Des journaux qui baissent rideau, cela arrive un peu trop souvent au Sénégal. Mais quand il s’agit de journaux estampillés proches du pouvoir libéral, l’on ne peut s’empêcher de faire le lien avec la chute de ce même régime, il y a seulement un mois. Parmi les victimes des dégâts collatéraux de cette débâcle, figurent désormais Le Messager et Le Point du jour, deux quotidiens que les Sénégalais ne verront plus dans les kiosques. Si pour le second, c’est un arrêt de travail qui a été signifié aux travailleurs, pour le premier, on parle plutôt «de congés pour le personnel» en attendant des lendemains meilleurs. Mais dans l’ensemble, les deux publications ont disparu du landernau médiatique et la raison en est «fort simple» selon Maké Dagnokho, le directeur de publication du Point du jour. Joint au téléphone, M. Dagnokho informe «qu’après avoir injecté près de 60 millions de francs dans le journal, le bailleur de fonds n’est plus en mesure de continuer».
Ce bailleur, Mamadou Diop «Decroix» en l’occurrence a d’ailleurs été «très naïf», poursuit M. Dagnoko qui explique que pendant deux ans et demi, le journal a été géré de «façon opaque et non transparente». Ce journaliste, ancien reporter du quotidien national, Le Soleil, précise également «qu’il n’y a eu aucun compte rendu ou justificatif. Même le fonds d’aide à la presse que le journal a reçu, on ne sait pas comment il a été géré.» Si les pratiques de gestion sont pointées du doigt, pour justifier cette fermeture des portes du Point du jour, c’est aussi sans doute parce que chaque mois, révèle M. Dagnokho, «une personne venait du Palais pour apporter de l’argent». Des sommes que Mamadou Diop «Decroix» n’est plus à même d’injecter dans le journal, après avoir quitté son moelleux perchoir du Palais.
Mais cette version est totalement rejetée par l’Administrateur du Point du jour. Birane Tamba s’indigne devant de telles accusations. Et même s’il accepte les raisons financières évoquées par Maké Dagnoko, M. Tamba les explique à sa façon. «C’est pas une question de bailleur. Le journal fonctionne avec ses propres fonds et les charges deviennent de plus en plus importantes. Et s’il y a des gens qui nous viennent en aide par-ci, par-là, on ne peut pas les rejeter.»
Après une tranche de rigolade, l’Administrateur du Point du jour qui reconnaît que son quotidien a clairement pris fait et cause pour le régime libéral, conclut que la fermeture du journal «n’a rien à voir avec la chute de Wade». Un fait que contredit Maké Diagnoko qui révèle que «c’est la Présidence qui finançait. On recevait chaque mois des millions et les dépenses devenaient faciles». Mais la chute du régime libéral a quelque peu chamboulé les cartes. Et sonné la fin d’une aventure, selon M. Tamba. Une fin qui affecte aussi une autre publication, Le messager. Là aussi des problèmes financiers ont été la cause de la fermeture, selon un des journalistes de l’organe qui a souhaité requérir l’anonymat. Toutefois il renseigne: «On nous a demandé d’arrêter parce qu’il y avait des problèmes d’imprimerie.» Toutes nos tentatives pour entrer en contact avec les responsables du Messager sont restées vaines.
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