Peut-être qu’il serait préférable de ne jamais poser une telle hypothèse pour éviter de porter la poisse au peuple sénégalais ; au moins, pour une fois, il est nécessaire d’être superstitieux car ce serait comparable à une situation dans laquelle, Saddam Hussein, après avoir envahi le Koweït, recevait de la part de l’Onu la bombe atomique sur un plateau d’argent.
Dans ce cas, changeons de cap et demandons nous donc comment battre Abdoulaye Wade en 2012. Il ne sera pas nécessaire de s’y attarder à partir du moment où tout le monde sait qu’il ne peut aucunement remporter les élections ni au second et encore moins au premier tour comme en 2007 où malgré le maquillage, il avait pu bénéficier d’un soutien assez substantiel d’une bonne partie de la population.
Peut-être la question qu’il faudrait se poser, en ayant 2012 en vue, est de savoir comment le décourager à tripatouiller les élections grâce à une fraude massive et nous imposer ainsi un troisième tour.
Abdoulaye Wade n’a plus rien à tirer de l’exercice du pouvoir. Il serait légitime de parier que s’il n’en tenait qu’à lui, il nous l’aurait rendu volontiers. Mais son erreur a été d’y avoir mêlé sa famille sans lui poser de garde-fous car en ce qui le concerne, j’ose pronostiquer, qu’il a pris assez de précautions pour ne pas être mêlé, avec des preuves irréfutables, au moindre scandale tout en y étant le principal bénéficiaire.
Par ailleurs, âpre son mandat, il ne sera pas possible de le condamner pour avoir donné la priorité à sa statue plutôt qu’aux sinistrés des banlieues, aux délestages quotidiens ou d’avoir mêlé sa famille à la gestion de l’Etat. Probablement, si après les Locales de 2009, le hasard n’avait pas négativement frappé la vie privée de Karim Wade, cela aurait pu être sa dernière tentative de nous l’imposer. Impossible de lui reprocher d’avoir fait de son fils un ministre d’Etat même si ce super portefeuille ministériel n’est rien de plus qu’un lot de consolation de la part d’un père qui n’a pas su tenir un langage de vérité vis-à-vis de ses ombres pour les préparer aux exigences de la vie et aux aléas du destin.
Les sanctions qu’un élu peut endurer, à moins qu’il ne soit mêlé à un scandale, sont essentiellement électorales et cela passe par un scrutin transparent et le respect du verdit des urnes comme en 2000. Ceci est présentement le carrefour vers lequel toutes les forces vives de la Nation doivent converger. Toutes sans exception car le second point de ralliement sera en place lors du scrutin où il faudra lutter contre l’abstentionnisme et militer pour un vote massif contre l’actuel régime aussi bien au premier qu’au second tour. Pour atteindre cette forte mobilisation, il faut mêler l’utile à l’agréable à travers des concerts dans toutes les régions regroupant tous les artistes souhaitant l’éviction de Wade avec comme principal innovation un prix à l’entrée substantiellement réduit (pouvant aller jusqu’à zéro) avec la présentation de la carte d’électeur. Au second tour, la même formule pourrait être appliquée dans les grandes régions comme Thiès, Dakar, Saint- Louis, Kaolack et de préférence au même jour de la présence de Wade dans ladite région. Après une forte mobilisation et un taux de vote très élevé ce qui obligatoirement tourne à son désavantage, il ne lui reste plus qu’à maquiller les résultats. Pour prévenir une telle ignominie, il devrait être régulièrement publié des sondages, avoir dans chaque bureau de vote un représentant et un dispositif identique à celui de l’Onel en 2000. Quand il ne pourra plus changer les chiffres, il ne lui restera plus qu’à confisquer le pouvoir. Dans ce cas, s’il est prêt à payer un prix, nous devons être prêts à payer le double de ce prix parce que nous ne pouvons pas le louper en 2012.
Heureux est ce peuple qui a choisi de ne pas recourir à la violence pour resoudre ses problèmes politiques car, nous devons certes trouver une solution à ce danger qui nous guette mais nous ne devons pas saper la virginité sociale que nous avons héritée de nos aïeux. Pour avoir tenu pendant 10 ans, nous sommes sans doute moins vulnérables à leurs incongruités et nullité. Pour ce laps de temps à attendre, il ne reste plus qu’à tirer le contenu éducatif de cette période et mettre en place les institutions nécessaires pour éviter que la même chose ne se reproduise. Cela passera obligatoirement par une atomisation sans précédent du pouvoir de sorte qu’il n’y aura plus entre les mains d’une petite entité les prérogatives nécessaires pour nous mener par le bout du nez et nuire dans l’impunité absolue. Toute personne ayant contribué à son élection a le devoir moral d’œuvrer pour sa chute. Cela est non négociable. Imaginez le sourire de Farba Senghor le jour de la réélection de Wade et ce qu’il fera dans ce pays à partir du moment où il est convaincu de la totale impunité dont il va jouir. Que ne nous fera t-il pas ? Imaginez ce que Karim Wade peut penser, en ce jour, en s’apercevant que le Sénégal n’est rien de plus qu’une Nation de beaux parleurs incapables de réclamer ce qui leur est de droit à savoir la possibilité de choisir leurs dirigeants et que ce n’est qu’une personne qui ne peut plus grand-chose pour elle même qui leur tient tête.
S’il m’était permis de faire une analogie, je dirais que Abdoulaye Wade est, dans Bouba et Frisquette, l’ours qui terrorisait les deux oursons et que Bouba a fini par mettre hors d’état de nuire. L’ours avait vieilli tandis que Bouba (les forces vives de la Nation) en était au midi de sa vie.
S’il ne tient pas à changer sa façon d’exercer le pouvoir, c’est parce qu’il ne compte pas sur les résultats d’une élection transparente pour garder son fauteuil. Au lieu de respecter le verdict des urnes, il compte, du haut de sa statue, défier la volonté du peuple en nous pointant du doigt en signe de mépris et par la même occasion ruiner notre société en accélérant la rouille de ses institutions dont il est le virus le plus corrosif.
Ousmane Thiané DIOP – Ecole primaire Hlm Route de Dakar -Thiès- Sénégal