La foire du drone bat son plein

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Malgré les cures d’austérité budgétaire, le marché des drones se porte bien. Les dépenses mondiales liées au développement et à l’achat de ces avions sans pilote devraient même doubler en dix ans, passant de 5,9 milliards de dollars à l’heure actuelle à 11,3 milliards en 2020 selon une étude publiée en mars par Teal Group, un cabinet spécialisé dans l’industrie mondiale de la défense.

Les avions sans pilote ont convaincu les états-majors après leur déploiement en Irak, en Lybie et surtout en Afghanistan, où ils sont utilisés pour la reconnaissance du terrain mais aussi pour des missions d’attaque. Le crash d’un de ces appareils, américain, sur le territoire iranien, montre que ces engins sont désormais indispensables pour toutes sortes d’opérations de renseignement.
Le nombre de missions d’attaque a d’ailleurs régulièrement augmenté, passant de neuf sur la période 2004-2007 à 118 l’année dernière avant de redescendre à 70 à la mi-novembre 2011 selon la comptabilité tenue par la New America Foundation.

ISRAËL ET LES ÉTATS-UNIS LOIN DEVANT

Ce marché plein de promesses profitera-t-il aux industriels européens ? Rien n’est moins sûr tant le Vieux Continent a pris du retard sur les Etats-Unis et Israël, historiquement en pointe dans le développement de ces appareils.
« Les Etats-Unis et Israël sont les seuls à avoir développé une industrie de drones très en amont, dès les années 70 avec la guerre du Vietnam d’un côté et celle du Kippour de l’autre », explique Jean-Pierre Maulny, directeur adjoint de l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques).
Aujourd’hui les Etats-Unis représentent à eux seuls les deux tiers des achats d’avions sans pilote avec 2,3 milliards de dollars en 2011 et 77 % des budgets de recherche et développement mondiaux dans le secteur, soit 2 milliards de dollars à eux-seuls selon Teal Group.
Pour autant, les positions des acteurs ne sont pas figées. « La particularité du marché des drones est de ne pas avoir été pris en charge par les acteurs traditionnels de l’industrie de la défense à ses débuts. Aujourd’hui, c’est encore un marché peu structuré avec de très nombreuses entreprises », analyse Jean-Pierre Maulny. Même certains grands noms de l’industrie du drone – l’israélien IAI ou l’américain General Atomics – ne comptent pas parmi les cadors de l’armement conventionnel.

DES DRONES POUR TOUS LES GOÛTS

Une différence existe cependant entre les petits drones dits tactiques, les MALE (moyenne altitude longue endurance) et les HALE (haute altitude longue distance) car sous le terme drone se cache une large varieté d’appareils.
« Les plus petits drones qui permettent d’aller voir de l’autre côté du mur, font aujourd’hui partie de l’équipement de base du fantassin », explique le général de brigade aérienne Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l’IRIS. De très nombreuses PME sont présentes sur ce segment de marché qui représente plus de 97 % des drones fabriqués en 2011, mais seulement un tiers en valeur. Pour appuyer ses troupes au sol sur les champs de bataille, l’armée française dispose ainsi de petits drones tactiques comme le Sperwer de Sagem.
A l’autre bout du spectre, les HALE sont les plus grands drones existants. De l’envergure d’un avion civil comme l’Airbus A320, ils parcourent plusieurs dizaines de milliers de kilomètres à très haute altitude. Dans cette catégorie, la firme américaine Northrop Grumman règne sans partage avec son modèle Global Hawk.
En Europe, seul EADS avec sa filiale Cassidian propose un drone HALE, l’Euro Hawk, qui est en fait une version européanisée du modèle de Northrop Grumman développé en partenariat avec l’américain. L’armée allemande, qui a signé en 2007 un contrat de 559 millions de dollars, doit en recevoir le premier exemplaire en 2012 pour effectuer des missions de surveillance maritime.
Le troisième segment – sur lequel les Européens essaient actuellement de se faire une place – est celui, intermédiaire, des drones MALE. Evalué à plus d’un milliard de dollars en 2011, toujours selon Teal Group, l’américain General Atomics s’y taille la part du lion avec le célèbre Predator et sa nouvelle version, le Reaper.
« General Atomics détient plus de 50 % du marché des drones MALE, estime Jean-Pierre Maulny. Ensuite vient le Heron de l’israélien IAI. Quand à l’Europe, elle est à la traîne. »
Dans un rapport parlementaire de 2009, la flotte de drones américaines est estimée à 250 Predators et 50 Reapers, soit 300 MALE, pour 27 Global Hawk de type HALE en service.

CACOPHONIE EUROPÉENNE

En Europe, deux projets de drone MALE – le Talarion d’EADS et le Telemos de Dassault et du britannique BAE – sont actuellement en cours de développement, alimentant des critiques sur une redite de la mauvaise opération qu’avait constitué le développement parallèle de deux avions de chasse européens concurrents, le Rafale et l’Eurofighter. « C’est la guerre des drones », résume le directeur adjoint de l’IRIS.
En attendant le Talarion ou le Telemos, des drones intérimaires doivent être commandés. EADS adapte pour cela le Heron avec l’israélien IAI sous le nom Harfang. Dassault le Heron TP, également avec IAI. C’est ce dernier modèle qui a été choisi par Gérard Longuet il y a quelques mois pour équiper l’armée française, suscitant une vive protestation de plusieurs élus (lire la tribune publiée dans Le Monde) qui lui auraient préféré le Reaper américain, moins cher et immédiatement opérationnel.

Sébastien Dumoulin

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