La parole de Karim Wade est d’or, son silence est d’argent par Madiambal Diagne

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Se taire, être muet comme une carpe
Etre muet dans la carpe
Etre carpe
-Obstruction, défection, occlusion
Silence
(Bourqain Jean Gabriel. Le procès de la Saint Sylvestre)

En reprenant sa place dans le box des accusés, Karim Wade a eu à apostropher les membres du Parquet spécial de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) en leur disant, avec un index dirigé vers eux : «Vous n’avez pas intérêt que l’on aille dans le fond dans ce procès». «Soit !», lui avaient répondu dans un murmure et avec un sourire en coin Alioune Ndao et Antoine Félix Diome. Le président Henri Grégoire Diop ne pouvait cependant laisser passer un tel incident et avait tenu à rappeler à la barre le prévenu Karim Meïssa Wade pour lui faire remarquer que la Cour n’accepterait pas qu’il cherchât, par ce procédé, à manquer de respect d’une façon ou d’une autre aux magistrats du Parquet spécial. Karim Wade s’excusa de l’incident et le Procureur spécial accepta les excuses. L’incident était clos, mais révélait la certitude et la détermination de Karim Wade de pouvoir bien se défendre dans une discussion dans le fond. D’ailleurs, une telle attitude, dans laquelle transparaissait une certaine superbe, a toujours était de mise dans le camp de Karim Wade et de ses co-prévenus. Combien de fois n’avait-on pas entendu dire que le dossier des accusations était vide et que l’Etat et ses procureurs de la Crei en auront pour leurs frais quand l’occasion sera donnée aux prévenus et à leurs avocats de démonter à la face du monde le tissu de mensonges, de contrevérités ? Le Parquet spécial n’aurait aucune preuve contre Karim Wade et compagnie en dépit des longs mois d’incarcération et des multiples enquêtes menées au Sénégal et à l’étranger. C’est dire toute l’attente que le public nourrissait pour voir l’éclatement de la vérité dans un procès public pour que chacun puisse se faire sa propre opinion. Mais grande est aujourd’hui la surprise de voir que Karim Wade use de stratagèmes et de subterfuges pour refuser que le fond du dossier soit évoqué devant la barre. Qu’on s’entende bien ! Il n’est nullement question de lui contester le droit de bâtir une stratégie de défense dans un procès pénal dans lequel il risque gros, c’est-à-dire sa liberté et un avenir pénal. Ainsi, a-t-il le droit d’invoquer toutes les questions liminaires pour faire annuler la procédure judiciaire. C’est de bonne guerre. Dans notre système judiciaire, il est même permis au prévenu de mentir pour sa défense. Mais là où le bât blesse, c’est que Karim Wade et Pape Mamadou Pouye ont choisi de ne plus répondre aux questions des magistrats tant que leur co-prévenu Bibo Bourgi n’aurait pas fini de se faire soigner en France et après, de revenir à la barre, à leurs côtés, pour se défendre. Karim Wade et Pape Mamadou Pouye lient leur sort désormais à celui de Bibo Bourgi. Pourtant, ils avaient toujours soutenu n’avoir rien à voir avec les affaires de Bibo Bourgi. Alors, se demande-t-on ce qu’ils pourraient attendre de Bibo Bourgi. Pourquoi ne disent-ils pas aussi refuser de répondre tant que l’autre prévenu Karim Bourgi, en cavale, ne se présenterait pas à la barre ? Bibo Bourgi et son frère seraient impliqués dans la procédure dans les mêmes conditions. Aussi, quelle serait l’attitude de Karim Wade et de Pape Mamadou Pouye si Bibo Bourgi, qui leur sert ainsi de prétexte, arrivait à ne plus prendre part au procès. Pour autant, se laisseraient-ils mener à l’échafaud sans chercher à se défendre. Il faut dire que Karim Wade et Pape Mamadou Pouye ne renoncent pas à se défendre. Bien au contraire. Ils adoptent une stratégie de défense assez commode, à la limite même lâche. Ils viennent devant la barre pour lire des textes préalablement préparés par des officines de communication dont des membres sont bien visibles dans la salle d’audience. Ils se prononcent sur les questions qui les intéressent, font dans la propagande, y vont de diatribes et de tentatives de discrédit de la Cour et de la procédure tout en évitant soigneusement de se livrer au jeu de questions-réponses entre eux et la Cour, entre eux et les avocats des différentes parties ou le ministère public. La stratégie adoptée par Karim Wade serait à ses risques et périls. Si le procès tourne en sa défaveur, il ne pourra pas dire que l’occasion ne lui a pas été donnée pour s’expliquer, battre en brèche les accusations portées contre lui. Cette attitude l’aurait d’ailleurs mis en mal avec certains de ses avocats. Si on en croit une révélation à la barre de Me Ciré Clédor Ly, les avocats de la défense avaient manifesté un certain agacement face à la lenteur du procès et qu’ils souhaiteraient aller au fond de l’affaire. Karim Wade se serait opposé à cela en demandant à ses avocats de ne pas changer la stratégie de défense préalablement établie. C’est cette anicroche qui avait poussé Karim Wade à demander à ses avocats de ne pas le trahir. Il devient dès lors clair comme de l’eau de roche que Karim Wade ne souhaite pas encore répondre dans le détail aux accusations portées contre lui, encore moins démonter les preuves de Alioune Ndao et Antoine Diome. Ainsi, les obstructions et les tentatives de sabotage du procès pourront continuer à avoir cours devant ce prétoire de la Crei. Karim Wade a poussé le bouchon jusqu’à donner l’air de diriger les débats à sa guise. Ainsi a-t-il cherché à «voler au secours de ses avocats ( ?)» en exigeant par exemple du président de la Cour qu’il donnât la parole à ses conseils. Quand Karim Wade daigne parler à son procès, il donne des lumières. On apprend de sa bouche qu’il compte être candidat en 2017. Dire que tous ceux qui parlaient du projet familial de lui préparer un destin de chef de l’Etat étaient taxés d’affabulateurs. Qu’il parle encore ! L’adage dit que «la parole est d’argent et le silence est d’or». Mais avec Karim Wade, c’est tout le contraire.

Madiambal Diagne
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11 Commentaires

  1. Parfaitement d’accord avec Mr Madiambal Diagne.
    Si Karim Wade n’a rien à se reprocher, s’il s’avère comme il a toujours soutenu que la CREI n’a aucune preuve contre lui, alors pourquoi refuser qu’on aille dans le fond du dossier?
    Son silence en effet est plus qu’étrange.

  2. C’est compter sans la tenacité citoyenne de ceux qui l’attendent au tounant pour exiger qu’il revienne au serieux ;’il se délecte , et s’amuse autant qu’il s’effraie de la fin du grotesque et du ridicule qui tôt ou tard arrivera à terme.Il n’est pas de ceux qui aiment le silence , il ne se taira pas .Il ira jusqu’à vouloir diriger les débats par des mini-bombes politiques jubilatoires préfabriquées et il n’en sortira point indemne.

  3. J’ai une seule et unique question; sur quoi karim wade doit répondre?
    Sur DPW si on sait que c’est le président Macky Sall qui est allé négocié avec les véritables propriétaires?
    Sur BMCE quand on sait que la Banque a financé la fondation de la 1ère dame?
    Sur AHS quand on sait que les personnes dont les noms figurent sur les actes disent qu’elle n’appartient pas à Abdoul karim wade et que aucun virement n’existe?
    Quelles sont les preuves de la CREI?
    Jusqu’à présent, Abdoul karim wade a fait 2 ans de prison et personne ne peut dire ce qu’on lui reproche concrétement?

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