Simon: «Pour aller au Grand-Théâtre, j’ai vendu 2 terrains, emprunté 2 millions à ma femme et plus d’1 million à Bakhaw»

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Il est connu pour ses prises de position tranchées, mais il est tout aussi audacieux. Son nom sera à jamais inscrit dans les annales de la culture urbaine du Sénégal. Simon est le premier Hip-Hoppeur qui a osé aller à l’assaut du Grand-théâtre, temple jusque-là réservé aux «Mbalax-men ». Un autre défi de taille, c’est la sortie d’un triple album sur support clé-Usb. Autant de sujets qu’aborde le membre incontournable du mouvement Yen à marre, face à l’Obs. Avec de croustillantes révélations en boucle…

Simon s’apprête à aller à l’assaut du grand-théâtre, une grande première pour le mouvement Hip-Hop. Quel est votre état d’esprit à quelques jours de l’événement ?

Je suis très confiant et très heureux, puisque le premier objectif est atteint. Je vais me produire à guichets fermés, parce que les tickets ont tous été vendus. Il ne me reste plus qu’à peaufiner certains détails du spectacle avec certains artistes qui viennent d’arriver de voyage. Il y avait également le problème de la clé Usb (support de son nouvel album leader) qui me contrariait un peu. Je pensais que cela ne serait pas disponible avant le spectacle du 20, mais tout est rentré dans l’ordre. Je suis particulièrement fier d’être l’auteur du premier album sous support clé-Usb en Afrique et dans le Hip-Hop international. Jusqu’ici, j’arrive à relever les défis. A part la fatigue qui commence à se faire sentir, il n’y a que du bon.

A quoi peut-on s’attendre le jour J ?

J’ai répété avec trois formations musicales différentes, dont le «Waliyane Band», qui va assurer la première partie. La deuxième partie sera une surprise car, beaucoup seront étonnés de me voir dans ce registre. La soirée sera clôturée en beauté avec un Disc Jockey en featuring avec toute la crème du mouvement Hip-Hop. Tout au long du show, il y aura beaucoup d’artistes invités comme Idrissa Diop, Aïda Samb, le Xalam 2… Yousou Ndour était prévu, mais malheureusement, il doit se produire en Gambie. Toutefois, il nous a concocté une petite surprise qu’on diffusera le jour du spectacle.

«Les guichets fermés servent de répartie à ceux qui ne me croyaient pas capable de faire salle comble»

Vous dites avoir épuisé les billets d’entrée à 4 jours du show, alors que d’aucuns doutaient de votre capacité à faire salle comble…

C’est vrai que j’ai entendu cette polémique, mais je pense qu’il fallait répondre par les actes. Aujourd’hui, les blocs de tickets vendus serviront de répartie à ceux qui ne me croyaient pas capable de faire salle comble. 1800 places, ce n’est pas grand-chose, ce n’est pas un défi pour le mouvement Hip-Hop. A plusieurs occasions, cela s’est vérifié. Là où on pouvait s’inquiéter, c’était peut-être par rapport aux prix d’entrée, entre 5000 et 10000 F Cfa. Il faut avouer que ce n’était pas à la portée de tout le monde, mais nous avons aussi un public cadre, qui nous suit depuis nos débuts. Ces gens-là ne peuvent pas venir dans les concerts et se mettre debout tout au long. Il faut qu’on les prenne en compte, parce qu’on rappe pour tout le monde.

N’avez-vous pas quelques appréhensions par rapport à la sécurité. C’est assez commun que les manifestations des Hip – hoppeurs se terminent en queue de poisson ?

Vous savez, la première fois que le grand-théâtre a subi des dégradations, ce n’était pas à cause d’une manifestation d’un artiste. C’était plutôt lors d’une soirée religieuse. Dans d’autres lieux tout aussi fascinants, le mouvement Hip-Hop s’est produit sans dommages. Il suffit d’un peu pour que les gens se mettent à nous dénigrer. La violence est aussi présente dans les navétanes, la lutte, et même dans les mosquées. C’est pour dire que c’est humain et ça arrive. Je sais que beaucoup s’inquiètent, mais notre public est assez mature. Partout il y a des exceptions, mais il faut toucher du bois. De toute manière, l’organisation a doublé la sécurité. Deux camions de pompiers sont prévus, les renseignements généraux sont en alerte, mais il n’y aura rien. Ce sera tout juste la fête du Hip-Hop.

La soirée va aussi consacrer la sortie de votre triple album en support clé-Usb. On dirait que la piraterie ne freine pas vos ardeurs ?

Nous sommes dans un milieu où il faut innover. La meilleure manière de le faire, c’était de réaliser quelque chose qui ne s’est pas encore vu dans la culture urbaine. Il y a en tout 52 titres, répartis en 3 parties. Ce sont des morceaux qui dorment dans les studios depuis 2006 et nous avons voulu contenter tout le monde plutôt que de les garder. Certains me disent qu’ils préfèrent quand je rappe, d’autres lorsque je slame. Il y en a qui adorent m’entendre chanter. C’est donc la fusion du rap, du slam et des vibes qui a donné naissance à cet album. Chacun pourra y aller avec sa sensibilité. Nous vivons à une époque où quasiment tout le monde se promène avec un smartphone, une tablette, un ordinateur. Ce qui fait que les clés Usb sont très pratiques, les gens auront le temps de le consommer. S’agissant de la piraterie, je pense qu’on n’y peut plus rien. Je préfère sortir ces titres, être piraté et que les gens se rendent compte qu’il y a un jeune Sénégalais, issu d’un pays sous développé du tiers-monde, qui a réalisé quelque chose que les Américains n’ont pas fait. Je crois que c’est ça la victoire. Il faut noter également que j’essayerai au maximum de visiter tous les lieux culturels pour présenter le produit.

«J’ai pris un risque pour que le Hip-Hop puisse relever la tête. Le grand-théâtre n’est pas un sens interdit pour nous»

Combien vous ont coûté l’organisation de cette soirée et la sortie de ce triple album ?

J’ai la chance d’avoir un studio avec des professionnels qui mixent et « masteurisent », je n’ai pas payé pour ça. Il en est de même pour les affiches, j’ai bénéficié de l’aide de mes amis. Gaston (rappeur sénégalais) m’a aussi été d’un grand apport pour les Cd. Pour les clés Usb, c’est un ami d’enfance, Babacar Guèye, ancien international sénégalais, qui a pris en charge le financement. Maintenant pour la soirée au grand- théâtre, j’avoue que j’ai vendu des biens. J’ai vendu deux terrains que j’avais à Diass, pour dire vrai. Il fallait montrer qu’on pouvait le faire, que le grand-théâtre n’est pas un sens interdit pour le Hip-Hop. Il est vrai que la location est chère, mais le jeu en vaut la chandelle. Au début, ce n’était pas trop évident, lorsqu’on sollicitait des aides, on nous méprisait. Toutefois, lorsque la campagne publicitaire a démarré et que la mayonnaise a pris, ce sont les sponsors qui couraient derrière nous. Pas plus tard que ce matin (hier), une boîte m’a contacté pour associer son produit au show. Le manager de Waly Seck m’a mis en rapport avec quelqu’un de très important au Sénégal, qui a donné sa participation. La société de téléphonie Orange, nous accompagne également, ainsi que le Groupe Futurs Médias (GFM), la ville de Dakar, Pape Sagna Mbaye, le maire de Pikine, Malick Diop, le maire de Fann, Point E et Amitié, d’autres entreprises de la place et des bonnes volontés. Tous ces soutiens nous ont permis de tout mettre en œuvre pour que le show soit mémorable. Il y a aussi une dame qui n’a pas souhaité dire son nom. Elle a souhaité mettre la main à la patte, après avoir vu tout le tapage médiatique. Cela montre que mes efforts n’étaient pas vains. J’ai même pris deux millions dans le compte de ma femme. Bakhaw de Da Brains, m’a prêté 1 million et poussière. Buzz Events (agence d’événementiel) a aussi mis ses moyens. Cela a porté ses fruits. J’ai même refusé des sponsors.

Pourquoi ?

Par principe ! C’est clair que j’ai toujours besoin d’argent, mais je refuse d’associer mon image avec de l’alcool. Si les sponsors me courent après, c’est un signal fort pour le Hip-Hop. Beaucoup croyaient que nous avions les financements avant, mais ce n’était pas le cas. J’ai rassemblé de l’argent de gauche à droite pour pouvoir réussir l’événement.

A vos risques et périls. N’aviez-vous pas peur d’un fiasco ?

Lorsque je venais d’installer ma boîte, j’y ai investi presque 20 millions. Tout le monde me disait d’acheter des taxis ou d’investir dans l’immobilier, mais j’ai préféré mettre mon argent dans le Hip-Hop. Aujourd’hui, c’est le Hip-Hop qui m’a donné beaucoup de satisfactions. Lorsque je vendais mes terrains, mon épouse et le reste de ma famille n’étaient pas au courant. J’avoue que j’avais un peu peur au début, mais il y avait une voix à l’intérieur qui me poussait à foncer tête baissée. Aujourd’hui, je peux dire que je peux racheter ces terrains-là. Toute l’équipe sera payée, le BSDA (bureau sénégalais des droits d’auteurs) est payé. Nous pouvons dire que pratiquement, toutes mes dettes sont remboursées. Si je n’avais pas pris ce risque, nous n’en serions pas là. Le plus important pour moi, c’est que le Hip-Hop va relever la tête. D’autres pourront le faire et il y aura la même dynamique derrière.

Parmi vos invités, il y a en bonne place des « Mbalax-men ». Pourtant, dans votre dernier clip vidéo, vous les caricaturez, en prédisant leur «mort» artistique. Qu’est-ce qui explique ce revirement ?

C’était une façon de me faire connaître des « Mbalax-men ». Je n’étais connu que par le mouvement Hip-Hop, donc il fallait que je touche là où ça fait mal pour attirer l’attention. C’est ce qu’on appelle du Marketing-clash en Hip-Hop. Quand tu attires l’attention, tu deviens une réalité et à partir de là, tu fais passer tes messages. Mais ce n’était pas méchant et heureusement, ils l’ont à quelques exceptions près, tous bien pris.

A travers vos affiches publicitaires, on remarque un Simon sous trois apparences, en costume, en boubou traditionnel et en blouson. Qu’est-ce que cela traduit ?

Ce sont toutes les facettes que l’on va trouver dans l’album. Il y a des morceaux traditionnels, d’autres purement Hip-Hop et certains avec une couleur occidentale.

Pourquoi leader ?

Non pas parce je suis un leader, mais parce que j’aspire à en être un.

L’OBS 

 

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