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Guido Heremans, Dg de Dp World sur le mouvement d’humeur des grutiers : «La situation actuelle est une catastrophe économique»

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La grève de zèle entamée par une partie de son personnel est en train de perturber le fonctionnement du terminal à conteneur. Néanmoins, tout en assurant disposer de ressources techniques et humaines lui permettant de résoudre le problème, M. Heremans, qui assure ne pas comprendre les motivations profondes des grévistes, déclare vouloir privilégier la concertation.

Une grève de zèle est en train de paralyser le terminal à conteneurs.  Comment en-êtes-vous arrivés là ?
Pour être honnête, je ne connais toujours pas la vraie raison pour laquelle les travailleurs ont choisi de faire leur «go slow (travail au ralenti. Ndlr)». Cela dure maintenant depuis une semaine. On a pensé au début que cela était dû au fait que l’on ne leur avait pas payé une certaine prime. Après, les délégués ont demandé l’autorisation de tenir une Ag, ce qui leur a bien sûr été accordé, et ce matin (hier. Ndlr), ils sont venus rendre compte des résultats de ladite Ag. On a eu une rencontre très correcte, mais j’ai quand même été surpris que leur exigence principale était le départ immédiat de deux de nos employés, un directeur et un cadre supérieur. Les autres points sont discutables dans le cadre de notre con­vention d’établissement, et ne causent, a priori pas de problème, et fe­ront tôt ou tard objet de discussion, comme c’est normal dans chaque société. Mais ce point-là, cette exigence, je n’arrive toujours pas à la comprendre. J’ai demandé une justification, afin de pouvoir me l’expliquer. Y a-t-il eu un malentendu, un acte qui n’a pas été bien apprécié pour telle ou telle raison, y’a-t-il mo­yen de corriger ? Malheureu­se­ment, à la fin de la réunion, après une con­certation entre eux et les représentants du syndicat Udts auquel ils sont affiliés, ils sont revenus pour réaffirmer leur revendication principale, à savoir, le départ immédiat de Dp World Dakar, de ces deux directeurs. J’étais surpris, car je ne m’attendais pas à cela. Je leur ai fait comprendre que je ne pouvais pas, de but en blanc, prendre une décision là-dessus, et je me demande même si c’est dans le pouvoir des délégués du personnel d’imposer une décision pareille.
En conséquence de votre décision, y a-t-il eu une certaine évolution, une amélioration de l’atmosphère de travail ?
A l’instant où je vous parle (Avant-hier soir. Ndlr), on n’a pas vu de signe positif, c’est toujours le Go slow. Et cela commence à avoir un impact négatif énorme sur les rotations dans le port. En dehors du terminal de vrac, tout passe par le terminal à conteneurs. Il va donc y avoir des répercussions sur les importations et les exportations. Les navires qui avant, étaient traités en 12 heures, le sont maintenant en deux jours ou plus. Certains réduisent leur escale, pour ne débarquer qu’une partie de leur cargaison et ne prennent plus de conteneurs vides. Donc, au niveau de la logistique, c’est une catastrophe.
A combien pouvez-vous estimer, à cette étape, le manque à gagner que constitue cette situation ?
On n’a pas encore le chiffre exact, mais pour moi cela n’est pas vraiment primordial. Ce qui est important, c’est qu’un certain mouvement prenne en otage l’économie de tout un pays. Je n’accuse personne, mais il y a certainement une raison que j’ignore, à la base de ce mouvement. Mais en ce qui me concerne, je crois toujours en la bonne volonté de tout le monde. Aujourd’hui, tout le monde, les délégués, les cadres, le personnel, sont au même niveau de respect et de crédibilité.
Depuis son arrivée au Séné­gal, Dp World a fait l’objet de commentaires. Il y a eu même des entreprises qui ont estimé que Dp World était venu prendre leur place à Dakar. Soup­çonnerez-vous que certains de ces concurrents pourraient être à la base de ce mouvement de vos employés ?
J’espère bien que non. Je pense que nos concurrents sont, comme Dp World, des entreprises professionnelles. Il arrive un jour que l’on gagne, et un autre où l’on perd, et la vie continue. Je ne pense pas que l’on soit encore au niveau de 2008. On a déjà dépassé cela. Moi, je n’y crois pas du tout. Mais il y a certainement des gens qui y croient, parce que cela fait rêver certains.
Les gens pourraient-ils être amenés à penser qu’une situation de blocage pourrait amener les autorités à remettre en cause le contrat de concession ?
Pour ce que je sais du contrat de concession, il y a des paragraphes qui prévoient un certain nombre d’évènements, mais cette grève-là n’est pas classifiée comme de nature à faire résilier la convention.
Avez-vous tenu informées les autorités du pays de cette situation, et quelle a été leur réaction ?
Nous avons informé tous nos partenaires, aussi bien les autorités, le Port autonome, c’est notre obligation. Je pense que les autorités ont été négativement surprises. Depuis que Dp World a commencé ici, avec l’accord d’établissement de juin 2011, on a reçu beaucoup de félicitations, et il semblerait que cet accord est même utilisé comme document de référence pour d’autres partenaires. On a fait un très grand chemin, et, même si je ne peux entrer dans les détails, je sais que Dp World paie très bien ses employés, aussi bien les cadres que les agents d’exécution. La preuve, quand j’ai cité le niveau de traitement de nos opérateurs aux autorités, elles ont convenu que cela ne pouvait être un motif de grève.
Puisqu’il ne s’agit, selon vous, que d’une trentaine de personnes qui bloquent le mouvement, Dp World n’a-t-elle pas d’autres ressources humaines pour les remplacer et remettre la machine en marche ?
On est actif dans 60 ports, et bien sûr, on peut trouver assez rapidement des gens qui peuvent venir à Dakar nous assister. Mais, nous n’en sommes pas encore là, et il est trop tôt pour envisager cette option. Nous voulons donner la primauté à une discussion sereine et réaliste. Nous avons, nous même formé ces employés à l’utilisation de ce matériel, qui est tout nouveau sur la place de Dakar, et on ne peut les remplacer au pied levé sur place. Cette capacité leur donne un certain pouvoir dont ils veulent abuser. Nous savons tous que l’obligation d’un travailleur est de faire son travail, comme l’a plusieurs fois répété le représentant de l’Udts qui a assisté aux négociations. Il a fait comprendre aux délégués que la priorité c’est de faire son travail pour préserver l’outil de travail.
Quand vous dîtes que la situation pour la logistique est catastrophique, n’est-ce pas l’outil de travail lui-même qui est menacé ?
Oui, bien sûr, et c’est ce qu’a expliqué le représentant de la centrale Udts aux délégués du personnel. Ce qui m’étonne, c’est qu’une partie de ces délégués, dont certains sont des grutiers, déclarent qu’ils ne sont pas d’accord avec le mouvement, mais y prennent part, même de manière passive. Ils ralentissent le travail, comme les autres. Certains délégués avec lesquels j’ai discuté le vendredi dernier, n’ont pas pu me donner de réponse pour justifier leur mouvement. Et maintenant, ils mettent sur la table, le départ de ces deux cadres. Ce que l’on peut dire, c’est que, à ce niveau, chacun sait que nous sommes dans une situation d’illégalité.
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