Depuis une semaine, la colère gronde en Egypte suite à la décision de Mohamed Morsi de renforcer ses pouvoirs. Près de 10 000 personnes ont manifesté mardi sur la place Tahrir pour protester contre celui qu’ils appellent le nouveau « pharaon ». Pour certains, le régime des Frères musulmans est pire que celui d’Hosni Moubarak. Une nouvelle révolution est-elle en marche dans le pays ?
La tête de Mohamed Morsi mise à prix ? Les manifestations massives contre le renforcement des pouvoirs du président égyptien s’intensifient. Mardi ? près de 10.000 personnes sont à nouveau descendues sur la place Tahrir, scandant « dégage ! », « le peuple veut faire tomber le régime ! ». Les mêmes slogans utilisés lors du soulèvement contre le régime de Hosni Moubarak, contraint à la démission le 11 février 2011. Ce dernier aussi avait été honni par les Egyptiens pour avoir régné durant trente ans sans partage.
Son successeur s’engage-t-il dans cette voie ? Difficile de savoir actuellement si Mohamed Morsi connaitra le même sort que son prédécesseur. Mais pour Halim, ex-officier de l’armée égyptienne, il n’y a pas de doute. « Tôt ou tard, il y aura une nouvelle révolution ! ». La situation est très tendue dans le pays, constate l’ancien militaire, qui suit de près au Caire, les évènements. « Actuellement, les Egyptiens vivent dans le stress. Ils ont peur pour leur avenir. Depuis que le régime des Frères musulmans est en place, il n’y a que des problèmes ! ». Le quadragénaire estime que « Mohamed Morsi est incapable de prendre une décision seul. Il adopte des mesures en fonction de ce que lui disent les autres responsables du régime ».
« Le régime des frères pire que celui de Moubarak »
Pis, les Egyptiens ont l’impression de ne pas avoir de chef d’Etat, renchérit Halim. « Morsi est le président que d’une partie du pays et non de tous. » Il va encore plus loin : « Le régime des Frères musulmans est pire que celui de Moubarak ! », arguant qu’au temps de l’ex dirigeant, il n’y avait pas autant d’insécurité. Sans compter les conditions de vie des Egyptiens qui se sont détériorées.
Un avis partagé par le chercheUr égyptien Tewfik Aclimandos. Il affirme aussi sans détour : « la présence des Frères musulmans au pouvoir est encore pire pour l’Egypte que le régime de Moubarak ». Il y a selon lui, « un très grand désenchantement vis-à-vis d’eux. Jamais ils n’ont été si impopulaires dans le pays ». Il y a deux types de contestation à l’encontre de Mohamed Morsi dans le pays, constate-t-il. « Celle de la classe moyenne égyptienne qui proteste contre le manque de démocratie. Et celle des populations les plus pauvres qui réclament une amélioration de leurs conditions de vie. » Pour le chercheur, « les Frères musulmans sont loin d’être un parti politique démocratique. Les Egyptiens n’ont encore rien vu ».
Liberté menacée
Des propos loin d’être partagés par les partisans du dirigeant égyptien. Ces derniers sont également descendus à plusieurs reprises dans la rue pour le soutenir, manifestant auprès de ceux qui contestent son régime. Des rassemblements qui se finissent toujours par de violents affrontements entre les deux camps.
L’Egypte est-elle divisée en deux ? Karim Dahan, ingénieur d’une trentaine d’années, évoque plutôt un malentendu qui crée un malaise entre les différentes parties. Le jeune homme, qui dit appartenir à aucun parti politique, note que les « frères musulmans et les libéraux ne se comprennent pas. Mais pourtant, ils étaient main dans la main durant la révolution. Sous le régime de Hosni Moubarak, ils ont tous été privés de liberté. » Une liberté qu’ils sentent menacée par le président égyptien. « La situation actuelle est très dangereuse, affirme l’ingénieur. Ce nouveau décret est inadmissible. Une seule personne ne peut pas détenir tous les pouvoirs ! Les Egyptiens craignent qu’une seule partie du pays prennent le pouvoir comme auparavant. En Egypte, on est habitué à ce que les opposants soient vus comme des ennemis par les dirigeants. Les gens ne veulent plus que cette douloureuse histoire se reproduise ».
C’est pour tourner définitivement cette page sombre de leur histoire que les manifestants contre le régime du chef d’Etat comptent bien poursuivre leur protestation. Mohamed Morsi n’est pas à l’abri d’une nouvelle révolution. Surtout, si la place Tahrir continue à grogner.
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