L’affaire SEDIMA/population de Ndenguéler : Des faits et des chiffres (Par Souleymane Niang)

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L’affaire opposant la SEDIMA à la population de Ndenguéler (commune de Ndiaganiao), au-delà de l’émotion qu’elle a suscitée chez certains, appelle un examen lucide et une analyse froide de certains faits et chiffres.

D’abord, les superficies en question. Trois cents (300) hectares, la surface totale des terres affectées à la SEDIMA par la commune de Sindia – puis sécurisées par voie de transformation d’un bail en titre foncier – équivalent à trois (03) millions de mètres-carrés. Autrement dit, trois (03) kilomètres-carrés ou un terrain de 1500 mètres (1,5 km) de long et 2000 mètres (2 km) de large.
Voyons maintenant la contrepartie déclarée par l’un des responsables de la société, invité à la radio, ce mercredi 1er juillet 2020. En tout, les frais d’acquisition et de mise en état d’exploitation (y compris le terrassement, les frais payés pour l’obtention du bail et, plus tard, du titre foncier) s’élèvent, à ce jour, à quelque 500 millions de FCFA.

Un peu d’arithmétique : 500 millions de FCFA / 3 millions de mètres-carrés = 166,66 FCFA par mètre-carré. Certains penseront que, littéralement, le terrain a été acquis pour une bouchée de pain. Mais, essayons de rester factuels.

Les états financiers de la SEDIMA ou de la société à l’actif de laquelle elle mettra cette immobilisation corporelle nous renseigneront un jour sur le coût réel (historique) de ce bien et, le cas échéant, le mode de financement de cette acquisition : fonds propres, endettement, montage financier, etc.).

Sur un plan purement financier, c’est surtout la juste valeur du terrain qui recèle un intérêt dans l’analyse. Car, les questions qui se posent sont les suivantes : Combien une banque ou un « pool » de banques serait-elle prête à donner à un demandeur de crédit qui apporterait une telle hypothèque ? A quel prix ces terres auraient-elles pu être vendues, au moment de leur attribution, sur un marché concurrentiel. Quelle différence de valeur y aurait-il entre ce prix et le coût d’acquisition ? Cet écart serait-il acceptable légalement, économiquement et … moralement.

Ne tirons pas de conclusions hâtives ; continuons de nous poser des questions. Y aurait-il, en contrepartie des facilités d’attribution (et d’acquisition) du terrain, des obligations sociales et environnementales imposées à SEDIMA ? Par exemple, l’obligation de recruter un minimum d’ouvriers agricoles des villages environnants ou le branchement de ces villages à d’éventuelles infrastructures hydrauliques (forages) ou électriques (mini centrale thermique, solaire ou éolienne) ? Aurait-on imposé à SEDIMA de contribuer à la sécurité alimentaire dans la zone ou à l’éducation et à la securité nutritionnelle des enfants ? La SEDIMA s’est-elle engagée à ouvrir des corridors, des zones et des pistes de pâturage ? La société aurait-elle accepté de construire, au nom de la RSE, ne serait-ce qu’une case ou un poste de santé, au besoin ?

Si la réponse à la moitié de ces questions était affirmative, alors le jeu en vaudrait peut-être la chandelle. Au moins, pour les communautés qui gravitent autour des terres en question. Mais seuls la SEDIMA, les autorités locales, les administrations fiscales et domaniales et un cercle restreint semblent le savoir.

Pour le reste, les terres que nous avons en commun, en tant que Nation, méritent toute la passion que cette affaire a soulevée. Il y va de notre avenir, de notre prospérité partagée et de notre cohésion sociale. Encore un peu de chiffres : si d’autres personnes, physiques ou morales, devaient recevoir la même surface, sur l’ensemble de la superficie du Sénégal (y compris les zones déjà habitées, occupées ou affectées), seules quelque 65.500 d’entre nous pourraient être servies. Il ne resterait plus rien à partager aux générations actuelles, encore moins aux générations futures, sauf si les riches héritiers de ces terres daignent en vendre une partie. A quel prix, alors ?

Voila pourquoi les autorités investies d’un pouvoir en la matière doivent faire montre de responsabilité et de patriotisme. A défaut, une infime minorité pourra se prévaloir de droits exorbitants sur le siège de notre Etat et de notre « commun vouloir de vivre ensemble ».

Je pense que nos « champions », comme la SEDIMA, doivent être encouragés et doivent obtenir de l’Etat tout le soutien pour mener à bien tous leurs investissements qui ont fait la preuve de leur faisabilité et de leur rentabilité (économique, financière et sociale). Mais, pour mettre en valeur 300 hectares de terres, un simple bail y suffit et l’accord de toutes les parties prenantes (y compris les communautés affectées par les projets) est une exigence.

Toute autre approche pourrait relever de la voie de fait et de l’abus de pouvoir

2 Commentaires

  1. Oui, Mr Niang !
    Si toutes les terres du domaine national sont declassees et affectees a des prives qui en font un patrimoine
    nous courrons le risque d un conflit social latent.
    Cette loi sur le domaine national doit etre revisee. Le patrimoine national
    n est un bien prive. Il peut allouer
    comme bail mais ne doit pas etre
    une propriete.
    Si toutes les vallees, les terres fertiles, le littoral, les parcs nationaux, les lacs sont declasses
    au profit une personne privee ou
    morale et que celui en fait un titre
    de propriete, c est la le debut de
    l anarchie.
    Une minorite de privilegies est en
    en train de s aproprier le foncier
    utile du pays en douceur et en faire
    une rente.
    Rendez la terre aux paysans!
    Wassalam

  2. Tout simplement, ces prédateurs fonciers doivent être arrêtés dans leurs boulimies. Pourquoi, ne pas organiser les populations en coopératives, pour leur permettre de se prendre en charge en dévelopant leurs localités.

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