On assiste de plus en plus à une caporalisation du champ politique par les hommes religieux. Cette tendance n’est pas du goût du Président-directeur général du Groupe Sud Communication. Babacar Touré s’en est fortement ému, hier, à l’occasion de la Journée d’études du Groupe Wal Fadjiri axée autour du thème : « l’entreprise de presse au Sénégal : Contraintes et perspectives d’avenir ».
En prélude à l’inauguration de leur siège, le 1er Avril prochain, les responsables du groupe Wal Fadjiri ont organisé, hier, une Journée d’études sur « l’entreprise de presse au Sénégal : Contraintes et perspectives d’avenir ». Cette rencontre, qui a enregistré une forte participation des acteurs des médias, a été un moment d’intenses échanges, de partage, de dialogue entre éditeurs et diffuseurs de presse, journalistes, membres du gouvernement, syndicalistes et différents acteurs intervenant dans le domaine de la presse. Parmi les panélistes, le président-directeur général du Groupe Sud Com, qui a présenté un exposé particulièrement captivant sur « l’évolution de l’entreprise de presse : que retenir de l’esprit des pionniers ? », n’a pas manqué de jeter un regard critique sur la sphère politique. Et c’est pour manifester sa totale désapprobation par rapport à l’intrusion intempestive des religieux dans le champ politique au détriment des hommes politiques. Abhorrant toute langue de bois, Babacar Touré a déclaré, sans ambages : « je suis désolé quand je vois que ce sont les chefs religieux, qui font, dans ce pays, le jeu politique ». Et le doyen de se désoler avec véhémence de l’attitude des hommes politiques, qui semblent avoir démissionné de leurs responsabilités. Aussi, rappelle-t-il, avec une pointe de raillerie, « je trouve inconcevable qu’un responsable politique dise : comme on nous a proposé un médiateur qui ne nous convient pas, je vais en parler à (Abdoul Aziz Sy) Junior ».
Sur l’évolution de la presse proprement dite, le patron du Groupe Sud Com est longuement revenu sur les principales étapes de l’évolution de la presse privée. Laquelle presse, rappelle-t-il, est « née d’une somme de frustrations » causées par l’absence d’un cadre d’expression des libertés. Après les pionniers comme Mame Less Dia, Boubacar Diop, d’autres générations de journalistes se sont battues, pour s’extraire des carcans de la pensée unique. Un combat qu’ils ont mené sans appui extérieur. « Les politiques ne se sont jamais battus pour le pluralisme médiatique. Leurs préoccupations étaient plutôt l’accès aux médias d’Etat », soutient Babacar Touré, qui juge primordial le rôle de la presse privée, lors des élections de 1988. « 88 est l’année, où le régime post-colonial a été mis en difficulté. Il y avait une mobilisation populaire sans précédent, c’était des concerts de casseroles, l’état d’urgence était instauré. La presse a joué un rôle primordial dans l’engagement citoyen. 2000 a été préparée par 88, parce que le Président Diouf était traumatisé, il ne sortait plus. C’est Jean Collin, qui était le maître du jeu, puis il y a eu Ousmane Tanor Dieng ».
Dans son intervention axée sur l’état des lieux, les difficultés et les mutations nécessaires de l’entreprise de presse aujourd’hui, Mamadou Oumar Ndiaye a mis l’accent sur l’environnement inadéquat, dans lequel celle-ci baigne. « Les entreprises de presse sont structurellement déficitaires. Elles font face à un endettement excessif vis-à-vis du fisc, de l’Ipres, de la Caisse de sécurité sociale », affirme le directeur de publication du « Témoin ». Devant ce tableau sombre peint par Mamadou Oumar Ndiaye, Babacar Touré lui, trouve qu’il sera difficile, pour une entreprise de presse, de s’en sortir dans un pays en crise, où les Finances sont en crise, où l’Économie est en crise.
Hawa BOUSSO
lasquotidien.info
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