Comme l’écrivait le professeur Joseph Ki Zerbo, Penda Mbow est tout simplement, « une femme d’Afrique » comme on en voit encore rarement de nos jours dans nos grandes villes. Naturelle et accessible, on garde de cette grande dame, l’humilité, le courage de ses idées et un engagement constant aux côtés des défenseurs des justes causes. Derrière le foulard qui fait penser à une «black muslim» à l’américaine, se cache, une femme pleine de vie et de charme. Une dame de cœur que les Sénégalais ont appris à mieux connaître au fil des années.
Un seul mot lui suffirait sans doute : engagement. Mais ne serait-il pas trop réducteur, quand on a pris le temps de découvrir la personne depuis son retour de ses études d’histoire en France jusqu’à son cheminement dans les facultés de l’université de Dakar. Si on ne la connaît aussi que par sa voix chaude que diffusent les radios et écrans de télévision, on n’aura qu’un petit bout de ce que cette femme représente réellement.
Penda, comme on l’appelle affectueusement dans les cercles universitaires, est aussi une femme dont la clarté des analyses, pour ce qui est l’histoire ancienne, de la sociologie politique, sont connus de ses étudiants et du cercle des intellectuels du monde. Pour dire qu’en dehors de l’image de la combattante qu’on lui colle, se cache une femme tranquille également qui fascine souvent dans ses cours aux amphis et dans les conférences.
Au milieu des années 1980, quand elle regagne le Sénégal après ses études en histoire, la jeune femme que nous voyions passer dans les couloirs de la faculté, ne laissait guère indifférent. Un petit visage d’ange derrière le foulard, montrait la beauté, mais surtout, la détermination d’une dame alerte qui aimait partager son savoir, s’impliquer dans la vie des facultés et la bonne formation des étudiants.
Un combat difficile à l’époque et encore plus ardu aujourd’hui. Depuis lors, la jeune femme a vu les années s’accumuler rapidement sans que des solutions réelles et adaptées ne soient trouvées dans la vie des universités au Sénégal. Une déception dont elle se plaît à aborder souvent les mille et une facettes avec ses anciens étudiants que nous avons été. Son engagement dans la politique part de ce fait d’ailleurs.
Au début des années 2000, la voilà qui voit un ses rêves se réaliser, avec le départ du pouvoir socialiste d’Abdou Diouf. Ephémère ministre de la Culture d’un des nombreux gouvernements de Wade, elle partira au bout d’un passage assez bref de ces cercles qui sans doute, ne lui convenaient pas trop.
Un brin téméraire et réaliste, la voilà qui s’implique davantage dans le combat contre le « despotisme éclairé » d’Abdoulaye Wade. C’est aussi au cours de cette période que la femme se fait vraiment connaître et apprécier des Sénégalais. Elle se présente aux élections locales dans la commune d’arrondissement des Hlm. Défendant l’idée de partage et de gestion commune des biens de la cité, elle se fera entendre par certaines personnes averties des problématiques de la bonne gouvernance des petites villes.
C’est aussi au cours de cette même période qu’une université américaine, au nom de son combat pour les justes causes, la démocratie et la condition de vie des femmes, choisit de la distinguer parmi les femmes qui font bouger l’Afrique d’aujourd’hui.
Une bonne nouvelle dans un océan de difficultés liées à l’absence de normes d’organisation pratiques et de fonctionnement de nos sociétés pour le futur. Une nouvelle aussi qui consacre le combat de la « chercheure » (en français québécois), pour l’accès à la connaissance des jeunes africains de demain. Lors des assises nationales pour poser les bases de la véritable construction de l’Etat de droit au Sénégal, la militante n’est pas reste.
Et cela, jusqu’à son engagement auprès du candidat Moustapha Niasse pour la présidentielle de février 2012. La place n’est pas usurpée. Citée en exemple par ce dernier qui se reconnaît dans ses qualités d’honnêteté et de courage, elle incarne le courage et la solidité de la femme sénégalaise quand l’heure est grave.
Pour la défense des justes causes
Pour la défense de toutes ses causes, il serait réducteur de présenter Penda Mbow comme une féministe. Sa démarche personnelle est beaucoup plus centrée sur des problématiques du monde en général et de l’Afrique en particulier. C’est une femme du monde elle aussi. Son discours en est une preuve. Son engagement dans le travail de recherche centrée sur l’ouverture d’une voie réaliste vers la nouvelle histoire que l’Afrique se devrait de réécrire pour elle-même, est aussi un des éléments forts de la construction du personnage.
Comme enseignante dans les universités, elle aurait pu faire comme d’autres avant elle, (les professeurs Yoro Fall, Mohamed Mbodji, Mamadou Diouf, tous du même département d’histoire) et partir sous des cieux plus adaptés et plus ouverts à la recherche sous ses parures presque dorées ; mais non ! Elle a préféré rester aussi auprès des siens : sa famille, ses amis, et surtout le Sénégal ; toutes choses qui lui valent aujourd’hui, tous ces combats. Femme du monde oui. Mais aussi, femme d’Afrique avant tout.