La barbarie au Kenya, c’est nous dans nous par Birame Waltako Ndiaye

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N’est-ce pas être enraciné que de comprendre et d’accompagner son identité en mouvement, libre de tout complexe? L’Africain s’étourdit d’aspirations et de faiblesses refoulées dans des représentations futiles, dans des reproductions superflues. Qui l’aurait cru? La portée des emprunts culturels impacte l’homme noir jusque dans son estime de soi, jusqu’à dans le crédit accordé à ses semblables. La cruauté récemment perpétrée au Kenya nous inflige d’irresponsabilités et de carences plus qu’elle nous afflige de regrets et de périls.

Le groupe salafiste, Al-Shabaab, s’inspire d’un discours antichrétien, alimenté par le soutien kényan au gouvernement de la Somalie. Les djihadistes qui étaient parvenus à prendre le contrôle d’une partie du pays étaient forcés de quitter nombre de leurs positions dont Brava, un important port somalien. Comme quoi, quand les violences entre musulmans et chrétiens ne démasquent pas un manque de maturité,  elles masquent l’ignominie d’intérêts politiques et financiers. « Le Kenya est en guerre avec la Somalie (…) nos hommes sont encore à l’intérieur et combattent. Leur mission est de tuer ceux qui sont contre les shebab », a déclaré, sur le champ, un porte-parole du groupe islamiste, Cheikh Ali Mohamud Rage.

L’islam qu’on a connu nous était venu du soufisme, d’une école particulière qui prône l’effort individuel contre les tendances malveillantes. Le « Jihad toul nafsi », combat contre soi, contre les désirs et tentations du mal s’oppose au jihad belliqueux traduit en termes de guerre sainte, de contrainte ou de propagation des valeurs arabo-musulmanes par la violence. L’incursion nouvelle d’écoles de pensées wahhabite et autres totalitaristes, de plus en plus visible dans l’espace religieux africain, a tendance à changer nos rapports à l’islam et à la spiritualité.

C’est fou comme les valeurs épousent, par le seul fait des conjonctures et de l’environnement, les contours du niveau d’organisation. Tiens! Enfants, il était admis de croire que le « djouti », (percepteur municipal), était voué aux braises de l’enfer. Cette croyance était bien entretenue par la communauté, auxiliaire de la morale. Ça a pris du temps, renforcée d’un niveau d’instruction beaucoup plus élevé, pour que l’opinion finisse par les envisager simples collecteurs au service de la collectivité. C’est dire à quel point nos attitudes et allures de croyants sont tributaires de notre capacité de discernement plus ou moins prononcée.

Aliénation pour aliénation. La bataille contre le déracinement et la spoliation porte souvent l’estocade à l’occidentalisation. Hélas ! L’Orient passe entre les mailles du filet sous le parapluie des sensibilités confessionnelles sans que nous nous réservions le droit de préférer nos prochains à nos lointains. En même temps que la pensée occidentale nous abreuve de son diktat idéologique, nous nous aplatissons sous le poids des croyances teintées d’arabité. Il est difficile de comprendre et d’accepter que le noir rejette son nègre de frère au nom d’une simplette allégeance: simple question de fierté et de hauteur.

S’il faut s’indigner de l’arrogante volonté assimilationniste des colombes déplumées venues d’Europe, il l’est autant de l’insolence des enturbannés, étoilés de certitudes et parrainés par notre lâche connivence. Ne faut-il pas réclamer notre part en face de cette universalité fumiste, celle des plus puissants? Nous devons déchiffrer et démystifier le manège, toute la tromperie qui se veut amitié et fraternité. Elle s’improvise cavalière sur nous autres, chevaux dociles habituellement suivistes, jamais meneurs.

De ces envoûtements et de ces manipulations qui nous font ennemis les uns aux autres, opposons nos origines lointaines, convoquons les souffrances endurées bien avant. Pas de haine! Point d’animosité! Mais, l’inévitable hébergement des influences diverses nous oblige à envisager et à assumer, main dans la main, le dépassement dans nos différences hasardeuses. Nous avons connu l’arabisation, nous avons connu l’hellénisation, nous éprouvons la mondialisation. À présent, même des petites révoltes et des affirmations isolées, s’ensuivent moult accusations d’infidélité et de traitrise. À vrai dire, on est mal barrés.

Birame Waltako Ndiaye

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