Dans l’optique de gouverner ensemble, les caciques de Benno Bokk Yaakaar ont, entre les deux tours de la dernière élection présidentielle, promis à la nation sénégalaise qu’en cas de victoire du candidat Macky Sall, les intérêts partisans seraient relégués en deçà des intérêts supérieurs de la patrie. «La patrie sera au-dessus des parti» disaient les opposants d’alors : Macky, Tanor, Niasse ou encore Idy. Une belle sentence qui, telle une formule magique, a conquis le cœur d’un grand nombre d’électeurs qui ont élu le président Macky Sall en lieu et place d’Abdoulaye Wade.
Cependant, en sourdine, des divergences n’ont pas manqué – et ne manqueront sûrement pas de se manifester au sein de la majorité présidentielle. Le «duel» entre Moustapha Cissé Lô et Moustapha Niasse pour le fauteuil de président de l’Assemblée nationale en témoigne. Comme en témoignent également les frictions entre l’Apr et Rewmi lorsque Mory Tine, le chef de cabinet de Idrissa Seck à la municipalité de Thiès a quitté Rewmi pour rejoindre le parti au pouvoir. «Je quitte le Rewmi de Idrissa Seck pour rejoindre l’Alliance pour la République de Macky Sall. Le devoir m’interpelle. En tant que Thièssois, je ne peux rester les mains croisées. Thiès est pris en otage par un seul homme. Notre ville ne mérite pas cela…» disait Mory Tine en retournant sa veste. Ces épisodes, parmi d’autres, matérialisent d’ores et déjà les querelles de positionnement et la course à la nomination qui minent la mouvance présidentielle.
Frères ennemis
Comme dans un pot pourri, on peut trouver du tout, ou presque, autour du pouvoir : il y a des apéristes sans ancrage idéologique explicite, des trotskystes ragaillardis, des centristes «guindés», des socialistes et des progressistes frères ennemis, ou encore, plus à droite, des libéraux transhumants. On y trouve aussi, dans l’antichambre communiste de Benno Bokk Yaakaar, un pan de la gauche panafricaniste et antilibérale. Sans compter la présence de mouvements citoyens, apolitiques à priori. Le président de la République lui-même déclarait être ouvert à toutes les sensibilités, pour peu que celles-ci convergent vers l’intérêt national. Et en appelant récemment à relativiser les idéologies, «sans pour autant encourager la transhumance» comme le disent si bien ses affidés, le Président de l’Alliance pour la République issu des rangs de Benno Bokk Yaakaar – et membre fondateur du mouvement des forces vives de la nation (M23) – faisait sien le souci de faire primer la patrie sur le parti. Prêt à recruter ses anciens frères de parti libéraux, il avait même convié les «bastions démocratiques du Parti démocratique sénégalais (Pds)» à se rallier à lui.
Certes, il est bon de ratisser large, d’impliquer toutes les sensibilités de la nation autour de la question nationale, mais comme dirait l’autre : «en s’entichant de n’importe quelle idéologie, on risque de gouverner n’importe comment». Les locales de 2014 et la présidentielle de 2017 (?) se profilent, l’heure est au gouverner ensemble. Le géant Benno Bokk Yaakaar, aux pieds d’argile démaquillés, a fort à faire pour que, comme promis, les conflits d’intérêts entre les partis qui le composent ne nuisent pas à la bonne marche de la patrie. Jusqu’aux prochains scrutins. Source : La Tribune
Benno Bokk Yaakaar : Un pot pourri idéologique
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