[Opinion] Quand les hommes de tenue singent les bandits

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Certes, les citoyens n’avaient pas une bonne image de leurs services de sécurité, mais jamais avant l’éclatement de l’affaire du ‘’trafic de drogue présumé dans la police’’, leur réputation n’avait été aussi mauvaise. Encore que cette grave affaire n’est que la dernière d’une longue liste de pratiques illicites dont sont coutumiers : policiers, gendarmes, douaniers et gardes pénitenciers.

Le mardi 16 juillet dernier, le journal Le quotidien mettait à sa Une, une rocambolesque affaire de trafic présumé de drogue au sein de la hiérarchie de la police. Depuis lors, cette information qui a surpris plus d’un fait couler beaucoup d’encre et de salive. « L’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants au cœur du trafic de drogue », selon le journal. Sur deux pages, notre confrère Bocar Sakho, exploitant un rapport du commissaire Cheikhna Cheikh Saadbou Keita, ci-devant ex-directeur de l’Office central de répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS), montre comment le directeur général de la police national (DGPN), le commissaire divisionnaire de classe exceptionnelle, Abdoulaye Niang, revendait la drogue saisie à des narcotrafiquants nigérians. Un commerce illicite qui a profité aux agents de l’OCRTIS et à certains gradés de la police, dont le prédécesseur de Niang, Codé Mbengue. En clair, certains cadres de la police recevaient des espèces sonnantes et trébuchantes en échange de la couverture des dealers. On ne sait pas depuis combien de temps ces pratiques mafieuses ont duré, ce qui est sûr c’est qu’elles ont la vie dure au sein de la police. Surtout que l’on raconte qu’au début de sa carrière à l’OCRTIS, dans les années 80, le même commissaire Niang a été accusé de faits similaires.

De l’avis du politologue Babacar Justin Ndiaye : « Une collusion mafieuse et corruptrice entre policiers gradés et trafiquants invétérés de drogue, même limitée et circonscrite, est malvenue dans un pays qui – suprême privilège – a été choisi, parmi et au détriment d’autres Etats de la sous-région, pour abriter le siège du Bureau régional de l‘Office des Nations-Unies contre la Drogue et le Crime ». Pour ce spécialiste des questions militaires et de sécurité, le risque est pour le Sénégal d’être logé à la même enseigne que tous les autres pays de narcotrafiquants du monde. « Concrètement, Dakar sera – si un vigoureux coup d’arrêt et une averse de sanctions n’interviennent pas – logée à la même enseigne que Bissau, la Babylone ouest-africaine de la drogue », met-il en garde.

TOUS CORROMPUS

Chez les citoyens, cette affaire de trafic de drogue dans la police n’a fait que confirmer la mauvaise presse qu’ils avaient vis-à-vis de la police. La sentence ne s’est pas fait attendre. « Ces policiers sont tous corrompus. Depuis l’agent de la circulation qui perçoit indûment de l’argent des pauvres chauffeurs, jusqu’aux chefs. Et personne ne dit rien. Parce que les patrons sont servis. C’est une police indigne qui ne veille plus sur la sécurité des citoyens. Il n’y a plus de ronde de la police la nuit, par contre la police de la circulation veille dans certaines villes jusqu’au petit matin pour soutirer de l’argent aux chauffeurs , fulmine Daouda Diop, étudiant en master II à la faculté de droit de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. D’après lui, « c’est une affaire de grands bandits qui est loin de connaître son épilogue ». Récemment, le dernier rapport de Transparency international a épinglé la police comme étant le corps le plus corrompu de l’administration.

AFFAIRE DES DOUANIERS

Pour une sombre affaire d’ « extorsion de fonds » sur fond de trafic de cocaïne, deux douaniers dont le chef de brigade, ont été arrêtés à Mbour, en compagnie du célèbre promoteur de lutte, Luc Nicolaï. Il s’agit du douanier Pape Massiré Thiam et de son supérieur hiérarchique, Abdou Khadre Kébé. Ils étaient accusés d’avoir introduit de la cocaïne dans le bureau du Président directeur général du Lamantin Beach hôtel pour, en retour, venir le faire chanter afin de lui retirer de fortes sommes d’argent. « C’est le douanier Abdou Khadre Kébé qui me demandait de l’argent pour étouffer l’affaire », a accusé Bertrand Touly, qui a été blanchi depuis lors par la justice. Les soldats de l’économie qui ont bénéficié d’une liberté provisoire, sont aujourd’hui placés sous contrôle judiciaire. Tandis que le prometteur de lutte, Luc Nicolaï, est toujours en prison.

LE CAS BADA FALL

Au mois de décembre dernier, une sombre affaire de corruption impliquant l’ancien régisseur de la prison de Thiès avant d’être muté à Louga, a défrayé la chronique. Bada Fall a été arrêté et placé sous mandat de dépôt pour « corruption », « escroquerie », « abus de confiance » et « complicité d’évasion » par le doyen des juges de Thiès. Il est reproché à M. Fall d’avoir, lorsqu’il était régisseur à Thiès, accordé des faveurs à Serigne Béthio Thioune, placé sous mandat de dépôt à la Maison d’arrêt et de correction de la localité pour meurtre, en échange d’argent. On l’accuse également d’avoir monnayé les grâces présidentielles qu’accorde le chef de l’Etat à la veille de la fête de l’indépendance, la Korité ou la Tabaski à certains prisonniers qui ont purgé la moitié de leur peine et on observé une bonne conduite. D’après l’accusation, Bada Fall réclamait 300 000 francs Cfa par détenu. Le pot aux roses a été découvert lorsque des prisonniers qui avaient versé leur argent n’ont pas été graciés. Et ce n’est pas la seule affaire scabreuse dans laquelle est cité M. Fall. Il a déjà été arrêté pour « complicité d’évasion » de la redoutable bande à Ino.

Des gendarmes, arrêtés et jugés pour abus de confiance, escroquerie ou divers autres délits ou crimes, font régulièrement à la Une des journaux. C’est à se demander si nos agents de l’ordre sont tous pourris…

Mamadou SARR

lagazette.sn

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