Traque des biens supposés mal acquis – Le Forum civil dresse un bilan mitigé

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Le Forum civil a dressé hier, jeudi 11 juillet, un bilan mitigé de la traque des biens supposés mal acquis déclenchée par le régime de Macky Sall pour poursuivre les responsables libéraux soupçonnés de s’être enrichis illicitement. En effet, pour Birahim Seck du Forum civil, malgré les avancées significatives enregistrées dans la procédure, des failles sont relevées quelque part.

La traque des biens supposés mal acquis déclenchée par le régime du Président Macky Sall, avec la réactivation de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) et la mise en place des instruments de lutte contre la corruption, a suscité la polémique par sa démarche. Après plus de deux années de chasse aux sorcières, le Forum civil nous livre un bilan nuancé.

Selon Birahim Seck, membre du conseil d’administration du Forum civil, la traque a eu des effets positifs sur la psychologie des Sénégalais. « Je ne dirais pas que c’est une réussite mais je pense que c’est un bon début quand même. La traque a bien joué sur la psychologie non seulement des décideurs mais aussi des Sénégalais. Elle a montré que les biens publics ne peuvent plus être gérés comme cela se faisait auparavant. Donc, je pense qu’il y a un réveil psychologique avec la réactivation de la Crei », a-t-il indiqué.

Toutefois, Birahim Seck a déploré le fait que certains dignitaires de l’ancien régime, aujourd’hui proches du pouvoir et qui ont été cités dans des affaires de détournement de biens publics, sont épargnés par la traque des biens supposés mal acquis.

« Il y a un groupe de personnalités du coté du pouvoir qui ont été citées dans certains rapports d’institutions de la république comme la Cour des comptes et qui n’ont pas été interpellés. Je veux nommer Aminata Niane, ancienne Directrice de la promotion des investissements et des grands travaux (Apix), alors qu’il y a un rapport de la Cour des comptes qui l’a citée dans une affaire de détournement de deniers publics. Cela constitue une tache noire de cette traque des biens supposés mal acquis », se désole-t-il.

Par ailleurs Birahim Seck a magnifié l’engagement et la détermination de l’ancien Premier Ministre Aminata Touré à poursuivre les pilleurs de République. Ainsi, invite-t-il ses successeurs à avoir la même détermination pour aller jusqu’au bout. Car, dit-il, « ce qui intéresse les Sénégalais c’est la vérité tout simplement ».

LUTTE CONTRE LES CRIMES ECONOMIQUES – Birahim Seck donne des pistes

Pour lutter contre l’enrichissement illicite, ainsi que d’autres crimes économiques, l’État du Sénégal a mis des institutions ( Ofnac, Crei, Centif, etc.) qui sont chargées de veiller à l’orthodoxie de la gestion des deniers publiques. Mais selon Birahim Seck du Forum civil, ces institutions sont bien, mais leurs résultats dépendront des hommes qui les composent.

« L’efficacité d’un mécanisme de contrôle ne dépend pas simplement de la configuration de l’institution. Mais cela dépend aussi des hommes qui les animent », explique-t-il. Et de poursuivre : «Donc, on peut avoir un organe avec tous les pouvoirs, si on n’a pas les hommes qu’il faut, je pense que cette institution ne pourra pas fonctionner ».

Selon Birahim Seck, pour une lutte efficace contre la corruption et l’enrichissement illicite, il faut, à coté de ces institutions, légiférer sur d’autres domaines qui peuvent aussi faire l’objet de détournements : « Pour sauvegarder notre démocratie, notre économie et aller à une émergence, il faut disposer d’une loi sur les conflits d’intérêt. Dans le domaine des marchés publics, on va vers de fortes irrégularités avec les modifications proposées par le gouvernement notamment la hausse du seuil de validation des marchés publics, et la hausse des seuils au niveau de Dcmp »

Pour Birahim Seck, il faut également que l’État travaille à adopter des dispositions sur les contrats miniers. Parce qu’aujourd’hui, on se rend compte qu’il y a beaucoup de contrats qui sont signés par l’État et dont les Sénégalais n’ont aucune information sur l’argent qui est injecté dans les caisses du Trésor. Il faut aussi, note-t-il, une réglementation sur les fonds spéciaux parce que les deniers publics ne font pas l’objet d’une discussion au niveau du Parlement. « Donc, ces fonds spéciaux doivent être réglementés dans la loi de finance. Sinon, si on n’y prend garde, on risque comme c’est déjà arrivé, en cas de traque, les principaux concernés diront que c’est le Président qui m’a offert de l’argent. Donc il faut une réglementation des fonds spéciaux. Je pense que l’actualité en France doit être révélatrice avec le dossier de Sarkozy. Nous, au niveau de l’Afrique, quand on est au pouvoir, on est intouchable et quand on n’a plus le pouvoir aussi, on semble intouchable. Ce qui peut régler cela, c’est de donner une indépendance aux magistrats et qu’ils aient aussi le pouvoir de poursuivre tout le monde afin que les Sénégalais soient informés de la gestion de leurs deniers», a conclu Birahim Seck.

Déclaration de patrimoine et loi sur les conflits d’intérêt

Le responsable du Forum civil mettra l’accent aussi sur la volonté de l’Uemoa qui a mis en place un code de transparence dans la gestion des finances publiques et qui voudrait que les différents États membres de cette communauté prennent des dispositifs pour inciter les autorités publiques à faire une déclaration de patrimoine. Le Sénégal est en phase avec cette disposition avec le vote d’une loi mais seulement « ces dispositions ne sont pas exhaustives parce qu’il y a un certains nombre d’autorités ( procureurs, inspecteurs du trésor, inspecteurs du trésor, inspecteurs d’État) qui ne manient pas les deniers, mais qui peuvent être dans des dossiers à milliards».
Dans la même mouvance, il faut une loi sur les conflits d’intérêt, dira-t-il, parce qu’on se rend compte qu’au niveau du pouvoir, il y a une forte connexion entre le secteur privé et le secteur public et « il importe surtout revoir la réglementation de la loi sur les marchés publiques ». Se prononçant enfin sur la Crei, Birahim Seck dira : « Je pense que c’est ce qui est important. C’est vrai que la loi de la Crei qui date de 1981 a besoin d’être retravaillée. Je pense d’ailleurs que le Président avait annoncé la mise en place d’une Cour de répression contre les crimes économiques et financiers, à partir d’une proposition qui a été effectuée par l’Inspection générale d’État en 2013. Ça, ce sont des instruments qui peuvent suppléer la Crei. Maintenant, si on pense que cette Cour pourra faire le travail nécessaire et efficace par rapport à la Crei, pourquoi pas ?»

MINISTRES, DIRECTEURS GENERAUX ET ENRICHISSEMENT ILLICITE – Ces positions propices aux…guêpiers

Les postes de ministres et directeurs généraux sont très convoités. En effet, avec ces postes, on peut faire beaucoup pour son pays. Mais on peut aussi beaucoup lui coûter.

Etre ministre ou directeur général est très couru au Sénégal. Tellement couru que si un portefeuille de ministre est dévolu à une quelconque personne, des félicitations viennent de toutes parts et quand au contraire, une personne est virée du gouvernement, c’est la consternation et la désolation chez sa famille et ses proches. Ceci nous amène à nous demander si le poste de ministre ou de directeur général peut cacher d’autres avantages que ceux de servir son pays.

D’après Birahim Seck, membre du Forum civil, être ministre ou directeur général constitue aussi bien un privilège qu’il en cache. En effet, Birahim Seck affirme que des mécanismes d’enrichissement illicite peuvent être mis en place par un ministre ou un directeur général, s’il n’est pas animé par le devoir de servir son pays, mais au contraire, n’a d’autres ambitions que de se servir. Ces mécanismes sont divers et sophistiqués mais efficaces : « Quand on parle d’enrichissement illicite, il y a plusieurs portes », déclare-t-il.

Et de poursuivre : « parmi ces portes, on peut citer la porte de la corruption, active ou passive, la porte du détournement de deniers publics, celle du trafic d’influence, celle de la prise illégale d’intérêt et celle de l’escroquerie ». Birahim Seck affirme par ailleurs que cette prolifération de moyens de s’enrichir illicitement explique que quand on renverse la charge de la preuve, cela pose des problèmes à ces personnes qui sont ciblées : « avec toutes ces façons de s’enrichir illicitement, certaines personnes ont des difficultés quand la charge de la preuve est renversée. Parce que quand on renverse la charge de la preuve, cela ne pose aucun problème pour celui qui s’est enrichi licitement ». Il poursuit : « Mais pour celui qui utilise les portes que j’ai citées, c’est au contraire un problème et c’est tout à fait compréhensible. Et cela a été expliqué par le législateur dans l’exposé de motif sur la loi de 1981sur les répressions de l’enrichissement illicite ». Selon lui, à coté de ces portes, figurent « le blanchiment d’argent, et toutes sortes d’autres infractions ».

Birahim Seck est d’ailleurs conforté dans ses propos par cet expert comptable qui préfère garder l’anonymat : « Vous savez, les mécanismes utilisés de nos jours sont très sophistiqués et complexes. Et c’est justement cette complexité qui fait que la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) a été réactualisée », explique-t-il. Et de poursuivre : « Si la charge de la preuve n’est pas inversée, les autorités pourront passer le restant de leur gouvernance à chercher parce que démontrer que telle personnalité a reçu une rétro commission n’est pas très aisé. Et les rétro commissions sont justement les moyens les plus utilisés pour s’enrichir illicitement ».

Selon lui, les rétros commissions consistent à donner un marché à quelqu’un et qu’en retours, il vous rétribue. « Les rétros commissions et les commissions ont des similitudes sur la forme, mais c’est le fond qui les différencie, explique-t-il. Mais la commission est légale parce que tu as démarché le marché et on te paie. Mais en ce qui concerne la rétro commission, les règles d’attribution du marché ne sont pas respectées. Tu as utilisé des subterfuges pour attribuer le marché à quelqu’un, même s’il ne le méritait pas, et en retour, il te rétribue. C’est aussi simple que ça mais elle est très difficile à prouver ».

Par Sudonline.sn

1 COMMENTAIRE

  1. voilà les genres d’individus qui doivent se taire pour n’avoir pas étaient conséquents. les accusations d’enregistrement illicites viennent d’eux, avec des chiffres et les lieux de planque. quand la procédure est déclenchée , ils optent pour la gueule de bois, alors qu’ils devaient aller témoigner à la CREI et donner les preuves de leurs allégations. a mon avis , ce sont des marionnettes. ils font parti des comploteurs ont fait partir WADE. L’histoire jugera avant la justice divine

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