Mouhamadou Bamba Ndiaye, ancien depute et SG du MPS/Selal sur les audits: «Que personne ne compte sur Touba pour se tirer d’affaire»

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L’audit est un outil ordinaire de contrôle de la gestion. C’est dans ce cadre que l’ancien député, Mamadou Bamba Ndiaye, demande au pouvoir et au Pds de baisser la tension en mettant fin à la politisation de ces dossiers. Dans cet entretien, M. Ndiaye estime qu’il faut faire très attention avec ces audits. Car, «de leur dénouement, dépend la stabilité de ce pays». Dans ce cadre, il exhorte la classe politique à épargner Touba de ces dossiers.

Vous faisiez partie de la coalition de l’ancien régime. Votre commentaire sur les auditions en cours ?
Je suis désolé non pas par le fait qu’il y ait des auditions, mais par la politisation outrancière de ces auditions. Quand je parle de politisation, j’accuse les deux parties, aussi bien le Pds que la coalition Benno Bokk Yaakaar à cause des commentaires, des déclarations fracassantes, des accusations. Il s’agit pour les Sénégalais de faire en sorte que la gestion des deniers publics soit contrôlée et que les éventuels fautifs soient sanctionnés. En tout cas, notre parti s’est toujours battu pour ça. Même quand nous étions dans la majorité, nous nous sommes toujours prononcés dans ce sens-là. C’est le cas dans l’affaire Idrissa Seck, en passant par l’Anoci, la privatisation de la Sonacos. Nous avons toujours demandé que des enquêtes soient menées, les responsabilités situées et les éventuels fautifs condamnés. Ça n’a rien à avoir avec des questions de personne. Il s’agit simplement de protéger l’argent public qui ne suffit pas à satisfaire déjà les besoins primaires des Sénégalais. C’est une question de principe. Dans le contexte actuel, bien qu’il y ait eu cette alternance du 25 mars, notre position ne peut pas évoluer. Nous sommes pour la clarté dans ces dossiers.

A votre avis, qu’est-ce qui provoque autant de bruit ?
C’est la politisation. On a l’impression qu’aucun des camps n’accepte que la justice fasse son travail en toute sérénité. Or, il est important que tout ça se clarifie. Une bonne partie des Sénégalais est convaincue aujourd’hui de deux choses : d’abord, qu’il y aurait des centaines de milliards de nos francs que les dignitaires de l’ancien régime auraient détournés et planqués à l’extérieur du pays. Ensuite, que la récupération de cet argent va permettre immédiatement de changer leur quotidien. Les gens y croient. Or, il faut que tout le monde fasse attention. Du dénouement de ces dossiers-là, dépend la stabilité de ce pays. Personne ne sait ce qui va se passer si au bout du compte, tout ça tourne en eau de boudin. Parce que les Sénégalais, surtout les jeunes, pourraient avoir l’impression qu’on a fait un deal pour faire passer cet argent éventuel par pertes et profits. C’est pourquoi je dis qu’au fond, il n’y a que les magistrats qui peuvent nous sauver. En faisant leur travail en toute indépendance. En faisant la lumière pour édifier les Sénégalais. Pour ça, je souhaiterais que le Pds mette fin à cette politisation outrancière et adopte une position de sérénité pour permettre à la justice de clarifier le dossier et de situer les responsabilités.

Que risque-t-on avec cette opposition qui bande les muscles ?
Je dis que tout ça n’a pas de sens dans le contexte actuel. Il y a des accusations qui sont faites, qui peuvent être fondées ou non. Il y a une justice qui est là. Il faut la laisser dire le droit.

Macky Sall avait prévenu qu’il ferait des audits. Vous pensez qu’il est sur la bonne voie ?
Il est inacceptable pour moi de dire que la transparence doit concerner seulement l’ancien régime. C’est cette justice des vainqueurs que je dénonce. Le plus important, c’est que l’audit concerne aussi bien les gestions passées et présentes telles que les opérations qui sont déjà bouclées comme la gestion des fonds pour les inondations, des fonds pour intrants agricoles… Si le pouvoir est dans l’optique de dire qu’il audite les vaincus et que s’il est vaincu demain, il sera audité, on passera notre temps dans des polémiques et le pays n’avancera pas. Je crois que le pays n’avancera en termes de transparence que quand l’audit sera institué comme un outil permanent.

Les interventions de Me Wade sont-elles selon vous de nature à mettre de l’huile sur le feu comme cela se dit ?
Je pense que Wade est un chef de parti qui est libre d’intervenir. Ce ne sont pas ses interventions qui me dérangent, mais cette politisation outrancière constatée autour de ces dossiers. Encore une fois, je voudrais que la sérénité soit de mise. Et que l’on laisse les magistrats faire leur travail sans pression et en toute sérénité.

Les personnalités indexées parlent d’acharnement et menacent de faire des déballages.
Tout ce déballage s’inscrit dans une logique de règlement de comptes politiques. Je crois que les Sénégalais n’ont pas besoin aujourd’hui de règlement de comptes. De toute façon, eux, leurs comptes seront difficiles à séparer. Parce qu’au fond, c’est les mêmes. Ils se sont séparés, il y a seulement trois ans. Ils ont le même parcours, ils se tiennent par la barbichette. Donc, ça va être nauséabond s’ils commencent à déballer. Mais ce n’est pas ce qui nous intéresse. Nous voulons que la justice soit à même d’avoir les bonnes informations pour dire le droit. Maintenant, le déballage, c’est eux dans eux.

De quoi a besoin, aujourd’hui, le Sénégal pour retrouver la bonne voie ?
Je crois que cette question de la transparence de la gestion des ressources publiques est importante parce que la corruption est un facteur de sous-développement. La bonne gestion permettrait certainement d’avoir beaucoup plus de fonds pour soutenir les prix… pour l’éducation, la santé, l’agriculture, etc.

Quel tableau dressez-vous de la situation politique nationale aujourd’hui ?
Il y a beaucoup de problèmes et tout le monde s’interroge. Il y a le flou. Parce que les gens s’attendaient à des baisses sur les produits de première nécessité.

A votre avis, pourquoi les promesses tardent-elles à se réaliser ?
En partie, c’est parce qu’elles étaient irréalisables. Surtout pour ce qui est des baisses. Aujourd’hui, le gouvernement tient le discours que nous avions avant le 25 mars. On leur disait de faire attention parce qu’il y a une libéralisation des prix. Que l’Etat ne peut pas baisser les prix à sa guise, à moins de les subventionner. Mais l’ancienne opposition a dit qu’elle pouvait le faire. Et aujourd’hui, le pouvoir dit la même chose que nous. C’est malheureux parce qu’au fond le pays n’a pas avancé d’un iota. Peut-être qu’il y a une alternance ; c’est tout. Et dans tous les domaines, c’est la même chose.

Ce week-end, il y a eu un chassé-croisé des hommes du pouvoir et de l’opposition à Touba. Est-ce normal ?
En tant que talibé, je vous dirai que tout le monde a raison d’aller à Touba. Maintenant s’il s’agit d’un espoir d’impliquer Touba dans ces dossiers-là, je pense que c’est peine perdue.

Votre parti ira-t-il seul aux prochaines locales ?
Nous sommes dans une phase d’évaluation, d’observation et de préparation qui va déboucher sur la tenue du congrès du parti qui définira les orientations. Comme d’habitude, nous chercherons des alliances. Mais, il ne s’agit pas de reconduire les anciennes alliances. Ça dépendra des réalités.

Quel commentaire faites-vous de la volonté du Sénégal d’intervenir militairement dans la crise malienne ?
En tout, je trouve que c’est une question qui mérite d’être approfondie.

Cette intervention est-elle nécessaire ?
Il est vrai qu’il y a une situation inacceptable. Parce que l’intégrité du Mali est mise en cause. Pour résoudre ce problème, il ne faut pas se situer du seul point de vue de la France qui a intérêt à ce qu’il y ait tout de suite une intervention pour la question de ses otages. Nous devons nous situer du point de vue des populations maliennes. Et de ce qui peut garantir la sous-région ouest africaine, de ce qui peut garantir la solidarité de la Cedeao et des pays voisins. Ensuite le Sénégal a un rôle à jouer dans la sous-région, notamment dans ce dossier malien. Je voudrais que le Sénégal soit parmi les pays qui vont exiger, en cas d’intervention militaire, que l’on préserve les populations et les installations civiles. Source : La Tribune

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