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Harouna Dia: le palais de la République, c’est sa cour de récréation

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Transhumance
Harouna Dia, le sergent recruteur
Depuis l’accession de Macky Sall au pouvoir, l’homme d’affaires et « argentier » de l’Apr, Harouna Dia est au cœur de la République. Cette collusion d’intérêts privés et publics a plusieurs conséquences dont la plus visible reste la transhumance.

Qui est actuellement l’homme le plus puissant du pays ? Si l’on s’amusait à poser cette devinette, les observateurs les moins avisés avanceraient surement le nom du président Macky Sall. Mauvaise réponse. Et ils perdraient leurs kopecks pour une question assez facile. La bonne réponse est Harouna Dia. L’argentier du candidat Macky Sall a une influence démesurée dans les affaires de l’Etat. Cet intime du président de la République est actuellement à la tête d’une puissante camarilla. Soutien financier de l’Alliance pour la République (Apr) durant les périodes de vaches maigres, Harouna Dia bénéficie aujourd’hui d’un retour d’ascenseur. Son influence est telle que nul ne peut accéder au chef sans passer par lui. A la faveur de la victoire de son poulain, cet homme affaires qui a fait fortune dans la sous-région ouest-africaine est devenu le cœur nucléaire de la République. Ses médiations de l’ombre pèsent sur les décisions au plus haut sommet. « Le palais de la République, c’est sa cour de récréation », rapporte un hiérarchique. Plusieurs décisions importantes prises sous le magistère de Macky Sall portent son empreinte. La nomination d’Abdou Lô, ministre de la communication et des Tics, c’est lui, apprend-on. La réconciliation entre Moustapha Cissé Lô et Macky Sall, c’est encore lui. La désignation de son frère cadet Daouda Dia au poste de questeur à l’Assemblée nationale, c’est toujours lui. Le maintien du projet controversé de biocarburant de la société Senethanol, c’est lui-même. L’influence de l’homme d’affaires déborde de ses compétences traditionnelles pour submerger tous les champs de la vie politique, économique et sociale du pays.

Non content de placer les hommes à sa guise dans les différents démembrements de l’Etat, M. Dia fait aussi office de nouveau sergent recruteur pour le compte de l’Apr. Il compte massifier le parti de son pote avant la prochaine joute électorale de 2017. Pour y parvenir, Harouna Dia a élu domicile au Radisson Blu où il reçoit diverses personnalités de la vie politique sénégalaise et d’hommes d’affaires de tout acabit. Le ballet incessant de notabilités confirme sa toute-puissance dans la nouvelle nomenklatura. Farba Ngom, un proche louangeur du milliardaire explique cette situation : « Le fait de voir le Président n’est pas chose facile. Et c’est pourquoi certains sollicitent directement Harou¬na. Je vous assure que ce n’est pas lui qui demande aux gens de venir. Ce sont eux-mêmes qui demandent à le rencontrer parce qu’ils trouvent en lui quelqu’un de très ouvert et de très attentionné », plaide-t-il. N’empêche, le nom de Harouna Dia est cité dans le débauchage de plusieurs hommes politiques du régime sortant. C’est à l’issue de son entretien avec Abdou Rakhim Agne, secrétaire général du Parti de la Réforme (PR) que ce dernier a annoncé son ralliement à l’Apr. De même, le recrutement de Khoureïchy Thiam, un transhumant de carrière, lui est attribué. Dans l’entretien avec le journal Rewmi, Farba Ngom récuse la participation de son ami à cette vague de transhumance. Mais s’empresse d’ajouter que : « Toute personne animée par la volonté de soutenir Macky sans condition est la bienvenue dans le parti ». Un démenti qui confirme en filigrane les accusations.

Collusion

Dans cette nouvelle démarche imprimée par le milliardaire, affaires privées et publiques s’emmêlent dans une terrible collusion d’intérêts. La digue qui séparait jadis les rapports incestueux entre politique et fric a cédé. La cause ? La nature du financement opaque qui a porté l’actuel président au pouvoir. La place accordée à Harouna Dia dans la victoire de son ami, lui confère le privilège d’un collaborateur officieux omniprésent du chef de l’Etat. Le cas de Harouna Dia est une révolution. Une grande « rupture » dans les mœurs politiques en cours au Sénégal. Dans l’histoire politique, les souteneurs financiers des candidats dissimulaient pudiquement leur aide. Lui par contre, c’est un « bienfaiteur » qui fanfaronne et plastronne excessivement sur son rôle dans le changement de régime. Dans les médias, il revendique de façon décomplexée ce rôle. Justifiant de ce fait, la place importante des hommes affaires dans la victoire de Macky. Les manœuvres secrètes de ce « mécène » trop ostensible a de quoi inquiéter les plus crédules. Pourtant, le président Abdoulaye Wade avait mis en garde contre ce danger. En pleine campagne électorale, il soutenait que « les émigrés qui financent la campagne de Macky Sall s’ils étaient mus par une bonne volonté allaient investir dans l’éducation ou la santé dans leur terroir ». Parmi les personnes visées par cette saillie de Wade, figurent en plus de Harouna Dia, Abdoulaye Sally Sall, Khalilou Wagué, Amadou Konté entre autres. Après la victoire, cette alerte de l’ancien président a pris tout son sens. La posture pesante de Harouna Dia démontre que son soutien financier n’était en réalité qu’une mise placée sur le « jockey » Macky Sall. Son comportement renvoie à un joueur de loto qui vient de remporter le jackpot.

Baye Makébé SARR

lagazette

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