Loups entre eux

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Il a été le premier à le déclarer. Abdoulaye Wade a fait des milliardaires. Avec de l’argent du contribuable, c’est indéniable. Et le voila échappant de justesse au sort du Sdf (Sans domicile fixe) qu’il aurait pu être s’il n’avait bénéficié de la disponibilité de quelques places, chez un « ami ».
C’est à peine si l’ancien président de la République du Sénégal, ci-devant créateur de milliardaires, ne se présente à l’opinion comme un banal ex-smicard, peinant à achever sa maison de retraite. L’ancien président serait-il dans la rue si Me Madické Niang n’avait mis sa maison à la disposition de celui qui en fit le ministre des Affaires Etrangères du Sénégal ?

Grossièrement, voila l’image qu’Abdoulaye Wade chercherait à donner de lui. Autrement dit, quand l’ex candidat à la présidentielle de 2012 sollicitait un nouveau mandat «pour achever les chantiers » qu’il avait ouverts, sa maison de retraite en (re)construction au Point E à Dakar, devait être de la liste. Les Sénégalais ont en décidé autrement et, à peine sorti du Palais, voila Wade pris en chasse par la meute. Président Macky Sall qui veut laver plus propre que le détergent-star de la publicité, n’a pas attendu d’occuper le fauteuil le plus élevé de la République pour lancer ses premières piques.

Depuis, la trompette embouchée par ses alliés – anciens et de circonstance – a été si forte que la cible a repris ses habits de bête politique. Wade ne se laisse pas enterrer. Au grand dam de ceux qui attendaient du secrétaire général national du Pds qu’il devînt un autre Senghor ou Diouf, en s’abstenant de « déclarations susceptibles de gêner » son successeur. Mais les auteurs de l’appel à l’adoption d’un certain «comportement républicain» ont-ils la même lecture que ceux qui voient dans la dernière sortie de Wade, la réaction d’un homme, « abusivement attaqué » ?
Quand Tine s’offusque

Alioune Tine relève que « jamais au Sénégal, un ancien président n’avait été aussi attaqué par le camp de son successeur », que l’est aujourd’hui le prédécesseur de Macky Sall.
En fait, les attaques sont dans la continuité d’un combat qui transcende les rapports de personnes entre Abdoulaye Wade et ses adversaires d’aujourd’hui, dont une bonne partie l’était déjà hier. On l’accusa – ou le suspecta, c’est selon – de vouloir « imposer Karim Wade » à la tête du pays, s’il avait été réélu. Puisque le fils de l’ancien président s’est jusqu’ici montré aussi bavard qu’une carpe, il fallait le secouer via celui qui est supposé être porteur de ses ambitions. Cela fait de la victime du 25 mars 2012, la cible par substitution.

Voici la lecture du président de la Raddho : « il semble qu’il y a une sorte d’acharnement à chaque fois qu’on parle de détournements de deniers publics. Karim Wade est la cible privilégiée ». L’ancien président du Conseil de Surveillance de l’Anoci et plus tard super ministre d’Etat ne peut, pour cela, en vouloir qu’à son père, alors seul habilité à nommer à des postes de ce niveau.

C’est vrai qu’à Wade fils on a beaucoup prêté. Au point de le désigner au milieu des années 2000, comme personnalité sénégalaise «interpellée à l’aéroport» à Paris, «porteuse d’une mallette» contenant 42 milliards de FCfa. La rumeur (un moment transformée en « scoop » pour la presse), prit une ampleur telle qu’il fallût la vigilance d’autres journalistes pour réaliser qu’une telle somme d’argent tiendrait difficilement dans un seul avion. L’affaire a surtout été dégonflée par le président Abdou Diouf, obligé de se fendre d’un démenti, alors qu’il était donné comme celui qui «sauva» Karim Wade, en «intervenant auprès des autorités françaises».

Des accusations de ce genre ont jalonné la gestion du pouvoir issu de la première alternance démocratique expérimentée au Sénégal en 2000.
Si un scandale en cache un autre

Scandolophages comme nous savons l’être, les politiciens ont souvent abusé de notre insatiable appétit, pour nous servir un os, chaque fois qu’ils ont le sentiment qu’une situation leur échappe. C’est cette analyse que l’ancien président du Sénégal doit avoir faite pour s’autoriser une sortie au vitriol contre tout ce qui bouge en face de son camp.
Les nouvelles autorités s’appuient sur une information sourcée Forum Civil, pour remuer l’épouvantail d’audits qui devraient permettre, entre autres résultats, de rapatrier pas moins de «430 milliards transférés» dans des banques étrangères. Les comptes appartiendraient à des ministres. Précision de taille : les mouvements de fonds auraient eu lieu durant les «derniers mois» ayant précédé la présidentielle de 2012. Subtil détail qui met hors du champ des suspicions, certains très proches collaborateurs d’Abdoulaye Wade «libérés» antérieurement de leurs charges gouvernementales.

Sauf que, comme le dit la cible par substitution – le père à la place du fils- il y aura besoin de chercher du côté de l’institution financière qu’est la Banque Centrale, pour y dénicher les inévitables complices si des faits aussi graves sont avérés. Ce ne sera pas tout. Abdoulaye Diop, ministre de l’Economie et des finances ne devrait pas pouvoir s’en tirer aussi facilement, même si son nom n’est presque jamais évoqué dans les scandales datant des «mois qui ont précédé» la dernière présidentielle. Et là, il y aurait problème.

L’argentier qui a le plus duré au poste sous le régime libéral, a été décoré il y a quelques mois, par un magazine londonien dont les experts disent qu’il fait autorité dans le monde de la finance internationale. Pour son édition 2012, soit dans la période des «mois précédant la présidentielle», «The banker», édité par le Financial Times de Londres, a vu en Diop, le «meilleur ministre des Finances d’Afrique ».

Le prix ayant été remis au récipiendaire en décembre 2011, on peut considérer que ce sont plutôt les 11 précédents mois qui ont été pris en compte. Encore qu’il serait bon que l’appréciation du travail du ministre tînt compte de ce que ce dernier avait fait de l’argent des Sénégalais, depuis son accession aux fonctions.

Selon Brian Caplan, Rédacteur en Chef du « Banker », la distinction « récompense les efforts et les résultats d’un homme à la tête d’un ministère au niveau duquel, il a su impulser de nombreuses réformes, qui valent aujourd’hui au Sénégal, une attention particulière des partenaires au développement et du secteur privé international ». (Le Soleil du 21 décembre 2011). Pas moins que çà !

De plusieurs hypothèses, deux : soit le ministre de l’Economie et des finances du Sénégal ne méritait nullement un tel prix, ce qui pose la question de la crédibilité du magazine spécialisé, soit le Sénégal de Wade était tellement liquide, que des milliards pouvaient circuler dans le pays à la barbe de celui supposé gérer ses finances. Dans cette hypothèse, ce sont ces «incontrôlés» du système qui ont fait voyager 430 milliards de FCfa dans l’ignorance des circuits normaux. Pourvu que ce ne soit pas comme la fameuse mallette de Karim Wade à Paris. Car le cas échéant, nous serions au début d’une affaire qui ne laissera pas intacte la crédibilité du nouveau pouvoir. Celle de ses sources non plus.

Dans tous les cas, les audits ne devraient être différés plus longtemps. Le minimum lorsqu’on se fait confier une chambre, c’est d’évaluer ce qu’on prend en héritage, au nom de la famille. Ce serait mieux si les éventuels fautifs devaient être inculpés, plus par leurs rapports à l’argent du contribuable, que par leur proximité avec le président de la République. Précédent comme en exercice, sans états d’âme ni humeurs vagabondes.

3 Commentaires

  1. L’ADAGE ROMAIN SELON LEQUEL LUPUS HOMINI LUPUS C’EST A DIRE L’HOMME EST LE OU UN LOUP POUR L’HOMME PEUT S’APPLIQUER AUJOURD’HUI AU SEIN DU CLAN WADE QUI S’ENTREDECHIRE.POUR SE BLANCHIR CHACUN ACCUSE L’AUTRE.MAIS ILS NE SAVENT PAS QUE CE BALLON QU’ILS SE RENVOIENT NE FAIT QUE LES CULPABILISER LA JUSTICE EST EN TOUT CAS SUR LA PISTE.

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