ls l’ont promis, ils l’ont fait ! Les libéraux avaient annoncé un grand rassemblement à la Place de l’Obélisque, le 4 décembre 2012, avant de le reporter au 6, afin que la mobilisation ne coïncide pas avec la célébration du Magal de Darou Khoudoss, une famille religieuse à laquelle le fondateur du Parti démocratique sénégalais (PDS), Me Abdoulaye Wade, est uni par de profonds liens historiques. Ce jeudi 6 décembre, la formation libérale a déployé les grands moyens et mobilisé une foule rarement vue dans une telle manifestation.
La sortie du PDS, jeudi 6 décembre, est la preuve que ce parti garde intactes sa force de mobilisation, sa ferveur populaire et son expérience de la lutte politique. Si, en plus, il possède maintenant des moyens autrement plus consistants qu’il y a 12 ans, les nouvelles autorités sont avisées : la tâche ne sera pas aisée pour contenir les assauts incessants d’un tel adversaire. Il leur faudra beaucoup de tact, de cran, d’expertise politique, de moyens dissuasifs et de bras valides pour faire face.
Le camp d’en face, celui des « vainqueurs » du 23 juin 2011 et du 25 mars 2012, est-il assez outillé pour résister à un «harcèlement continu et soutenu», respectueux des lois et règlements vigueur en matière de démocratie ? Saura-t-il maintenir l’ordre, protéger les Sénégalais et leurs biens, animer «sa» vie politique sans heurts ni exactions, tout en construisant le pays ? Ce n’est pas évident ! Surtout si le « Pape du Sopi » refuse de prendre sa retraite et participe, même à distance ou dans l’ombre, au «combat pour la non-gouvernabilité légale» du pays.
Entrée en jeu des faucons
Que pense le peuple de cette situation politique, certes encore calme mais annonciatrice de lendemains mouvementés, si la tendance persiste ? Certains d’entre eux que nous avons approchés affirment que «si les auditions aboutissent à des arrestations et des emprisonnements non justifiés, le pays pourrait s’embraser». D’autres sont d’avis que «le PDS, après avoir perdu le pouvoir par sa faute, cherche à déstabiliser le régime en place afin de précipiter sa chute». Les uns comme les autres sont formels pour dire en chœur que «des deux côtés, il y a des faucons qui ne souhaitent que voir le Sénégal connaître des troubles pour espérer tirer les marrons du feu».
Ces faucons, du côté du pouvoir, seraient les faux-alliés, qui guettent le moindre faux-pas du président Macky Sall pour le précipiter dans le fossé. Ceux-là, selon l’homme de la rue, ne sont autres que «Idrissa Seck, qui se tient loin de la chose publique, même de sa mairie, pour n’avoir rien à justifier d’ici 2017, Youssou Ndour, qui maille le pays avec son « Fekkee ma ci boole » et même Moustapha Niasse, pour qui 2017 sera forcément la dernière bataille». On ne manque pas, non plus, de jeter un regard soupçonneux sur l’ancien ministre des Affaires étrangères, Cheikh Tidiane Gadio, qui crie haut et fort qu’il «est temps», d’où le nom de son mouvement politique : « Luy jot jotna« .
Du côté de l’opposition, au sein des «jaune et bleu» du PDS qui mènent un combat légitime pour la reconquête du pouvoir, il y en a qui livrent leur propre lutte de positionnement, dans la perspective de l’après-Wade. Ceux-là aussi jouent les faucons et ne souhaitent que voir les deux camps s’affronter. Dans ce lot, nos interviewés désignent les fondateurs de courants, notamment Dr Aliou Sow et Serigne Mbacké Ndiaye, mais aussi le Coordonnateur national du PDS, Oumar Sarr qui, affirment-ils, «se voit déjà dans la peau d’un Secrétaire général national, sans comprendre qu’il n’en a ni l’étoffe, ni les compétences, encore moins la popularité».
Mais il n’y a pas que ceux-là. Même hors du Parti démocratique sénégalais, on indexe des alliés d’hier, tels Aj/Pads et Pds/Jant bi, qui mettraient de l’huile sur le feu pour pousser le PDS dans la rue et en récupérer les dividendes, comme par le passé.
«Le Rallye Palais-Dakar 2017 lancé»
Mais au-delà de tous ces calculs politiciens, un constat est fait par la plupart des personnes interrogées : «Karim Wade s’impose comme le leader naturel de l’opposition, pour peu qu’il y croit et qu’il œuvre pour le devenir». Parce que, font-ils remarquer, «son profil, les preuves qu’il a faites dans sa gestion des grands projets de l’Etat, ses relations internationales, son vécu et son éducation plaident largement à lui conférer ce statut». Ajoutée à tous ces bons points la sympathie naissance des jeunes pour cet homme, qu’ils qualifient de «discret et affable», que le régime du président Macky Sall «est en train d’ériger en martyr», « Rimka » pourrait devenir l’adversaire le plus crédible du chef de l’Etat, s’il compte se présenter pour un second mandat.
Pour emprunter une formule chère au défunt hebdomadaire satirique de Laye Bamba Diallo, « Le Cafard Libéré« , nous dirons que «le départ est donné pour le Rallye Palais-Dakar 2017», si tant est que le président Macky Sall tient un de ses «engagements» de campagne : «ramener le mandat présidentiel de 7 à 5 ans».
SERIGNE MOUR DIOP