De sources sûres, à l’hôpital Albert Royer, des agents du personnel de facturation et de caisse reconnus coupables d’avoir détourné plusieurs millions de F Cfa, menacent tout bonnement de balancer le reste du réseau, « de grosses huiles de l’établissement sanitaire ». Résultat, des membres du Conseil d’administration qui s’est réuni avant-hier, pour statuer sur le scandale, ont bizarrement opposé leur veto au licenciement des « mange-mil » des fonds de l’hôpital pour enfants. Retour sur une affaire gérée dans la plus grande discrétion et qui se retrouve sur la place publique.
Les murs de l’hôpital Albert Royer bruissent de toutes sortes de commentaires. À l’origine, un détournement de plusieurs millions, qui, selon des sources dignes de foi, porte les empreintes du personnel de facturation et de caisse de l’établissement sanitaire. Et l’affaire est si grave que le conseil d’administration de l’hôpital s’est réuni, avant-hier, pour statuer sur le scandale. Sur le montant exact des sommes détournées, c’est encore le flou total. Mais ce qui est sûr, c’est que rien que pour une période de deux mois, c’est environ dix millions qui ont été volés des caisses. Lorsque le lièvre a été levé, renseignent les mêmes sources, s’en est suivie une enquête, qui a épinglé des agents du Service de facturation et de caisse. Ces derniers, qui ont d’abord demandé une confrontation en écritures, ont ensuite reconnu leur forfait. Chose bizarre, ajoute une source digne de foi, les fautifs ont été simplement relevés de leurs postes, pour être mutés vers d’autres. Commentaire d’un proche du dossier : « c’est la première fois que, dans l’histoire d’un scandale, des coupables, au lieu d’être traduits en justice, sont seulement réaffectés vers d’autres postes ».
Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, le conseil d’administration avait pris la mesure du licenciement contre les auteurs du détournement, mais le vote a basculé dans le camp des « contre ». Certains médecins croient dur comme fer que derrière ce vote, se cache une volonté de protéger les agents coupables. Motif invoqué : ces derniers ont menacé de claquer la langue et de balancer tous les membres de la chaîne qui sont impliqués dans cette affaire, expliquent nos sources.
Pour une affaire de détournement, Issakha Ndiaye, un ex-fonctionnaire de l’Etat, qui était en service à la Pharmacie, a été envoyé en prison, où il a séjourné durant cinq longues années et a vu sa carrière brisée. Les auteurs de ce détournement ne sont pas, quant à eux, inquiétés. En tout cas, « si on veut absolument faire la lumière autour de cette affaire, il faudrait que les autorités hospitalières saisissent la justice, qui, en remontant dans un temps lointain, se rendra compte que ces pratiques malsaines ne datent pas d’aujourd’hui », affirme un proche du dossier. Qui renchérit que, parmi les remplacements de ces facturiers qui défraient la chronique, figure un jardinier.
Mballo Dia Thiam : « c’est moi qui ai mené les investigations »
Joint au téléphone, le chef du Service administratif et financier de l’hôpital Albert Royer confirme l’existence du détournement. « Effectivement, c’est le conseil d’administration qui a statué là-dessus et a décidé de la mesure conservatoire qui a consisté à la mutation des agents coupables », affirme Mballo Dia Thiam. Qui ajoute : « c’est une mesure conservatoire, pour que cela ne se reproduise plus dans l’hôpital ». Quid de la protection réelle ou supposée dont bénéficieraient les auteurs du détournement ? Le secrétaire général du Sutsas dégage en touche : « personne ne protège qui que ce soit. D’ailleurs, c’est moi qui ai mené les investigations ayant abouti à la découverte de ce détournement. Quand quelqu’un commet ce genre de délit, la première mesure à prendre consiste en une sanction disciplinaire, et c’est ce que nous avons fait, en enlevant les agents incriminés de leurs postes ».
Aussi, dit-il, « lorsque ce genre d’affaires éclate, chacun essaie d’expliquer les faits comme bon lui semble, mais je peux vous assurer que les coupables n’ont menacé personne ». Et présentement, soutient-il, « c’est tout ce que je puis vous dire, pour l’instant, car le dossier est en train d’être instruit par les autorités de l’hôpital ». S’agissant d’une probable instruction du scandale par un juge, Mballo Dia Thiam préfère donner sa langue au chat.
Daouda THIAM
lasquotidien.info