerné remplit toutes les conditions devant présider à sa désignation. La Gazette, pour prendre part au débat en cours s’appuie sur des textes ayant trait à l’évolution des statuts des inspecteurs généraux d’Etat et à leurs conditions de recrutement.

Il faut surtout rappeler que le corps des vérificateurs généraux a été institué par la loi 74-51 du 4 novembre 1974 portant statut des membres. Ce texte prévoyait en son article six (6) deux (2) voies d’accès à l’Ige. Il s’agit naturellement du concours professionnel ouvert aux fonctionnaires de la hiérarchie A1 et assimilés. Cette catégorie de postulants doit avoir le niveau du baccalauréat plus six (6) années de formation, en plus de justifier d’une ancienneté de cinq (5) années dans ladite hiérarchie. Tous les candidats à cette voie ne peuvent se présenter au concours que deux (2) fois.

Il est aussi possible d’accéder à l’Ige grâce au tour extérieur. Il permet au président de la République de recruter, dans la limite de 1/5e de l’effectif théorique du corps, des fonctionnaires du même niveau que ceux qui sont visés par le concours professionnel. Pour cela, il faut justifier d’une ancienneté de dix (10) années dans la hiérarchie. La loi 74-51 fixe en outre l’âge de la retraite des inspecteurs généraux d’Etat à soixante ans (60) et leur interdit toute forme de cessation concertée de travail.

Cette loi a été abrogée et remplacée le 3 août 1987 par une nouvelle loi n°87-18 qui apporte d’importantes innovations. Elle ouvre, en effet, une troisième voie d’accès, en l’occurrence le concours direct qui vise les ingénieurs-docteurs, les personnes titulaires d’un doctorat d’Etat en droit, en économie ou en gestion et aux experts comptables. La nouvelle loi fait passer le quota de recrutement au tour extérieur par le président de la République de 1/5 à 2/5 de l’effectif théorique du corps. Car, le constat était fait que le concours ne permettait pas d’augmenter de façon significative l’effectif du corps qui n’atteignait pas trente (30) inspecteurs. Le chef de l’Etat peut désormais recruter au tour extérieur douze (12) inspecteurs sur les trente prévus. Toujours au chapitre des innovations, les candidats se sont vus autoriser à effectuer trois tentatives et non deux comme en 1974. Aussi, la loi 87-18 prévoit que l’âge d’admission à la retraite fixé à soixante ans (60) pouvait être prorogé à 65 ans, par décret, sur demande de l’inspecteur concerné entre autres évolutions.

A leur tour, les textes du 3 août 1987 ont été abrogés et remplacés par une autre loi dite 2005-23 en date du 11 août 2005. Elle reprend toutes les dispositions relatives au recrutement, tout en donnant un sens au terme « hiérarchies assimilées » qui ne visait pas les fonctionnaires déjà dans des hiérarchies, mais plutôt des agents non fonctionnaires. Elle élargit, formellement, les compétences de l’Ige en matière d’évaluation, d’audit et de vérification intégrée, renforce les sujétions qui pèsent sur les Ige qui ne peuvent posséder des intérêts de quelque nature dans les entreprises publiques et parapubliques soumises à leur contrôle. Si les nouveaux textes leur interdisent le droit de grève, ils reconnaissent, en revanche, le privilège de juridiction aux inspecteurs généraux d’Etat qui ne peuvent être jugés, en matière correctionnelle et criminelle, que par la Cour de Cassation.

Les années passent et le corps de contrôle poursuit son évolution. C’est ainsi qu’en 2007, la loi 2007-17 du 19 février est venue modifier la loi du 11 août 2005. Elle crée le poste de Vérificateur général du Sénégal, nommé pour un mandat de sept (7) années non renouvelable, et celui de Vérificateur général adjoint. Une loi qui interdit, formellement, aux Ige l’appartenance à un parti politique, ainsi que toutes activités politiques. Le 8 juillet 2011, une dernière loi portant statut des inspecteurs généraux d’Etat a abrogé et remplacé celles de 2005 et 2007. Elle reprend les dispositions relatives aux trois modalités de recrutement en plus de maintenir le tour extérieur. Avant le vote de ladite loi, l’effectif théorique du corps a été porté à cinquante (50) inspecteurs, ce qui, de facto, augmente le quota de recrutement du président de la République au tour extérieur. Ce quota passe de 12 à 20 inspecteurs. Toutefois, la loi augmente l’ancienneté requise passée de dix (10) à quinze (15) années dans la hiérarchie A1 ou A spécial. Cette loi accorde au Vérificateur général un pouvoir d’auto saisine. Il peut prendre l’initiative d’auditer et de vérifier tous les services et toutes les Institutions de la République.

Enjeux du tour extérieur

L’effectif théorique des inspecteurs généraux d’Etat étant réduit à sa plus simple expression, car dix-huit (18) étaient opérationnels pour couvrir tout le champ de compétence de l’Ige, il fallait absolument l’augmenter. C’est d’ailleurs pourquoi depuis plus de quinze (15) années, l’Ige n’a vérifié aucun ministère, faute de personnel. Cette situation de non contrôle était devenue inacceptable, au moment où la fraude et la corruption atteignaient des proportions inquiétantes. L’augmentation de l’effectif était donc un enjeu important compte tenu du rôle et de la place de l’Ige qui est au cœur de la gouvernance publique. Or, le concours professionnel ne pouvait pas permettre d’atteindre cet objectif, avec seulement un (1) à deux (2) candidats qui réussissent à chaque édition.

Tout comme en France et un peu partout ailleurs, le tour extérieur offre l’opportunité de renforcer et de diversifier les profils dans les institutions supérieures de contrôle. Les hauts fonctionnaires choisis par le biais du tour extérieur capitalisent une grande expérience de la gestion publique et disposent des qualités professionnelles requises dans les délicates fonctions d’inspecteur général. Il ne saurait, pour autant, empêcher l’organisation du concours professionnel. Alors qu’en ce qui concerne le concours direct qui n’a été organisé qu’une seule fois (1990), l’Ige envisage l’ouverture de ce mode d’accès d’ici fin 2012. Il y’a lieu de préciser, pour ce qui est du tour extérieur, que le président de la République a compétence liée. En d’autres termes, il est obligé de se conformer aux dispositions de la loi qui fixe les conditions de recrutement. Le rôle du Vérificateur général du Sénégal étant d’instruire les dossiers afin de s’assurer que lesdites conditions sont réunies, et de donner son avis, après avoir fait diligenter une enquête de moralité par les services compétents de l’Etat. Si la loi est respectée et que les candidats remplissent les conditions d’accès, l’avis du Vérificateur général est simplement consultatif. Dés lors, il ne lie pas l’autorité ayant pouvoir de décision qui se trouve être le chef de l’Etat.

Alioune Badara COULIBALY


LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

France : Stéphane Séjourné sur le franc CFA, « Si les pays africains se mettent d’accord pour changer le nom, c’est de la souveraineté des...

XALIMANEWS-Le ministre français Affaires étrangères Stéphane Séjourné a accordé un entretien...

Football-Match amical : le Sénégal en maîtrise face au Gabon (3-0)

XALIMANEWS-Ce vendredi soir à Amiens au stade de la...