Me El Hadj Diouf : entre marteau et enclume par Bosse Ndoye

Date:

Les avocats peuvent être appelés à défendre différentes causes : des plus nobles aux plus abjectes. Leur honneur est de prendre en main des dossiers justes, méritoires. Mais leur profession peut aussi les amener à plaider des causes injustes voire minables. Certains parmi eux s’appliquent la clause de conscience – principe selon lequel un avocat n’est pas obligé d’accepter un dossier si le contenu ou le demandeur est contraire à ses convictions profondes – pour éviter de s’immiscer dans des affaires qu’ils jugent indignes de soutenir. D’autres, en revanche, n’hésitent pas à mettre « la main dans le cambouis » en acceptant presque tout ce qui leur est proposé. Parmi ces derniers, on peut citer l’un des plus célèbres et certainement des plus controversés, Jacques Vergès. Lui, le militant anticolonialiste, qui avait entre autres défendu avec bec et ongles Djamila Bouhired, célèbre indépendantiste du FLN, en la sauvant de la peine de mort avant de l’épouser plus tard ; lui qui avait vaillamment assuré la défense du fameux jardinier Omar Raddad, a aussi plaidé la cause de Klaus Barbie, l’un des bourreaux d’Auschwitz, comme il l’avait fait pour Carlos, le terroriste, qui a été accusé d’avoir organisé quatre attentats dans un train Paris-Toulouse; devant le siège du magazine Al-Watan Al-Arabi, rue Marbeuf à Paris à la gare Saint-Charles de Marseille et dans un TGV Marseille-Paris. Vergès avait même dit, dans le documentaire L’Avocat de la terreur: « J’aurais défendu Hitler (…) à condition qu’il plaide coupable ». Dès lors, ce n’était guère étonnant qu’une kyrielle de surnoms lui fût attribués. Entre autres: l’avocat des causes perdues, l’avocat des causes tordues, l’avocat du diable, le défenseur de l’indéfendable, pour ne citer que ceux-là. Tout ceci montre que certains avocats ne se tiennent pas toujours sur la ligne droite; celle que nombre de gens jugent plus sensée à suivre. Cela peut-être « compréhensible » dans une certaine mesure, car, dans un État de droit, tout accusé, fût-il le plus méchant des hommes, doit être défendu dans un procès équitable bien que l’avocat ait la latitude de choisir les combats qu’il veut mener.

Dans notre pays, la profession d’avocat, comme celle de douanier, n’a pas toujours été vue d’un bon œil. Si par le passé certains parents ne voulaient pas que leurs enfants exercent ces deux métiers – où l’on trouve d’ailleurs des bons, des moins bons et des mauvais comme dans tous les autres – c’est certainement parce qu’ils savaient à quel point on pouvait être exposé à la corruption et à l’argent facile, ou à la défense des causes qui ne sont pas toujours justes et nobles… En choisissant de se ranger du côté de Frank Timiss dans le combat l’opposant à certains de nos patriotes compatriotes qu’il accuse entre autres de diffamation dans la nébuleuse affaire Pétro-Tim, Me El Hadj Diouf, qui s’était autoproclamé « l’avocat du peuple » semble avoir agi en porte-à-faux avec les intérêts de ce peuple dont il prétendait être le fidèle serviteur. Un refus de sa part eût été d’autant plus symbolique qu’il avait été député de la République et les intérêts de son protégé – à en croire les médias – sont divergents de ceux du pays. Sa décision aussi surprenante qu’inattendue lui a par ailleurs valu, de la part du forum du justiciable, une plainte pour : « Défaut de patriotisme, troubles politiques, discrédit des institutions, sécurité compromise. » Bien que chaque citoyen ait le droit d’exercer la profession qui lui plaît, dans la mesure de la décence, l’attitude de Me El Hadj Diouf est symptomatique d’un des maux qui empêchent notre pays d’aller de l’avant. Comme lui, beaucoup de nos dirigeants, n’hésitent pas à faire prévaloir leurs intérêts personnels au détriment de ceux de la Nation si l’occasion de s’enrichir sur le dos de l’État leur est offerte. Dans ces conditions l’espoir d’émergence ne peut être que chimérique. Un nettoyage général est nécessaire dans notre landerneau politique, qui fait souvent penser à une écurie d’Augias.

Bosse Ndoye

Montréal

[email protected]

Auteur de : L’énigmatique clé sur l’immigration; Une amitié, deux trajectoires; La rançon de la facilité

 

 

3 Commentaires

  1. C’est quoi ce torchon? Maintenant tout le monde écrit, mais à lire leurs contributions, on se demande si ces gens là sont bien informés ou bien ils sont des idiots , ou ils prennent les sénégalais pour ce quils ne sont pas. Me Diouf ne s’est jamais proclamé avocat du peuple mais DEPUTE DU PEUPLE. Renseignez-vous bien cher Monsieur. Hitler, Goebels Claus Barbie ont été défendus par des avocats. Plus proche de nous Salah Abdelssalam avait des avocats jusqu’à avant hier je crois et Il aura des avocats le jour de son procès. Est-ce que les familles des victimes ou la société française ou la presse a eu à s’attaquer à ses avocats demissionnaires ou à celui qui le defendait en Belgique avant son transfèrement en France par des contributions ou par des sorties dans la presse pour unsulter ses defenseurs ? Les exemples sont nombreux. Me Diouf n’est pas un vendu, tous ceux qui l’insultent ne sont pas plus patriotes que lui. Il n’y a pas un sénégalais qui aime plus le senegal que ce saloum saloum. Ke comprends qu’on ne soit pas d’accord avec lui en politique, mais laissez le faire son travail comme il veut. Sinon ou est la liberté individuelle chacun d’entre nous. C’est quoi cette pensée de G. Bush junior: tu es avec nous ou bien tu es contre nous? Mbass waay!

  2. Belle contribution. De Mars 2000 à nos jours c’est l’incompétence, la roublardise et l’enrichissement sauvage qui ont été érigées en valeur dans notre cher pays. Les cafards sont tous sortis de la boiserie; continuez de jouer votre rôle en jetant la lumière sur eux. Le moment viendra où les hommes et femmes de valeur reviendront au premier plan.
    Pour moi le choix de El Hadj Diouf en dit très long sur la position de Timis. Il est l’avocat de ceux qui savent ne pas avoir raison mais veulent brouiller les pistes. Toute personne aussi riche que Timis se sentant diffamé et blessé dans leur honneur aurait choisi un des vrais ténors du barreau. Mais il a choisi un bouffon.
    Pour ceux qui affirment qu’il ne fait que son travail, je rappelle qu’il a choisi de défendre ce dossier. Il affirme sans cesse appartenir à une descendance royale mais il est la preuve vivante que dans les cours royales, on trouve du tout.

  3. Quand le devoir de la maison du pere (patrie),se presente s occuper d autres
    choses ferait de vous un fils maudit .
    Telle est la croyance de nos ancetres .
    Sinon , les polemiques entre les acteurs politiques ont toujours existees « affaire Me Seye , chantiers
    de Thies , passeport de Taiwan … »
    mais tout cela restait dans le cadre d un scene menage senegalo senegalais, il nya pas le feu comme dit .
    Et voila que nos ressources petrolieres
    et gasieres ont ete mis sous parfum de corruption entre l etat du Senegal , la
    societe unipersonelle Petrolim de Aliou
    Sall et celle de Frank Timis .
    La meilleure des reactions de la part de ces derniers devrait etre de proner
    la transparence et l assurance dans cette affaire . Mais l etat du Senegal et Aliou sall ont transfere leur propre combat politique dans un champ prive
    En mettant en selle un cavalier nomme
    Timis (crepuscule ou declin cela va de soi) s ingerer avec arrogance et mepris
    dans notre vie politique pour des questions de souverainete qui sont les
    Ressources naturelles , Faits sans precedents de l independance a nos jours . C est une affaire de fierte nationale :un Defi patriotique
    Voila , la ou l avocat de Timis s est trompe de combat , ce n est une affaires 21personnes de l opposition ou de la societe civile mais un Affront
    Pour notre peuple souverain .
    Erreur fatale pour lui et les timisards car au crepuscule ( timis),l eclat du soleil perd de sa superbe :
    C est le declin
    ECOUTE PLUS LES CHOSES QUE LES
    ETRES ,
    LA VOIX du feu s entend …(Birago Diop)

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

CAN 2023

DEPECHES

DANS LA MEME CATEGORIE
EXCLUSIVITE

Violence coloniale dans Les otages, contre-histoire d’un butin colonial (Par Bossé Ndoye)

Contrairement à l’énorme battage médiatique ayant accompagné la « restitution »...

La France n’en a pas encore fini avec le Mali (Par Bosse Ndoye)

La France ne semble toujours pas avoir digéré son...

Quand les président élus minent la démocratie (Par Bosse Ndoye)

En parcourant How democracies die de Steven Levistky et de Daniel Ziblatt -...

Retour sur les raisons inavouées de l’intervention militaire française au Mali (Par Bosse Ndoye)

« Il serait temps que les Français comprennent pourquoi leurs...