L’indépendance de la justice sénégalaise dépend de la maturité des citoyens

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Nous passerons toujours à côté de la plaque à chaque fois que l’indépendance de la justice sera abordée en aparté, séparément du problème global de la corruption dans la société sénégalaise. La séparation des pouvoirs n’est pas en cause, il ne s’agit pas non plus d’un problème de corporation. Par l’approche institutionnelle, il y aura tout au plus l’espoir de voir prédominer des comportements précis et prévisibles. C’est par l’éducation des masses et par l’exemple des leaders que les mentalités, mères de tous les comportements, seront modelées durablement.

Il se trouve que lorsque les décisions des magistrats sont entachées de parti pris, c’est qu’ils ont sciemment, sous l’effet d’un nécessité ponctuelle d’enrichissement, torpillé les lois et règlements. Que ça se traduise par un besoin d’avancement ou par une quête de privilèges, la motivation et la finalité restent la tendance sociale à s’enrichir au plus vite. Dès lors, le problème relève davantage du dérèglement social, décalage entre les attentes officielles et les incitations manifestes. Il y a une culture de plus en plus répandue du « sauve qui peut » qui s’installe, bousculant tous les autres vecteurs d’accomplissement social.

Dans les pays dits développés, l’orientation conservatrice ou progressiste des juges de dernière instance est un enjeu politique de taille. Selon que la majorité des juges est de droite ou de gauche, les décisions en sont autant marquées. Selon que les juges sont plus ou moins féministes, les avocats et leurs clients s’attendent à des décisions plus ou moins sévères sur des questions de mœurs ou d’ordre matrimonial.

Par conséquent, c’est le caractère trivial des préoccupations dans les couloirs des palais de justice sénégalais comme dans les rues et ruelles qui doit préoccuper plus que l’argument fourre-tout de l’indépendance de la justice. Au Sénégal, les institutions sont, en pis-aller, pointées du doigt alors que ce sont les centres d’intérêts qui se sont déplacés depuis longtemps. Ils ont fait du pouvoir d’achat le principal critère de respectabilité et de considération sociales, et nous sommes encore dans le déni.

Les hommes et les femmes, animateurs des institutions, en sont impactés tout autant que n’importe quel « gorgorlou ». Qu’on ne s’étonne pas que le travail soit moins valorisé. Les arrangements et réaménagements de structures de même que les innombrables feuilles législatives n’y feront rien. Les principes tels que l’inamovibilité, la liberté des magistrats debout qui consiste à s’affranchir, à l’oral, des injonctions de la hiérarchie sont autant de garde-fous qui n’opèrent que lorsque le magistrat, lui-même, compte s’en prévaloir.

Dans le dispositif actuel, existent bel et bien des garanties pour que les juges s’assument et s’affranchissent des élus. C’est que cela ne suffit pas. Au delà, il y a une impérieuse propension à se libérer des potentats et des maitres-chanteurs qui fait défaut. C’est une chose que les normes militent en faveur de la séparation des pouvoirs, c’en est une autre que les magistrats se révèlent libres et rivaux de l’exécutif.

C’est justement à la charge des gouvernants d’insuffler ce sens de la justice et du service rendu. C’est par l’éducation et par un renversement des valeurs que cette mutation s’opérera. C’est parce qu’on s’entête à inverser les rôles que les formules calquées ne marchent jamais. Ce n’est pas par le haut que le progrès social sera réalité. C’est du bas que les exigences en feront mode de gouvernance et besoins incompressibles. Et, c’est de ce point de vue que l’anachronisme de l’élite s’illustre en déphasage de l’ordre historique. Il nous faut un homme ou une femme qui porte l’idéal du renouveau. Une âme de feu qui vainc et convainc par la force de ses exemplarités.

Birame Waltako Ndiaye

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4 Commentaires

  1. Je me rappelle que Wade lui trouvait que ce sont les magistrats qui ne veulent user de l’indépendance qu’ils ont de fait. Wade disait qu’il les (les magistrats) voyaient comme ces anciens esclaves qui, affranchis, faisaient quelques pas pour revenir à leur ancien maître pour dire qu’ils ne peuvent pas vivre libres.

  2. Ce n’est pas parce que des ignorants ou faibles d’esprit (exécutif ou législatif peut faire partie de ce lot) cherchent des raccourcis d’argent pour se faire respectables, notoriété et briller que le magistrat ou juge doit faire de même, c’est à dire les suivre. Ousmane Sonko, Nafy Ngom Keïta, le Colonel Ndao, le commissaire Cheikhna Cheikh Keïta, Mody Niang, le professeur Malick Ndiaye, le professeur Amsatou Sow Sidibé et j’en passe sont ils meilleurs qu’eux? Doivent ils accepter que Sonko et les autres qui ont sacrifié leurs immenses privilèges pour défendre le peuple et le pays soient meilleurs qu’eux? La construction d’un pays, quel qu’il soit, requiert la participation de toutes les couches de ses citoyens. Si les juges et magistrats font comme Sonko, Ngom Keïta, Colonel Ndao, commissaire Keita, Mody Niang, Malick Ndiaye, Amsatou Sow Sidibé etc, alors le pays se mettrait sur les railles. Si la justice fait comme la justice du brésil par exemple qui a enquêté vigoureusement la présidente Dilma Rousef qui vient d’être débarquée pour une faute très mineure (mais aux conséquences désastreuse si on laisse prospérer) comparées aux scandales de chez nous, alors le pays se porterait mieux. Le peuple n’y est vraiment pour rien. Le peuple s’est battu en se levant comme un seul homme pour rendre l’alternance possible à deux reprises alors que les magistrats et juges ont fait validés une candidature inconstitutionnelle et des résultats douteux. Donc Gacce Ngalama ce peuple. Il a fait sa part. Maintenant, s’il est trahi à chaque fois, ce n’est pas de sa faute. Si l’entité juges et magistrats ne font pas leur rôle dans la marche du pays, ce n’est pas non plus sa faute. Si les députés qu’il a envoyé le représenter à l’assemblée nationale ne font pas leur rôle et représentent finalement un président, ce n’est pas la faute du peuple non plus. La construction d’un pays requiert la participation de toutes les couches de ses citoyens: les juges et les magistrats (Justice) et les députés (Assemblée Nationale) qui doivent défendre le pays au lieu d’un homme et leurs intérêts, tout comme Sonko, les deux Keita, Ndao, Ndiaye, Sidibé, Niang etc ont défendu la nation exclusivement au détriment de leurs propres intérêts individuels en refusant d’être des Guewels ou larbins.

  3. Aussi il faudrait que l’on interdise la pratique malsaine des aadiya et autre pratiques ou des sommes enormes en liquide passent d’une main à l’autre. Qu’une personne veuille faire sa contribution au tarikha de son choix est une des libertés primaires de tout individu. Si l’acte est mû seulement par une conviction réligieuse, personne ne devrait être au courant. Il faudrait que nos khalifes, le peuple et l’état exigent que ne soient donnés que des chèques, donc traçable. De cette manière on s’assure que l’édifice de Bamba,Mawdo et autre ne soit entaché de souillure.

  4. « Il se trouve que lorsque les décisions des magistrats sont entachées de parti pris, c’est qu’ils ont sciemment, sous l’effet d’un nécessité ponctuelle d’enrichissement, torpillé les lois et règlements » vous dites. Cet enrichissement illicite est du problème de l’indépendance de la justice ou plutôt de l’impartialité? Car il se trouve qu’il y a une grande différence entre impartialité et indépendance. Et le magistrat qui torpille consciemment les lois et règlements pour tirer profit des justiciables, ceci ne s’agit il pas d’impartialité de la part du magistrat étant donné que ce dernier n’est soumis a aucune autorité ou influer par une personne ou un organe ?

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