Le premier voyageur qui débarque pour la première fois dans la cité religieuse de Touba se laissera emporter par les nombreux chantiers en permanence et inachevés qui font partie du décor de la ville. Ces investissements à tout bout de champs ne reposant sur aucune base légale irritent au plus haut point les autorités de la ville, au premier chef, l’actuel khalife. Serigne Sidy Mokhtar Mbacké qui, pour mettre un terme définitif à cet imbroglio politico-social, a installé une commission indépendante.
(Correspondance) – ‘Rien ne sera plus comme avant. Désormais, tout ce qui a trait aux préoccupations personnelles du khalife général des mourides sera minutieusement pris en charge par un groupe restreint de compétences variées avant toute intervention dans la ville de Touba ou dans un autre domaine indiqué par le marabout’. La sentence est de Serigne Cheikh Bara Mbacké, fils de l’actuel khalife des mourides, par ailleurs membre du conseil rural de Touba. Une commission qui viendra allonger la liste des innovations prises par Serigne Sidy Mokhtar Mbacké, depuis son accession au khalifat. Toutefois, Cheikh Bara Mbacké Maty Lèye rassure qu’elle sera différente des autres commissions, à tout point de vue.
La discrétion dans ses interventions fera d’elle l’une de ses particularités mais surtout son droit de regard sur toute forme d’investissements dans la cité quel qu’en soit le domaine ou l’initiateur. Mais quelles que soient ses prérogatives, cette dernière préoccupation semble être le véritable mobile de la création de cette commission dont le ‘Jawrigne’ n’est pas encore connu. C’est en pleins échanges au cours du Comité local de développement sur le prochain Magal de Touba, hier, que des interrogations sans réponses relatives à l’utilisation anarchique des 60 kilomètres d’extension du réseau électrique que le gouvernement avait attribués au khalife d’alors Serigne Bara, ont été soulevées. Une redistribution qui, selon des chefs de village et des conseillers ruraux présents à la réunion préparatoire du Magal de Touba 2011, les a mis en mal avec le reste de la population.
A peine avalée cette grosse couleuvre, une autre préoccupation des conseillers reste entière. Il s’agit de celle relative au projet de 7 milliards que la Banque africaine de développement a injectés dans le secteur hydraulique à Touba. Cette intervention de la Bad dans la cité religieuse concernant la réhabilitation de conduites d’eau complètement ignorée par l’actuel président du conseil rural bien qu’étant à sa phase terminale de réalisation (85 %), amènera Abdou Lahat Kâ à inviter le chef du service régional de l’hydraulique de Diourbel à s’expliquer sur les tenants et les aboutissants d’un tel investissement dans le périmètre qu’il gère. Alassane Sam accentua l’inquiétude de l’assemblée pour avoir soutenu qu’il n’a ni de près ni de loin été associé à la réalisation de telles infrastructures à Touba. Cependant, l’hydraulicien régional qui capitalise plus de vingt années de services dans la localité aura cautionné le bien-fondé du projet. Cela au terme d’une énième rencontre à Dakar avec les principaux acteurs et des responsables du ministère de l’Hydraulique.
Rencontre au cours de laquelle Alassane Sam s’est vu tordre le bras par ses supérieurs hiérarchiques et désigner désormais comme maître d’ouvrage délégué du projet. Une confusion sans précédent dans le mode d’investissement à Touba qui, loin d’être la dernière, poussa le khalife à vouloir siffler la fin de cette cacophonie. L’on se rappelle la sortie au vitriol du médecin-chef de district sanitaire de Touba, lors du dernier séjour de la caravane de lutte contre le paludisme dans la localité. Docteur Moustapha Sourang avait vertement décrié devant une délégation de son ministère de tutelle les postulats fallacieux de travail sur lesquels se fondent les autorités médicales pour mener des actions dans la ville de Touba. ’Qu’on se le tienne pour dit, tous les indices sur lesquels le ministère de la Santé se réfère pour intervenir à Touba sont intégralement faux’, avait-il fait remarquer.
Vu tous ces dysfonctionnements, le chef de la communauté mouride s’est montré décidé à mettre un terme au désordre ambiant. Ce, par l’entremise d’une commission autonome.
Abdoulaye Bamba SALL
walf.sn
