Le prix Nobel de physique 2015 décerné à Takaaki Kajita et Arthur B. McDonald pour leurs travaux sur les neutrinos

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Le prix Nobel de physique 2015 a été attribué conjointement mardi 6 octobre à Takaaki Kajita (Japon) et Arthur B. McDonald (Canada) pour la découverte des oscillations de neutrinos qui montre que ces particules ont une masse.

Takaaki Kajita a démontré, en 1998, que les neutrinos, ces particules élémentaires produites par les réactions nucléaires, pouvaient se transformer quand ils entraient dans l’atmosphère. Pour observer le phénomène, le chercheur japonais et son équipe ont utilisé le « Super »Kamiokande », un observatoire dédié aux neutrinos de 40 mètres de haut et rempli de 50.000 tonnes d’eau.

4 ans plus tard, en 2002, Arthur B. McDonald et son équipe ont prouvé que les neutrinos provenant du soleil (qui n’est autre qu’un gigantesque réacteur nucléaire) se transformaient en neutrinos « muonique » et « tauique ».

Vous n’avez pas tout compris? Pas de panique, on reprend depuis le début. Le neutrino a été inventé en 1914. Oui inventé, car au départ, ce n’est qu’un simple concept mathématique, imaginé par Wolfgang Pauli en 1930.

Speedy Gonzales

Cette particule élémentaire est en quelque sorte le « chaînon manquant » pour comprendre la radioactivité. On considère alors qu’elle n’a pas de poids. Et à vrai dire, cette particule devait être impossible à observer. Enfin, ça, c’est ce que pensaient les chercheurs dans les années 30.

Pourtant, théoriquement, les neutrinos sont partout. Ils sont produits par toute réaction nucléaire. Les nôtres, mais aussi (et surtout!) celles du soleil et de toutes les étoiles, trous noirs et supernovas de la galaxie. Sans oublier le Big Bang originel. Comme ces particules sont minuscules, une fois produites, elles foncent à toute vitesse (quasiment aussi vite que la lumière) à travers l’espace… et la matière.

Etant donné que leur masse est proche de zéro, elles la traversent sans soucis et ne sont pas déviées par d’autres particules. En une seconde, même vous, vous produisez près de 5000 neutrinos qui s’échappent de votre corps, à cause des isotopes de potassium qui se désintègrent petit à petit (pas de panique, c’est sans danger et tout à fait normal). C’est en 1956 que le neutrino est réellement repéré pour la première fois par deux physiciens américains. Un exploit, car pour ce faire, il faut que le neutrino rencontre frontalement le noyau d’un atome (ce qui est rare, car à cette échelle, tout est constitué majoritairement de vide).

Un neutrino dans un chapeau

Quelques années après, les scientifiques ont calculé le nombre de neutrinos fabriqués par le soleil. Sauf que plus de deux tiers qui devraient traverser la terre ont disparu entre-temps. Un problème qui pourrait s’expliquer… sur le papier. Théoriquement, il existe trois types de neutrinos, que l’on appelle « saveurs »: électronique, muonique et tauique. Sans rentrer dans le détail, le soleil produit des neutrinos électroniques uniquement. Mais s’ils se transforment en arrivant sur terre, voilà qui pourrait expliquer cette « disparition ».

Pour analyser cela, on a donc construit les grosses machines que vous avez vu ci-dessus et sur lesquels ont travaillé Kajita et McDonald. Celles-ci sont remplies d’une eau d’une pureté incroyable, isolées de toute interférence dans des mines sous terre. Sans bruit, elles captent le passage de quelques neutrinos.

En observant ces collisions, Takaaki Kajita s’est ainsi rendu compte que quelque chose clochait à propos des neutrinos « muoniques ». Normalement, il devait y en avoir autant qui traversait le « Super Kamiokande » dans tous les sens. Mais en réalité, il y avait bien moins de neutrinos muoniques lorsqu’ils avaient traversés toute la surface de la terre. La seule solution possible: une partie s’étaient changé en neutrinos tauiques.

Arthur B. McDonald s’est lui rendu compte qu’il manquait un tiers des neutrinos électroniques provenant du soleil. Sur les 60 milliards de neutrinos qui traversent la terre en provenance du soleil pour chaque centimètre carré, l’observatoire de neutrinos de Sudbury n’en captait que… trois par jours. Soit seulement un tiers. Encore une fois, la seule explication était le changement de « ‘saveur » des neutrinos.

Une révolution physique

Grâce à ces deux expériences, les chercheurs en physique fondamentale ont alors découvert que pour qu’un tel changement de « saveur » soit possible, il fallait que les neutrinos aient une masse. Si cette masse est très faible, le nombre de neutrinos est grand. Ainsi, au total, leur poids combiné serait égale à celui de toutes les étoiles visibles de l’univers, rien que ça.

Surtout, la découverte de cette masse va à l’encontre du modèle standard de la physique, qui est la théorie sensée régir notre univers depuis les années 1970. Depuis la découverte des deux nobelisés, de nombreux chercheurs s’interrogent sur les propriétés bien particulières des neutrinos. L’une des questions restant sans réponse est de savoir quelle est exactement leur masse.

Ces derniers jours, plusieurs journalistes s’étaient essayés aux pronostics pour ce prix Nobel de physique 2015, imaginant des récompenses touchant des domaines aussi variés que l’information quantique, le zéro absolu, la matière noire, les lasers ou encore les métamatériaux. En 2014, le prix Nobel de physique avait été décerné aux inventeurs de la LED bleue.

Lundi, le prix Nobel de médecine a été décerné à William Campbell, né en Irlande, au Japonais Satoshi ?mura et à la Chinoise Youyou Tu, pour leurs travaux sur les traitements contre les infections parasitaires et le paludisme.

Chaque prix Nobel est doté de huit millions de couronnes suédoises (près de 855.000 euros), à partager entre lauréats s’il y en a plusieurs.

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