Les réalités socio-culturelles agissent de manière directe et indirecte sur le fonctionnement de l’entreprise (entendre ici toute structure, publique ou privée, de production de biens ou de services). Les fêtes religieuses et sociales régulières contribuent à renforcer l’absentéisme. Mais le mal n’est pas que socio-culturel, il est aussi lié au comportement de l’agent au travail.
Le travailleur sénégalais n’est pas productif du fait de son particularisme. L’affirmation vient de voix autorisées. L’environnement est déterminant pour la production de l’entreprise et la productivité de ses agents. Dans l’évaluation de la productivité, les critères de qualification (formation, compétence), de comportement de l’agent au travail ainsi que l’environnement interne (conditionnement de traitement au sein de l’entreprise, motivation, capacités managériales de la direction, etc.), et l’environnement externe, sont pris en considération. Il semble que l’environnement socio-culturel pèse lourd sur le travailleur. L’obligation sociale d’assister aux cérémonies familiales (baptême, mariage, funérailles) et, dans une moindre mesure, aux cérémonies religieuses (Magal, Gamou, Thiant, entre autres) contribuent à l’absentéisme au travail. Et lorsque la permission de s’absenter n’est pas délivrée par l’autorité hiérarchique, le repos médical de complaisance entre en jeu. Il faut ajouter à cela les nombreux jours fériés, tout au long de l’année.
L’amélioration de l’environnement des affaires pour laquelle le gouvernement a entrepris des réformes, doit prendre en compte ces paramètres. Car la productivité du travailleur est un élément que l’investisseur étranger potentiel prend en compte. Le succès de nombreux pays asiatiques vient de là. Par ailleurs, il existe une différence entre le temps de travail fixé et les heures de travail effectives. Il est de notoriété publique que certains agents de l’administration publique notamment, à cheval sur leur travail administratif et les consultances, pour certains et le commerce pour d’autres (surtout les femmes) ont tendance à sacrifier l’activité où le contrôle est moins rigide et pour lequel ils sont payés pour s’adonner à d’autres activités lucratives.
Selon le président de la Commission dialogue social et normes du travail au Conseil national du patronat (Cnp), Charles Faye, une étude réalisée par le Cnp avait révélé que l’ouvrier sénégalais a un rendement de 30 % par rapport à son homologue français. Il note, toutefois, que l’âge et l’état de santé agissent sur le rendement de l’agent, lorsque celui-ci fait un travail physique. Plus l’agent est âgé, moins il peut faire d’efforts et plus il s’absente pour cause de mauvais état de santé. Le problème se pose moins, cependant, quand le travailleur fait un effort intellectuel.
Le conseiller aux affaires sociales de la Confédération nationale des entreprises du Sénégal (Cnes), Gora Thiaw, estime, pour sa part que la responsabilité sur la non productivité est partagée. Au plan interne, dit-il, la capacité managériale doit être avérée. Le traitement salarial est un élément à prendre en considération, de même que la motivation des travailleurs et la protection sociale. En amont, l’entreprise doit veiller à avoir des ressources humaines de qualité. Le président de la Commission dialogue social et normes du travail au Cnp estime qu’il faille ‘restituer le sens et la noblesse de la valeur du travail’, par un effort participatif du travailleur et une motivation de ce dernier de la part de l’employeur.
La rigueur dans le travail, par ailleurs, fait plus défaut au sein de l’administration publique que dans les entreprises privées où il y a un impératif de résultats, accompagné de suivi et de contrôle tout au long de la chaîne. M. Faye, sur ce point, indique que l’on doit passer à une administration de développement, sans interférence politique, où seul la compétence, l’efficacité et le mérite prévalent. Il déplore ainsi le fait que l’on ‘recrute (uniquement) pour caser’.
Khady BAKHOUM
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