Président Macky Sall : quels enseignements après l’avertissement du 20 mars 2016 ?*

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« Pour nous, le choix est fait. Nous sommes de ceux qui refusent d’oublier. Nous sommes de ceux qui refusent l’amnésie même comme méthode » (Aimé Césaire)

1. La victoire du OUI, et surtout, le nombre de votants pour le NON, lors du référendum du 20 mars 2016, confirme indéniablement l’ancrage manifeste de notre pays (Le Sénégal), au sein des nations politiquement matures, en matière de démocratie. Même si le NON n’est pas sorti victorieux, son résultat est, un sérieux avertissement adressé au Président Macky Sall et, en général aux hommes et aux femmes politiques (les politiques). Mais encore, loin des scores à la soviétique, avec un assez important taux d’abstention et, un NON qui a plus que résisté, cet ensemble impose, selon nous, au pouvoir de faire un décryptage objectif du message populaire. En s’exprimant de la sorte, une importante partie de la population a voulu spécifier, de nouveau, sa profonde répulsion de la fourberie ou, de la supercherie, en réitérant implicitement l’essence de son paradigme politique. Entre autres, proscrire la fausseté et, la déloyauté de la sphère politique car, des valeurs cardinales doivent être le soubassement de toute relation.

2. Au regard des conséquents moyens financiers mis au service de la propagande du pouvoir exécutif, pour faire campagne, et les méthodes très agressives, antidémocratiques et illégales, employées. Notamment, avoir débuté sa campagne électorale avant l’ouverture officielle de celle-ci, la corruption par l’achat de conscience d’électeurs, ou un positionnement et appui très marqués, du média d’Etat (la RTS). Faussant non seulement l’équilibre des forces, mais encore, en faisant dangereusement obstacle au principe du pluralisme démocratique et, d’équité en période d’élection. Malgré la défaite les « nonistes » peuvent se montrer satisfaits du résultat, avec peu de moyens, une très courte préparation, ou une inégalité dans la « parité des armes », et prendre date pour les prochaines confrontations électorales.

3. Encensé, par de funestes glorificateurs, le Chef de l’Etat s’est non seulement dédit (wax waxeet), mais s’est entêté dans sa volonté de présenter tout le bloc de texte à la votation populaire, en faisant fi de la déception provoquée. En prenant le risque de demander au peuple d’approuver ou, de rejeter la révision constitutionnelle proposée, le président Macky Sall a loupé de peu la correctionnelle, en ayant oublié que « les grandes décisions ne peuvent être prises contre un peuple » (Jacques Chirac). En effet, nul ne peut nier qu’il y a des dispositions introduisant une véritable avancée sur le plan démocratique. Mais, la réforme contient aussi plusieurs autres mesures vraiment néfastes, pour l’intérêt général. Et selon nous, dès lors qu’un seul point n’est pas à l’avantage du peuple, cela devrait conditionner le rejet de l’ensemble du texte par un vote négatif.

4. De notre point de vue, nulle sérénité ne doit nous habiter avec l’approbation du texte, car elle n’est point un cautionnement du retournement (wax waxeet), du président de la République. Cela ne devant pas être compris ou interprété, par certains politiques comme la légitimation populaire du mensonge et de la duperie, voire un blanc-seing donné, sans réserve. Aussi, une vigilance s’impose, car d’ici les prochaines élections, au-delà de plastronner, un risque certain est à craindre avec les folies de personnages tels que Farba Ngom, ou Moustapha Cissé Lô, même s’il a perdu dans son bureau de vote. Pour causes, ne sont guère de nature à inspirer confiance et sérénité, le comportement agressif ou, l’attitude et le verbe souvent abjects, de quelques partisans du pouvoir à l’égard des « nonistes », ou adversaires du projet de révision constitutionnelle, comme Idrissa Seck, khalifa Sall, Imam Mbaye Niang, Abdoul Mbaye et, d’autres encore.

5. Ainsi, avec un taux d’abstention très élevé, et un score très honorable du NON, les causes de non adhésion au projet constitutionnel sont multiformes, même, s’il est prématuré de les analyser finement. Toutefois, certains faits ou, actes ont beaucoup contribué ou, motivé le vote négatif de certains électeurs. Au-delà du reniement (wax waxeet), du Chef de l’exécutif, la stratégie du gouvernement, ou des partisans du OUI n’axant pas prioritairement leurs discours de campagne, sur le bienfondé ou, les réelles avancées de la révision, a rendu fort sceptiques des votants. Participent, aussi des raisons qui ont accentué le vote du NON, la très grande précipitation dans l’organisation du scrutin et, une criante absence de concertation, de pédagogie, et d’explication. D’autant que, comme moyens pour convaincre les électeurs, le pouvoir gouvernemental et ses alliés ont principalement concentré leurs actions, sur l’effet du porte-monnaie sans rabat, et pour leurs argumentaires, ils ont préféré la menace, les invectives, la désinformation, la dénonciation calomnieuse, et le dénigrement d’adversaires du projet.

6. De plus, le résultat obtenu par le vote négatif semblerait reposé, en outre, sur un patchwork de considérations exogènes, que substantiellement sur le contenu du texte. Car, plusieurs électeurs ont voté NON, par défiance envers le Président Macky Sall, pour le censurer. Cette situation découlant, entre autres, de sa politique incompréhensible, illisible, néfaste, et improductive, mais surtout, pour certains, l’omnipotence supposée de sa famille au sens large (Sall ; Faye ; Thimbo…), dans la gestion des affaires de l’Etat. Même si le OUI a remporté le référendum, en tout état de cause, le peuple vient de remporter une victoire très importante, confirmant qu’il sait apprécier non seulement ses intérêts mais, n’est plus disposé à déléguer aveuglément la gestion de son destin.

7. Certes, « la politique n’a ni yeux, ni oreilles, ni cœur ; en politique le vrai et le mensonge portent le même pagne, le juste et l’injuste marchent de pair, le bien et le mal s’achètent ou se vendent au même prix » (Ahmadou Kourouma). Néanmoins, pour réhabiliter la parole politique et surtout présidentielle, et regagner la confiance du peuple, et éviter que la fracture ne s’installe, après la sommation populaire, à notre avis, la seule issue pour le Chef de l’Etat est de s’inscrire dans la voie de la rédemption. En posant des actes forts, montrant qu’il a non seulement entendu le message du peuple, mais encore, en prenant de la distance avec sa cohorte de rustres embourgeoisés, très nuisibles au fonctionnement d’un Etat fondé sur des valeurs. Faute de quoi, sa cohabitation avec une partie importante du peuple risque d’être heurtée voire, reposer sur une prégnante inquiétude d’ici la fin de son mandat. D’autant que « le gouvernement ne peut dépendre pour sa vie et pour son autorité que du peuple » (Georges Pompidou).

8. Républicains, démocrates, et de surcroît légalistes, nous sommes sans voix devant la victoire du peuple, et la confirmation de son indéfectible attachement à la démocratie. Toutefois, nous ne saurions conclure sur le vote référendaire du 20 mars 2016, sans rappeler, à certaines personnes et, en particulier à des journalistes, qu’il n’y a rien de plus odieux que d’exceller vilement dans la calomnie, la diabolisation, l’intimidation et/ou les insinuations. C’est pourquoi, à l’exemple de Madiambal Diagne, ils devraient, à notre avis, longtemps méditer la justesse de cette sagesse doctrinale, à savoir « le droit de savoir des citoyens est à la source de la légitimité des journalistes : la responsabilité qui leur incombe est de créer les conditions de cette autonomie politique des individus sans laquelle le collectif démocratique n’est qu’une imposture ou une mascarade » (Edwy Plenel).

Daouda N’DIAYE
Juriste/Analyste politique (France)
* Article dédié à Ahmed DIOP

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2 Commentaires

  1. Macky Sall est un voleur et un corrupteur des consciences, mais on l’attend, d’accord avec DAOUDA NDIAYE, car il faut maintenant être gigilant avec MACKY. En s’exprimant de la sorte, une importante partie de la population a voulu spécifier, de nouveau, sa profonde répulsion de la fourberie ou, de la supercherie, en réitérant implicitement l’essence de son paradigme politique. Entre autres, proscrire la fausseté et, la déloyauté de la sphère politique car, des valeurs cardinales doivent être le soubassemCar, plusieurs électeurs ont voté NON, par défiance envers le Président Macky Sall, pour le censurer. Cette situation découlant, entre autres, de sa politique incompréhensible, illisible, néfaste, et improductive, mais surtout, pour certains, l’omnipotence supposée de sa famille au sens large (Sall ; Faye ; Thimbo…), dans la gestion des affaires de l’Etat. Même si le OUI a remporté le référendum, en tout état de cause, le peuple vient de remporter une victoire très importante, confirmant qu’il sait apprécier non seulement ses intérêts mais, n’est plus disposé à déléguer aveuglément la gestion de son destin.
    Merci encore Monsieur NDIAYE pour ton article oh combien bien écrit.

  2. Les rats commencent à sortir de leur trou ! Non seulement vous avez voulu manipuler les Sénégalais en interprétant faussement les 15 points de réforme, mais vous avez aussi voulu profiter du référendum pour contester la légitimité de Macky. Vous avez même agité l’idée d’une présidentielle anticipée en 2017 si le NON l’emportait. De qui vous moquez-vous ? Le peuple vous a montré qu’il n’est ni dupe ni naïf, et taxer les Sénégalais de corrompus ou d’inconscients après la victoire du OUI à plus de 60%, c’est leur manquer de respect. Un conseil : n’essayez pas de refuser votre défaite car c’est une véritable déculottée malgré le soutien actif de Walf Tv, Sen Tv, Xalima et plusieurs autres médias qui ont roulé à 100% pour le NON.
    Mais si vous contestez le vote très conscient des Sénégalais tout en leur manquant de respect, attention au retour de bâton en 2017 et en 2019. Car quoi qu’on dise, la tendance de l’électorat montre que les chances d’Idrissa Seck sont de plus en plus nulles pour la présidence. Je peux parier qu’un Gackou ou un Khalifa Sall le dépasseront aisément, même si les Dakarois les ont remis à leur vraie place ! Même le dirigeant de la Radho est contesté et Y en marre est réellement démystifié et ses animateurs ont intérêt à aller chercher un vrai travail. Quant aux autres, les Mame Adama Guèye (futur candidat), Decroix, Baldé, Adama Gaye, etc., ils sont bons pour la retraite au même titre que Niass et Dansokho. Acceptez humblement votre cuisante défaite et surtout fermez-la pour un bon moment pour laisser les gens travailler. Sinon, vous n’aurez ni rien compris ni encore rien compris, les Sénégalais n’aiment être pris pour des cons. Et attendez 2017 (pour nous servir la même rengaine) et 2019…

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