Le SENEGAL peut-il devenir une économie émergente ? Par Patrice SANE

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Le Sénégal, en dépit d’une crise mondiale persistante, reste mieux loti que de nombreux pays
de la sous-région. Outre sa position géographique stratégique, notre pays, sous l’ère du président
Macky Sall, est resté profondément démocratique et politiquement stable. Le tout sous la bannière
d’une nouvelle politique de bonne gouvernance. Il réunit donc tous les atouts pour que les
investisseurs viennent investir en toute sérénité. D’ailleurs, ces atouts, le président de la République
les a agrégés pour concrétiser sa vision à travers le Plan Sénégal Emergent (PSE). Lequel Plan pose
les bases d’une croissance durable. Un taux de croissance ambitieux qui va certainement conduire
notre pays à l’émergence économique dans une vingtaine d’années, c’est-à-dire à l’horizon 2035. Pour
atteindre cet objectif, le gouvernement a ciblé six secteurs économiques à fort potentiel que sont
l’agriculture et l’agroalimentaire, l’habitat social, la modernisation de l’économie sociale, les mines,
l’industrie et le tourisme.
Il faut définir l’émergence selon les valeurs africaines (bien-être) et trouver les instruments de
mesure pour se comparer et vérifier si l’on progresse. Cette approche devrait contribuer à stopper
l’approche des nombreux dirigeants africains. Les résultats de l’émergence sont souvent repoussés
dans le temps pour les pays africains, 10 à 30 ans. Cela ne peut se faire sans une croissance soutenue
autour de 7 %, un secteur privé national, une transformation structurelle de l’économie avec du
contenu technologique, ce qui suppose une valeur ajoutée manufacturière entre 17 et 21 % du produit
intérieur brut (richesse nationale) et des emplois avec des salaires décents. Aussi, les dirigeants
africains qui n’ont pas contribué à l’émergence de l’Afrique entre 1960 et 2012 (Senghor, Diouf et
Wade) devraient considérer qu’ils n’ont pas réussi leur mission première. A ce titre, ceux qui sont
encore au pouvoir devrait en tirer les conséquences en redoublant d’effort.
Par contre dans le discours actuel, il revient très souvent que le gouvernement Sénégalais
envisage de partir d’une économie traumatisée, pauvre et très endettée pour arriver à ce qu’il appelle
une économie émergente. Ce discours est sans cesse repris par les différents membres du
gouvernement au point que certains sénégalais finissent par s’y perdre. Nombreux sont cependant ceux
qui se posent la question de savoir comment leur pays fera pour devenir une économie émergente en
2035, dans 21 ans seulement ? Ils se demandent même ce qu’est réellement une économie émergente
sachant que le SENEGAL est à l’heure actuelle présenté comme une économie « PPTE (Pays pauvre
très endetté) » ? http://donnees.banquemondiale.org/pays/senegal
Être une économie PPTE a déjà été une situation difficile à comprendre pour des sénégalais
auxquels on disait que leur pays était le moteur de la sous-région, alors, envisager maintenant de
passer en si peu de temps dans le groupe des pays émergents crée une confusion totale. Sans entrer
dans les subtilités de ces deux appellations, retenons qu’une économie PPTE du genre Sénégal a
terminé l’année 2013 avec un taux de croissance de 3,5% du PIB (Produit intérieur brut), alors qu’une
économie émergente comme celle de la TURQUIE, par exemple, a eu en 2010 un taux de croissance
du PIB de +9,1%.
Si le SENEGAL veut être émergent en 2035 cela veut dire qu’il se donne 21 ans pour atteindre
les performances d’une économie comme celle de la Turquie ou du Brésil. « La structure de la
production de la Turquie est caractérisée par une surreprésentation de l’industrie et de l’agriculture et
une sous représentation des services. La Turquie est un pays industriel ou l’agriculture occupe une
place importante dans la production de la richesse nationale. La valeur ajoutée de l’industrie représente
26,6 % du PIB contre 63,7 % pour les services et 9,6 % pour l’agriculture,
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_de_la_Turquie ». Cela signifie que le gouvernement
sénégalais va désormais devoir faire du rattrapage économique. Mais comment se présente donc la
logique du rattrapage économique ?
En la matière, le Président Macky SALL n’invente rien car depuis toujours des hommes, avant
lui, ont cultivé le mythe du rattrapage. On se souvient qu’en 1956, Khrouchtchev, alors Secrétaire
Général du parti communiste de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS), engageait son pays au rattrapage de l’économie américaine en 37 ans. Ce qui signifie que l’URSS s’engageait à
offrir à sa population en 37 ans un niveau de vie équivalent à celui des Américains. Chez les
économistes, le rattrapage est resté un mythe car à part la propagande qui en a été faite, en 1993 (37
ans après l’année 1956), l’URSS poursuivait son écroulement après la chute du mur de Berlin en 1989,
suite à la Pérestroïka et à la Glasnost. Cependant, la théorie de la dynamique économique de longue
période a développé, à l’époque, une méthode pour calculer les délais de rattrapage.
Ce calcul économique permet, à partir des données économiques (PIB, taux de croissance du
PIB), d’un pays émergent et d’un autre pays non émergent, de calculer en combien de temps le second
pourra rattraper le premier et donc atteindre à son tour l’émergence. Pour que cela soit possible, il faut
d’évidence que le plus pauvre progresse plus vite que celui qui est déjà émergent et une formule
mathématique permet de définir en combien de temps l’écart va se réduire pour que le pays pauvre
puisse enfin atteindre un niveau de vie qui puisse lui permettre de prétendre entrer dans le groupe des
pays émergents. Le rattrapage se fait lorsque la dynamique des niveaux de vie sera la même dans les
deux pays.
Il est important que la société civile et les populations sénégalaises restent en éveil et
demandent des comptes aux dirigeants du pays de manière à ne pas sombrer dans l’attente béate d’un
renouveau qui ne repose sur rien. Il peut certes être stimulant d’écouter ces pronostics optimistes mais
ils ne doivent pas endormir l’esprit critique et la vigilance citoyenne. L’émergence ne se décrète pas
politiquement, elle se construit économiquement. Il n’y a pas de miracle en économie. Il peut certes
être réconfortant de s’entendre répéter la même litanie optimiste dans tous les discours du président de
la République et de ses ministres mais la gestion des affaires publiques demande de la rigueur, de la
transparence et du respect à l’égard du peuple. Il est malhonnête de construire un discours politique sur
du vide, dans l’unique dessein de se maintenir au pouvoir. Comme l’écrit Albert Camus « Au fond
des prisons, le rêve est sans limite, la réalité ne freine rien. L’intelligence dans les chaines perd en
lucidité ce qu’elle gagne en fureur » (in L’homme révolté). Tentons de ne pas pourrir ensemble au
fond de nos propres geôles.
Oui je suis convaincu que le SENEGAL peut devenir une économie émergente à une seule
condition qu’on se concentre sur l’essentiel et qu’on se mette résolument au TRAVAIL, que la
SENELEC nous donne du courant, que la SDE nous offre de l’eau et qu’on engage l’émergence
socio- politique.
GOD BLESS MACKY SALL
Patrice SANE
Militant APR, membre de la CCR

1 COMMENTAIRE

  1. Mr Sané, il ne faut surtout pas rêver: le Sénégal ne pourra prétendre, je dis bien prétendre, à l’Emergence que lorsque ses dirigeants auront le courage de mettre de l’ordre et on en est bien loin.

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