Lobatt Fall parle – «Quand on est opérateur économique, il faut être du côté du pouvoir»

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«Pompiers» ne bruit plus de ses klaxons de véhicules d’antan, depuis le transfert de la gare routière aux Baux maraîchers. Tous les transporteurs ont quitté, mais Lobatt Fall lui, a choisi de ne pas bouger. Dans ce jadis centre du Sénégal aux départs et arrivées informels, reliant toutes les régions, le vétéran politique y gagne encore sa vie, et pas seulement dans le transport. Le téléphone sonne «Saygué», cette chanson reprise par un autre Thioubalo, comme lui, Baba Maal. Qui ne connaît pas cet as du transport public à la future Cité de l’émergence ? Rien d’un milliardaire, ou même d’un petit millionnaire. Il a laissé ses bureaux pour vivre l’ambiance à laquelle il est habitué : Restaurants, ateliers mécaniques, magasins… «Il est là, allez-y !» Ô surprise ! Le doigt de ce guide est pointé vers un hangar noyé par des gargotes. Un boubou violet, des cheveux encore noirs et un crâne qui ne résiste pas à ses 86 ans. L’ancien député du Parti socialiste, puis conseiller économique et social version Pds, et aujourd’hui conseiller départemental apr, ne renonce pas à la politique. «Je ne peux être qu’avec le pouvoir. L’opposition, ce n’est que des problèmes», dit-il, sans autre théorie. C’est à l’image de ses temps de parole à l’Assemblée nationale, exclusivement en pulaar, souvent mâtinés d’un français saccagé plongeant l’Hémicycle dans une séquence d’hilarité. Dans sa couchette de misérable, cachée par une couverture veloutée, l’enfant de Thioubalel Lao, rêve même d’un «troisième ou quatrième mandat» pour Macky Sall.  Il prépare son meeting de soutien au président de la République, parrainé par le ministre des Finances Amadou Bâ. Depuis «Pompiers», montez à bord avec Lobatt Fall.

Quel est le sens de votre meeting du samedi 23 avril ?
Après la victoire du «Oui» dans le département de Podor, nous avons décidé de travailler pour la réélection du Président Macky Sall en 2019. Nous sommes tous contents que notre département soit le premier en termes de voix en faveur du «Oui». Le meeting de soutien que nous comptons organiser samedi (demain), sous la présidence du ministre de l’Economie et des finances, Amadou Bâ, sera une occasion de sonner la mobilisation. Au-delà de Podor, nous comptons sur tous les ressortissants du Fouta pour que ce meeting soit un véritable succès. Je puis vous dire que certains doivent quitter les différentes localités de Podor ce vendredi pour participer à cette manifestation et soutenir le ministre Amadou Bâ et moi.

Pourquoi avez-vous choisi Amadou Bâ pour présider ce meeting ?
Je l’ai choisi parce que c’est d’abord un parent, mais aussi parce que c’est un militant du parti engagé. A travers lui, je souhaite que tous les ressortissants de cette zone soient unis pour soutenir le président de la République. Si j’avais vu un autre militant comme Amadou Bâ, qui a autant d’engagement pour accompagner Macky Sall dans sa volonté de faire émerger le pays, je l’aurais choisi.

Quand est-ce que vous avez rallié l’Apr ?
Avant même le premier tour de l’élection présidentielle de 2012, Macky Sall était venu me voir chez moi. Nous avons discuté et je lui ai dit que je le considérais comme un neveu. Donc, je ne le soutiens pas parce qu’il est devenu président de la Répu­blique mais parce c’est un neveu et un parent. Et nous ne ménagerons aucun effort pour nous donner les moyens de le faire réélire.

C’est déjà connu qu’en étant militant de l’Apr, vous soutenez son leader. Pourquoi alors aujourd’hui un meeting de soutien ?
Nous avons décidé de tenir ce meeting au lendemain de la victoire du «Oui» au référendum du 20 mars dernier. Et donc, nous avons estimé que cela méritait d’être célébré et, en même temps, que nous exprimions toute notre satisfaction à l’endroit du Président et de son ministre des Finances.

Vous dites que le département de Podor est premier, mais certains responsables de Matam aussi disent la même chose ?
Non ! Matam vient après nous. Si vous revoyez les résultats, vous vous rendrez compte que le «Oui» a engrangé plus de voix à Podor. Mais bon, c’est la même chose parce que nous avons le même but : aider le Président, son Gouvernement, son ministre des Finances.

Quel âge avez-vous au­jour­d’hui ?
Je suis né en 1930, je dois avoir 86 ans.

A cet âge, vous ne pensez pas que vous devriez prendre votre retraite politique ?
J’ai commencé à faire de la politique avec Senghor, Lamine Guèye, puis avec Abdou Diouf et dernièrement avec Abdoulaye Wade. C’est vous dire que j’ai soutenu tous ces hommes politiques.

Est-ce parce qu’il n’est pas facile d’abandonner la politique ?
Non ! Ce n’est pas cela, je le fais juste pour aider les gens. Quand on est vieux, il faut aider les plus jeunes. J’ai des sympathisants à qui je peux demander de m’aider à soutenir un homme politique. Chez nous, au Fouta, nous cultivons des valeurs com­me l’entraide.

Puisque vous avez pratiqué tous les chefs d’Etat. Qui est le meilleur parmi les quatre ?
J’ai la même considération pour chacun d’entre eux. Chacun d’entre eux a fait pour moi ce qu’il devait faire.

Pourquoi vous soutenez toujours celui qui est au pouvoir ?
Je suis au Sénégal et je suis un homme d’affaires. Quand on travaille dans le secteur de l’économie, il faut toujours être du côté du pouvoir. Ça ne sert à rien de se mettre à dos un Gouver­ne­ment. C’est seulement l’opérateur économique qui risque d’en pâtir. Donc, quel que soit le régime en place, si celui-ci accepte de travailler avec vous, il n’y a aucun problème. J’ai eu à travai­ller avec chacun de ces Prési­dents et en de bons termes.

Si, demain, il y a un autre président de la République, vous ferez pareil ?
Oui, je travaillerai aussi avec lui.

Vous ne vous souciez pas de la transhumance ?
Non ! Ce qui importe, c’est de travailler avec le Gouvernement en place.

Vous avez été député sous le régime socialiste, membre du Conseil économique et social sous Wade…
(Il coupe) J’ai été député pendant 10 ans, membre du Conseil de la République pour les affaires économiques et sociales (Craes)…

Et aujourd’hui, qu’attendez-vous du Président Ma­cky Sall ?
Je veux juste l’aider à atteindre ses objectifs. On ne peut pas dire qu’on n’attend rien de personne, mais je veux juste préciser que je ne le soutiens pas pour avoir un poste en retour.

Vous êtes conseiller dé­par­temental à Podor. Cela vous agréerait-il d’être mem­­bre du Haut conseil des collectivités territoriales ?
J’en ai entendu parler, mais on ne se nomme pas dans cette structure…

Mais si on vous le propose, allez-vous accepter de siéger ?
Bien sûr que je prendrai ce siège (éclats de rire).

Votre conception de la politique, c’est de toujours soutenir le président de la République…
Je ne lâcherai jamais quelqu’un qui est au pouvoir.

Vous ne voulez pas être dans l’opposition ?
Non ! Je ne veux pas être dans l’opposition.

Pourquoi ?
Parce que l’opposition, ce ne sont que des problèmes, des divergences, de la haine. Quand quelqu’un devient Président, il faut accepter que c’est la volonté divine et le soutenir. Et tout le reste n’a pas d’importance. Donc, quelle que soit la décision que je prends, je veux qu’elle soit celle de Dieu avec l’aide de ma famille, du Gouvernement et que le Président ne se fâche pas contre moi.

Qu’est-ce que le régime de Macky Sall a réalisé à Po­dor ?
Vous avez déjà entendu parler des projets qui sont prévus là-bas.

Ce sont des projets dans quels domaines ?
Dans le domaine des infrastructures, des routes, il y a différents types de projets qui sont prévus dans cette zone.

Est-ce qu’ils sont en train d’être mis en œuvre ?
Oui, ils ont commencé à les mettre en œuvre.

C’est ce qui explique votre soutien à l’endroit du Prési­dent Sall ?
Je vous ai dit que c’est d’abord parce que c’est un neveu et un parent. Quand il passait dans ma zone, il disait : «C’est le village de mon oncle Lobatt.»

Mais quand votre «neveu» a eu des problèmes avec Abdoulaye Wade, vous ne l’aviez pas soutenu à l’époque ?
J’ai commencé à le soutenir depuis qu’il a commencé ses activités. A la veille de la Présidentielle, il est resté chez moi jusqu’à 23h. Nous avons partagé le dîner et pris du thé ensemble…

Mais à cette époque, vous étiez encore au Conseil économique et social…
Oui à l’époque, c’était le Craes.

Quelle analyse faites-vous de la situation du pays ?
Je veux juste qu’on aide le Président à avoir un deuxième mandat.

Dans vos activités, avez-vous ressenti le transfert de la gare de «Pompiers» vers les Baux maraîchers ?
J’ai décidé de rester à «Pompiers» parce que c’est ici que j’ai mes magasins, mon bureau, toutes mes activités tournent autour de cet espace. Rien n’a changé dans mes activités. Si ça n’a pas connu une hausse d’ailleurs…

Vous avez constaté une meilleure santé de vos activités ?
Je rends grâce à Dieu.

N’êtes-vous pas frustré par le fait que le Gouver­ne­ment ait transféré la gare à Pikine ?
Je ne peux pas être frustré parce que le Gouvernement a pris sa décision et je n’y peux rien.

Mais c’est une décision qui ne vous a pas plu ?
Tout ce que je peux dire, c’est que je ne peux pas quitter «Pompiers».

Est-ce qu’on peut toujours dire que Lobatt Fall est un homme riche ?
Je dis Alhamdoulilah, j’arrive à satisfaire mes besoins.

lequotidien.sn

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