COMMENTAIRE DU JOUR – PAR MALICK NDAW
Ivre de liberté dans ce ciel qu’il n’aurait jamais espéré conquérir, il oublia la mise en garde de la raison et s’avança dangereusement vers le soleil dont la chaleur fit fondre la cire qui maintenait ses ailes. Des ailes d’oiseaux confectionnées avec des plumes collées entre elles. L’histoire de Dédale et d’Icare a ceci de tragique que dans un premier temps, le père demande à son fils de faire attention. Il voulait être sûr que son fils fasse correctement les choses. « Surtout, ne t’approches pas trop près du soleil, car sinon, la cire va fondre et tu vas tomber! », lui lança Dédale. Mais Icare n’a pas interprété les avertissements de son père comme des ordres.
Plutôt comme de simples conseils. Et pour que tout marche comme prévu, Dédale vole en tête, suivi de son fils. Au début, Icare suit les instructions de son père. Tous deux volent. Ils volent et c’est magnifique. Icare est si heureux- on imagine sans peine son bonheur- et il se met à voler… trop haut. D’autant plus haut qu’il s’approcha trop près du soleil. Le jeune Icare, devenu trop imprudent dans ce vol qui plaît à son audace, voulait s’élever jusqu’aux cieux. Les feux du soleil amollissent la cire de ses ailes ; elle fond dans les airs ; il agite mais en vain ses bras qui, dépouillés du plumage propice, ne le soutiennent plus. Il s’abîme dans les flots.
Un amateur qui examinerait le tableau sans en connaître le titre (Paysage avec chute d’Icare) ne remarquerait probablement pas la tache de peinture blanche, en bas à droite, entre le bateau et le pêcheur, qui représente une paire de jambes sortant de l’eau. Il le prendrait pour un paysage ou pour une figuration de laboureur au travail. Et même s’il repérait cette paire de jambes, il pourrait l’attribuer à un plongeur ou à un pêcheur de perles en train de se noyer (car rien ne dit que le propriétaire des jambes est tombé du ciel). Il lui suffit de prendre connaissance du titre et, connaissant l’histoire d’Icare, alors ces jambes deviennent le point focal du tableau. Tout le reste n’est plus qu’un arrière-fond, qui met en valeur la chaleur du soleil d’un côté (qui brûle derrière les nuages), le pauvre Icare de l’autre.
La tragédie antique se déroule aujourd’hui sous nos tropiques et nos yeux et, les passions n’y sont jamais absentes, dans la lignée des mémorialistes latins. Certes « Toute personne qui se voit reprocher une infraction est réputée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été légalement établie. Ce principe de droit est acquis et personne ne peut le dénier ». Il est aussi vrai que la Loi, expression de la volonté générale, est d’autant meilleure qu’elle donne davantage satisfaction à un besoin ressenti par la collectivité.
La figure du personnage trop ambitieux aborde ici le problème du désir de maîtrise et de puissance toujours grandissant de l’homme et de la méconnaissance de ses limites, au risque de « se brûler les ailes ». Sébastien Brant qui, dans son recueil de poèmes intitulé La Nef des Fous, fustigeait les faiblesses humaines au rang desquelles figure l’ambition excessive. Ne voilà-t-il pas l’illustration parfaite de ce que l’histrionisme et la démesure sont de mauvais conseillers.
Il s’agit d’avidité pour l’argent, le pouvoir ou la gloire. Ou d’égoïsme suffisant d’adultes trop sûrs d’eux-mêmes, avares de leurs biens matériels. Rien de nouveau sous le soleil, on ne rêve que de fric, de grosse bagnole, de blonde bien roulée et de baraque qui en jette. Or voler n’est pas tout.
Voler, c’est inscrire dans le temps de sa vie une trajectoire de maîtrise et de dignité, visible à l’œil nu par tous. Non pas donner l’exemple, mais être l’exemple.
Lui ne peut être comparé à l’astre du jour, il est juste une étoile, forcément filante. Pourtant des superstars, indécrochables celles-là, gravitaient autour de lui pour s’imprégner de son lustre. Ils perdirent leur éclat.
L’histoire contemporaine de Dédale et d’Icare a ceci de dramatique qu’à aucun moment, le père ne demande à son fils de faire attention. Il voulait être sûr que son fils monte le plus haut et pour que tout marche comme prévu, il le déclara « le plus intelligent de tous ! ».
Faisant fi de la maxime : Qui se frotte à la puissance, s’y consume et… s’abîme dans les murailles de Bicêtre.
SUGGESTION AUX PENSIONNAIRES DE REUBEUSS
ORGANISEZ UNE QUETTE AUPRÈS DE VOS NOUVEAUX COLOCATAIRES MILLIARDAIRES EN VUE D’AMÉLIORER LES CONDITIONS DE VIE DAN CETTE PRISON
trés bon article…que j’ai rerouté àmes enfants, mesniéces et neveux..merci
Les patrons japonais sont très forts. Pour contenir la mauvaise humeur des employés, ils ont trouvé une belle stratégie. En fait de mauvaise humeur des travailleurs, certains la jugent naturelle. Le travailleur déteste le patron, c’est presque normal. Parce qu’il faut être d’un haut niveau mental pour ne pas haïr le chef. Les gens d’en bas, détestent « forcément » les gens d’en haut. Et pour cause : lorsque les travailleurs se bousculent dans les bus et trains à 5 H du matin pour être à l’heure au travail, le patron dort. Comment ne pas avoir une mauvaise pensée pour ce gros idiot qui dort, quand les autres vivent le calvaire ? Surtout qu’à la fin du mois c’est lui qui touche plus. Lorsque le fils du travailleur est renvoyé de l’école pour 1000 F, le fils du patron est dans les pays étrangers pour des études qui coutent la vie de salaire du travailleur. Comment ne pas avoir une mauvaise pensée pour… ? Lorsque l’épouse du travailleur vit le martyr dans des maternités mal famées, celle du patron vit un accouchement de luxe dans des cliniques huppées. Comment ne pas avoir une mauvaise pensée pour… ? Bref la haine de celui d’en bas pour celui d’en haut est « innée ».Même si elle est acquise, elle est difficile à éviter. Autant alors chercher à la contrôler ? Et c’est là où les patrons japonais ont eu du génie. Puisque la haine remplit leur cœur quotidiennement (les travailleurs), puisque lorsque les cœurs sont pleins jusqu’à déborder, le travailleur devient dangereux (surtout pour le patron), autant trouver un moyen de vider régulièrement les cœurs de leur plein de haine, pour éviter qu’elle ne déborde. Et la solution a été d’offrir aux travailleurs l’image du patron pour leur permettre de déverser leur haine sur l’image et non plus sur le patron. L’image servira de déversoir et assurera le soulagement qui éloigne le débordement. Des posters géants des patrons furent épinglés dans les lieux isolés où passent les travailleurs. Le constat a été que chaque poster collé ne reste pas intact plus de deux jours. Après il fini par être déchiré, les yeux du patron exorbités, on lui ajoute des cornes par feutre, on y ajoute des insultes, etc.… Et à chaque fois que les posters deviennent illisibles, on les remplace par des neufs. Ainsi, ceux qui ont compris ont contrôlé ceux qui n’ont pas compris.
Mais lorsqu’on a compris et bien compris, il est loisible de faire un contrôle plus pointu que celui des patrons japonais. Parce qu’il s’agit, ici, d’un cas simplifié. On peut même faire autre chose de la même réalité. Au lieu de contrôler une haine « normale », on peut la fabriquer et en remplir des cœurs. Dans mes précédents textes, je vous ai parlé de la fabrique, par la presse, d’un Bouki Wade, je vous ai parlé de la fabrique des pôles de concentrations de haine que sont les Farba Senghor, Karim et autres. Mais ceux qui ont prêté attention ont aussi vu et vécu les différentes vidanges de haine. Par exemple : la « saisie » des biens de Farba, son arrestation pour pintade, et dernièrement « molesté » par les forces de l’ordre. Qu’il démente (comme dans le dernier cas), vous avez très peu de chance de le lire. Parce que ce qui est offert en lecture est choisi pour aller dans le sens de ce qu’on veut que le lecteur digère. Les différentes vidanges pour le cas Karim, aussi, sont en cours. Cela donne, en simplifié : « Haïssez le, Haïssez le, Haïssez le », puis suit : « Soyez heureux de savoir qu’il a mal, Soyez heureux de savoir qu’il a mal, Soyez heureux de savoir qu’il a mal ». Il va sans dire que si vous attendez que l’Observateur titre clairement « Haïssez Karim » pour comprendre, vous pouvez aller vous rendormir. Quand vous vous réveillerez, il fera bon vivre au Sénégal.
Alors, Fabrique et Vidange de haine, si cela s’arrêter uniquement dans le domaine politique, on ne trouverait pas redire. Car le plus idiot des votants, c’est celui qui croit qu’un Karim, qu’un Idy, qu’un Macky, qu’un Wade a mal parce que les journaux ont dit ceci ou cela. Si ces gens là avaient mal pour cela, il aurait eu une espérance de vie courte. Moi, je vous dis que même quand il pleure c’est du théâtre. Quand on n’a pas la carapace dure, on ne fait pas de la politique sénégalaise. La fabrique et la vidange de haine a des effets désastreux sur les fanatisés. Et surtout sur le plan religieux.
Dans mes prochains post, inchallah, je me suis fixé comme tâche d’expliquer ce que ce travail des médias détruit dans le corps, l’esprit des fanatisés. Je tenterai d’expliquer comment on fait monter petit à petit le paisible sénégalais vers ce mental rwandais qui a créé le génocide. Et ma conviction ferme est que cela est fait exprès.