C’est un Abdoulaye Bathily très en verve qui a présidé une conférence publique samedi à la Bourse du Travail de Paris. Dans une salle pleine à craquer et où tous les partis de l’opposition étaient représentés, le leader de la Ligue démocratique (Ld) a fait un réquisitoire contre le système Wade auquel il appelle les Sénégalais à mettre fin.
C’est un Abdoulaye Bathily très en verve qui a présidé une conférence publique samedi à la Bourse du Travail de Paris. Dans une salle pleine à craquer et où tous les partis de l’opposition étaient représentés, le leader de la Ligue démocratique (Ld) a fait un réquisitoire contre le système Wade auquel il appelle les Sénégalais à mettre fin. M Bathily, en se gardant de citer des noms, a attiré l’attention sur l’«obsession pour la présidence» qu’il a décelée chez certains leaders de Bennoo. Une obsession qui, à ses yeux, serait fatale pour l’opposition. Morceaux choisis…
Propos recueillis par Thierno DIALLO – Correspondant permanent
«Le Sénégal a aujourd’hui reculé sur tous les plans. Et Abdoulaye Wade (…) a donné le pays à son fils à travers l’Anoci qui organise la noce. (…) Chaque jour, il y a un scandale qui implique l’Anoci. Ils organisent une véritable tontine avec les ressources du pays (…) Je suis heureux que les jeunes aient pris l’initiative d’organiser une marche ici à Paris le 3 avril pour manifester contre le monument de la Renaissance. Nous-mêmes, au niveau de Dakar, nous allons organiser le même jour une marche de protestation. 30 milliards de FCFA pur un monument, c’est le plus grand scandale. Un forage dans un village de plus de 2000 habitants coûte 100 millions. Avec les 30 milliards du monument de la Renaissance, combien de forages on aurait pu construire au Sénégal, donner de l’eau potable à des milliers de paysans dans les villages? Combien de Sénégalais meurent à l’hôpital Le Dantec ? Je ne parle même pas des centres médicaux dans les régionaux (…) Abdoulaye Wade prend les terres de l’Etat, de l’aéroport de Dakar, les donne, à moins quatre fois le prix, à un opérateur qui les revend et qui prétend maintenant donner de l’argent au président pour construire un monument. C’est du jamais vu dans les annales de la gouvernance mondiale ! Et Abdoulaye Wade décide que 35% des produits de ce monument reviendraient à sa fondation. Tout le pays est opposé à ce monument. Les imams se sont réunis, il y a trois jours, pour décider de faire une prière contre le monument, le 3 avril. Comme il sait qu’il y a une écrasante majorité du pays opposée à ce monument, il fait un semblant de mobilisation en convoyant des Sénégalais de l’extérieur sous prétexte qu’il va faire voter l’organisation des Sénégalais de l’extérieur du 2 au 3 avril. Il y a deux jours à Accra au Ghana, c’est cet subterfuge qu’ils ont vendu aux Sénégalais en leur disant qu’il y aura un séminaire à Dakar les 2 et 3 avril. Ils sont donc en train de mobiliser un peu partout parce qu’ils savent que les Sénégalais de l’intérieur ne viendront pas à l’inauguration du monument. Il veut faire combiner l’inauguration de ce monument avec les fêtes de l’indépendance ; ce qui est totalement illégitime. Il invite des chefs d’Etat étrangers en leur disant : «il faut venir pour le cinquantenaire, mais venez le 3 au matin et non le 4». Comme ça, quand ils viendront, il leur dira : «il y a l’inauguration du monument de la Renaissance il faut m’accompagner (…)»
«COMBAT DE LIBERATION NATIONALE»
« (…) Abdoulaye Wade a fini de détruire le Sénégal. Tout le monde le dit, le proclame. Ce qui est important aujourd’hui, c’est quoi? Quelles perspectives pour sortir de cette situation ? (…) La solution des problèmes du Sénégal, c’est les conclusions des Assises nationales ; la solution, c’est l’unité de Bennoo Siggil Senegaal. Le niveau de destruction du pays est tel que celui que nous avons en face a si peu de scrupules que si nous allons dans la désunion, il va mettre en place son projet auquel il n’a jamais renoncé : mettre son fils au pouvoir. Abdoulaye Wade ne respecte ni constitution, ni loi, ni morale, ni les bonnes manières. C’est un être à part. Comment au Sénégal, devant les Sénégalais, un Sénégalais peut-il dire «mon fils est le meilleur ; les autres Sénégalais, quand je veux leur donner un ministère, il faut je le découpe en quatre pour qu’il puisse le diriger, mais mon fils est tellement intelligent que si je lui mets quatre ou cinq ministères, il les dirigera à merveille » ? (…) Devant un homme de cette nature, c’est un combat de libération nationale qu’il faut engager. Le combat de libération nationale exige l’unité de la nation contre son fossoyeur. (…) Le 22 mars a démontré amplement que c’est dans l’unité que réside la victoire. Le 22 mars, les Sénégalaise et les Sénégalais n’ont pas voté pour un parti, mais pour Bennoo. Partout où nous allons, ils disent que c’est Bennoo la solution. Bennoo, ce n’est pas les partis politiques seulement, c’est un mouvement national. Maintenant le peuple s’en est emparé.
Il se trouve en même temps que pour la première fois dans notre histoire nationale, non seulement nous avons l’unité de l’opposition politique, aujourd’hui nous avons tous les instruments pour redorer le Sénégal : les conclusions des Assises nationales. Mais les gens ne mesurent pas l’importance de ces conclusions pour la vie de notre pays (…) Ces vastes échanges ont donné naissance à ces conclusions pour sortir le pays de la crise. Nulle part en Afrique, on n’a vu une telle initiative (…)
Ce qu’il nous faut aujourd’hui c’est que Bennoo, comme nous sommes en train de le faire, s’adosse sur les conclusions des Assises nationales pour en faire un programme qui ne sera pas celui d’un parti politique, ni d’un candidat, mais un programme de rénovation nationale.»
«OBSESSION POUR LA PRESIDENCE»
«Quand les gens mettent en avant le débat autour de la candidature unique, je dis toujours que nous sommes en train de passer à côté de la plaque. Ce que les assises ont proposé est beaucoup plus important que d’être président. En réalité, les conclusions des Assises nationales mènent à une refondation de nos institutions. Jusqu’ici au Sénégal, -et c’est ce que les assises ont démontré- pendant les 50 dernières années, c’est le président de la République qui décide de tout dans la vie publique. C’est cette tradition politique, qui fait de la présidence de la République le centre principal des décisions, que les conclusions des assises demandent de rompre. Elles proposent de nouvelles institutions où le l’Assemblée nationale sera le centre d’impulsion de la vie publique, et non plus la présidence. C’est pourquoi ceux qui veulent absolument être président n’ont rien compris des conclusions des assises nationales. Si on les comprend bien et qu’on y adhère sincèrement, honnêtement, la présidence devient une institution beaucoup moins importante que l’Assemblée nationale qui est quand même le centre où s’exprime la diversité de la nation sénégalaise (…) Donc pourquoi cette obsession pour la présidence ; «il faut que je sois président, sinon je ne suis rien ?». Dans le niveau dispositif, un député sera aussi important parce qu’il aura la dignité de la fonction ; il sera indépendant de l’Exécutif, prendra les lois en toute connaissance de cause à partir des réalités de la vie nationale, de sa circonscription (…) Il nous faut un équilibre des pouvoirs dans le pays pour garantir la stabilité, la durabilité de nos institutions : sinon, nous serons à la merci de n’importe quel aventurier- et on a eu un aventurier en 2000. J’ai fais toute la campagne de 2000 avec Abdoulaye Wade ; nous avons pris les engagements ensemble. Quel engagement, n’a t-il pas pris devant les Sénégalais? Que sont-ils devenus aujourd’hui? C’est pourquoi il y a danger à laisser les destinées d’un pays entre les mains d’un homme, quelle que soient les professions de foi. On peut avoir un deuxième, puis un troisième aventurier, et le pays va sombrer (…)
Ce n’est pas un parti politique qui pourra appliquer ce programme, ce n’est pas un groupe de citoyens. Il faut bien sûr une direction, une équipe soudée autour de ce programme et une mobilisation populaire pour le faire aboutir. Donc, c’est un faux problème d’engager le débat sur des questions de personnes. Ce serait la meilleure façon d’escamoter complètement le débat et donc de créer les conditions de l’échec.
Respect des engagements
Je voudrais vous exhorter, en tant que militants de Bennoo ici en France, membres de la société civile ayant participé aux Assises nationales, à vous organiser, vous mobiliser pour le triomphe de cette cause. Nous n’avons pas le choix (…) Parce que le combat sera très rude contre des gens sans scrupules qui sont prêts à tout. L’un d’entre eux a d’ailleurs dit que «si Bennoo gagne, nous irons tous en prison». Il ne pouvait pas mieux dire ; il sait ce qu’ils ont fait. Ils vont donc se battre pour rester au pouvoir (…) Il est plus facile de réussir l’unité aujourd’hui qu’en 2000, si nous sommes sincères dans nos engagements (…) En 2000, il n’y avait que la Ca 2000 qui avait son programme et d’autres candidats qui avaient leur programme. Et les impératifs sont plus pressants aujourd’hui du fait qu’Abdoulaye Wade a ruiné le pays. Il l’a détruit économiquement ; il a détruit l’éducation, le système sanitaire, et par-dessus tout, les valeurs morales. Les Sénégalais sont réduits à rien. Aujourd’hui, c’est quand on vole, trahit, transhume qu’on est porté au pinacle. Mais quand on fait du bien, on est honnête, intègre, on n’a pas de place dans le système Wade. Devant une situation comme ça, il nous faut avoir un sursaut de conscience avant que notre pays ne sombre (…)»
«Sur le cas Macky Sall : ndlr) Moi, je parle de Bennoo et des engagements que nous avons pris. Nous avons signé la charte sur la gouvernance démocratique, et tous ceux qui l’ont signée savent très bien que ce qui est fondamental aujourd’hui, ce n’est pas de dire «je vais être président ou je ne vais pas l’être». Ce qui est fondamental, c’est comment construire un Sénégal nouveau sur la base des conclusions des Assises nationales.»
lequotidien.sn
C’est cette tradition politique, qui fait de la présidence de la République le centre principal des décisions, que les conclusions des assises demandent de rompre. Elles proposent de nouvelles institutions où le l’Assemblée nationale sera le centre d’impulsion de la vie publique, et non plus la présidence. C’est pourquoi ceux qui veulent absolument être président n’ont rien compris des conclusions des assises nationales. Si on les comprend bien et qu’on y adhère sincèrement, honnêtement, la présidence devient une institution beaucoup moins importante que l’Assemblée nationale qui est quand même le centre où s’exprime la diversité de la nation sénégalaise (…) Donc pourquoi cette obsession pour la présidence ; «il faut que je sois président, sinon je ne suis rien ?». Dans le niveau dispositif, un député sera aussi important parce qu’il aura la dignité de la fonction ; il sera indépendant de l’Exécutif, prendra les lois en toute connaissance de cause à partir des réalités de la vie nationale, de sa circonscription (…) Il nous faut un équilibre des pouvoirs dans le pays pour garantir la stabilité, la durabilité de nos institutions : sinon, nous serons à la merci de n’importe quel aventurier