ENTRETIEN AVEC MAMADOU LAMINE NIANG PRESIDENT DE LA CHAMBRE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE DE DAKAR
« Les Chinois vont bientôt investir dans le secteur productif sénégalais »
Actuel Président de la Chambre de commerce d’agriculture et d’industrie de Dakar, Mamadou Lamine Niang candidat à sa propre succession évalue l’activité économique au Sénégal et en Afrique de l’ouest à la lumière de la frénésie de l’ entrepreneuriat chinois sur le continent . Entretien
La Sentinelle : Président, pouvez vous nous faire le bilan de vos 17 ans de gestion de cette grande institution consulaire ?
Mamadou Lamine Niang : Ecoutez, ce serait fastidieux de faire un bilan mais on va essayer de résumer car dans ce bilan il y a des choses immatérielles et des choses matérielles. La première performance, c’est l’intégration très forte du secteur informel au sein de la Chambre de commerce car auparavant on assistait à des bagarres très rudes entre acteurs de l’informel. Cela a permis d’apaiser les tensions et aujourd’hui il n’y a plus de batailles de positionnement entre le secteur formel et le secteur informel. Et puis nous avons donné une visibilité à la Chambre de commerce à l’échelle internationale. Nous recevons au moins une vingtaine de missions d’opérateurs économiques chaque année et nous en envoyons à l’étranger cinq ou six missions en moyenne par année. Ce sont des missions ciblées qui ont permis à nos membres de disposer de contacts intéressants. Beaucoup d’opérateurs économiques étrangers qui s’intéressent au Sénégal passent par la Chambre de commerce de Dakar. Il y a donc ces deux aspects et sur le plan purement matériel, nous avons créé un centre d’arbitrage et de médiation considéré aujourd’hui comme la référence en Afrique de l’ouest. Nous avons créé aussi des outils pour l’encadrement des opérateurs économiques tels que le centre de gestion agréé qui permet de passer du formel à l’informel et qui compte à peu près une centaine d’auditeurs par an. Nous avons aussi installé le centre de formalités des entreprises qui enregistre a peu près quelques 4000 formalités par an pour le compte des chefs d’entreprises qui gagnent ainsi un temps précieux dans ce domaine. Nous avons aussi créé l’espace du créateur d’entreprises qui permet à des jeunes qui ont une idée de projet de le formaliser grâce à notre encadrement. Nous avons aussi installé le cyber centre qui permet d’initier les commerçants au commerce électronique. De même, la fondation SEN FINANCES existe grâce à notre appui et à ce jour elle a déjà distribué près de 2 milliards de crédits dans la micro-finance.On ne peut pas avoir un bilan plus complet d’autant que nous avons fait des émules car les chambres de commerce de la sous-région viennent souvent s’inspirer de notre expérience. Maintenat, il nous faut construire aussi une nouvelle Chambre de commerce car Dakar s’est profondément transformée et une chambre de commerce reflète l’image d’une ville.
L. S : Comment appréciez vous l’économie sous-régionale en ces temps de crise économique ?
M.L.N : L’Afrique de l’ouest a cet avantage d’évoluer depuis la dévaluation du franc CFA sous un système économique intégré. Ce qui permet de disposer d’une soupape de sécurité par rapport à certains chocs. Lorsqu’aujourd’hui le marché sénégalais peine, les opérateurs se tournent vers les marchés ivoiriens ou maliens. L’harmonisation tarifaire et l’ouverture effective des frontières au sein de l’espace UEMOA a été quelque chose de décisif. Bien sûr, il existe des barrières visibles ou invisibles sur lesquelles il faut continuer de travailler de manière régulière. Mais ce système intégré ouest africain a été un amortisseur à certains chocs extérieurs sur le plan économique. Cela dit, nous avons un système bancaire qui n’est pas spéculatif. Donc même si nous avons subi les effets de la crise de manière indirecte, nous avons pu tenir le choc. A l’avenir, il nous faudra doper nos relations d’affaires avec les pays émergents d’Asie comme la Malaisie ou la Chine.
L. S : Justement, quelle est la place de la Chine dans votre stratégie d’attraction des capitaux étrangers ?
M.L.N : La place de la Chine est une place très importante, les Chinois sont très présents au Sénégal mais malheureusement nous n’avons pas encore enregistré d’investissements chinois dans le domaine industriel. Nos objectifs, c’est d’amener les Chinois à investir dans des activités productives. Je pense que nous y arriverons parce que l’AGOA va nous y aider. Les quotas qui existent entre la Chine et les Etats-Unis sont très rapidement dépassés par les Chinois. Certains produits chinois pourraient être fabriqués au Sénégal en délocalisation. Ils pourront de la sorte être exonérés à des quotas sur les marchés européens ou américains. C’est à force de fréquenter et de connaître davantage le Sénégal que les Chinois prendront le risque d’investir ici. Aujourd’hui les Chinois investissent au Cameroun, en Angola ou au Nigeria. Nous pensons qu’ils finiront par investir au Sénégal. Il faut savoir que leur domaine d’activités privilégié, ce sont les matières premières, les mines. Et puis la Chine a une forte demande en produits d’agro-industrie. Nous avons les terres et l’eau, donc il suffit de produire pour exporter. Le tourisme chinois se développe aussi .Donc on peut beaucoup leur proposer.
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